Interview de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, dans "L'Est républicain" du 13 janvier 1999, sur la délinquance des jeunes et la lutte contre la violence urbaine, la nécessité de responsabiliser pénalement les mineurs, sa proposition de sanctions immédiates et d'éloignement dans des "centres de retenue".

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Média : L'Est républicain

Texte intégral

Pierre Taribo
- Vous qui êtes plutôt jaloux de votre intimité, que ressentez-vous à chaque fois que l’on vous demande faire l’inventaire de vos sentiments après le « retour de l’autre rive » ?

Jean-Pierre Chevènement
- De l’amusement car, en fait, je n’ai découvert que ce que je savais déjà, sans toujours me le formuler aussi clairement : « La vie est comptée, la mort n’arrive pas qu’aux autres, recevoir ne suffit pas, il faut donner et, si possible, plus qu’on a reçu, etc. ». Il n’y a pas besoin de faire le voyage pour arriver à ces conclusions !

Pierre Taribo
- On vous dit grand serviteur de l’Etat, ayant le souci du respect de ses règles et de ses exigences. A ce rôle, vous ajoutez celui de « miraculé de la République ». Ce n’est pas trop lourd à porter pour un seul homme ?

Jean-Pierre Chevènement
- C’est mon ami, Georges Sarre, grand laïc devant l’Eternel qui, entendant les commentateurs parler de « miracle » à propos de ma récupération, s’est exclamé : « si miracle il y a, il doit être clair qu’il ne peut s’agir d’un miracle républicain ! ».
Cette expression, a plu. Elle a été reprise malicieusement sans que je la revendique pour autant ; simplement, mes parents m’ont donné une bonne constitution. J’ai eu la chance d’avoir affaire à des équipes médicales compétentes qui n’ont pas baissé les bras. Et j’ai conscience enfin d’avoir été soutenu par l’affection des miens et la pensée de beaucoup que je remercie. Me retrouvant à mon établi, j’ai repris mon travail avec le simple souci de servir. C’est cela qui me rend facile de porter des dossiers, quand même assez lourds.

Pierre Taribo
- Après cet accident d’anesthésie et la convalescence qui vous ont éloigné durant quatre mois du ministère de l’Intérieur, quel œil portez-vous sur le quotidien du pouvoir ?

Jean-Pierre Chevènement
- Cela me donne le sens de la durée.

Pierre Taribo
- Vous n’avez pas quelque fois le sentiment que c’est un peu vain et inutile ?

Jean-Pierre Chevènement
- Justement non, parce que, dans la durée, les choses avancent. Et puis, dans la vie, il n’y a pas ceux qui réussissent et ceux qui échouent. Il y a ceux qui qui essayent et ceux qui renoncent.

Pierre Taribo
- Revenons à la politique. Aujourd’hui, votre dossier prioritaire est la sécurité. Mais on a l’impression que vous remettez cette question à l’ordre du jour sous la pression des circonstances et de l’intervention de Jacques Chirac dans ce débat.

Jean-Pierre Chevènement
- L’intervention du président de la République n’est pas en cause. Depuis que je suis ministre de l’Intérieur, la sécurité a toujours été mon dossier prioritaire. C’est pourquoi, dès mon arrivée place Beauvau, j’ai préparé et organisé le colloque de Villepinte. C’est pourquoi aussi, le Premier ministre a régulièrement réuni, depuis lors, le Conseil de sécurité intérieure. C’est pourquoi, dès la fin du mois de décembre, je l’ai saisi des propositions que je fais pour assurer l’efficacité des orientations prises. La sûreté est la condition de l’exercice des libertés, elle est un bien très précieux. Quand elle est menacée, c’est le devoir de l’Etat de veiller à ce qu’elle soit garantie à tous nos concitoyens et d’abord aux moins favorisés qui sont aussi ceux qui souffrent le plus de l’insécurité.

Au demeurant, la réalité – ce que vous appelez les circonstances – rappelle quotidiennement l’Etat à son devoir. Il est vrai que le développement des violences urbaines et de la délinquance des mineurs, qui est une tendance de longue durée, reste aujourd’hui préoccupant et que nous devons traiter cette question avec une énergie renouvelée. A Villepinte, il y a un peu plus d’un an, nous avons fixé un cap, défini une politique. Il faut continuer en ciblant toujours mieux nos objectifs et en précisant les moyens qui nous permettrons de les atteindre.

Pierre Taribo
- Que peut-on faire pour lutter contre la violence urbaine ?

Jean-Pierre Chevènement
- Il faut d’abord prendre en claire conscience des causes de ce phénomène : le chômage, les inégalités sociales, la […] simples, indispensables à toute vie collective dans une société policée, une sorte de « déséducation » qui fait que les parents, les adultes en général, ne savent pas ou n’osent pas plus transmettre aux enfants et aux adolescents les valeurs les plus fondamentales comme le respect d’autrui, le respect de la loi, le sens de l’intérêt général ; et aussi, l’amoindrissement de notre capacité à intégrer à la nation les jeunes issus de l’immigration, à leur ouvrir largement, généreusement, l’accès à la citoyenneté. Mais l’explication n’est pas la justification. La lutte contre les causes du mal prendra du temps. En attendant qu’elle porte ses fruits, on ne saurait rester les bras croisés. C’est maintenant, sans tarder, qu’il faut s’atteler à réduire les violences urbaines.
Nous devons, pour cela, renforcer la coopération entre les différents partenaires qui ont un rôle à jouer dans cette action, à commencer par la Justice, l’Education nationale, les services sociaux. Sur le terrain, les contrats locaux de sécurité, dont près de 600 sont en cours d’élaboration, sont le bon moyen de faire travailler ensemble les élus, les administrations, la police, les gendarmes, les magistrats, les bailleurs sociaux, les transporteurs publics, les associations.
Quant à la police, elle doit concentrer davantage ses forces sur les zones prioritaires, c’est-à-dire sur les quartiers les plus fragiles. Elle doit aussi resserrer la coopération entre ses services – la sécurité publique, la police judiciaire, les renseignements généraux. Surtout, il faut davantage l’orienter vers une police de proximité. Par tradition, la police française est plutôt une police d’ordre. Par le passé, on a beaucoup misé sur l’intervention de services spécialisés et mobiles pour se saisir des délinquants et quand la délinquance de quelques individus dégénère en violences urbaines plus collectives, on fait appel aux CRS ou aux escadrons de gendarmes mobiles. Ce modèle atteint ses limites. Des correspondants police-jeunes viennent d’être désignés dans les départements et dans les agglomérations. Il nous faut aussi une police plus proche de nos concitoyens, plus présente dans les quartiers, plus visible, habituée à travailler en liaison plus étroite avec les commerçants, les gardiens d’immeubles, les chefs d’établissements scolaires. Bref, une police qui se sente plus directement responsable de la sécurité sur le territoire qui lui est assigné. Dès maintenant, des directives ont été données pour lutter contre l’économie souterraine qui s’est installée dans certains quartiers et qui nourrit la délinquance. Une répression coordonnée – judiciaire, fiscale, douanière – sera mise en œuvre là où c’est nécessaire.

Pierre Taribo
- Comment réduire la délinquance des jeunes qui ne cesse de s’aggraver ?

Jean-Pierre Chevènement
- La part prise par les mineurs dans la délinquance ne cesse malheureusement de croître : plus d’un quart des faits de délinquance et 36,45 % des délits de voie publique sont commis par des mineurs. Pour autant, il ne faut pas assimiler l’ensemble des jeunes aux délinquants. Tout jeune, loin s’en faut, n’est pas un délinquant en puissance. Rien n’est plus horripilant que d’entendre dire « les jeunes » à propos de quelques bandes de voyous qui empoisonnent la vie de nos banlieues. Il ne faudrait donc pas que préoccupation légitime du gouvernement à l’égard de ce phénomène de délinquance juvénile puisse être caricaturée comme la manifestation d’un esprit anti-jeunes. C’est tout le contraire ! Nous voulons libérer les jeunes de la peur et de l’impasse suicidaire de la violence pour développer une politique d’accès à la citoyenneté pour tous, notamment pour les jeunes issus de l’immigration.
A l’égard des jeunes délinquants, en revanche, il faut tenir un langage très ferme. Le gouvernement ne méconnait pas les facteurs sociaux qui favorisent la délinquance. Cependant, face à des jeunes dépourvus de repères clairs et solides, il convient d’affirmer la responsabilité pénale du mineur dans la violation de la loi que constitue tout acte délinquant. La sanction relève moralement le délinquant qu’elle frappe : elle ne le prend pas pour un zombie mais lui rappelle qu’il est un être de liberté.
Tout fait de délinquance mérite une réponse, y compris les injures, les menaces, les dégradations de cages d’escaliers, les rodéos nocturnes en « mobylette » qui font beaucoup de tapage. Ce sont, en effet, ces agissements qui rendent la vie impossible dans certains quartiers et alimentent le sentiment d’insécurité.
Mais si la réponse aux actes de délinquance se doit d’être systématique, elle doit aussi être rapide car condamner un mineur plusieurs mois, voire un an après les faits, n’a plus aucun sens pour ce jeune délinquant.
Enfin, la réponse doit être visible pour la communauté sociale, c’est-à-dire pour les autres jeunes, pour les victimes, pour les habitants du quartier. Il faut, en effet, combattre l’idée que le mineur délinquant demeure impuni. En ce sens, je dirai que la sanction doit être aussi visible qu’a pu l’être le fait délinquant.

Pierre Taribo
- Irez-vous jusqu’à mettre sous condition le versement du RMI ou les allocations familiales ? On vous dit favorable à la détention provisoire des mineurs ou à la création de centres fermés ?

Jean-Pierre Chevènement
- Si la responsabilité pénale du mineur délinquant doit être affirmée, la responsabilité de ses parents ne doit pas être écartée. Ils doivent être incités à assumer pleinement leurs obligations éducatives. Les textes en vigueur permettent, notamment, de vérifier que les prestations familiales sont bien utilisées au profit des enfants. Quand ce n’est pas le cas et lorsqu’on relève que les parents d’un mineur délinquant se sont soustraits à leurs responsabilités éducatives, des mesures de suspension ou de mise sous tutelle des prestations familiales peuvent être adoptées. On peut penser que ces possibilités ne sont pas suffisamment utilisées. Mais ce n’est pas la seule façon d’impliquer les parents. Ils doivent être associés étroitement à la vie scolaire de leur enfant, se rendre systématiquement à toutes les convocations judiciaires… Bref, il faut mobiliser ou remobiliser les parents.
Il y a, cependant, des cas où les carences éducatives sont telles au sein de la famille qu’il vaut mieux retirer, au moins pendant un temps, le mineur de son contexte de vie habituel. Eloigner le mineur délinquant d’un quartier où il fait régner la terreur, le couper de sa « bande » constitue souvent une bonne solution. Mais il faut reconnaître que l’on manque de structures d’accueil qui offrent à la fois un projet éducatif fort et un cadre suffisamment contraignant pour des mineurs totalement dépourvus de repères. Entre la prison dont on nous dit qu’elle est criminogène, en tout cas dans les conditions actuelles des quartiers de mineurs qu’il faudrait sans doute revoir, et les foyers éducatifs, où l’on rentre et d’où l’on sort comme dans un moulin, il manque, à mon sens, un maillon. Au terme de « centre fermé » qui prête, semble-t-il à polémique, je préfère celui de « centre de retenue » qui a une connotation plus éducative.
Quelle que soit la solution adoptée, il m’apparait essentiel que la victime, en particulier la victime d’une agression physique, ne se retrouve pas nez à nez avec son agresseur le lendemain des faits, comme cela se passe trop souvent. C’est pourquoi je demande que l’on étudie la possibilité de retenir, selon des critères très stricts pour une courte période, dans l’attente de la sanction qui doit, une fois encore, intervenir très vite, certains mineurs de moins de 16 ans, auteurs de délits graves envers les personnes. Ce n ‘est pas possible actuellement et ces jeunes le savent fort bien ce qui renforce chez eux le sentiment d’impunité.

Pierre Taribo
- La gauche est-elle en train d’effectuer un virage sécuritaire ?

Jean-Pierre Chevènement
- Faire en sorte qu’on puisse garer sa voiture en bas de son immeuble sans qu’elle risque d’être brûlée, prendre des dispositions pour qu’une femme puisse aller faire ses courses sans craindre de se faire arracher son sac ou protéger les conducteurs de bus contre les jets de pierre et les coups, ce n’est ni de droite ni de gauche, c’est du bon sens. C’est humain.
Il est vrai que la gauche a trop longtemps opposé la sécurité et la liberté. La déclaration des droits de l’Homme et du citoyen les associe au contraire, à juste titre. Car il n’y a pas de liberté dans le climat de la peur, voire de terreur.
De plus, l’insécurité frappe surtout les quartiers les plus défavorisés de nos villes. Elle frappe ceux de nos concitoyens qui sont les plus faibles et elle les frappe d’autant plus durement. Chacun a un droit égal à la sécurité. Aujourd’hui, ce droit n’est pas respecté et ce sont les plus modestes qui en souffrent le plus. Le vol d’une automobile ou d’un poste de télévision est insupportable pour tout le monde. Il l’est davantage encore pour celui qui les a achetés à crédit et qui ne dispose pas des économies suffisantes pour les remplacer en attendant le dédommagement des assurances. Et ce n’est pas dans les lycées du centre de nos villes que se répandent d’abord les violences scolaires, c’est plutôt dans les collèges de banlieue. C’est pourquoi, œuvrer pour la sécurité, faire « des villes sûres pour des citoyens libres », comme on l’a dit au colloque de Villepinte, ce n’est pas, pour la gauche, « effectuer un virage », c’est rester fidèle à sa vocation : travailler à l’égalité républicaine.

Pierre Taribo
- Cette politique n’est pas du goût de tout le monde à l’intérieur de la majorité plurielle ?

Jean-Pierre Chevènement
- Il y a quelques soixante-huitards attardés qui n’ont pas encore compris qu’une société tant soit peu civilisée, ne peut pas se maintenir sans quelques règles. L’enfer est pavé de meilleures intentions : ils ne voient pas que leur laisser-faire et leur laisser-aller font le lit de ce qu’ils prétendent combattre : la loi de la jungle, la violence aveugle avec, à terme, le risque de réactions fascisantes. Heureusement, je suis là pour les retenir ! La gauche républicaine, dont le Mouvement des Citoyens n’est que l’avant-garde, doit rester majoritaire dans la gauche plurielle. Le sens de l’intérêt général doit guider nos choix. C’est ce qu’une majorité de nos concitoyens apprécie dans la démarche de Lionel Jospin, à juste titre.

Pierre Taribo
- Les mêmes divergences existent au sujet des sans-papiers. Que vont devenir ceux qui ne sont pas régularisés ? Des clandestins semi-officiels devront-ils quitter le territoire ?

Jean-Pierre Chevènement
- Il y a d’abord ceux qui sont régularisés : ils sont plus de 80 000, ce n’est pas rien. Des familles ont pu être réunies, des ressortissants étrangers bien intégrés en France ont pu s’y installer, des personnes malades qui n’auraient pas pu se soigner dans leur pays peuvent le faire : il fallait sortir des situations inextricables créées par les lois précédentes.
Quant aux demandeurs de titre de séjour qui n’ont pas été régularisés, ils ne sont pas plus qu’avant des « clandestins officiels ». Ils n’ont pas l’autorisation de séjourner en France. Ils doivent donc quitter le territoire et rejoindre leur pays. Nous leur proposons de le faire volontairement avec une aide pour se réinstaller. Pour les ressortissants de trois pays avec lesquels nous négocions actuellement des conventions de co-développement – le Mali, le Maroc et le Sénégal -, il est même proposé un contrat de réinsertion dans le pays d’origine, qui complète cette aide par une formation préalable et par le droit à un visa après qu’ils seront réinstallés. Je les invite très vivement à contacter l’OMI-Office des migrations internationales – pour pouvoir en bénéficier. Désormais, c’est la loi RESEDA du 11 mai 1998, discutée et votée par le Parlement, l’hiver dernier, qui s’applique. Cette loi contient des assouplissements qui rendront, je le pense, largement inutiles à l’avenir de telles opérations de régularisation : il s’agit notamment de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». Cette législation est juste : elle est à la fois humaine et conforme à l’intérêt du pays dans un monde traversé de déséquilibres.

Pierre Taribo
- Le mondial avait donné l’illusion d’une France « black-blanc-beur ». Vous ne trouvez pas que les lendemains déchantent ?

Jean-Pierre Chevènement
- L’équipe de France n’a pas gagné parce que Thuran était black, Barthez blanc et Zidane beur, mais parce qu’ils avaient tous les trois du talent ! Défions-nous des modes importées et restons fidèles à l’élitisme républicain : il nous fournit une meilleure grille de lecture pour comprendre la victoire de l’équipe de France de football. Et aidons les jeunes, nés de l’immigration, à réussir dans tous les domaines grâce à leur talent. Là est le devoir sacré. Tout le reste n’est qu’insipide bavardage pseudo-humanitaire.

Pierre Taribo
- Lorsque Noël Mamère dit que vous donnez une image archaïque de la gauche ou que vous sautez comme un cabri en disant « la République, la République, la République » qu’est-ce que vous lui répondez ?

Jean-Pierre Chevènement
- En matière de cabri, on ne peut guère faire mieux que la personne que vous citez : je rends les armes. Quant à la République, c’est une idée toujours neuve si on veut bien se donner la peine de réfléchir à ce qu’en tous domaines, exige l’intérêt général. Evidemment, c’est difficile. C’est une ascèse. On ne peut pas y parvenir seulement en sautant devant les caméras !

Pierre Taribo
- Vous allez en Corse cette semaine. Où en est l’enquête sur l’assassinat du préfet Erignac ?

Jean-Pierre Chevènement
- J’ai toujours été convaincu que cette enquête finirait par aboutir. L’Etat républicain aura le dernier mot. J’en suis plus que jamais convaincu.

Pierre Taribo
- N’avez-vous pas l’impression qu’il y a plus de gesticulation que de résultats ?

Jean-Pierre Chevènement
- Vous n’avez pas la vue d’ensemble.

Pierre Taribo
- Le redéploiement police-gendarmerie est un autre sujet très délicat. N’est-ce pas une façon de récupérer des policiers pour les affecter dans les zones urbaines sensibles ?

Jean-Pierre Chevènement
- Vous l’avez bien compris, la réorganisation territoriale de la police et de la gendarmerie nationale est un des moyens de répondre au besoin de sécurité exprimé par nos concitoyens. Il n’y a rien de choquant à mettre davantage de moyens là ou les besoins sont les plus pressants : dans les zones urbaines, où la délinquance est la plus forte. C’est le principe même du service public. Cela dit, rien ne se fera qu’après une analyse et une concertation approfondies.
Dans les cinq ans qui viennent, nous allons être confrontés à de très nombreux départs en retraite : ceux de 25 000 policiers. C’est donc un moment particulièrement opportun pour repenser certains modes de fonctionnement de l’Administration.

Pierre Taribo
- L’euro a vu le jour à la date fixée. Le franc a disparu des cours de la Bourse. Vous assimilez cela à un abandon de souveraineté nationale ?

Jean-Pierre Chevènement
- La France n’a plus de monnaie qui lui soit propre et donc plus de politique monétaire. Le traité de Maastricht soustrait explicitement la politique de la Banque centrale européenne à l’influence du politique et, par conséquent, à l’action des citoyens. C’est cela, à mon sens, qu’il va falloir changer.

Pierre Taribo
- Pour la ratification du traité d’Amsterdam, êtes-vous d’accord avec la procédure choisie ou regrettez-vous comme Charles Pasqua, l’absence de référendum ?

Jean-Pierre Chevènement
- Je suis convaincu que sur un sujet aussi sensible que l’immigration, le peuple français n’acceptera que les règles qu’il aura lui-même fixées : c’est dans cinq ans que le traité d’Amsterdam prévoit que ces règles pourraient être fixées à la majorité qualifiée. D’ici là, à défaut d’un référendum que le président de la République a refusé, le peuple français aura l’occasion de se saisir du sujet.

Pierre Taribo
- Que va faire le Mouvement des Citoyens pour les élections européennes ?

Jean-Pierre Chevènement
- Se battre pour faire avancer ses idées. Comment ? Notre congrès, qui se réunira à Créteil les 6 et 7 février prochain, répondra à cette question.