Texte intégral
J.-L. Hees : Un commentaire, D. Cohn-Bendit à la suite du portrait de P. Meyer.
– « Sur l'analyse, je suis d'accord, sauf sur les Verts. Je crois que le camarade Meyer s'est laissé aller. Parce que D. Voynet représente la tentative, et la meilleure de tous les ministres de l'environnement, d'ancrer l'environnement dans la politique gouvernementale. Et je crois que c'est assez neuf de dire que l'environnement ce n'est pas seulement la défense de la nature – c'est cela ! –, mais l'environnement c'est l'aménagement du territoire, donc c'est une nouvelle conception de l'organisation de la société. Et c'est vrai, je trouve qu'elle fait cela très bien. Ce n'est pas facile d'être ministre de l'environnement dans un cadre politique qui accepte souvent la politique de l'environnement, l'écologie politique à contrecoeur. C'est un rapport de forces difficile. »
J.-L. Hess : Mais le bon choix, c'est le parti politique ou c'est le mouvement social ?
– « On ne peut pas faire de politique aujourd'hui sans être ancré dans des structures politiques. Il faut un mouvement social. Et là, on peut discuter : est-ce que le mouvement écologique est encore capable d'être un mouvement social ? Vrai débat. Mais s'il n'y a pas de parti politique on est cannibalisé par les partis politiques existants. »'
J.-L. Hess : Dites-nous la vérité : Êtes-vous satisfait ou très peiné de voir autant de gens vous détester ouvertement et cordialement ? Je ne pense pas à certains chasseurs ou à certains militants de la CGT – comme on a pu le voir à La Hague quand vous avez rendu visite à l'usine de retraitement –, je pense à certains ministres. Par exemple, on entend des choses, et je ne sais pas si vraiment il faut en prendre toute la portée telle qu'elle, s'il faut y voir de la xénophobie – certains s'en défendent –, mais est-ce qu'au fond il n'y a pas une petite satisfaction à sentir qu'on dérange autant dans un paysage politique comme P. Meyer l'a décrit ?
– « Je crois que P. Meyer avait raison là-dessus : je déteste être détesté, et c'est vrai que j'aime être aimé. Et je ne comprends pas. On peut dire qu'on n'est pas d'accord avec moi, on peut dire que les idées que je défends sur l'écologie, sur la politique, sur l'Europe sont des idées du passé, ou sans avenir, ou naïves. Mais cette hargne personnelle et individuelle : non, cela ne me plaît pas du tout. Et je ne dis pas : "Je suis dangereux c'est pour cela qu'ils me détestent – ou qu'ils font semblant." Non, je crois que, pour la démocratie, c'est un danger. On fait semblant d'avoir des débats politiques alors qu'on essaye d'assassiner quelqu'un. »
S. Paoli: Justement où est le débat d'idées ? On est à même pas six mois des européennes, où est le débat d'idées sur les enjeux européens : « Dans quelle Europe allons-nous vivre ? », « Qu'est-ce qu'on va partager ensemble ? »
– « Je crois que, grâce au Parlement européen, et grâce à la crise européenne, on est obligé d'entrer dans des propositions pour l'Europe. J'ai essayé de le dire : "Arrêtons de faire un débat franco-français." "Ne faisons pas un débat germano-allemand sur les élections européennes, mais proposons quelque chose pour l'Europe.
Maintenant, il faut le dire. Quelle va être la cohésion européenne dans trois ou quatre ans ? Comment arriver à une cohésion européenne ? Comment mettre l'Europe en mouvement ? Comment se mettre en mouvement pour l'Europe ? C'est-à-dire : Quel futur institutionnel à l'Europe ? Qu'est-ce que c'est que l'Europe sociale ? Est-ce qu'on est pour un Smic européen ? Si oui, comment y arriver ? Alors on va dire : « C'est impossible ! » En 1945, en France, il y avait des salaires départementaux, et après il y avait des zones d'abattement. Le Smic national, quand est-ce qu'on l'a eu ? En 1968 ! Donc de 1945 à 1968, il n'y avait pas de Smic... »
S. Paoli : Comment cela se fait qu'on n'ait pas entendu quelqu'un comme vous au moment où la BNP lance son offre publique d'échange et où, personne, dans le Gouvernement français et même en Europe, ne réagit. Au fond, qu'est-ce qu'il reste de la social-démocratie européenne en face de l'économie de marché ? On ne vous a pas entendus là-dessus.
– « Vraiment, vraiment, d'accord, c'est toujours facile de... »
S. Paoli : Ce n'est pas un petit débat.
– « D'accord, on fait un pacte : vous mettez un micro de France Inter en permanence à côté de moi, et comme cela vous m'entendez... Vous avez tout à fait raison quand vous dites : il y a la BNP, il y a le problème d'Alcatel qui fait des bénéfices de 15 milliards et qui va réduire le nombre de salariés de 12 000. À quand la régulation de l'économie de marché ? Vous avez raison. Et je crois que la masse critique, pour imposer une régulation positive et sociale, c'est justement l'Europe face à un marché se mondialisant.
Donc, il faut inventer de nouvelles règles. C'est une chose. Et puis, il y a une autre économie. Quand on dit : "On a une économie plurielle", "on a plusieurs marchés", est-ce qu'on ne peut pas avoir aussi une manière de vivre, de travailler autrement –- tout ce qu'on appelle l'économie solidaire, l'économie sociale – ; c'est-à-dire de trouver des emplois de proximité qui permettent aux gens, de satisfaire des besoins, et en même temps de vivre et de travailler autrement ? C'est ce que nous défendons. Voilà un objectif qui peut être un objectif européen, parce que ce genre d'initiatives existe en France, en Allemagne, en Italie, en Angleterre. Faisons un bilan de cette nouvelle économie. »
P. Le Marc : Est-ce que vous avez le sentiment de faire campagne dans le cadre d'une solidarité gouvernementale et avec la majorité, ou êtes-vous totalement libre ? Est-ce que vous êtes un électron libre, ou bien vous avez un « fil à la patte », comme le disent Laguiller et Krivine ?
– « C'est complètement idiot. Laguiller et Krivine ont un boulet à la patte qui s'appelle la révolution. Qu'ils arrêtent de me casser les pieds ! »
P. Le Marc : Vous avez peut-être le vôtre ?
– « Oui, d'accord, j'ai le mien ! Je n'ai pas un fil à la patte, je veux une majorité plurielle, je veux une nouvelle majorité au Parlement européen pour faire une autre politique. C'est cela le problème pour imposer quelque chose, même au Conseil, à la Commission, il faut qu'on ait une majorité, il faut qu'on définisse les cadres... »
P. Le Marc : Mais est-ce que vous n'avez pas un devoir de réserve dans cette campagne à l'égard du Gouvernement et à l'égard de Jospin ?
– « Je ne sais pas ce que c'est, le droit de réserve. »
P. Le Marc : Est-ce qu'il n'y a pas un code de bonne conduite ?
– « C'est autre chose. Un code de bonne conduite, c'est de dire : Il y a un combat d'idées. J'ai des concurrents à l'intérieur de la majorité plurielle. Il y a des concurrents politiques, on veut faire des scores, donc il faut avoir des voix. Donc on est concurrent, on est concurrent ami dans une même majorité. Et puis, il y a, d'un autre côté, des adversaires politiques, c'est la droite. Et il y a des ennemis, c'est l'extrême droite. Et puis, il y a d'anciens copains qui sont à côté de la plaque, c'est l'extrême gauche. »
J.-L. Hees : On ne vous l'a jamais faite cette comparaison ? (Ndlr : À propos de la déclaration du RPR, E. Raoult, ancien ministre de la Ville, sur D. Cohn-Bendit, qu'il qualifie de « Johnny Halliday de la vie politique sans Stade de France » )
– « C'est joli, oui. J'étais... Bon, enfin bref. »
J.-L. Hees : Sur votre utilité politique, D. Cohn-Bendit ?
– « Mais, ce sont des élections européennes. Ma circonscription c'est la France. Et je veux être élu député européen, pour construire l'Europe. Et je crois qu'il y a une souveraineté politique européenne – on l'a vu ces derniers jours. Et enfin, qu'on arrête ! On peut faire de la politique pour l'Europe sans vouloir être maire de Montreuil ou d'Argenteuil ! On peut faire de la politique pour l'Europe sans vouloir être ministre ! Enfin, est-ce un titre de noblesse d'être député ! Député européen, voilà ce que je veux être, pour me battre pour la construction européenne. Donc, mon avenir c'est l'Europe, l'avenir de la France c'est l'Europe ! »
J.-L. Hees : Vous restez, pour beaucoup de gens encore, une sorte d'ovni – Objet Vert Non Intégrable – dans le paysage politique traditionnel français. On parle beaucoup de vous, en pour ou en contre, du coup on parle moins du programme des Verts. Est-ce que ça vous semble être un champ d'action politique très souhaitable et très sain, quand tout va sur votre personne ?
– « C'est un passage forcé apparemment, et lentement – quand on va commencer à parler de l'Europe – on va commencer à parler du programme des Verts, de notre programme, de mon programme, de, nos propositions. »
J.-L. Hees : Il faut apurer le passé, c'est ça ?
– « Mais, non ! C'est tout le charme de l'opération et la difficulté fait partie du paysage politique français, de l'histoire de France, d'un des grands mythes de l'histoire de France. Il n'y en a pas tellement, mais il y en pas mal. »
J.-L. Hees : De Gaulle et Cohn-Bendit, c'est ça que vous dites ?
– Non ! Il y a la guerre de 14, il y a la Résistance, et il y a Mai 68. Bon ! À partir du moment où quelqu'un de cette époque revient faire de la politique – pas que je revienne en France ! –, il est évident qu'il faut vider, essayer d'abord de vider l'abcès du mythe ; dire que c'est autre chose. Mais, il faut en passer par là. Donc, après la première période du romantisme mythique, on arrive maintenant à la réalité politique et aux propositions politiques. »
P. Le Marc : Le : Parlement européen est le grand vainqueur de la crise institutionnelle que l'on vit, en Europe. Mais n'y a-t-il, tout de même, pas besoin d'un sérieux ménage, aussi, de ce côté ? Je fais allusion là, au statut des élus et à l'absentéisme. Et pensez-vous que les Européens peuvent se satisfaire de cette démocratie-là ? Ne faut-il pas aller plus loin, trouver des procédures de participation plus directes, inventer – je ne sais pas – le référendum, ou l'élection des pouvoirs ?
– « Vous avez tout à fait raison. Premièrement, aujourd'hui, on a enfin compris qu'une démocratie se fait surtout, qu'elle est garantie par un parlement, c'est-à-dire par une élection au suffrage universel qui élit des députés qui contrôlent un exécutif. Et, aujourd'hui, tous ceux qui disent – comme M. Séguin par exemple – qu'il faut renforcer le Conseil européen, c'est justement ne pas renforcer la démocratie. Ce n'est pas le Conseil qui a critiqué l'exécutif, la Commission, mais c'est le Parlement.
Deuxièmement, vous avez raison, il faut que le Parlement européen soit capable de faire une commission d'enquête sur lui-même, sur sa gestion, sur le statut du député européen qu'il a proposé. C'est au Conseil, aujourd'hui. M. Chirac devra, à Berlin, décider oui ou non si on a un statut unique européen du député européen. Et un statut des assistants des députés, qui est un scandale aujourd'hui : les femmes, les frères, les épouses, je ne sais pas qui, employés par des députés ! C'est scandaleux ça ! Il faut aussi l'épurer, et donc une autocritique des députés. »
J.-L. Hees : Mais faut-il pas inventer une démocratie plus directe ?
– « Troisièmement : je suis pour une initiative de citoyen. Disons qu'il faut un million de signatures dans trois pays européens, sur un sujet ; et si on a ce million de signatures, cette initiative citoyenne doit être discutée au Parlement européen. Voilà, par exemple, une possibilité de créer l'espace politique européen. De plus, moi je suis à long terme pour l'élection au suffrage universel direct du président de la Commission. C'est un autre type d'élection, parce que faire passer un Italien, ou d'autres candidats, en Europe, il faut un an – non pas de campagne, mais d'explications – il faut, en fait, qu'on apprenne à connaître ce candidat. »
P. Le Marc : Étant élu par toutes les nations européennes, il aurait davantage de pouvoirs que les chefs d'État, alors ?
– « Non, il serait l'expression d'une volonté et d'un espace politique européens, dans le cadre de la souveraineté européenne. Pour cela, on a besoin d'une constitution européenne, c'est-à-dire de définir ce que sont les droits et les devoirs des citoyens européens – c'est la charte des droits fondamentaux – ; et d'une constitution expliquant l'espace politique européen en comparaison avec l'espace national ou l'espace régional, ou municipal. »
S. Paoli : Pour l'instant l'espace politique européen n'existe pas ? Au fond, ce qu'a créé l'euro, c'est une sorte de grande zone économique et au fond – puisque vous faites référence à l'histoire – n'est-on pas confronté au fait que l'on va choisir entre une sorte de zone de libre-échange – la version plutôt anglo-saxonne – ou une Europe politique avec un contexte aussi d'Europe sociale fort ? N'est-ce pas cela qui est vraiment l'enjeu ?
– « Non, moi je dis non à M. Barre ! J'ai entendu les propos de M. Barre, d'hier matin. Je dis simplement : aujourd'hui, nous avons besoin de définir l'espace économique européen qui n'est pas l'espace financier. La Banque centrale européenne c'est un espace financier, fédéraliste même, c'est un pilier de l'économie européenne, mais si on n'a pas l'espace économique, et si on ne crée pas la cohésion sociale de l'Europe, alors, effectivement, cet espace financier sera le seul pilier, il dominera l'économie. Ce qui met en danger la démocratie sociale dans nos pays ! Donc, il y a des différences économiques, il n'y a pas que des différences sociétales entre la droite et la gauche. La gauche, c'est l'organisation du marché ; c'est ne pas se laisser aller au marché ; c'est de ne pas subir le marché ; c'est d'essayer d'influencer le marché... »
S. Paoli : Mais que reste-t-il de la gauche ? Même R. Barre disait : « Il n'y a plus de social-démocratie en Europe – encore une fois, on ne gouverne pas contre les marchés – et ni Schröder, ni Blair, ni Jospin ne gouvernent contre les marchés. »
– « M. Paoli, puis-je vous faire quand même une remarque ? Je ne suis pas candidat sur la liste du PS, et j'ai des raisons pour cela. Je suis tête de liste des Verts, car, effectivement, nous voulons que la social-démocratie prenne conscience qu'on n'a pas le droit de se laisser aller au marché ; qu'on n'a pas le droit simplement de dire "Si Alcatel va supprimer 12 000 emplois, c'est comme ça !" On n'a pas le droit de dire : " S'il y a fusion des grandes banques, on va licencier 30 000 personnes, c'est comme ça !" Nous devons mettre un projet économique et social en avant : réduction du temps de travail en Europe, oui c'est possible ! 10 % du temps travaillé réellement en Europe, oui c'est possible ! Harmoniser la législation du travail en Europe, oui c'est possible ! Ceci, pour qu'il n'y ait pas de délocalisations sauvages. »
J.-L. Hees : C'est pour cela que vous parlez du « mensonge permanent du Parti socialiste à l'égard de l'Europe » ? Ce qui n'est pas très aimable au passage.
– « Le Parti socialiste a signé, avec le Mouvement des citoyens, un contrat pour les élections européennes où ils disent qu'ils sont contre l'abolition du vote à l'unanimité au Conseil. Ça veut dire que le Luxembourg pourra, avec son droit de veto – puisque c'est d'intérêt national – empêcher qu'on arrête les paradis fiscaux au Luxembourg. Je trouve ça scandaleux ! Il n'y a pas que l'intérêt de la France. Chaque pays, à l'unanimité, définit son intérêt et bloque l'évolution. Nous devons arriver à un vote démocratique, c'est-à-dire à un vote à une majorité qualifiée au Conseil, et que c'est mentir aux Français, ce n'est pas leur dire la vérité, que ne pas expliquer, qu'aujourd'hui, la démocratie européenne passe par une démocratisation des formes de décisions au Conseil, et par une parlementarisation de l'espace politique européen. C'est-à-dire par un renforcement du pouvoir démocratique du Parlement européen. »
P. Le Marc : La crise de la Commission pose le problème des institutions. Celle du Kosovo pose le problème de la défense européenne. Comment le libéral libertaire, que vous êtes, voit l'organisation de la défense européenne intégrée ?
J.-L. Hees : Ça vous va « libéral libertaire » ?
– « Pour Le Marc c'est une petite pique. »
P. Le Marc : Non, non pas du tout !
– « J'ai entendu ses commentaires je les connais. »'
P. Le Marc : Avec nucléaire ou pas, défense populaire ou armée de métier ?
– « Premièrement, je suis pour une armée de métier. Je suis pour un service social des jeunes européens, pour la cohésion sociale. L'armée de métier, parce je ne crois pas qu'aujourd'hui la défense populaire soit quelque chose qui soit vraiment réel. Si nous devons intervenir au Kosovo, ce n'est pas une armée populaire qui va intervenir mais une armée de métier. Et j'ai vu, je vois, pour la première fois de ma vie, de très près, un ministre des affaires étrangères, que je connais très bien, qui doit décider de la guerre ou de la paix. Ça fait peur. On dit : mais pourquoi ils repoussent toujours ? C'est vrai. Prendre la décision de bombarder, prendre la décision, peut-être, d'intervenir militairement au Kosovo, pour sauver des vies humaines, c'est juste et en même temps, c'est d'envoyer des gens à la guerre ! Pour la première fois, on hésite, on dit : on va encore tenter une médiation politique. C'est vrai que Milosevic joue avec nous ; il joue avec notre peur séculaire de la guerre. Moi j'aime mieux des hommes politiques qui ont peur de la guerre mais qui, à un moment, décident qu'il faut intervenir que des hommes politiques qui admirent la guerre et qui décident de bombarder n'importe quoi et n'importe quand, et n'importe où. »
P. Le Marc : Une Europe sans armes nucléaires ?
– « À la longue, oui. »
P. Le Marc : « À la longue... »
– « À la longue. Écoutez, au Kosovo, les armes nucléaires, le Charles-de-Gaulle il nous aide à quoi pour intervenir au Kosovo ! »
J.-L. Hees : Il n'est pas en activité.
– « Même si on arrivait à ramer pour le faire avancer – si on s'y mettait tous, Le Marc et moi, parce qu'on s'aime bien, on va ramer ensemble le Charles de Gaulle – ça ne change rien. Il faut arrêter ! L'arme nucléaire c'était l'époque de la Guerre froide. Aujourd'hui, nous ne sommes plus à cette époque. L'indépendance de la France passe par l'Indépendance de l'Europe. »
S. Paoli : La négociation à Paris, et les missiles à Washington ?
– « Mais les missiles pour aller où ? »
S. Paoli : Au Kosovo ! Qu'est-ce qu'on dit, ce matin, là ? Écoutez un peu nos journaux, on a parlé que de ça : négociation à Paris et missiles à Washington.
– « Mais, enfin arrêtez ! Arrêtez ! Le problème de Mme Albright c'est qu'elle dit : "bombing, bombing, bombing !" Et alors et après ? ?bombing, bombing, bombing !? en Irak. Et après ? S. Hussein dit : "Thank you ! Continue. Moi mon pouvoir se trouve renforcé. " “Thank you ! Continue. Moi mon pouvoir se trouve renforcé." Est-ce que, oui ou non, on veut, premièrement : .une véritable autonomie et un espace de liberté et de paix pour les Kosovars ? Eh bien ce n'est pas "bombing", c'est d'envoyer des soldats qui protègent les Kosovars pour qu'il n'y ait pas une lutte armée permanente entre l'UCK et l'armée serbe, pour qu'il n'y ait plus de pillage des Serbes. Mais ce n'est pas "bombing, bombing, bombing, bombing !" Parce qu'ils ne vont pas "bombing, bombing, bombing" 24 heures sur 24 jusqu'à la fin de l'année ! »
S. Paoli : Et quand l'Europe dira-t-elle à Washington : « No bombing ? »
– « L'Europe l'a dit ! »
S. Paoli : La preuve c'est qu'on continue ce matin. On entend « bombing », encore ce matin ! Donc l'Europe n'a pas été entendue ?
– « Écoutez, l'espace politique européen, quand nous aurons une vraie structure européenne, où nous dirons : nous sommes capables d'intervenir seuls, nous devons devenir capables d'intervenir seuls ! Mais il faut, avant, faire autre chose aussi. Il faut un corps civil de paix ; il faut avoir une politique de prévention des conflits, d'intervenir en amont. On aurait pu, il y a huit ans, intervenir autrement au Kosovo, en soutenant Rugovar qui était une résistance pacifique, une résistance sans armes ! On ne l'a pas soutenu. On n'avait pas cette force d'intervention civile. Aujourd'hui on est obligé de faire la guerre. Quand on n'arrive pas à faire la paix, d'intervenir civilement, cinq ans après, on est obligé de faire la guerre. Ça, il faut le dire aussi. Donc, il nous faut une politique étrangère européenne, civile de paix, et si nécessaire, d'intervention militaire européenne. On ne doit plus dépendre simplement des Américains pour faire la paix, et pour avoir un projet de civilisation. »