Texte intégral
Date : 30 avril 1996
Source : Le Parisien
Le Parisien : Va-t-on enfin sortir de la crise de l’immobilier ?
Pierre-André Périssol : La reprise est proche. On est aujourd’hui à une période charnière.
Pour la première fois depuis longtemps, tous les éléments sont réunis pour permettre un redémarrage de l’activité : les taux d’intérêts ont baissé de 2 %, la conjoncture est meilleure et les réformes que l’on a engagées donnent leurs premiers résultats.
Le Parisien : Oui, mais ça fait longtemps que l’on nous promet la reprise…
Pierre-André Périssol : Cette fois, c’est différent car il y a des signes concrets. Le neuf est reparti avec l’effet du prêt à taux zéro : les promoteurs ont enregistré une hausse d’activité de 20 à 25 % entre le quatrième trimestre 1994 et le quatrième trimestre 1995, particulièrement en grande couronne.
L’ancien amorce à son tour un redémarrage : les promesses de vente ont progressé de 25 % en février à Paris et en petite couronne. La reprise y est un peu plus tardive car il a fallu auparavant purger le marché des effets de la spéculation des années 1989-1991. Les prix avaient alors littéralement flambé. Aujourd’hui, on peut dire qu’ils ont retrouvé leur équilibre et qu’ils ont retrouvé leur équilibre et qu’ils correspondent aux moyens et aux besoins des ménages.
Le Parisien : Vous conseillez donc d’acheter ?
Pierre-André Périssol : Bien sûr, c’est le bon moment. Et je le dis d’autant plus clairement que j’ai toujours exhorté les acheteurs à se responsabiliser. Le but n’est pas de les pousser à l’achat irraisonné pour retomber dans des spirales de spéculation et d’endettement comme on a pu en connaître. Aujourd’hui, je conseille d’acheter parce que le marché s’y prête et que les aides sont là pour ça. Il suffit de regarder : dans le neuf, vous bénéficiez du prêt à taux zéro. Dans l’ancien, vous pouvez aussi en profiter avec, en plus, la baisse d’un tiers des droits de mutation. Et quel que soit votre achat, accession ou investissement locatif, neuf ou ancien, vous bénéficiez d’une majoration de 20 % des droits d’épargne-logement.
Le Parisien : Doit-on s’attendre à de nouvelles aides ?
Pierre-André Périssol : Non, il n’y a pas d’autres dispositifs prévus pour l’instant. Ceux qui sont en place fonctionnent déjà très bien. Il ne faut pas oublier qu’en quatre mois on a réformé tout le système d’accession à la propriété pour l’adapter à la situation actuelle. Maintenant, il faut que la courbe de la crise de l’immobilier s’inverse de façon durable.
Date : vendredi 3 mai 1996
Source : France 2
France 2 : Vous êtes ministre délégué au Logement, vous êtes donc appelé à faire des efforts. Qu’allez-vous pouvoir faire dans votre ministère en 1997 ?
P.-A. Périssol : Je crois qu’il faut d’abord dire que réduire les dépenses publiques, c’est l’intérêt de tous. Pour nous tous. D’abord parce qu’aujourd’hui la première dépense de l’Etat, c’est le remboursement de la dette. Nos impôts servent plus à payer la dette aujourd’hui qu’à investir dans l’Education, dans les routes, dans le logement. En tant que ministre du Logement, je suis le premier intéressé à cette réduction de la dépense publique de manière générale, parce que les efforts qui ont été menés par le Gouvernement d’A. Juppé depuis un an ont permis une baisse des taux dont bénéficie pleinement celui qui achète des logements. Celui qui achète un logement aujourd’hui va avoir un allégement, une réduction de son remboursement chaque mois, de l’ordre de 10 %. Donc, c’est un acquis et j’entends bien le maintenir.
France 2 : Quelles économies pouvez-vous réaliser puisqu’il était question de faire des économies sur les aides à l’emploi et éventuellement sur les aides au logement ?
P.-A. Périssol : Il n’y a aucun sujet, aucun secteur tabou, le Premier ministre l’a bien dit. De la même manière, aucune mesure précise n’est aujourd’hui arrêtée. Il y aura un débat au sein du Gouvernement, il y aura d’ailleurs un débat – pour la première fois – devant le Parlement la semaine prochaine à l’Assemblée nationale, la semaine suivante au Sénat. Pour ce qui me concerne, je continuerai à chasser le gaspi des dépenses inutiles, à rendre les dépenses plus efficaces tout en renforçant la cohésion sociale et le droit au logement. Je crois que, sur un certain nombre d’exemples, j’ai montré qu’on pouvait le faire.
France 2 : L’enveloppe qui représente l’aide au logement va être amputée ou pas, l’année prochaine ?
P.-A. Périssol : Elle le sera, j’allais dire, comme pour chacun des ministères. Je veux dire… Chaque ministère devra apporter sa contribution, le ministère du Logement comme les autres. Mais il faudra moins dépenser avec – ce qu’il est, à mon avis, indispensable, de faire en même temps – qui est de dépenser mieux. Je vous prends un exemple. Le prêt à taux zéro. L’accession à la propriété, elle était en panne. Les quatre aides qui permettraient d’aider 30 000 familles à acheter un logement chaque année… J’ai supprimé ces quatre idées et j’ai mis en œuvre le prêt à taux zéro. Sans alourdir la charge pour le contribuable, avec la même somme, aujourd’hui, en 6 mois, il y a eu 60 000 manages qui ont bénéficié du prêt à taux zéro, surtout des ménages modestes, essentiellement des jeunes ménages. Cela montre bien qu’on peut dépenser mieux et être plus efficace.
France 2 : Vous avez déjà pris des mesures sur le logement neuf, allez-vous en prendre sur l’ancien ?
P.-A. Périssol : Je voudrais simplement dire que le logement a été un secteur qui était – on m’a dit – matraqué fiscalement, et, grâce à la mesure qui a été prise, mesure permettant d’amortir le bien, de traiter celui qui investit dans l’immobilier comme celui qui investit dans un autre secteur de l’économie. Eh bien, il y a eu un recul de la pénalisation fiscale, du poids fiscal, sur le logement. C’est un des secteurs sur lequel nous avons fait reculer le poids de la fiscalité.
France 2 : Mesure étendue ou non ?
P.-A. Périssol : C’est une mesure très forte, on l’a qualifiée de « révolutionnaire », et qui, pour l’instant, marche bien.
France 2 : Un mot sur la conjoncture. Le bâtiment repart ?
P.-A. Périssol : Je le crois. Je crois fondamentalement qu’aujourd’hui les Français sont conscients que l’année 1996, c’est l’année du logement. Toutes les conditions sont réunies : des taux bas et des mesures très puissantes, très efficaces. A ce moment-là, ils vont, à nouveau, se mettre à acheter des logements. Je crois qu’on a relancé ce secteur du logement. En terme de bâtiment, il y a un effet mécanique. Si aujourd’hui il y a une conjoncture, dans les entreprises de bâtiment, faible, c’est la conséquence de la faiblesse des ventes il y a un an. Donc, lorsque j’ai fait 60 000 prêts à taux zéro en 6 mois, eh bien c’est 60 000 chantiers pour demain.