Déclaration de M. Philippe Séguin, président du RPR, sur la charte de l'union de l'opposition pour les élections européennes, Paris le 18 mars 1999 (en annexe texte de la charte).

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Intervenant(s) : 

Circonstance : Présentation de la charte européenne commune du RPR et de Démocratie libérale, à la brasserie "L'Européen" à Paris le 18 mars 1999

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,


Le lieu de notre rencontre est symbolique par son nom. Mais il exprime aussi deux valeurs que nous entendons voir présider à notre campagne : la simplicité il et la convivialité.

Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation. Alain Madelin et moi-même sommes en tout cas, heureux de vous présenter aujourd'hui, la plate-forme de la liste d'union de l'opposition que nous conduirons aux élections européennes du 13 juin prochain.

A un peu moins de trois mois du scrutin, il nous a semblé en effet que le moment était venu de faire connaître les grandes lignes de notre projet européen, et de les soumettre au débat.

Là est, à nos yeux, l'essentiel. Le moment ne viendra qu'ensuite, de procéder à la composition de notre liste. Vous conviendrez que nous sommes ainsi logiques avec nous-mêmes : nous, avons toujours dit que les problèmes de fond devaient être traités avant les questions de personnes. Par ailleurs, chaque candidat saura ainsi par avance sur quelles bases il doit s'engager.

Ce projet, nous l'avons voulu le plus concret possible. Qu'on n'attende pas de nous de savants exposés philosophiques sur le fédéralisme ou le souverainisme. Ce n'est pas le sujet de cette élection que de trancher la nature juridique de l'Europe à construire, même à supposer que ce débat-là ait encore une actualité. Notre intention, en tout cas, n'a jamais été de nous perdre en conjectures sur l'Europe idéale.

Notre propos était de définir l'esprit et les modalités d'un programme de législature au Parlement européen.

C'est ce à quoi nous sommes parvenus, sans difficulté particulière, avec nos amis de Démocratie Libérale. Je tiens à cet égard à remercier le groupe de travail, constitué Pierre Lellouche et Jean-Claude Pasty d'une part, Pierre Lequiller et Laurent Dominati de l'autre, qui a largement contribué à cet exercice de rédaction.

Nous conservons, les uns et les autres, nos sensibilités, nos spécificités. Nous n'avons pas, par exemple, exactement les mêmes vues sur l'évolution des services publics ou sur le rôle de l'Etat dans l'économie. Non seulement ces différences ne nous gênent pas mais nous les assumons et, même, nous les revendiquons. Elles ne nous ont pas empêché, par le passé, d'élaborer un programme commun de gouvernement. Il nous a semblé, de même qu'elles n'étaient pas de nature à nous empêcher d'élaborer un programme de législature européen.

Le texte que nous avons élaboré n'est donc pas théorique. Il se veut simple, lisible et pragmatique. Il comporte dix engagements forts qui nous lient pour les cinq ans à venir.

Je ne vous en donnerai pas, dans ce propos liminaire, le détail. Sans doute aurons-nous l'occasion d'y revenir dans quelques instants lors des questions que vous ne manquerez pas de poser.

Qu'il me soit permis toutefois de souligner que les choix de la liste d'union reposent sur quelques idées forces :

Le problème n'est plus, selon nous, de savoir si l'on est pour ou contre l'Europe. Il est de déterminer quel projet politique nous voulons assigner à la construction européenne.

Nous entendons substituer une démarche résolument politique aux habitudes technocratiques ou strictement gestionnaires. Ce qui signifie réaliser la grande Europe et adapter nos institutions en conséquence, donner à l'union les moyens d'assurer sa sécurité extérieure, d'exister sur la scène internationale, de promouvoir d'un modèle de société qui lui soit propre. Autant de domaines sur lesquels notre programme apporte des propositions novatrices.

Puisque l'alternative n'est plus d'accepter l'Europe telle quelle ou de la refuser par principe, la véritable confrontation va opposer ceux qui veulent un super-Etat dont tout indique qu'il sera omnipotent, et inefficace et ceux qui attendent de l'Europe qu'elle libère les énergies des peuples qui la composent ; ceux qui ne peuvent concevoir l'Europe hors de l'uniformité, de la taxation et de la réglementation et ceux qui voient en elle le moyen de protéger les diversités nationales, de concilier liberté individuelle et solidarité sociale, de favoriser la responsabilité personnelle.

Dans cette élection, nos seuls véritables adversaires sont donc les Socialistes et leurs alliés. On pourra aisément le vérifier en confrontant nos propositions et les leurs.

Aussi, notre plate-forme contient-elle des orientations :

- pour garantir à tous les européens le respect de leur droit fondamental à la sécurité ;
- pour permettre aux forces vives de bénéficier des atouts potentiels que peut receler la monnaie unique ;
- pour faire de l'Europe une véritable zone de croissance et d'emplois ;
- pour assurer aux peuples de l'Union l'égalité des chances devant le travail ;
- pour donner aux générations futures la possibilité de vivre dans un espace de prospérité et de civilisation ;
- pour faire de l'Union Européenne un terrain supplémentaire de l'exercice des droits individuels.

En comparant nos propositions et celles du manifeste des socialistes européens, on verra que le clivage entre la gauche et nous n'est ni artificiel ni factice, ni dicté par de médiocres considérations de politique politicienne. Mais qu'il correspond tout simplement à une réalité incontournable. A partir du moment où l'Europe est dans tout, il est clair que problèmes nationaux et problèmes européens sont indissolublement liés. Et que les oppositions qui se font jour au niveau national ont vocation à se transposer à l'échelle européenne. Ce scrutin nous paraît donc important pour la vie du pays. Notre ambition est de le transformer en un vrai rendez-vous démocratique, à la hauteur des enjeux posés, et non de reprendre sans cesse les mêmes débats.

Pour défendre et incarner les choix que nous proposons aux Français, nous constituerons une liste que nous vous présenterons dans les semaines à venir. Ce sera une véritable équipe de France pour la coupe d'Europe. Cette équipe, nous la voulons offensive, séduisante, généreuse, et dotée d'une bonne technique…

Cette équipe, nous la voulons apte à jouer collectif, à saisir toutes ses chances, en un mot apte à gagner. Nous voulons donc que les électeurs soient nombreux à se reconnaître en elle, et qu'ils aient envie de la soutenir.

Avec nos amis de D.L., nous allons procéder à une sélection en conséquence. Les élections européennes ne sont ni une session de repêchage ni une distinction honorifique pour services rendus.

Le Parlement Européen n'est pas une sinécure. Nos candidats et nos candidates seront choisis en fonction de leur capacité à promouvoir à Strasbourg nos idées, et à les défendre devant les électeurs, pendant la campagne électorale et après.

Pour atteindre ces objectifs, la composition de la liste obéira à plusieurs impératifs : - Celui de la parité entre les hommes et les femmes : pour mémoire, je vous rappellerai que la liste de l'opposition en 1994 comptait à peine un peu plus de 20 % de femmes - très exactement 19 femmes sur 87 candidats. Notre objectif est aujourd'hui d'aboutir à. une parité totale. II y aura donc plus de 40 femmes sur notre liste, ce qui correspond pour être tout à fait précis à une augmentation supérieure à l00 % ! Ne voyez pas dans cette « comptabilité » la réponse à un simple effet de mode mais la prise en compte de l'évolution de notre société et notre conviction que la participation active de nombreuses femmes constituera un atout pour répondre aux préoccupations concrètes et quotidiennes de nos compatriotes.

- Celui de la parité entre le R.P.R. d'une part, Démocratie Libérale, la société civile, et ceux et celles qui sont favorables à l'union de l'opposition républicaine, d'autre part.

- Troisième parité, celle que nous recherchons entre le renouvellement et l'expérience. Il s'agit, en même temps, de profiter du maximum de compétences acquises au Parlement Européen, et de promouvoir une nouvelle génération d'élus. C'est probablement le seul avantage de la représentation proportionnelle que de permettre d'imposer en effort de renouvellement - au même titre que l'effort de féminisation. Autant donc en profiter.

- Quatrième et ultime parité : la parité régionale. J'entends par là que nous souhaitons assurer une juste représentation de toutes les régions françaises, sans léser les petites et moyennes qui doivent pouvoir faire valoir leurs intérêts dans les enceintes communautaires. Je ne méconnais pas le poids, le rôle et l'importance de la région capitale, mais j'entends veiller avec une attention toute particulière à ce que l'ensemble des régions puisse être représenté.

Ainsi constituée, notre liste sera une liste d'union sincère, authentique, tournée vers la reconquête. Car, n'en doutez pas, nous sommes rassemblés autour du soutien à la politique européenne du Président de la République que nous approuvons sans réserve ni restriction. Comme lui, nous renvoyons dos à dos les adversaires d'une Europe nécessaire et ceux qui n'ont pas compris que le réalisme et le pragmatisme étaient la meilleure manière de la servir.

Comme lui nous sommes attachés au fait national, socle de la construction européenne. Et nous partageons enfin sa détermination à mieux associer les peuples au processus d'édification de l'Europe et à son fonctionnement quotidien.

Nous mènerons campagne sur la base de ces principes dans un esprit d'union de l'opposition.

Certains n'ont pas voulu de cette union parce qu'ils veulent transformer le scrutin du 13 juin en un référendum sur un traité déjà ratifié. Et il ne leur déplairait pas de manifester à cette occasion leur opposition au Chef de l'Etat, en ralliant à leur cause, si j'ai bien compris, des représentants de la gauche et la droite. Je ne vois pas ce qui peut sortir de constructif, pour l'opposition et pour la France, d'une telle confusion. En adoptant la position que l'on sait, M. Chevènement a donné, en la matière, une leçon de réalisme qui mériterait d'être méditée. Quant aux autres, on se perdrait en conjecture sur les raisons qui les ont poussés à faire bande à part, si on n'avait pas mieux à faire. Nous serons fidèles à notre ligne de conduite qui consiste à ne pas polémiquer, quitte à sembler ennuyeux… Tant il est vrai qu'il est plus facile de plaire à bon compte avec des propos cruels que d'intéresser avec des développements substantiels.

Une fois encore, notre ambition n'est pas de faire une campagne à destination du microcosme. Nous voulons que les Français s'approprient le débat européen, qu'ils ne le considèrent plus comme un phénomène qui ne les concernent pas, sachant qu'il n'est pas un domaine d'activité qui ne soit concerné peu ou prou, directement ou indirectement, par l'intervention de l'Union Européenne. Notre liste sera en conséquence une liste alternative aux propositions socialistes pour l'Europe, qui sont la reproduction des recettes socialistes pour la France, et mènent aux mêmes impasses.

Nous mènerons une campagne active. Une campagne de proximité. Une campagne pédagogique. Une campagne sérieuse. Autant vous dire qu'elle ne sera pas limitée aux émissions de radio et de télévision ou à de grandes réunions publiques.

Alain Madelin et moi-même tiendrons environ six grands meetings communs. Nous participerons par ailleurs, séparément, à des réunions publiques dans toutes les régions de France, afin de démultiplier l'effort de persuasion et de conviction qu'il y a à accomplir.

En outre, j'entends aller à la rencontre des Français, dialoguer avec eux sur les problèmes concrets que pose la construction européenne. Aussi effectuerai-je de nombreux déplacements à l'image de ce que j'ai déjà réalisé dans le Cher à Blancafort pour parler de l'Euro ou à Nîmes pour évoquer le maintien des traditions locales dans l'Europe en construction. Dès demain, je me rendrai au Croisic pour évoquer l'Europe de la pêche.


Mesdames et Messieurs,

Voilà ce que, pour ma part, je voulais en préambule brièvement vous dire.

C'est maintenant à Alain Madelin de s'exprimer.

Je vous remercie de votre attention.


Charte Européenne pour l'union présentée par le RPR et Démocratie Libérale le 18 mars 1999

Le Rassemblement pour la République et Démocratie Libérale ont décidé de constituer ensemble une liste d'Union de l'Opposition aux prochaines élections européennes sur la base d'un contrat de législature au Parlement européen.

Nous le faisons avec la conviction que cette union est la bonne réponse à l'enjeu des élections européennes.

Nous le faisons parce que nous partageons sur l'essentiel une même vision de ce que doit être le rôle de la France dans la construction européenne et l'action des parlementaires français dans les cinq ans qui viennent.

Pour affirmer la continuité de l'engagement européen de la France dans la pleine acceptation du Traité de Rome, de l'Acte Unique, du Traité de Maastricht et du Traité d'Amsterdam.

Pour exprimer un engagement fort en direction de la construction européenne. Une Europe des libertés, conciliant initiative individuelle et solidarité, capable de défendre de façon autonome ses intérêts face au reste du monde.

Pour réussir l'élargissement de l'union européenne et faire aboutir au plus tôt les modifications institutionnelles nécessaires à cet élargissement.
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Nous sommes convaincus que l'enjeu des élections européennes du 13 juin 1999 n'est pas dans la poursuite d'un débat archaïque entre partisans des Etats-Unis d'Europe et partisans d'un nationalisme étriqué entre « pro » et « anti-européens ». Ce débat n'a plus lieu d'être. L'Europe unie des états voulue par le Président de la République s'impose naturellement dans une construction originale.

Dans leur lettre commune du 9 juin 1998, le Président de la République française, Jacques Chirac, et le Chancelier fédéral allemand, Helmut Kohl, en ont défini l'ambition : " l'objectif de la politique européenne n'a jamais été et ne peut être d'édifier un Etat central européen, c'est-à-dire une Europe organisée de manière centralisée. Tous nos efforts doivent plutôt viser à créer une Union, européenne forte et capable d'agir, tout en préservant la diversité des traditions politiques, culturelles et régionales ".

Le véritable enjeu des élections européennes, c'est le choix entre une Europe des libertés et une Europe socialiste.

Si les socialistes et les sociaux-démocrates devaient dominer l'ensemble des institutions européennes - Conseil européen, Commission de Bruxelles et Parlement de Strasbourg - il existerait alors un vrai risque de voir l'Europe mise au service d'une politique socialiste, de voir les dépenses publiques augmenter, les réglementations européennes se multiplier, et de se créer un impôt européen.

C'est pourquoi dans cette élection européenne, enjeu national et enjeu européen sont étroitement liés.

La présente Charte pour l'Europe constitue le contrat de législature de notre liste d'Union de l'Opposition autour de dix objectifs communs.

Elle est le reflet à la fois de la volonté de défendre les intérêts de la France en Europe et d'une forte ambition européenne pour le France.

L'Europe est aujourd'hui l'espace naturel où se dessine notre avenir.

La nouvelle Europe du nouveau siècle porte l'espoir d'une société plus humaine, plus harmonieuse, plus respectueuse de la liberté et de la dignité des personnes, plus soucieuse de l'homme et de son environnement.

Cette Europe-là, cette nouvelle Europe, peut être un bel espoir pour la jeunesse.

C'est cet espoir que nous entendons faire vivre dans notre engagement commun pour l'Europe.

1. Affirmer la continuité de l'engagement européen de la France

2. Réussir l'élargissement de l'Europe

3. Donner à l’Europe une défense commune pour assurer la paix

4. Assurer la sécurité à l'intérieur des frontières de l'Union

5. Tirer tous les bénéfices du marché unique et de l'Euro

6. Donner une ambition sociale à l'Europe

7. Développer les politiques communes qui vont façonner l'Europe du 21ème siècle

8. Renforcer l'union politique de l'Europe

9. Mieux contrôler les institutions européennes

10. Refuser l'Europe socialiste