Lettre de M. Louis Viannet, secrétaire général de la CGT, adressée à M. Lionel Jospin, Premier ministre, le 7 mai 1998, sur les inquiétudes suscitées par l'accord et le calendrier de la privatisation du Crédit Lyonnais conclu avec Bruxelles.

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Circonstance : Accord entre l'Etat français et la Commission européenne sur le dernier plan de sauvetage et la privatisation avant 1999 du Crédit Lyonnais

Texte intégral

« ... L’annonce d’un accord intervenu avec Bruxelles sur le devenir du Crédit lyonnais fait grandir l’inquiétude légitime manifestée par le personnel, d’autant qu’il apparaît que les conditions imposées par la Commission européenne ont été acceptées.

En effet, les hypothèses rendues publiques, confirmées par l’entrevue que les responsables CGT ont eu à Bruxelles, laissent penser que, pour l’essentiel, c’est bel et bien le diktat du commissaire à la concurrence qui l’emporte.

Les éléments en notre possession font en effet apparaître un total de cession d’actifs en Europe, dans le monde et en France d’environ 800 milliards, c’est-à-dire 50 % du total des actifs, ce qu’exigeait Bruxelles.

Si ces données devaient se confirmer, il deviendrait illusoire de parler de viabilité du Crédit lyonnais et les incidences sur l’emploi seraient évidemment catastrophiques.

Or, il s’agit bien du devenir de l’emploi de plus de 50 000 agents sur l’ensemble du réseau, dont plus de 30 000 en France.

Sur le fond, la question est bien de savoir si la primauté à la concurrence, affirmée par la Commission, peut conduire à accepter des décisions qui mettent en cause l’intérêt général du pays et l’intérêt national.

Car il va de soi qu’une privatisation, que nous continuons de condamner, adossée à de telles conditions, va être ressentie comme une braderie, qu’elle se fasse de gré à gré ou dans le cadre d’une ouverture totale au plus offrant.

Le personnel, qui supportait mal que l’évolution d’un dossier qui met en cause son avenir et celui de l’entreprise, se discute dans l’opacité de transactions dont il est exclu, bien que premier intéressé par les décisions finales, ne peut manquer de réagir face à une telle situation.

Toutes les craintes exprimées par le personnel et l’intersyndicale se trouvent confirmées et conduisent à porter un jugement sévère sur cette décision finale.

Le personnel veut être informé et sa demande est légitime.

Je souhaite qu’une initiative en ce sens soit prise par le gouvernement »