Texte intégral
La lettre confédérale CGC - 20 mai 1997
Législatives, et après… ?
Dès 20 h 30, le 21 avril dernier, après l’annonce de la dissolution de l’Assemblée, la CFE-CGC déclarait : l’action syndicale continue.
Elle continue en effet plus que jamais.
Mais, dans le contexte électoral ainsi créé, il nous est apparu aussi indispensable de participer au débat dans sa partie économique et sociale.
Et pas en sollicitant les forces politiques en présence pour obtenir des réponses convenues ou controuvées aux interrogations de la CFE-CGC.
Non ! Cette façon d’intervenir ne correspond plus au besoin de repères et de clarification que l’encadrement, comme l’ensemble des salariés, revendiquent.
Après vingt-quatre années de crise… momentanée et d’augmentation continue du chômage, ce n’est pas une énième promesse de « sortie du tunnel » que nous attendons.
Non ! Il s’agit de parler vrai, de reconnaître la mutation de société que nous vivons.
Il convient de l’aborder avec une nouvelle grille d’analyse en sortant du cadre des solutions dix fois tentées et qui ont dix fois échoué.
La CFE-CGC affiche donc – dans le document joint – qu’elle veut ce qu’elle attend du pouvoir politique.
Elle affirme un projet social à l’horizon du nouveau siècle.
Ce que veut la CFE-CGC, ce que nous exigeons de ceux qui sollicitent nos suffrages, c’est de remettre notre pays sur les rails de l’emploi et notre société sur la voie du progrès social. Notre responsabilité est de baliser le chemin.
Ceux qui se reconnaîtront dans nos analyses et nos propositions s’en inspireront dans le choix éclairé de leur vote citoyen, tout comme elles guideront notre attitude dès le 2 juin au matin.
La lettre confédérale CGC : 16 juin 1997
De la République à Matignon via la Nation
Le 10 juin, nous avons marché sous le soleil pour la première euro-manifestation de notre histoire.
Ce fut un succès. Succès d’ensemble, même si une organisation syndicale était absente. Succès pour la CFE-CGC, qui – avec une mobilisation de proximité donc volontairement limitée – figurait en bonne place dans le cortège des manifestants.
C’est dire s’il y a une réelle prise de conscience du rôle que joue – ou plus encore que devrait jouer – l’Europe dans notre existence, notre devenir. C’est dire s’il y a une volonté de prendre en main notre destin collectif qui, face aux évolutions majeures du monde, passe par l’Europe.
Intervenant à un moment capital de la construction européenne, cette manifestation est certes une affirmation de la nécessité de l’Europe, mais aussi l’expression ferme de notre exigence d’imposer la primauté du politique sur les décisions monétaires et économiques. Introduire des critères sociaux, pour que le pacte de stabilité soit aussi vraiment pacte de croissance et d’emploi, est un impératif. Les circonstances sont exceptionnellement favorables pour réussir si on en juge, par exemple, à la situation de l’Allemagne. Autre façon de dire que l’Europe doit avoir pour objectif le bien-être de ses citoyens, des femmes et des hommes, qui font l’économie en se levant chaque matin.
Toute tentation d’abandon, de capitulation devant « les forces du marché » serait fatale pour notre avenir. L’Europe qui ouvre les marchés pour fermer des usines n’est pas la nôtre. Toute velléité de renforcer la rigueur existante, pour consacrer au fétichisme des taux, serait mortelle pour le possible retour à la croissance et ravageuse pour l’équilibre social de notre pays. La France a une chance historique de relancer une croissance durable par la consommation intérieure et d’installer un nouveau pacte de partage des profits de la productivité entre salaires, bénéfices des entreprises et emploi.
Toutes les conditions en sont réunies : inflation disparue, excédents extérieurs records, entreprises désendettées et profitables, capacités d’investissement sur développées.
C’est ce que nous avons dit à Lionel Jospin, le 12 juin, à Matignon. Devant le Premier ministre, qui a répondu à notre demande d’entretien – et nous y avons été sensibles – avant le sommet d’Amsterdam et sa déclaration de politique générale, nous avons décliné nos attentes telles qu’elles sont définies dans notre « projet social pour le nouveau siècle ».
Une Europe volontariste et sociale où l’encadrement et la CEC auront toute leur place, une croissance durable par une amélioration des revenus salariaux, une autre répartition du travail que celle binaire du tout ou rien, c’est-à-dire de l’emploi sur-stressant ou du chômage déprimant, d’autres modes de financement de la protection sociale reposant plus sur des richesses produites et consommées croissantes que sur des masses salariales stagnantes ou décroissantes déjà surimposées. Avec à chaque fois :
- le court terme (SMIC, conférence sur les salaires et l’emploi, contrat de générations, transfert des cotisations maladie, déductibilité de la CSG…) ;
- le moyen terme (pacte de partage, réduction du temps de travail et négociations sociales, situation de l’encadrement, cotisations à la valeur ajoutée…) ;
- et le long terme (droit au temps des salariés, réorganisation du temps de travail sur la vie…).
Sans compter bien sûr une première évocation des dossiers chauds de Renault Vilvorde, France Télécom, Air France, à la SNCF, Dassault-Aérospatiale et GAN-CIC en passant par le canal Rhin-Rhône et Superphénix. Liste non exhaustive que nous reprendrons, comme chacun des sujets évoqués, avec les ministres concernés.
Le Premier ministre nous a cordialement reçus et nous a écoutés, mais sans se livrer. Rendez-vous donc pour savoir s’il nous a entendus au discours de politique générale le 19 juin et surtout aux actes et actions qui suivront.
C’est là l’épreuve de vérité.