Texte intégral
C'est à Coëtquidan, haut lieu de la formation de nos officiers, qu'est désormais gravé dans la pierre, comme-un signal adressé aux générations nouvelles des Feules, le message du Saint-Cyrien de là. Promotion Fez, du Chef de la France libre et de l'homme d'État.
Ce message, s'est imprimé à jamais dans l'histoire, le 18 juin l940, à la radio de Londres "quoi qu'il arrive, la flamme de la Résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas".
Vers l'armée de métier est la profession de foi du stratège, le discours de Bayeux celle de l'homme d'État. L'Appel du 18 juin est la profession de la foi du général de Gaulle en la France. Ce refus de la défaite, cette volonté inébranlable de poursuivre la guerre pour "l'honneur, l'unité, l'indépendance" nationales s'adressait aux Français d'alors. Mais parce qu'il exprime, par-delà les événements, "une certaine idée de la France", l'Appel s'adresse toujours aux Français d'aujourd'hui.
Renan avait défini la nation comme "une âme, un principe spirituel". De Gaulle, lui, définit la France comme un idéal qui doit être proposé, et même parfois opposé aux Français tentés par la discorde. Il l'imagine comme un commandement permanent à l'effort et au dépassement. C'est cette idée qui a guidé les "soldats tombés dans les déserts, les montagnes ou les plaines ; marins noyés que bercent pour toujours les vagues de l'océan ; aviateurs précipités du ciel pour être brisés sur la terre ; combattants de la Résistance tués aux maquis et aux poteaux d'exécution", je cite le général dans le Mémorial des Compagnons de la Libération.
C'est cette idée qui oblige les Français à la grandeur. Ce mot sonne étrangement aux oreilles contemporaines. Pourtant, il n'est pas trace de grandiloquence dans l'exigence de la grandeur. C'est simplement le critère qui tranche, aux heures de vérité, les questions de vie ou de mort et les choix dangereux.
Le mémorial sera pour les futurs officiers de Coëtquidan un rappel permanent de l'exemple que doit constituer pour eux la pensée et l'action du général de Gaulle.
Je pense en particulier à la nécessité, qu'il a soulignée maintes fois pour les officiers, de cultiver le "Caractère, vertu des temps difficiles". C'est en eux-mêmes que ceux qui exercent la responsabilité du commandement, doivent trouver, face à l'épreuve, les ressources et l'inspiration pour l'action.
Cette force de caractère, Charles de Gaulle l'illustre en incarnant quasiment seul, face à la montée en puissance de l'Allemagne nazie, l'avant-garde de la pensée militaire contre les illusions pacifistes et les doctrines défensives du moment.
Il porte cette qualité au plus haut en choisissant de poursuivre le combat depuis Londres, en affirmant, à lui seul, la volonté que la France soit présente dans la guerre, que "la victoire, la victoire certaine soit le plus possible une victoire française".
Mais cette vertu des temps difficiles, Charles de Gaulle l'illustre également dans la paix.
C'est le choix, exprimé dès le discours de Bayeux, et réalisé en 1958, de refonder la République affaiblie et discréditée. Comme naguère ses options militaires, sa vision institutionnelle s'appuie sur une perception aiguë des réalités nouvelles et une définition précise des moyens d'y faire face.
C'est le refus du général de Gaulle, malgré toutes les pressions internationales, de transiger sur l'intérêt de la France. Comprenant le "pouvoir égalisateur de l'atome", il sait aussi qu'il n'y aura pas d'État décideur qui ne soit doté de l'arme suprême. Cette analyse lucide inspire sa décision de bâtir la force de dissuasion nucléaire.
Je conclurai en rappelant que le Mémorial est aussi le symbole de la continuité du courage et de la générosité de la jeunesse française.
Hier, à l'appel du général de Gaulle, une poignée de jeunes gens s'est levée. Elle s'est dressée contre la défaite et l'humiliation. Elle a rendu à la Nation l'honneur et l'espoir. C'était au nom d'une certaine idée de la France.
Aujourd'hui, c'est encore en son nom que nos soldats, en ex-Yougoslavie, bravent le danger et endurent l'épreuve. C'est en son nom qu'ils surmontent le doute et la lassitude, qu'ils continuent à protéger les populations victimes de la haine ethnique. C'est en son nom qu'ils tombent, au nom d'"une France qui refuse de s'abandonner à la fatalité et à l'irresponsabilité" comme l'a rappelé le Président de la République à Vannes.
D'une génération l'autre, le témoin est passé. Le message du général de Gaulle est toujours présent au cœur des Français. Puisse-t-il à jamais les inspirer.