Interview de M. Charles Millon, président de La Droite, à France 2 le 10 janvier 1999, sur sa défaite à l'élection à la présidence de la région Rhône-Alpes et sa dénonciation de "l'arc républicain" RPR-UDF pour son accord avec la gauche.

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Circonstance : Election au 3ème tour d'Anne-Marie Comparini, candidate UDFà la succession de Charles Millon, à la présidence du conseil régional Rhône-Alpes, le 9 janvier 1999

Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

Michèle Cotta : Bonjour. L’année 1999 commence et comme chaque année, c’est l’heure des vœux. Le président de la République a donc présenté ses vœux aux Français d’abord, le soir du 31 décembre, puis il a reçu le gouvernement pour lui souhaiter avec un peu plus d’ambiguïté une bonne et heureuse année. Lionel Jospin, lui, a réservé au journal Le Monde ses confidences sur l’action gouvernementale et ses rapports avec le président de la République. Mais les premiers jours de 1999 ont vu aussi le basculement de toutes les monnaies européennes sur l’euro et le passage à la monnaie unique, nous en parlerons dans la deuxième partie de cette émission avec nos autres invités. Notre premier invité de la semaine, c’est Charles Millon, président de La Droite, qui vient de perdre la présidence de la région Rhône-Alpes avant hier, et auquel nous avons – vous vous en doutez, Charles Millon –, quelques questions à poser avec mon confrère Philippe Reinhard de L’événement. Charles Millon donc, bonjour.

Charles Millon : Bonjour.

Michèle Cotta : Vous avez perdu puisque vous vous êtes retiré dès le premier tour. À quelle trahison, à quelle défection attribuez-vous votre défaite ? Et peut-être à vous même, après tout ?

Charles Millon : Tout d’abord, il faut peut-être rappeler comment s’est déroulée cette élection et quelle a été l’attitude que j’ai adoptée. La région Rhône-Alpes est à droite. Les électeurs de la région Rhône-Alpes ont voté à droite le 15 mars dernier. J’ai été élu président de la région Rhône-Alpes le 20 mars dernier pour garder la région à droite. Il y a eu ensuite l’annulation de l’élection par le Conseil d’État. Et on en est arrivé à cette nouvelle élection. Au premier tour, je me suis présenté car j’ai considéré que c’était de mon devoir de continuer à tout mettre en œuvre pour garder la région à droite. À la lecture des résultats, j’ai constaté que je pouvais éventuellement être un obstacle à l’objectif recherché. C’est la raison pour laquelle à ce moment-là je me suis tourné vers le candidat des appareils, celui que le RPR, l’UDF ont présenté durant les neuf mois derniers comme étant le candidat du secours, du recours, c’était le doyen d’âge et je lui ai demandé s’il voulait bien se présenter. Il a répondu « oui ». À ce moment-là, je me suis tourné vers le RPR et l’UDF et je leur ai dit : « eh bien maintenant, puisque vous avez votre candidat, on va tous se mettre ensemble. Il va être élu ». À quoi j’ai fait face ? Au refus de l’UDF qui revenait donc sur ce qu’elle avait dit et à une non-réponse du RPR. Et ce candidat au second tour a lui aussi été mis en difficulté. À ce moment-là, j’ai abordé le troisième tour et j’ai essayé de trouver ce que l’on appelle un candidat de consensus, c’est-à-dire qu’il y avait donc le candidat Anne-Marie…

Michèle Cotta : Vous l’avez sorti d’un marais…

Charles Millon : Ce n’est pas lui ! Il y avait Anne-Marie Comparini ; il y avait le doyen ; et il y a une personnalité de la région qui s’appelle Jean-François Chossy qui est député de la Loire, qui est un homme reconnu, admiré et qui a décidé de se présenter, mais pas se présenter directement devant le Conseil régional car j’ai demandé aux 61 colistiers qui ont fait campagne avec moi, qui ont été élus avec moi, avec un programme de droite et qui ont emporté la majorité avec moi, je leur ai dit : on va se réunir ensemble et on va choisir ensemble, on va voter. Et celui qui arrivera en tête deviendra le candidat de consensus. Refus de l’UDF, refus du RPR. À partir de ce moment-là, j’ai constaté qu’il y avait une volonté d’arriver à une solution qui était préparée. Et ce que je voudrais dénoncer aujourd’hui, c’est qu’il y a eu une solution de marchandage qui a été mise en place, qui a abouti à un arc républicain que tous les partis avaient dénoncé avant et qu’ils ont pourtant installé et je le dis très clairement : les dirigeants du RPR et de l’UDF ont pris une responsabilité très grave car ils ont méprisé l’électorat car ils ont dit « l’électorat, nous en s’en fiche ! On va faire nos petits arrangements. » On est revenu à la IVe République. Il y aura des conséquences dans la vie politique française que l’on ne peut pas aujourd’hui évaluer.

Michèle Cotta : Alors, Charles Millon, vous parlez de la droite. Quand vous dites « la droite », vous voulez dire toute la droite y compris le Front national…

Charles Millon : Non, je ne parle pas du Front national. Je parle de la droite parlementaire, c’est-à-dire UDF, RPR non-inscrits, la droite, ceux qui se réfèrent à mon mouvement. Je ne parle pas du Front national car, ce qui est paradoxal dans cette affaire, c’est que le Front national, depuis, a implosé. C’est que les mégrétistes avaient décidé de ne pas participer, de ne pas participer au scrutin, et qu’à partir de ce moment-là, la droite n’avait aucun problème pour avoir un président. Or, qu’est-ce qu’elle a fait ? Elle a attendu que monsieur Queyranne, c’est-à-dire le socialiste qui avait 60 voix et qui aurait pu être élu ; elle a attendu que monsieur Queyranne choisisse seul celui ou celle qui allait demain présider. C’est-à-dire que, ce qu’il y a d’extraordinaire dans cette histoire, c’est que les socialistes qui pouvaient avoir un président de région, n’ont pas pris cela…

Michèle Cotta : … Ont préféré démontrer… faire la démonstration inverse…

Charles Millon : Non, non, non, non ! Ils ont choisi la droite de connivence et de complaisance avec qui ils voulaient travailler. C’est extraordinaire !

Philippe Reinhard (L’Événement) : Charles Millon, vous avez dénoncé, dans cette affaire, les magouilles d’état-major. Vous n’avez pas le sentiment d’y avoir un peu participé vous-même…

Charles Millon : Pas du tout.

Philippe Reinhard : Au deuxième tour, par exemple, le candidat qui vous remplaçait, Pierre Gascon, n’a pas eu toutes les voix qu’il pouvait espérer et on dit même que la vôtre lui aurait manqué.

Charles Millon : Je ne sais pas lire dans les urnes. On m’a d’ailleurs reproché de ne pas savoir lire. Le 20 mars, on m’a dit : pourquoi vous ne savez pas lire ? Je ne sais pas lire dans les urnes. Je dis simplement, c’est que Pierre Gascon a eu plus de voix que les voix de mon groupe.

Philippe Reinhard : Il a eu celle de Gollnisch ; il a eu celles du Front national… il a eu 13 voix du Front national !

Charles Millon : Attendez, on croit toujours le Front national, on le croit toujours, on l’a cru durant neuf mois…

Philippe Reinhard : Apparemment, vous l’avez cru plus tôt que moi.

Charles Millon : Non pas moi ! Vous ! Vous, les médias ont cru que j’avais passé accord alors que le Conseil d’État…

Philippe Reinhard : C’est très ressemblant…

Charles Millon : Non, non attendez. Je suis d’accord, mais le Conseil d’État a dit qu’il n’y avait pas eu accord et que maintenant le Front national lui-même dit : on a été l’objet d’un marché de dupe parce qu’il n’y a pas eu d’accord, et qu’il voulait à ce moment-là un accord écrit. Donc, un, je ne crois pas monsieur Gollnisch. Monsieur Gollnisch raconte ce qu’il veut. Il a voulu à ce moment-là semer le trouble. Et, aujourd’hui, on essaie de nous dire, c’est vous qui avez mis les bulletins blancs alors qu’il y a exactement le même nombre que les membres du groupe de monsieur Gollnisch.

Michèle Cotta : Charles Millon, est-ce que vous avez eu monsieur Jacques Chirac au téléphone pendant cette période-là, pendant ces trois jours-là ? Qui vous avez eu au téléphone ? Qui avez-vous appelé ? Vous avez eu Jacques Chirac ? Philippe Séguin ?

Charles Millon : Je n’ai eu aucun chef d’appareil. Je n’ai pas eu bien évidemment le président de la République. Je sais assumer mes responsabilités. J’ai reçu un mandat de mes électeurs. Je ne suis pas propriétaire de leurs voix et je ne vais pas traficoter – comme on vient de le faire – avec les voix des électeurs pour faire un arrangement dans leur dos. Donc, moi j’avais un mandat, c’était celui de défendre un programme. J’ai défendu le programme et j’ai pris trois moyens différents, et j’ai pu constater à l’évidence que les partis politiques – et je le dis très clairement – ont voulu faire un arrangement en essayant d’ailleurs de le cacher parce que, maintenant, j’entends un certain nombre de leaders du RPR qui expliquent : « mais ce qui s’est passé, c’est extraordinaire, c’est très mal, nous ne voulons pas l’arc républicain »… mais dans ce cas-là, qu’est qui s’est passé ?…

Michèle Cotta : Vous voulez dire Nicolas Sarkozy hier ?

Charles Millon : Oui bien sûr ! Qu’est-ce qui s’est passé localement ? Localement, madame Comparini, pour pouvoir aller faire son arc républicain, a eu 15 voix et sur ces 15 voix, il y avait la majorité du groupe RPR. Donc, je dénonce ici en fait l’hypocrisie et le mépris, et surtout le mépris de l’électeur et le mépris de la démocratie.

Philippe Reinhard : Charles Millon, en admettant… puisque, vous, vous avez voté Pierre Gascon, c’est ce que vous nous dites, aux deux derniers tours, en admettant que la solution Gascon était la bonne, pourquoi alors ne pas avoir adopté cette solution quand Jacques Chirac vous le suggérait en mars dernier alors que monsieur Gascon aurait été clairement élu, lui, sans les voix du Front national ?

Charles Millon : Il n’aurait pas été élu à cette époque-là ! Ç’aurait été la même… J’ai fait la démonstration. C’est qu’en réalité, les appareils politiques ont leur idée depuis bien longtemps et monsieur Bayrou le déclare publiquement : il est pour un arc républicain. Eh bien, maintenant, on le sait. D’ailleurs, si l’alliance a tant de difficultés, c’est que monsieur Bayrou, lui, dit clairement qu’il…

Philippe Reinhard : Mais vous ne croyez pas que cet arc républicain il est né de vos neuf mois de cohabitation avec le Front national ?

Charles Millon : Ah non, pas du tout ! Pas du tout ! On constate à l’évidence qu’aujourd’hui, leurs petits arrangements, leurs petits traficotages, ce n’est pas Rhône-Alpes qui est le centre de la France. Rhône-Alpes est l’une des vingt-deux régions, mais monsieur Bayrou, quand il explique que si monsieur Queyranne, que si monsieur Queyranne se maintient, à ce moment-là, il retirera Anne-Marie Comparini. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire qu’ils ont fait des accords ?

Philippe Reinhard : Charles Millon, vous avez dénoncé donc, et vous continuez à dénoncer cet accord entre la gauche et ce que vous appelez la gauche déguisée. Alors, il y a une question, vous qui avez travaillé dix ans avec Raymond Barre. Est-ce que Raymond Barre, il appartiendrait à vos yeux à la gauche déguisée ?

Charles Millon : Alors, j’ai une question à poser publiquement à monsieur Barre. J’ai été, je crois, un de ses principaux soutiens. J’ai même organisé pour Raymond Barre tous les réseaux pour lui permettre d’être élu éventuellement président de la République en 88.

Philippe Reinhard : Tous les réseaux ?

Charles Millon : Tous les réseaux…

Michèle Cotta : C’est-à-dire ?

Charles Millon : Les réseaux réels…

Philippe Reinhard : Oui les réseaux réels, mais et les autres contacts ? Vous avez mené d’autres contacts ?

Michèle Cotta : Par exemple avec le Front national à ce moment-là où…

Charles Millon : Non, non… pas du tout… J’ai organisé tous les réseaux pour qu’il puisse être élu. J’ai été d’une fidélité et je crois d’une loyauté à son égard total. À l’époque, pourquoi je le faisais ? Parce qu’il avait une analyse politique qui m’avait en fait intéressé. Elle était conforme à la Ve République, c’est-à-dire qu’il n’y avait ni arrangement des partis, ni cohabitation, ni cogestion. Il n’y avait pas en fait tout ce système que l’on est en train de voir maintenant émerger dans la région Rhône-Alpes et peut-être ailleurs. Aujourd’hui, je n’y comprends plus rien. C’est que le théoricien de la non-cohabitation est devenu le partisan zélé de la cogestion et de la cohabitation. Alors, je trouve que c’est un paradoxe cocasse, c’est peut-être à monsieur Barre qu’il faut poser la question. Je crois qu’actuellement, il a joué, monsieur Barre, avec la région Rhône-Alpes. On verra demain que cela aura des conséquences sur Lyon ; cela aura des conséquences sur la COURLY et que cela aura même des conséquences au-delà même des frontières de la région Rhône-Alpes. On ne joue pas avec les électeurs. Et je rappellerai à monsieur Barre un enseignement qu’il m’a donné : c’est qu’un élu n’est pas propriétaire des voix. Il est dépositaire. Il est chargé de l’expression des suffrages.

Michèle Cotta : Dans le cas présent, cela veut dire quoi ?

Charles Millon : Dans le cas présent, c’est qu’on n’a pas le droit de faire un arrangement dans le dos des électeurs. Dans ce cas-là, il a réclamé, et je reconnais la dissolution, mais il l’a réclamée trop tard. Moi, je l’ai réclamée le 15 avril. À l’époque, j’aurais bien aimé entendre monsieur Barre, entendre toutes les personnes qui actuellement s’expriment réclamer la dissolution.

Philippe Reinhard : Vous la réclamez toujours ?

Charles Millon : Je la réclame toujours.

Philippe Reinhard : Mais avec la nouvelle loi régionale, vous pensez que vous gagneriez ?

Charles Millon : Je suis sûr que je gagnerai parce que si vous connaissiez l’écœurement des Rhône-Alpins aujourd’hui, ils comprennent parfaitement ce que je veux dire.

Michèle Cotta : Charles Millon, l’écœurement ne se traduit-il pas contre vous ?

Charles Millon : Pas du tout ! Ils ont très bien compris que moi, personnellement, je suis clair. Je ne suis pas là pour aller magouiller dans les antichambres ou dans les bazars pour pouvoir avoir un poste et afin de faire des équilibres entre l’assemblée régionale, la COURLY, l’assemblée municipale de Lyon, etc. Je suis clair. J’ai un programme ; j’ai été élu sur un programme et je veux appliquer ce programme.

Michèle Cotta : Est-ce que vous êtes toujours chiraquien puisque vous avez longtemps dit que vous étiez parmi les chiraquiens ? Est-ce que vous l’êtes resté, là, après ces élections ?

Charles Millon : Moi, j’ai fait la campagne de Jacques Chirac, je ne regrette rien du tout…

Michèle Cotta : Comme celle de Raymond Barre, donc peut-être que vous auriez pu changer…

Charles Millon : Vous connaissez quand même mon opinion : je ne suis pas attaché à un homme ; je suis attaché à des convictions. Si les hommes sont fidèles aux convictions pour lesquelles je me suis engagé avec eux, je reste fidèle aux hommes. S’il y a des variations, eh bien, à ce moment-là, je reprends mes distances.

Philippe Reinhard : Si vous êtes toujours chiraquien alors que vous dénoncez les partis de l’alliance, RPR, UDF, Démocratie libérale, est-ce que vous…

Charles Millon : Je pense quand même que l’alliance a explosé en vol et elle s’est déconsidérée.

Philippe Reinhard : Est-ce que vous êtes quand même toujours partisan du parti unique de l’opposition ?

Charles Millon : Je suis toujours partisan d’un système démocratique moderne…

Philippe Reinhard : … Le parti du président…

Charles Millon : Un système démocratique moderne où, d’un côté, il y a une gauche qui s’est organisée, il faut le reconnaître, mais ce qui est quand même assez étonnant, elle est même ironique, cette gauche, car quand Jean-Jack Queyranne, propriétaire de 60 voix – propriétaire… porteur de 60 voix – désigne, fait la courte échelle, donne un strapontin à madame Comparini, qui est porteuse, elle, de 15 voix, pour la mettre en place et ensuite la faire jouer comme une marionnette, la gauche, elle est organisée.

Michèle Cotta : Elle n’a pas l’air d’une marionnette, franchement, quand on la regarde… ne soyez pas antiféministe comme cela…

Charles Millon : Attendez, vous verrez… Ce n’est pas une histoire de femmes. C’est une histoire de rapport de forces politiques. Quand monsieur Gollnisch était en face de moi, puisque vous prenez l’exemple. Lui, il avait 35 voix ; moi, j’en avais 60, et que le rapport de force est un peu différent, j’avais la majorité relative. Elle, elle n’a rien puisqu’elle n’a ni majorité relative…

Philippe Reinhard : Vous voterez toujours contre elle ?

Charles Millon : Attendez, le problème c’est, si elle applique mon programme, c’est-à-dire le programme sur lequel elle a été élue…

Philippe Reinhard : C’est ce qu’elle a dit ce matin…

Charles Millon : À ce moment-là, elle floue toute la gauche. Dans ce cas-là, c’est le mépris complet des électeurs. Tout le monde est trompé, tout le monde est floué, tout le monde est trahi. Je dis aux électeurs de gauche : il faut quand même… faites respecter aussi vos suffrages ! C’est : on est passé de la Ve à la IVe République et quand j’entends monsieur Bayrou dénoncer cela…

Philippe Reinhard : C’est la IVe…

Charles Millon : Je lui dis monsieur Bayrou, c’est vous qui avez été le manipulateur de tout cela. Alors ne soyez pas en fait le pompier incendiaire.

Michèle Cotta : Vous avez parlé de Bruno Gollnisch. Quel avenir vous prêtez maintenant au Front national ? Est-ce que vous le jugez affaibli par ses divisions ou au contraire ratissant plus large justement parce que divisé et à votre détriment ?

Charles Millon : Je ne crois pas. Je crois que, si la droite retrouve ses valeurs, fière d’elle-même, elle se présente d’une manière sérieuse devant les électeurs, la droite reprendra toute sa place et l’extrême-droite sera marginalisée. Par contre, si on a un système de cohabitation perverse en haut, une cogestion trouble en bas, des cohabitations multiples et variées, alors là, l’électeur il ne va plus du tout se retrouver et l’électeur il va aller où ? Eh bien, il ira soit vers l’abstention, c’est ce que l’on a vu aux dernières élections législatives partielles, soit vers le vote protestataire, soit vers le vote extrême. Donc, aujourd’hui, je dis : attention, car on est en train de recréer un climat qui sera un climat non seulement délétère mais dangereux.

Michèle Cotta : Est-ce que vous… enfin, vous vous prétendiez longtemps le rempart, un rempart contre le Front national mais, après tout, est-ce que ce n’est pas le Front national finalement qui a gagné sur vous ?

Charles Millon : Pas du tout parce que, si vous prenez le dernier sondage de BVA, vous vous apercevez que, si demain il y a une dissolution, la droite est majoritaire en Rhône-Alpes. C’est la raison pour laquelle tout à fait officiellement, je réitère ma demande de dissolution du conseil régional pour qu’effectivement, ce soient les électeurs qui tranchent et qu’ils n’aient pas l’impression d’être floués, trompés, trahis parce qu’on leur a pris leurs voix et, ensuite, on est allé faire quelques petites manigances.

Michèle Cotta : Dernières questions sur l’Europe, est-ce que vous serez candidat pour la droite aux élections européennes ? Et surtout, qu’est-ce que vous allez faire maintenant de votre parti, La Droite ? Est-ce qu’elle existe toujours ?

Charles Millon : C’est un mouvement…

Philippe Reinhard : Est-ce que vous allez transformer votre mouvement en parti justement ?

Michèle Cotta : Voilà, est-ce que cela existe toujours ? Est-ce que…

Charles Millon : Je suis décidé plus que jamais à m’impliquer dans le débat politique national et d’ailleurs, dans les jours qui viennent, je partirai pour un tour de France afin d’aller rencontrer les responsables, les citoyens, toutes celles et tous ceux qui ont envie de discuter avec moi car il me paraît impératif qu’apparaisse ou émerge sur l’échiquier politique un parti de droite qui soit clair. Ce parti de droite, j’espère qu’il sera le parti de toute la droite et, dans l’état actuel des choses, mon mouvement continuera à se battre pour cela. À la fin de cette tournée, on décidera ce que l’on doit faire en fonction des réponses et des engagements de celles et ceux…

Philippe Reinhard : Vous travaillez pour vous ou pour Chirac ?

Charles Millon : Je travaille pour mes convictions.

Michèle Cotta : Mais vous travaillez donc à côté de Jacques Chirac, mais est-ce que vous êtes conscient tout de même que Rhône-Alpes a fourni depuis quatre jours un spectacle assez dégradant pour la démocratie auquel, tout de même, vous avez participé, Charles Million ? Je crois que vous vous exonérez un peu rapidement quand même non ?

Charles Millon : Attendez ! Moi, personnellement, ce n’est pas moi qui suis allé faire des accords de couloir, des accords d’antichambre, des manigances avec les socialistes ! Personnellement, quand je me suis présenté, on va comparer le 20 mars et puis ce qui s’est passé. Le 20 mars, moi, je me suis présenté avec mon programme. Parce que des voix de conseillers régionaux front nationaux se sont portés sur mon programme, à ce moment-là, on a eu un tohu-bohu médiatique. Là, qu’est-ce qui s’est passé ? On n’a pas parlé du programme une seule fois. On s’est foutu complètement des électeurs, des élus… On ne sait même pas ce que madame Comparini va faire parce qu’elle ne l’a pas dit. Alors, soit elle fait une politique de gauche ou une politique de droite, mais il faudrait peut-être le dire. On ne s’en est pas occupé. On ne s’est occupé que des arrangements. Alors, quand monsieur Bayrou, quand monsieur Barre, quand un certain nombre de personnages disent « ce spectacle est affligeant », je dis : « peut-être qu’il ne fallait pas le fabriquer ».

Michèle Cotta : Bon, Charles Millon, merci.