Texte intégral
Robert Hersan était une personnalité exceptionnelle, ce qui veut dire qu’il agissait d’une manière différente des autres et pour atteindre d’autres buts que les autres. La conséquence en était qu’il subissait inévitablement l’incompréhension, et parfois l’injustice.
Sa passion, c’était la presse. Il s’acharnait à bâtir, depuis ses premiers périodiques, le plus important groupe de presse français, devenu européen, lorsqu’il avait franchi les frontières de la Belgique, de la Hongrie et de la Pologne.
Il ne se résignait jamais à se séparer d’un titre de journal, tant il ressentait chacune de ses publications comme sa propre chair. La politique le passionnait, mais uniquement comme un sujet de curiosité, sur lequel il se montrait intarissable.
Je n’ai jamais rencontré chez lui de manifestations d’ambition politique. Tout ce qu’il en attendait, c’était de laisser vivre – et non pas de faire vivre ! – son groupe de presse, il a souhaité être élu député européen. Je l’y ai aidé. Il a rejoint avec moi le groupe PPE, convaincu que l’avenir de la France passait par une politique européenne, inscrite au centre droit de l’échiquier européen.
Son amitié pour Michel d’Ornano nous avait rapprochés sur le plan humain. J’ai découvert en lui une nature discrète, secrète, sans doute blessée par le rappel de ses égarements de jeunesse, une grande simplicité d’apparence et de vie, et une humanité attentive au sort des autres, qui lui interdisait de jamais se séparer d’aucun de ses collaborateurs.
La vie l’a largement récompensé par sa réussite, mais elle ne l’a pas délivré de sa solitude. Il gardait son cœur pour les siens. Je crois avoir réussi à le toucher, ou en tout cas, à l’effleurer, en lui témoignant mon estime, qui était le sentiment dont il attendait le plus, et en lui offrant aujourd’hui en souvenir, dans les colonnes du journal dont il était le plus fier, l’expression affectueuse et fidèle de mon amitié.