Déclaration de M. Bernard Pons, ministre de l'équipement du logement des transports et du tourisme, sur le rapport Chaussebourg sur le tourisme, au Conseil économique et social le 25 juin 1996.

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  • Bernard Pons - ministre de l'équipement du logement des transports et du tourisme

Texte intégral

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les conseillers,

Je me réjouis d'assister, aujourd'hui, à l'examen par votre assemblée, du rapport « le tourisme, un atout à développer » auquel notre ami Fernand Chaussebourg a consacré tous ses soins, faisant auditionner par votre section du cadre de vie de nombreuses personnalités et consacrant à ce thème un nombre important de séances de travail.

Vous ne pouviez mieux choisir votre rapporteur ! Fernand Chaussebourg est, en effet, depuis des dizaines d'années, un acteur passionné et un observateur attentif du monde u tourisme.

Tel que vous l'avez conçu, Monsieur le rapporteur, Mesdames et Messieurs, ce rapport est très complet et ne méconnaît aucune des multiples facettes de ce que recouvre aujourd'hui l'économie touristique.

Partant d'un panorama que je qualifierais d'exhaustif, il aborde successivement les institutions internationales, le tourisme mondial, la place qu'y tient la France, et le poids qu'occupe cette activité en terme d'emplois, il en inventorie les atouts, les détails aussi, sans complaisances, les faiblesses et les insuffisances de nos acteurs et de nos institutions touristiques. Il le fait à partir de cas et d'expériences bien choisies et minutieusement analysées.

Rejoignant le constat que j'ai fait moi-même, il énumère les différents axes d'efforts à entreprendre, pour que notre pays ne s'endorme pas sur les lauriers d'une position mondiale flatteuse mais fragile et adapte en fonction de l'évolution du marché mondial, son cadre administratif et politique.

Nombre des mesures que vous proposez pour accroître encore le rapport « qualité-prix » de notre offre, tout en s'efforçant de mieux répondre à la demande des clientèles françaises et étrangères, me paraissent tout à fait pertinentes.

Je note, de même, le souci constant affiché par votre section, de satisfaire une légitime aspiration aux vacances qui, dans la France d'aujourd'hui, correspondent à une attente sociale de l'ensemble de nos concitoyens.

Le tourisme, en effet, vous le montrez parfaitement, représente un formidable enjeu à la fois économique et social, et se situe dont au cœur même des travaux que conduit votre assemblée.

Enjeu économique par le poids qui est le sien sur l'emploi, les activités de services, la balance commerciale, l'aménagement du territoire et le développement futur de nombreuses régions, départements et pays.

Enjeu social par sa place dans la qualité de la vie de nos concitoyens. Ils y consacrent, quels que soient leurs moyens, une part croissante de leurs ressources et constitue pour eux, souvent, la frontière qui sépare l'insertion de l'exclusion.

Nous devons retrouver les chemins d'une véritable politique touristique, sous-tendue par une vision globale.

En prenant connaissance de votre rapport, j'ai constaté, avec un très grand plaisir, que nombre de vos propositions concordaient pleinement avec certains des axes de la politique volontariste que je viens de présenter devant le Conseil national du tourisme.

Je ne peux qu'approuver, en particulier, le constat que vous faites sur l'extraordinaire abondance et diversité de nos richesses culturelles et naturelles, hélas partiellement valorisées, ce que j'ai désigné du nom de « jachère touristique ».

Je partage votre inquiétude devant le manque de lisibilité et de volonté des politiques suivies jusqu'à présent, et le caractère fragile d'une « rente de situation » dont la pérennité sera, si rien n'est fait, douloureusement remise en cause.

Vous exprimez le souhait que soit créé un ministère du tourisme, comme cela a pu être le cas dans le passé. Les débats sur la meilleure structure gouvernementale sont aussi vieux que les gouvernements et je ne crois pas que nous arriverons à y apporter une réponse définitive.

Il me semble cependant, que l'adossement du tourisme à un ministère plus vaste et plus puissant, à un ministère dont dépendent des infrastructures qui concourent au développement du tourisme est une bonne chose et faute d'apporter une réponse théorique à ce débat, j'espère vous en apporter la preuve pratique.

Je comprends aussi que derrière ce souci, il y a celui de renforcer la vision stratégique centrale de l'État, c'est ce à quoi je m'attache dès la préparation du budget 1997, en réaffirmant le rôle central de la direction du tourisme. Des contacts ont également été pris avec le commissariat général du plan pour que le tourisme soit mieux pris en compte dans les réflexions d'avenir.

De même, je souscris entièrement aux propositions que vous formulez en faveur d'une « politique sociale du tourisme », soucieuse des conditions d'emploi et de formation, d'un accroissement du taux de départs en vacances, aujourd'hui nettement plus faible que chez nombre de nos voisins et dont certaines catégories sociales comme les jeunes sont, actuellement, souvent exclues. À mon sens, l'Agence nationale des chèques vacances doit être l'instrument essentiel de cette politique.

Comme vous, je ressens la nécessité d'améliorer encore notre accueil, de moderniser et de dynamiser notre offre, qu'il s'agisse de notre offre d'hébergement tant en milieu urbain qu'en milieu rural, ou de notre offre de produits.

Vos propositions me confortent dans la volonté de promouvoir dès à présent, une politique volontariste qui s'organise autour de 3 priorités :

1. Mettre les Français au cœur de la politique touristique.
2. Développer et rendre plus accessible l'offre touristique française, tout en l'adaptant aux nouveaux comportements de ses clients.
3. Maximiser le rendement touristique de nos investissements quels que soient les ministères dont ils relèvent.

La première priorité vise à répondre à un besoin normal en cette fin de siècle où les vacances constituent un élément majeur de la qualité de vie de vos concitoyens.

Mettre les Français au cœur de la politique du tourisme, c'est permettre des vacances pour tous, alors que 40 % d'entre eux ne partent pas en vacances et que cette fracture sociale-là, doit aussi être réduite. Le chèque vacances constitue de ce point de vue, par excellence, le vecteur de cette ambition. C'est aussi répondre à leurs aspirations en matière de courts séjours, en structurant cette offre française de loisirs de proximité.

Développer notre offre, c'est faire qu'elle soit connue et disponible, c'est la rendre plus accessible aux Français comme aux étrangers qui nous rendent visite.

C'est, en un mot, jouer de l'ensemble de notre palette, alors que nos résultats actuels demeurent pour l'essentiel, le fruit de l'exploitation d'une petite partie de notre potentiel et de notre diversité.

Nous devons mieux structurer et mieux commercialiser notre offre en mettant à profit, pour ce faire, les relais existants dont certains n'ont été, jusqu'à présent, que très peu sollicités et les techniques télématiques abondamment disponibles dans notre pays.

Enfin, il nous faut tirer parti de nombreux investissements consentis chaque année d'un bout à l'autre de la France et dont les potentialités touristiques demeurent sinon totalement ignorées des décideurs qui les ont consentis, du moins très secondaires à leurs yeux.

Tout ce que nous réalisons ou presque dans ce pays a directement ou indirectement une vocation touristique.

Quel formidable potentiel de forces nous valoriserions si, comme vous le proposez vous-même au chapitre 6 de votre rapport, nous savions développer entre tous ces investissements des synergies !

C'est l'ambition et c'est l'espoir que je nourris pour le tourisme français. Je sais, je sens en étudiant le rapport que votre ami Chaussebourg nous présente aujourd'hui, que cette ambition, que cet espoir, ne sont pas hors de notre portée.

Ils reposent, au contraire, sur le fondement des constats dont vous êtes de plus en plus nombreux à me faire part.

L'heureuse coïncidence de la remise de ce rapport devant votre assemblée, de la définition par le gouvernement d'une politique de tourisme ambitieuse est le gage que les esprits évoluent, qu'une prise de conscience s'opère et qu'un tournant s'amorce dans notre pays pour développer l'économie touristique.