Interview de M. André Lajoinie, secrétaire du comité central du PCF, à RTL le 17 mai 1993, sur les mesures annoncées par M. Balladur.

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P. Caloni : Le plan Balladur est bon pour vous ?

A. Lajoinie : C'est un très mauvais plan. C'est une mauvaise action contre la France. Non qu'il ne faille pas prendre de mesures, nous avons été les premiers à les réclamer. Les mesures prises sont injustes puisqu'elles frappent essentiellement le monde du travail et les retraités. Elles ne frappent pas les capitalistes et la spéculation. Parce qu'elles sont injustes, elles sont inefficaces. Elles vont aggraver la situation, on prend 5 milliards essentiellement au monde du travail. On aura une baisse de la consommation et une augmentation du chômage. L'UNEDIC annonce 345 000 chômeurs de plus pour la fin de l'année ! Il y a d'autres mesures tout aussi néfastes : l'attaque sans précédent contre la Sécurité sociale. C'est la première fois aujourd'hui que l'on va décider que les gens ne partiront pas à la retraite à 60 ans. On licencie partout avant 60 ans. À l'arrivée, ils n'auront plus rien. Ce n'est pas la bonne voie que d'allonger le temps de travail. Nous, nous proposons entre autres de réduire le temps de travail. C'est une piste.

P. Caloni : Comment fait-on pour réduire le temps de travail sans réduire le salaire ?

A. Lajoinie : La productivité est extraordinaire, mais cette course ne doit pas profiter seulement aux entrepreneurs ou au capital. La droite augmente les impôts alors qu'elle avait dit qu'elle ne le ferait pas. Nous la prenons la main dans le sac de la démagogie. Nous sommes pour certains augmentations d'impôts, comme celui de la fortune. Cela ne ruinerait aucun des grands fortunés puisque depuis dix ans, nous assistons à l'enrichissement des riches et à l'appauvrissement des gens modestes. Les inégalités se sont accrues. Il faut faire le contraire de ce que fait E. Balladur. On pourrait mettre en place un impôt intelligent : il pénaliserait la spéculation de telle sorte que l'argent aille à l'investissement créateur d'emplois.

P. Caloni : On ne gomme pas trois millions de chômeurs comme cela !

A. Lajoinie : Ce n'est facile ! Non seulement on ne les gomme pas, mais on va en rajouter. Et le dumping social ? Une Russe a dit qu'elle était l'esclave de l'Occident. Est-ce cela l'avenir ? Non ! Il y a la nécessité de garantir un progrès social partout. Nous sommes pour la solidarité et pour produire français. Nous sommes opposés aux délocalisations et à la fuite de notre industrie. Cela ne peut qu'affaiblir notre pays.

P. Caloni : Et la rentrée ?

A. Lajoinie : Elle sera chaude. C'est tout de suite qu'il faut agir. Nous sommes aux côtés des organisateurs de la journée du 27 mai. Nous voulons mettre en échec ces mesures et en imposer d'autres.