Interview de M. Philippe Séguin, président du RPR, à France 2 le 29 octobre 1998, sur la stratégie électorale de l'opposition au sein de l'Alliance, la préparation des élections européennes et le cumul des mandats.

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Circonstance : Réunion du comité politique de l'Alliance à Paris le 29 octobre 1998

Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

Claude Sérillon
A Paris, première réunion du comité politique de l’Alliance, dans ces nouveaux locaux, un appartement du VIIe arrondissement où vont cohabiter Alain Madelin, Edouard Balladur, Alain Juppé, Philippe Douste-Blazy entre autres ou encore Nicolas Sarkozy et Philippe Seguin, il s’agit de faire vivre l’Alliance cinq mois après sa création et de préparer les prochains débats politiques et les échéances électorales. Alors monsieur Seguin bonsoir.

Philippe Seguin, président du RPR
Bonsoir.

Claude Sérillon
L’Alliance c’est pour quoi faire ? Qu’est-ce que vous avez vraiment de commun ? J’énumère tous ces noms et puis à vous entendre souvent on se dit ça doit être discordant quand même, non ?

Philippe Seguin
Il y’a une grande diversité c’est vrai, mais la diversité elle n’est pas incompatible avec l’union. Lorsque nous avons décidé de faire l’Alliance c’était au terme d’un triple constat, un triple constat que faisaient les trois formations qui constituaient l’opposition. Je les rappelle, Démocratie Libérale présidée par Alain Madelin, l’UDF présidée par François Bayrou et le RPR que je préside moi-même. Ce triple constat quel était-il ? C’était premièrement que nous ne pouvions gouverner qu’ensemble et qu’en conséquence le plus tôt nous travaillerions ensemble le mieux ce serait, cela répondait d’ailleurs à une attente de nos électeurs potentiels. Eh bien aujourd'hui ils ont satisfaction, l’Alliance est en place, depuis cinq mois nous avons travailler à cette mise en place, aujourd’hui elle a des locaux comme vous l’avez dit, elle a des moyens, elle a des instances, elle respecte l’identité de chacune de ses composantes, mais l’opposition désormais est unie et organisée.

Claude Sémillon
Mais alors vous conviendrez monsieur Seguin que depuis cinq mois vous avez souvent donné l’image de désunion, de couac, le dernier ça a été le Sénat, l’élection au Sénat, il y a eu… sur l’Europe vous n’êtes pas d’accord…

Philippe Séguin
Non mais attendez, attendez, attendez…

Claude Sérillon
Il y'a beaucoup de choses qui font qu’en fait il y a encore du travail à faire.

Philippe Séguin
Il ne faudrait pas monsieur Sérillon que lorsqu’il y a de la diversité dans la majorité on s’extasie sur cette richesse que ça constitue et…

Claude Sérillon
C’est-à-dire le pluriel serait bien d’un côté, ne le serait pas de l’autre côté.

Philippe Seguin
Lorsqu’il y a diversité chez nous on dit que c’est très mal, non, la politique est ainsi faite et les problèmes du monde sont tels, qu’aujourd’hui il est très difficile d’avoir des solutions clé en main. C’est bien la raison pour laquelle des gens plus savants que moi parlent de déclin des idéologies, c’est le déclin des système clé en main, des systèmes, tel le marxisme, qui avaient réponse à tout. Vous aviez un problème, vous aviez la réponse, tout était… C’est fini.

Claude Sémillon
Donc en clair vous RPR vous n’avez pas réponse à tout, nécessaire il faut discuter.

Philippe Seguin
Bien sûr, il faut discuter. Alors il y a des cultures différentes, il y a des approches différentes…

Claude Sérillon
Parce qu’entre le gaullisme et le libéralisme de monsieur Madelin il y a quand même de sacrées différences, non ?

Philippe Séguin
Il y a des différences, elles sont incontestables…


Claude Sérillon
Et pour l’Europe par exemple, l’Europe vous allez faire comment ?

Philippe Seguin
Mais il y’a des différences, il faut essayer de vois si ces différences sont insurmontables, je ne crois pas qu’elles le soient. Parce que souvent ces différences sont le fruit de malentendus et résultent de l’insuffisance.

Claude Sérillon
Mais il y a un moment où il faudra une tête de liste pour les élections européennes par exemple.

Philippe Seguin
… Attendez, avant…

Claude Sérillon
Chaque chose en son temps vous allez dire.

Phillipe Seguin
Sur la tête de liste on s’entendrait certainement très facilement…

Claude Sérillon
Si vous ne l’êtes pas, vous serez quand même sur la liste ou pas ?

Phillipe Seguin
On s’entendrait certainement très facilement, non l’essentiel c’est de savoir ce qu’on veut en matière européenne, bon nous avons dit ce que nous voulions, nos amis de Démocratie Libérale, nos amis de l’UDF sont en train également d’y réfléchir. Nous, que voulons nous, nous voulons une Europe qui assure sa propre sécurité, une Europe qui défende un modèle de société, un modèle culturel qui lui soit propre…

Claude Sérillon
Oui mais lequel ?

Phillipe Seguin
Je vais vous dire, monsieur Sérillon je vais vous dire, au risque de vous étonner, moi je suis sidéré par l’enthousiasme avec lequel nous acceptons, nous accueillons la tradition Halloween, d’où ça sort ça Halloween   Eh bien je vais vous dire ce que c’est…

Claude Sémillon
Effectivement je ne m’attendais pas à ce que vous me parliez…

Phillipe Seguin
Je vais vous dire ce que c’est, c’est un effet de ce mouvement d’uniformisation du monde, d’uniformisation culturelle, qui à nos yeux est en danger. Le monde, le monde il est riche et l’Europe en particulier, sont riches de leur diversité et nous voulons que cette diversité soit maintenue, à cet égard l’Europe est un moyen de sauvegarder notre langue, notre manière d’être, notre culture en un mot.

Claude Sémillon
Alors je reviens sur des divergences entre vous, sur le cumul des mandats, vous avez montré l’exemple vous, vous avez abandonné votre mairie d’Epinal et Dieu sais si quelques concitoyens d’Epinal se disent pourquoi il n’est plus là…

Phillipe Seguin
Ce qui démontre bien que les Français sont souvent schizophrènes, ils sont contre le cumul des mandats mais contre le cumul des mandats appliqués par les élus.

Claude Sémillon
Bon alors vous, vous avez dit je suis contre le cumul des mandats, je me l’applique à moi-même…

Phillipe Seguin
… cas du Premier ministre, il est toujours Premier ministre et…

Claude Sérillon
Il est conseiller général…

Phillipe Seguin
… Mais, il a deux fonctions publiques, moi je n’en ai qu’une. Je suis plus à l’aise pour parler de cumul.

Claude Sérillon
Alors, comment vous expliquez que le RPR au Sénat soit contre la loi ?

Phillipe Seguin
Mais il n’a jamais été notre la loi, sur certains points d’ailleurs nous allons plus loin que le Gouvernement.

Claude Sérillon
Enfin, il est en désaccord avec vous, quand même.

Phillipe Seguin
On est en train de raconter, de nous monter un bobard, au terme duquel il y a d’un côté la gauche généreuse, éternelle qui est contre les cumuls, et de l’autre la droite exploiteuse et avide qui est pour les cumuls, ça ne résiste pas une seconde à l’examen. Nous allons plus loin…

Claude Sérillon
Il y a des sénateurs de droite qui refusent quand même…

Phillipe Seguin
Nous allons plus loin, nous allons plus loin sur certains points que la majorité actuelle, par exemple sur les ministres, rien n’est prévu pour les ministres, or moi je fais ce soir une proposition très claire. On est ministre et on ne fait rien d’autre, mais il n’y a, je le répète, aucun proposition s’agissant des ministres. Alors actuellement sur quoi, on nous a parlé de référendum…

Claude Sémillon
Ça porte sur soit mandat local et mandat national. Vous vous êtes favorable à ça ?

Phillipe Seguin
Non, non, non, vous savez sur quoi porte la différence actuellement, entre le Sénat et le Gouvernement et sur quoi on est en train de nous faire toute cette histoire, nous, nous disons qu’il doit être possible d’être à la fois par exemple député ou sénateur et maire ou président de Conseil général ou régional, et les socialistes disent on peut être à la fois député ou sénateur et adjoint au maire ou vice-président du Conseil général ou régional, il n’y a pas de quoi faire un référendum. Moi je suis pour le système en cause justement en raison de mon expérience personnelle et en raison de ce que j’ai observé. Si on s’en tient au cumul du poste de député, du poste de premier adjoint au maire, on va avoir des situations qui vont être des situations malsaines, pourquoi ? Parce que le premier adjoint ex maire continuera à régenter la mairie, il vaut mieux que les choses soient claires.

Claude Sérillon
Merci monsieur Seguin.

Phillipe Seguin
Merci monsieur Sérillon.