Texte intégral
Q. : Ma question s’adresse à M. le ministre de la défense. Hier soir, le Président de la République a annoncé aux Français, dans une intervention télévisée, la fin de nos essais nucléaires français. En dépit de bien des oppositions externes et internes qu’il fallait quelquefois prendre au second degré, le président a donc maintenu l’objectif qu’il s’était fixé et, en l’espèce, il a montré qu’il n’entendait pas renoncer aux prérogatives qui sont les siennes. Dans cet ordre d’idées, il a annoncé des initiatives fortes dans le domaine du désarmement et de la défense européenne.
Ma question sera double, monsieur le ministre : d’une part, pouvez-vous nous indiquer les initiatives que la France prendra demain en matière de désarmement, et avec quelles nations ? Pouvez-vous, d’autre part, nous dire avec quels pays européens une véritable concertation sur une défense commune va-t-elle être engagée ?
R. : Monsieur le député, oui, le président de la République a eu le courage, la ténacité, l’intelligence, de mener à bien cette dernière campagne d’essais nucléaires. Oui, le président de la République a eu l’intelligence d’engager une démarche qui maintenant va mettre la France en position de demander désarmement et coopération.
Désarmement nucléaire
Vous m’avez demandé quelles seraient les initiatives que la France prendrait en matière de désarmement à la suite de cette dernière campagne d’essais : la France signera le traité de Rarotonga qui prévoit la dénucléarisation du Pacifique. Elle a demandé et exigera ce qu’on appelle l’option zéro pour la signature du traité d’interdiction des essais nucléaires, le (CTBT). Donc, la France prendra toutes les initiatives qui s’imposent en matière de désarmement :
Quant à la coopération européenne, la France poursuivra son action permanente :
- d’une part en matière de forces, et c’est la raison pour laquelle elle continue à favoriser des opérations du type « Corps européen », Euroforce, Euromarforce ;
- d’autre part, en matière d’industries d’armement – et c’est la raison pour laquelle la France et l’Allemagne ont conclu pour mettre sur pied une Agence franco-allemande d’armement destinée à préparer une industrie européenne d’armement :
- enfin, la France continuera toutes les coopérations en matière européenne dans le cadre de l’UEO et pour renforcer le pilier européen de la défense dans le cadre de l’OTAN.
Réponse du ministre de la défense à une question de M. Jacques Boyon, député de l’Ain et président de la commission de la défense nationale et des forces armées
Dissuasion nucléaire
Q. : Ma question s’adresse elle aussi à M. le ministre de la défense. En 1960, le général de Gaulle avait dit après la première expérimentation nucléaire à Reggane : depuis ce matin, la France est plus forte et plus fière.
Aujourd’hui, après le sixième essai, effectué samedi, et après la déclaration du président de la République annonçant l’arrêt définitif des essais français, nous pouvons avoir le même sentiment. Aujourd’hui, la France est plus forte, car elle a comblé son retard par rapport aux Etats-Unis et à la Russie et peut entrer elle aussi de manière efficace dans la voie de la simulation.
Aujourd’hui la France est plus fière, car le Président de la République a tenu ses engagements et il restera désormais, dans les esprits, comme le premier chef d’Etat de puissance nucléaire militaire à avoir choisi, pour le traité d’interdiction des essais nucléaires, l’« option zéro », c’est-à-dire l’arrêt total des essais, quelle que soit leur puissance. Ultime campagne et « option zéro » étaient liées car, sans cette campagne, l’option zéro eut été inacceptable pour la France.
Aussi, monsieur le ministre, je voudrais que vous nous confirmiez que tous les résultats scientifiques que nous attendions ont bien été obtenus et cela, grâce, je crois, à l’excellent travail de conception et de conduite de la campagne qu’ont mené les équipes civiles et militaires du Commissariat à l’énergie atomique et des armées, ce qui a permis de terminer le programme plus vite que prévu.
Pouvez-vous nous dire aussi quel est l’avenir du Centre d’expérimentation du Pacifique et de ses personnels ? Pouvez-vous, enfin, nous indiquer comment vont se poursuivre dès maintenant les travaux de la simulation dans l’attente des livraisons des grands équipements scientifiques tels que lasers, calculateurs et appareils de radiographie, que la simulation exige ?
Essais nucléaires (réussite complète)
R. : Monsieur le président de la commission de la défense, je m’associe aux félicitations que vous avez adressées aux personnels civils et militaires qui, il est vrai, ont rempli à 100 % la mission qui leur a été confiée. Il faut savoir que les six essais ont été réussite complète, tant sous l’angle scientifique que sous l’angle militaire. C’est la raison pour laquelle je voudrais, de l’Assemblée nationale, les féliciter d’une manière tout à fait particulière.
Avec vous, monsieur le président, je rends hommage au Président de la République qui, en dépit d’opérations médiatiques, de mouvements d’opinion, est resté fidèle au devoir de sa charge : garantir l’indépendance nationale et la souveraineté du pays.
CEP (reconversion en un lieu d’observations scientifiques)
Vous m’avez interrogé sur l’avenir du centre d’essais du Pacifique. Il sera reconverti durant les mois et les années qui viennent, mais je peux d’ores et déjà assurer les Polynésiens que les crédits seront dégagés pour qu’en aucun cas l’économie locale ne soit troublée.
Je peux aussi assurer les salariés du CEP que leur mission en matière de radiologie et de contrôle de l’environnement se poursuivra et que le ministère de la défense mettra tout en œuvre pour que ce lieu d’expériences devienne un lieu d’observations scientifiques.
Simulation
Enfin, vous m’avez interrogé sur la simulation. Je vous précise qu’aujourd’hui la France est sans doute l’une des grandes puissances nucléaires les plus en avance dans ce domaine et que, grâce aux efforts des gouvernements successifs – et je me tourne vers ceux qui braillent à gauche de l’hémicycle pour leur dire que la remarque englobe les gouvernements qu’ils ont soutenus et leurs initiatives ! – ont peut désormais s’engager dans la simulation, grâce aux gouvernements successifs, disais-je, y compris celui de M. Balladur et celui présidé aujourd’hui par Alain Juppé.
Accélérateur (expérimentation)
Le programme d’adaptation à la limitation des essais nucléaires, le PALEN, sera poursuivi, les travaux sur l’accélérateur AX également, et je voudrais vous dire ma fierté d’être ministre de la défense pour mener ce type de projet.