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Paris Match : Vous êtes deuxième sur la liste Fabius en Haute-Normandie. Les sondages en font l'une des deux régions susceptibles de basculer à gauche. Vous y croyez ?
Frédérique Bredin : Il y a une forte chance que cela arrive. Pour deux bonnes raisons. La Haute-Normandie est une des régions où la droite a déjà fait alliance avec le Front national en lui offrant une vice-présidence. Beaucoup d'élus jugent cette idéologie insupportable. Résultat : aucune décision n'est prise. La région est paralysée depuis six ans. De plus, la droite est désunie. L'ex maire de Fécamp, mon prédécesseur, présente une liste dissidente.
Paris Match : Le Pen est au centre de cette campagne. S'il vous demande de lui prêter une salle, accepterez-vous ?
Frédérique Bredin : Je ne pourrais plus me regarder dans la glace si je contribuais le moins du monde à servir ses thèses. Il n'est pas question que je lui prête la salle du théâtre municipal. Chacun doit prendre ses responsabilités. Le Pen est un danger pour la démocratie. Il a fait suffisamment de déclarations pour que chacun sache qui est ce personnage, quelles sont ses thèses racistes et antisémites. Cela dit, rien ne l'empêche de louer une salle privée.
Paris Match : À 35 ans, vous êtes le plus jeune ministre du Gouvernement. Comprenez-vous tous ces jeunes qui ont ras-le-bol de la politique et sont déçus d'un Président de la République qu'ils jugent vieillissant ?
Frédérique Bredin : C'est tout le contraire. Je comprends, moi, que le Président de la République soit déçu. Quand j'ai la chance de discuter avec lui, je suis face à un personnage plus combatif que tous les socialistes réunis. Je comprends que le Président soit fatigué de ces socialistes qui se martyrisent eux-mêmes. Leur masochisme fait peine à voir. Je suis fier d'être dans un gouvernement, fier d'être au côté du Président de la République. Nous n'avons à rougir ni du passé ni de ce que nous avons l'intention de faire à l'avenir. Comme disent les jeunes, il faut avoir la pêche.
Paris Match : Avoir la pêche, c'est proposer quels projets flamboyants aux électeurs normands ?
Frédérique Bredin : C'est traiter les problèmes de formation et d'éducation : rien n'a été fait. C'est s'occuper de l'environnement : en Haute-Normandie, la situation est catastrophique. La droite y consacre 0,5 % d'un budget annuel de 2 milliards, contre 5 % en moyenne ailleurs. Résultat : 60 industries sont sur des sites à risques.
Paris Match : L'écologie est devenue le mot magique. Seriez-vous prête à créer un courant écolo au sein du PS ?
Frédérique Bredin : Je me suis suffisamment battue contre les courants pour ne pas en créer un de plus. Je suis pour signer un accord de gouvernement avec les écologistes. Pas ceux d'Antoine Waechter, qui veulent rester un groupe de pression marginal, mais avec Brice Lalonde, qui est prêt à prendre ses responsabilités. Je m'entends bien avec lui. C'est aussi une question de génération.
Paris Match : Les Jeux olympiques ont été une réussite pour l'image de la France. Êtes-vous inquiète du dépassement de devis, qui, selon certains, atteindrait des sommes géantes ?
Frédérique Bredin : Je ne suis pas du tout inquiète. Les Jeux ont été une réussite, et les recettes d'entrées aussi. Le déficit se situera entre 200 et 300 millions, soit entre 3 et 7 % d'un budget total de 4 milliards. C'est très peu. Et puis, pour faire les comptes définitifs, il faudra attendre les années suivantes, voir notamment à quelle hauteur les recettes touristiques paieront ces investissements.
Paris Match : Si vous aviez un message à délivrer aux jeunes, quel serait-il ?
Frédérique Bredin : Faites-nous confiance. La politique, ce n'est pas les affaires. C'est la générosité et l'égalité des chances.