Déclaration de M. François Bayrou, président du CDS, sur l'intégration des immigrés de la deuxième génération, le devenir de la sécurité sociale, la construction européenne, les idéaux du CDS et la préparation du congrès de Lyon, Paris le 6 octobre 1995.

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Circonstance : Réunion des présidents et secrétaires fédéraux du CDS à Paris le 6 octobre 1995

Texte intégral

Nous nous réjouissons d’être aussi nombreux ce soir pour tenter, ensemble, de nous représenter ce que vont être les deux mois qui viennent.

Nous nous réunissons à un moment doublement important. Il est important, parce que nous allons entrer dans la période de refondation de notre mouvement. Et il est important parce que, comme beaucoup d’entre nous le percevaient depuis longtemps, la France traverse une période politique difficile, marquée par l’incertitude.

Et je voudrais d’abord, si vous le voulez bien, vous dire un mot de cette incertitude.

Vous lirez dans « Le Monde » de ce soir la confession, sur plusieurs pages, de Khaled Kelkal à un sociologue allemand qui faisait une étude sur les banlieues en 1992. Ce garçon avait alors 22 ans ; il en avait 24, hélas, au moment où sa vie s’est achevée dans les conditions que l’on sait, dans la cavale, après les drames que nous avons vécus et dont nous venons de vivre une réédition cette après-midi.

Il me semble que jamais, jamais, – comment dirais-je ? – le caractère essentiel du type de réflexion que nous menons dans cette famille politique n’aura été autant souligné que par cette confession-là. Car si ce papier est, bien entendu, révélateur de la crise économique, de la crise sociale que nous visons, il est d’abord – cela crève les yeux – révélateur de quelque chose de beaucoup plus profond. Il est révélateur d’une crise morale, j’oserai dire d’une crise spirituelle. Cette crise-là, je vais le dire autrement, c’est une crise des raisons de vivre ensemble.

Car tout ce que ce papier dit – et je n’oublie rien des atrocités qui sont imputées à ce garçon – tout ce que ce papier dit, c’est : « Nous n’avons plus rien à faire ensemble ».

Ce garçon est quasiment né en France ; il est arrivé en France alors qu’il avait, je crois, 2 ans. Et beaucoup des siens, de ses proches, de ceux qui sont, sans doute, impliqués dans ces réseaux, sont français. Ils ont la carte d’identité française dans la poche. Mais ils disent : « Nous n’avons plus rien à faire ensemble ». Et nous n’avons plus rien à faire ensemble parce qu’il n’est plus, ce lien profond qui fait qu’un peuple a une destinée commune.

J’avais moi-même essayé, lors du congrès de Rouen, de commencer à traduire ces attentes-là. Mais voilà que l’heure du rendez-vous a sonné. Il ne faut pas vous y tromper : il n’y a que deux solutions. Et je ne suis pas certain que la bonne soit plus probable que la mauvaise, celle en tout cas qui est mauvaise à nos yeux.

Il n’y a que deux solutions.

Il y a la dérive américaine, anglaise, allemande. Je dis dérive, parce que c’est exactement de cela qu’il s’agit, c’est-à-dire l’instauration, l’acceptation unanime de la séparation en communautés distinctes, selon le principe du « chacun pour soi », « chacun sa loi », « chacun ses principes », « chacun ses coutumes », « chacun ses intérêts ». Dérives dont le procès d’O.J. Simpson ne donne, me semble-t-il, qu’une faible idée.

Mais là est bien la question posée.

Si nous acceptions cette dérive-là, que j’appellerai « communautariste », même s’il faudrait peut-être trouver un autre mot afin de ne pas entacher le mot « communauté » qui est, pour nous, chargé de sens positif, si nous l’acceptons, et bien c’est toute l’idée française, l’idée républicaine qui se trouvera remise en cause.

Il se trouve que la France – je ne dis même pas la République, parce que si l’on veut bien y réfléchir, toute l’histoire de France est marquée par cette idée originelle selon laquelle la France est un peuple « un », même si la République a naturellement accentué cette marque – la France, donc, est fondée sur des principes universels, c’est-à-dire ni celui de la couleur, ni celui de la religion, ni celui de l’hexagone, ni celui de la localisation géographique. La France est fondée sur autre chose, sur un idéal commun qui s’adresse au monde. Et on pourrait suivre, dans les méandres de l’histoire de France, le cours de cette idée qui nous a réellement fondés.

C’est pourquoi, la vision communautariste de la société est, pour nous, Français, une vision bouleversante subversive au sens propre, de ce que nous avons de plus précieux.

Ou bien, deuxième solution, celle que j’appelle de mes vœux, nous réussirons le réenracinement moral de ce peuple. Et nous montrerons dans les mots, bien entendu, mais aussi, et surtout, concrètement, qu’en effet nous sommes ensemble parce que nous voulons être ensemble.

Renan disait – mais à l’époque cela n’avait pas beaucoup de sens –, Renan disait que la nation était un plébiscite de tous les jours. Vous voyez bien que c’est en effet de cela qu’il s’agit. Or, qui ne voit qu’aujourd’hui, un certain nombre de gens, à ce plébiscite, répondent non ?

Et nous portons, nous, pouvoirs publics, organisations démocratiques, une part de responsabilité. Et nous savons très bien pourquoi. Nous en connaissons les raisons, qui ne sont pas toutes indignes. Un certain nombre de ces raisons sont nobles. On a craint, pendant longtemps, que l’affirmation de principes communs ne soit une atteinte aux libertés individuelles, et on a protégé les individus contre cette affirmation de principes communs.

Mais on ne s’est pas rendu compte que ce qui était vrai dans une société structurée ne l’était plus dans une société en voie de déstructuration. On ne s’est pas rendu compte que toutes les communautés auxquelles nous, personnalistes et communautaires, étions attachés, étaient en train de se déliter, de se défaire, de s’effacer, creusant une absence cruelle et laissant devant nous la question : avons-nous quelque chose à faire ensemble ?

Eh bien, j’ai l’intuition – je l’ai dit devant les JSD l’autre jour – que c’est exactement à cette question-là que nous devons répondre, sans négliger les autres, naturellement – toutes les questions qui tiennent à la gestion, aux politiques économique et sociale, auxquelles nous devons répondre, c’est évident –. Mais je dis que si on ne répond pas à cette question de principe d’origine, on ne répondra à rien.

Et c’est de la réponse à cette question, curieusement, que dépend la réponse aux enjeux, d’ordre strictement politique, qui sont débattus ces jours-ci.

Regardez la Sécurité sociale ; nous avons été de ceux qui l’ont fondée, promue et célébrée au lendemain de la guerre. Si nous n’avons pas de raison de vivre ensemble, alors personne n’acceptera les efforts ; tout le monde se comportera en consommateur ; tout le monde considérera qu’il a des droits et que ces droits doivent tenus pour intangibles au travers du temps.

Et la Sécurité sociale sautera.

Si nous pensons, au contraire, qu’un lien de solidarité nous unit, que nos mains se tiennent quand le vent souffle, alors chacun acceptera de faire un effort pour que ce système soit sauvé ; chacun en acceptera les rigueurs, même si ces rigueurs, entre nous, ne sont pas, finalement, insupportables, si l’on veut bien considérer les situations antérieures ou les situations qui sont celles d’autres pays.

Le devenir de la Sécurité sociale, c’est maintenant qu’il se joue.

Regardez l’Europe. Ne vous y trompez pas. C’est maintenant qu’elle se joue. La question des critères de Maastricht n’est, pour ainsi dire, qu’une question secondaire. Mais si la divergence entre la France et l’Allemagne est, comme nous le pensons, une question fondamentale, c’est en ce moment que l’Europe se joue. Si venait à grandir le sentiment allemand qu’après tout, les vieilles règles peuvent retrouver toute leur valeur, que l’Allemagne peut être grande avec ses propres atouts : le mark, l’espace qui l’entoure dans l’Europe centrale, bref, si, comme l’écrivait récemment Helmut Schmitt dans un article tout à fait éclairant, l’Allemagne était reprise par son rêve de domination au centre de l’Europe, alors, ne vous y trompez pas, il y aurait de nouveau fracture et, de nouveau, des conflits.

L’avenir de l’Europe, c’est maintenant qu’il se joue.

Nous sommes exactement dans la même situation que Robert Schuman. Des hommes, un petit nombre d’hommes, ont entre les mains la réponse à cette question fondamentale : « est-ce que nous acceptons de marcher ensemble, indissolublement liés, ou est-ce que nous considérons que nous sommes définitivement séparés : chacun son destin, chacun ses intérêts ? ». Or, à terme, ces intérêts seront nécessairement conflictuels. Je voudrais me tromper, mais je crois que je ne me trompe pas et que l’histoire n’est pas finie. En aucune manière, du point de vue des conflits, quelle que soit la forme qu’ils prennent – et ils peuvent prendre la forme la plus violente –.

Regardez l’architecture des pouvoirs. Comment organiser les pouvoirs pour que chacun en ait sa part, pour la meilleure efficacité et le meilleur épanouissement des citoyens ?

L’évolution de l’architecture des pouvoirs, c’est maintenant qu’elle se joue.

Tout cela, nous l’avons entre les mains et tout cela n’est pas gagné, nous le sentons bien. Et vous voyez que j’ouvre la porte vers le congrès ; tout cela ne sera pas gagné s’il n’y a pas une formation politique qui a conscience de ces enjeux et qui les énonce avec la crudité de ce que nous essayons de faire ensemble, aussi simplement que ça.

Vous sentez bien que les formations politiques traditionnelles, celles des années 70, ne répondent pas du tout à ce genre de préoccupation. Leur langage, leur mode d’expression, leur organisation militante elle-même, sont complètement à rebours de cette question-là.

Imaginer qu’on puisse décider en haut quelque chose qui s’appliquera en bas, que ce soit dans l’ordre militant ou dans l’ordre politique, j’allais même dire dans l’ordre du gouvernement de la France, c’est se tromper d’époque, c’est se tromper d’attente. Et c’est interdire que ces questions se trouvent formulées.

Voilà pourquoi je crois que le défi qui est devant nous est réellement historique et qu’il nous appartient de le relever. Personne d’autre ne le fera. Le RPR va rester le RPR. Son mode d’organisation et le fait qu’il vienne d’accéder au pouvoir ne lui ouvrent pas la possibilité d’une évolution rapide sur ces sujets. Je crois que le PR n’a pas ce genre de préoccupation, en tout cas pas immédiatement, même si nous entendons avoir avec lui les meilleures relations possibles. Et je crois que le Parti socialiste de Lionel Jospin est appelé à séduire les socialistes, mais pas à répondre aux questions de la France.

Donc, nous sommes tout seuls, et tout seuls en face de quoi ? En face de ce qui est, me semble-t-il, le plus à craindre et presque inéluctable si nous ne savons pas répondre à ces questions, c’est-à-dire la montée de ceux qui arriveront avec un langage d’autorité, rassurant, qui donneront aux gens des mots d’ordre en « kit » et des réponses fondées sur la haine, parce que c’est un sentiment très fort en période de crise. Et vous voyez bien que c’est naturellement du côté de l’extrême droite que je vois poindre ce danger-là.

Vient toujours le moment, dans l’histoire d’un homme, d’une femme, d’une famille, d’une association, où tout un chacun s’aperçoit qu’ayant vainement attendu que d’autres fassent les choses à sa place, il lui reste à les faire lui-même. Il y a même des fables de La Fontaine célèbres sur le sujet… Elles disent toutes la vieille leçon de la nature humaine.

Le moment est donc venu pour nous de retourner vers les sources qui sont les nôtres, les sources doctrinales, philosophiques et puis vers les sources personnelles qui touchent au plus profond, avec cette interrogation : que voulons-nous faire de notre vie ? Quoi de plus exaltant que de tenter, dans cette vieille maison chargée d’histoire, recrue de fatigue, peut-être, comme aurait dit le général de Gaulle, de retrouver la question fondamentale, celle de femmes et d’hommes qui décident de s’engager pour que le monde dans lequel ils vivent ait un peu de sens ?

Je crois que nos concitoyens sont affamés de sens et, au fond, la confession de Khaled Kelkal, qu’il faut prendre comme un document sociologique, ne dit pas autre chose. Affamé de sens.

Voilà le niveau du débat. Voilà le niveau du défi. Voilà le niveau de l’enjeu. Je sais que c’est extrêmement difficile mais, je le répète, personne ne le fera à notre place.

Vous voyez, dès lors, pourquoi je parle de refondation. Il ne s’agit pas seulement de changer le nom du parti. Il s’agit de retrouver la sève la plus profonde de notre famille politique.

J’ai lu ici ou là qu’il s’agissait d’abandonner notre identité pour nous diluer dans je ne sais quel espace flou. C’est exactement le contraire que nous allons faire. Nous ne pourrons nous ouvrir que si nous sommes nous-mêmes.

Nous allons essayer de ne pas rester entre nous, parce que je crois que dans une société de déchristianisation profonde, être uniquement étiqueté démocrate chrétien vous empêche d’être entendu. Je le crois vraiment. D’ailleurs, aucun de mes prédécesseurs, depuis 1945, n’a voulu de cette étiquette. Et ils savaient exactement pourquoi, parce que dans la société française, il y a une séparation entre les ordres, tradition que, pour ma part, je trouve heureuse et que j’approuve.

Ils n’ont pas voulu de l’étiquette démocrate chrétienne, mais elle est revenue constamment, en partie, ne vous y trompez pas, parce qu’elle arrange les autres.

Chaque fois que je rencontre un leader de la majorité concurrent, amical mais concurrent, il me dit : « vous n’allez tout de même pas abandonner le positionnement démocrate chrétien ! ». Et je comprends parfaitement ce qu’il veut dire. Il veut que nous restions entre nous, et comme la société française est en voie de déchristianisation croissante – j’espère qu’un jour, c’est le chrétien qui parle, la courbe s’inversera – notre peuplade se réduit tous les jours.

Je vous demande de ne jamais oublier que précisément ceux qui ont pensé cette doctrine et cette vision de la vie, l’ont fait pour que l’on ne reste pas entre chrétiens. C’est une philosophie qui s’adresse à tous, dont les valeurs s’adressent à tous.

Je crois qu’il importe de rappeler que, dans notre famille politique, des chrétiens, des juifs, des musulmans, des agnostiques peuvent avoir leur place, si nous nous rencontrons sur les valeurs et sur l’idéal.

Je n’ai jamais oublié cette phrase de François Mitterrand, une phrase qui m’avait profondément choqué sous la plume d’un homme politique de première dimension, lorsque Rocard et les siens, étiquetés chrétiens, étaient entrés au Parti socialiste. Et cette phrase était celle-ci, elle est absolument terrible : « qu’ils viennent, mais qu’ils laissent leurs armes et leurs bagages au vestiaire. » Cette phrase est terrible d’intolérance et de volonté d’écraser les différences.

Je propose que nous disions exactement le contraire : « que nous nous rencontrions et que chacun vienne avec ses armes et ses bagages, sa tradition et sa fierté, et que nous regardions sur quels points nous nous rencontrons. » Nous nous apercevrons alors que les zones de rencontre sont infiniment plus larges que ce que nous croyions, enfermés comme nous l’étions depuis longtemps dans cette seule identité, qui a sa justification en Allemagne, pour des raisons complètement différentes et sur lesquelles je ne m’étendrai pas, mais qui ne peut être pareillement justifiée en France.

Nous allons être le mouvement des humanistes, chacun avec sa tradition. Nous sommes, pour beaucoup d’entre nous d’ailleurs, pas tous, nous sommes les humanistes chrétiens. Et nous avons le droit d’affirmer la fierté d’un héritage sans pareil. Et les autres humanistes ont le droit, aussi, d’être fiers d’eux-mêmes. Nous allons travailler ensemble, chacun avec la fierté d’être ce qu’il est.

Et nous allons d’abord, ensemble, nous essayer à reformuler avec des mots modernes ce que nous sommes. Car il faut que nous soyons sûrs de ce que nous croyons et il faut que nous trouvions des mots nouveaux pour répondre aux défis nouveaux et aux attentes nouvelles.

Alors, d’autres, j’espère, viendront. Aujourd’hui, ou dans quelques mois, ils viendront dans la nouvelle formation que nous allons construire ensemble, que nous nommerons, que nous baptiserons, à Lyon, le 25 novembre. A Lyon, pourquoi ? Vous le voyez bien. Lors des dernières élections municipales, des amis, des proches ont conquis une grande ville de France. Nous avons vécu avec Raymond Barre une aventure présidentielle, nous avons vécu avec lui une aventure gouvernementale, nous avons vécu avec lui une aventure d’amitié. Il nous a semblé qu’il était juste, pour manifester cette ouverture dont nous parlons, de le faire avec un homme qui a toujours été amical avec nous, proche de nous et qui, en même temps, a toujours rappelé la nécessité de cette ouverture et de cette rencontre des inspirations différentes.

Je crois que ce sera un grand événement, en raison du caractère novateur de cette démarche. Et pour que cet événement soit un grand événement, il faut qu’il y ait du monde. Alors je vous le dis, vous avez deux tâches devant vous. La première, c’est de penser. Et la deuxième, c’est d’agir, pour que nous soyons très nombreux à Lyon. Pas seulement avec nos militants d’hier, mais aussi avec ceux qui peuvent être nos militants de demain. Il faut que vous offriez la chance de nous rencontrer à des gens qui vous entourent et que vous sentez capables d’entrer en résonance avec ce message-là, le message le plus profond qu’on puisse apporter aujourd’hui en politique.

Voilà cette aventure.

Et ce parti-là, naturellement, il a vocation à s’exprimer au plus haut degré dans la politique française. Il me semble que le moment est venu, oui, d’affirmer notre ambition, parce que, si nous ne parlons pas à ce niveau-là, alors nous ne serons pas entendus. Et si cette ambition est regardée du coin de l’œil par nos camarades, et bien, c’est la vie. Il faut qu’ils s’habituent à ce que nous soyons ambitieux, et nous allons montrer à l’avenir qu’en effet, nous assumons cette ambition, qu’un centre nouveau est né et qu’il n’a pas l’intention de se laisser satelliser.

Naturellement, comme toutes les aventures, elles dépendent de ceux qui sont encordés pour gravir la montagne. Il faut qu’ils aient confiance les uns dans les autres et que chacun assume sa part du travail.

Le temps n’est plus, je m’en souviens, où nos militants se plaignaient de ne jamais entendre leurs dirigeants à la radio et à la télévision. Je ne crois pas qu’on puisse dire ça aujourd’hui. Peut-être certains trouvent même qu’on nous entend trop. Eh bien, il va falloir, encore une fois, qu’ils s’y habituent. Je voudrais attirer votre attention sur le fait que nous ne sommes pas présents par le moyen que choisissent les responsables politiques habituellement, par les petites phrases et les vacheries. Ce n’est pas demain la veille que vous verrez des polémiques, de l’agressivité, des coups en traître, venir de notre famille politique.

Je veux insister là-dessus, car il s’agit d’une part essentielle de notre image de marque. Qu’est-ce qui, dans l’esprit des Français, dans l’inconscient des Français, menace le centre ? C’est son indécision et son infiabilité. La marque du nouveau centre, ce sera sa loyauté, sa fiabilité et sa détermination. Nous savons où nous voulons aller. Quand nous disons non, c’est non. Et on peut compter sur la parole de cette famille politique.

Je vous demande d’y veiller tout particulièrement et d’éviter les coups tordus auxquels nous sommes habitués par culture, parce qu’en effet, lorsque nous étions un parti secondaire, alors il nous fallait toujours trouver des alliances compliquées pour survivre. Mais je dis que ce temps est révolu, et que nous serons dans le paysage politique français parfaitement lisibles et parfaitement fiables.

Voilà l’aventure. Je ne vous propose pas, certes, un chemin semé de roses comme ceux de la Fête-Dieu autrefois. Je vous propose un immense effort pour sortir de nous-mêmes et rentrer en même temps dans notre histoire, un immense effort pour retrouver la hauteur d’inspiration qui était celle de ceux qui nous ont précédés et dont j’évoque la mémoire. Un immense effort pour être à la hauteur de nos convictions.

Mais cet effort, je le crois, peut faire fleurir notre famille politique comme jamais elle ne l’a fait dans les cinquante années qui viennent de s’écouler.

Notre peuple sent bien quel est le degré du séisme dont il est traversé. Et c’est à cela qu’il veut qu’on réponde. Quel ordre ? Pour quoi faire ? Quel sens à cet effort ? C’est la réponse que nous allons apporter ensemble. C’est beaucoup plus que notre avenir politique qui se joue. C’est, j’en suis certain, l’avenir de l’Europe comme institution, une grande partie de l’avenir de la France comme nation, comme république et comme peuple.