Articles de M. Alain Deleu, président, et Jacques Voisin, secrétaire général de la CFTC, dans "La Vie à défendre" de novembre et dans "La Lettre confédérale" du 17 novembre, et lettre commune, parue dans "La lettre confédérale" du 26 novembre 1997, sur les élections prud'homales.

Prononcé le 1er novembre 1997

Intervenant(s) : 

Circonstance : Elections prud'homales du 10 décembre 1997

Média : La Lettre confédérale CFTC

Texte intégral

La Vie à défendre - novembre 1997

L’éditorial de M. Alain Deleu

Multiplions les voix CFTC aux prud’hommes !

Nous y sommes. Le rendez-vous des élections prud’homales est arrivé. C’est le grand rendez-vous des militants CFTC, qui verront comment leurs efforts sont reconnus par les salariés et les chômeurs. Une fois tous les cinq ans, l’ensemble des salariés du secteur privé et des entreprises publiques est appelé à choisir ceux qui jugeront les litiges individuels du travail. Et les employeurs font de même.

Nous l’avons déjà dit, l’enjeu est considérable. D’abord le taux de participation est essentiel. Une abstention forte exposerait l’institution prud’homale aux attaques de ceux qui n’ont jamais accepté que la justice du travail soit paritaire. C’est donc une question de dignité des travailleurs. Il en est de même pour choisir des juges compétents, qui ne soient pas des partisans. Et la CFTC n’a pas à rougir de ses conseillers du salarié, de ses conseillers et de ses défenseurs prud’homaux. Leur disponibilité et leur compétence sont réputées et le « bouche à oreille » est notre premier promoteur.

La CFTC a joué un rôle décisif dans l’amélioration substantielle du droit du licenciement et des prud’hommes. Qu’on se souvienne de la généralisation de l’entretien préalable à tout licenciement et de la création des conseillers du salarié, qui l’assistent lors de cet entretien. Qu’on pense à son rôle dans les conventions de conversion et à leur extension, à la révision des règles du jugement prud’homal, afin que le doute profite au salarié.

Vous pouvez être fiers de la CFTC dans ces domaines si sensibles de l’action syndicale.

Mais cette élection est aussi l’occasion de mesurer l’audience des confédérations syndicales. Ce test d’audience est le plus important depuis que les élections à la Sécurité sociale ont été abandonnées (avec l’accord de plusieurs confédérations). Notre représentativité n’est pas en cause, mais notre audience en dépendra fortement pendant cinq ans. Il ne doit donc pas manquer une voix à la CFTC le 10 décembre. À chacun de vous de se dire maintenant, comme chaque responsable CFTC se l’est dit au début de cette campagne : « Je ne serais pas le maillon faible de la chaîne de l’action CFTC ». Chaque adhérent a le devoir de se rendre aux urnes s’il n’a pas accompli les formalités pour voter par correspondance. Cela va sans dire, cela va encore mieux en se le rappelant.

Nous connaissons certainement autour de nous des salariés indécis, ou qui risquent tout simplement d’oublier d’aller voter. Beaucoup de salariés à temps partiel n’iront pas au travail un mercredi. Bien des jeunes en emplois à durée déterminée, des employées de maison, à horaire très partiel, et combien de chômeurs, ne penseront peut-être pas que ces élections les concernent. À nous de motiver, de convaincre, de faire valoir la CFTC et ses candidats.

Nous vous proposons un objectif simple et réaliste : que chaque électeur de « La Vie à défendre » décide autour de lui cinq personnes à aller voter CFTC. Nul doute que si chacun accepte de relever ce défi, l’objectif des 10 % des voix aux prud’homales sera atteint.

Car la compétition sera serrée. La médiatisation de l’information sociale met toujours en « tête de gondole » les mêmes deux ou trois produits. Des listes d’origine plus ou moins certaines voudront se parer des atours de la nouveauté. Mais que livreront-elles au bout du compte de positif pour un syndicalisme réellement nouveau et libre ?

Le conflit des routiers, début novembre, a montré l’intérêt du syndicalisme qui va au bout de la négociation sans chercher à provoquer le conflit, mais qui garde aussi jusqu’au bout la préoccupation des intérêts réels des salariés et qui sait dire la vérité, sans compromission. Ce n’est pas la voie la plus facile, mais c’est celle de la responsabilité et du respect des travailleurs.

Chers amis, nous vivons une période très importante pour l’avenir de la CFTC. Après plus de dix ans passés à batailler le dos au mur, la réduction du temps de travail pour l’emploi est un enjeu exceptionnel pour notre syndicalisme. Avec les conclusions de la conférence pour l’emploi, les salaires et le temps de travail, s’ouvre un champ historique de négociation. Alors, chers amis, pour les prud’hommes et pour l’emploi, comme l’aurait dit notre regretté Jean Bomard, « Haut les cœurs ! ».

 

Le mot du secrétaire général, M. Jacques Voisin

Au vif du sujet

La campagne pour les élections prud’homales bat son plein. Les organisations syndicales occupent le terrain. Chacun y va de son slogan invitant les salariés, les chômeurs au meilleur des choix.

Une question simple paraît avant tout se poser : quelle justice du travail voulons-nous ?

La réponse appartient à chaque électeur. Elle induira son vote pour la confédération syndicale la plus à même de prendre en compte ses choix.

À cette occasion, la CFTC fait largement connaître ses propositions et ses options, tant sur sa conception de la justice prud’homale que sur tous les sujets qui concernent le monde du travail.

Autant alors aborder l’un des aspects qui n’est que méthode, mais va au vif du sujet. Dans les esprits, conseil de prud’hommes rime habituellement avec licenciement et pour cause ! Ce n’est malheureusement pas l’actualité qui le contredira. Cette actualité qui concentre l’activité prud’homale sur la rupture du contrat de travail, les contrats précaires… Prud’hommes rime aussi avec tribunal et juge. On se dit qu’il est l’ultime recours pour faire valoir son bon droit. Mais on connaît la crainte des salariés aux réactions, voire les représailles, à la seule évocation du mot. Peut-il en être autrement ? La CFTC pose la question.

Que le conseil de prud’hommes soit le recours face aux licenciements, il le faut. Qu’il soit l’ultime recours, c’est nécessaire. Mais alors, l’action en prud’hommes intervient souvent trop tard, quand le mal est fait, même si le droit est dit.

C’est pourquoi la CFTC fait un certain nombre de propositions concrètes et cohérentes pour mieux encadrer les licenciements. Pour ceux de moins de 10 salariés, par exemple, en relation étroite avec le conseiller du salarié, et à l’issue de l’entretien préalable, la CFTC préconise une procédure de recours auprès de l’inspecteur du travail. Pour les licenciements de plus de 10 salariés, ou pour un plan social, les syndicats et les comités d’entreprise doivent avoir la possibilité d’intenter une action en référé devant le tribunal de grande instance.

Partout nous pouvons gagner en efficacité, et surtout prévenir, dans l’intérêt du salarié et pourquoi pas de l’entreprise.

La CFTC privilégie le dialogue, la concertation, la négociation, la médiation, l’engagement. Elle est d’ailleurs porteuse d’un avis au Conseil économique et social.

C’est bon pour le temps de travail et l’emploi, à l’exemple des engagements pris par la conférence sur les 35 heures. C’est bon pour les salaires, pour les conditions d’emploi, la formation, toute la protection sociale, la couverture chômage, le droit syndical, la représentation du personnel dans les entreprises… L’histoire est là pour en attester. C’est bon aussi pour les litiges, pour prévenir les conflits, anticiper les ruptures, parce qu’en définitive, c’est toujours la négociation, la réconciliation des intérêts, l’accord. Les routiers nous en font aujourd’hui l’éclatante démonstration.

C’est enfin bon pour les prud’hommes qui doivent toujours privilégier la conciliation.

Les prud’hommes fondent leurs missions sur les principes et les valeurs que la CFTC a toujours défendus. Ce n’est pas par hasard.

Ils s’appuient sur le paritarisme (salariés et employeurs au même niveau pour apprécier ensemble) et la connaissance qu’ont les juges, représentants des salariés et des employeurs, de la vie de l’entreprise. Les conseils de prud’hommes ont la possibilité de gagner en efficacité dès l’instant où ils peuvent être appelés à intervenir plus régulièrement et au plus tôt dans un différend entre un salarié et son entreprise. Il faut pour cela porter un autre regard sur l’institution, s’en remettre normalement à elle pour apprécier le bon droit des parties, concilier, au bon moment, avant qu’il ne soit trop tard.

Concilier, c’est respecter ; reconnaître l’autre, c’est dialoguer. C’est aider les parties à se rapprocher, résoudre leur différend, c’est négocier, aboutir, éviter le pire.

Ce n’est qu’en dernier ressort que le conseiller de prud’hommes devient un juge, le conseil de prud’hommes, un tribunal. Ainsi, seront-ils des acteurs reconnus de la paix sociale nécessaire à tous.

S’il n’y a plus lieu aujourd’hui de convaincre les adhérents CFTC, c’est alors ce message que nous pouvons porter pour inciter au vote, aider au choix et défendre la justice pour les salariés.

 

La lettre confédérale CFTC - 17 novembre 1997

La dernière ligne droite

À moins d’un mois des élections, voici donc la dernière ligne droite. Pour le militant qui travaille depuis des mois, c’est le moment où la tension monte, où tout s’enchaîne de plus en plus vite : collages des affiches, distributions de tracts, visites d’entreprises, derniers meetings, conférences de presse… avec le téléphone qui sonne pour vous rappeler à la réalité des affaires courantes.

C’est dans ces moments-là que la fraternité des équipes se renforce. C’est dans l’effort que l’esprit CFTC se partage et se multiplie.

La dernière ligne droite, c’est le moment d’être côte à côte avec les électeurs. Tout est déjà balisé et prévu, c’est le temps de l’action, le temps de la rencontre.

Le bureau confédéral propose à chaque adhérent une dernière action de proximité appelée « 1 = 5 ». Chaque adhérent est invité à faire voter CFTC 5 personnes de son entourage. Relayez cette initiative aux quatre coins de votre entreprise. Aidez votre UD à la mettre en place dans votre département.

Vous trouverez dans cette lettre confédérale un tract, synthèse de notre argumentaire de campagne. Adoptez-le autant que de besoin à la situation concrète de votre terrain.

Le syndicalisme CFTC doit aller à la rencontre du plus grand nombre. Au moment où tout le monde se sert du salarié, il est temps qu’il prenne lui-même en main son destin pour créer ce lieu qui brisera la chaîne des fatalités. Par votre action exigeante et constante sur le terrain, demain comme hier, la CFTC continuera d’être à la pointe de l’innovation sociale.

Allons donc dire à chaque salarié l’assurance qu’il aura d’être bien défendu. Portons haut l’étendard de notre campagne : « Voter CFTC, c’est voter pour vous ! ».

Jacques Voisin, secrétaire général

 

La lettre confédérale CFTC - 1er décembre 1997

Paris, le 26 novembre 1997

Lettre aux militants

Chers amis,

En lançant notre campagne les 4 et 5 septembre à la Bourse du travail à Paris, nous prenions l’engagement de faire chacun et chacune le maximum.

Pendant plus de deux mois, les responsables confédéraux sont venus soutenir votre action sur le terrain pour une campagne de proximité.

Nous avons vu une mobilisation réelle, même si parfois il a fallu changer de rythme et surtout, nous avons rencontré beaucoup de fraternité, beaucoup de chaleur humaine, avec des équipes qui savaient faire jouer la complémentarité des personnes.

Des témoignages d’efficacité sont rendus, des actions originales sont menées, des relations sont renforcées avec différentes associations à caractère social ou des syndicats autonomes. Dans plusieurs cas, on n’avait pas vu des réunions de militants aussi importantes depuis longtemps et cela a démultiplié les énergies. Dans ces rencontres beaucoup de nouveaux militants, fréquemment issus d’autres organisations, nous ont témoigné ce « plus » CFTC qui fait qu’on se sent bien chez nous.

Nous le sentons bien, un succès est à la portée de notre main. Les inconnues sont certes nombreuses, mais la CFTC donne des repères forts. Bravo à tous ceux qui ont su créer cette dynamique par leur implication personnelle.

Permettez-nous, chers amis, de vous exhorter une fois de plus, à pousser au bout de l’effort votre engagement personnel dans la campagne.

Les voix se gagnent une à une, par le contact personnel, par la fierté d’être CFTC que vous manifestez.

Maintenant, dans ces tout derniers jours, c’est à vous de faire la différence. Nous comptons sur vous comme vous pouvez compter sur nous.

Gagnons cette bataille. Elle fera date dans l’histoire de la CFTC.

Amitié fraternelle.

Jacques Voisin, Alain Deleu.