Texte intégral
Q - La journée sans voitures : vous êtes médecin mais vous êtes aussi maire de Lourdes. Comment vous organisez-vous à Lourdes ? Y a-t-il effectivement une journée sans voitures, encore qu'il y ait déjà une bonne partie de la ville qui soit réservée aux piétons et aux pèlerins ?
– « Le problème, pour moi comme médecin, ce n'est pas un jour par an. Nous respirons 20 kilos d'air par jour. Donc, l'air que nous respirons c'est l'élément le plus important dans l'environnement. Nous avons décidé de ne plus avoir d'autobus diesel. 70 % de dioxyde d'azote, ce sont les autobus diesel. »
Q - À Lourdes, c'est vous qui montrez l'exemple, à la différence de ce qui se passe dans le reste du pays, où, on le sait, entre les camions de La Poste, parfois les autobus de la RATP…
– « Si vous prenez les autobus de la RATP qui sont pratiquement tous au diesel – idem dans les grandes villes –, si vous prenez les camionnettes municipales, celles des différents ministères et administrations, alors vous avez un parc diesel qui fait qu'il y a aujourd'hui un nourrisson – qui a moins de deux ans – sur trois, dans les grandes villes, qui a des bronchiolites et de l'asthme. Et je trouve vraiment que c'est un problème politique majeur pour les maires. Les maires doivent être aujourd'hui des acteurs de santé publique. On n'a pas le droit, aujourd'hui, d'acheter un bus diesel, ce n'est pas possible. »
Q - Est-ce que les solutions sont les mêmes pour une ville comme Lourdes que pour une ville comme Paris où, évidemment, les distances ne sont pas les mêmes. Un certain nombre de gens parfois dans les petites villes sont absolument enchantés, et puis quand ils arrivent à Paris, on a le sentiment qu'ils pestent un peu plus.
– « D'abord les chiffres ne sont pas les mêmes. Il y a les chiffres que je donne sur les enfants asthmatiques – c'est pour les villes de plus de 500 000 habitants. Pour les villes de moins de 30 000 habitants, les chiffres sont évidemment tout petits par rapport à cela. Ce qui prouve bien que c'est la pollution qui donne de l'asthme. Le problème des grandes villes, c'est que la moitié des déplacements se fait pour des déplacements de moins de trois kilomètres en voiture. Donc prendre la voiture pour moins de trois kilomètres, cela veut dire qu'on n'a pas suffisamment développé les transports en commun, les taxis et, surtout, les transports en commun et les taxis avec des moteurs propres : moteurs thermiques, électriques, GPL, gaz naturel véhicule. C'est cela qu'il faut. C'est de cela que les hommes politiques de ma génération doivent, aujourd'hui prendre conscience. »
Q - Aujourd'hui, dans le pays, se développe un débat sur le nouveau capitalisme, depuis que le Premier ministre s'est exprimé ici même à France 2. Une partie de la gauche dit qu'au fond Jospin n'admet pas qu'il peut diriger l'économie ; et puis, à droite, aujourd'hui, dans Le Figaro, D. Tillinac, entre autres, dit : « Il y a une crise à droite, il y a une droite imaginaire » – comme on dénonce à gauche une « gauche imaginaire ». Comment vous regardez tous ces débats ?
– « Il faut regarder ce qui se passe chez Michelin. C'est le paradoxe que nous vivons aujourd'hui en fin de siècle. D'une part, les bénéfices des entreprises n'ont jamais été aussi élevés et, en même temps, soit on licencie soit on gèle les salaires. Qu'est-ce qu'il faut faire ? M. Jospin nous dit : « Il y a d'un côté des actionnaires, de l'autre les salariés. » C'est-à-dire que les actionnaires aujourd'hui, ce sont les fonds de pension américains : les retraités qui sont au Texas, à New York, à Washington qui ont un petit bout des entreprises françaises. Et puis, M. Jospin dit aux salariés : « Manifestez dans la rue, vous allez faire plier les retraités de New York. » Ce n'est pas sérieux. Qu'est-ce qu'il faut faire ? Il faut changer le capitalisme français. Et nous, à l'UDF, nous devons proposer cela, c'est-à-dire donner aux salariés un petit bout de l'entreprise dans laquelle ils travaillent. »
Q - C'est-à-dire faire en sorte que le salarié soit actionnaire pour qu'au fond il ait en tête les deux aspects de l'intérêt, à savoir le prix de l'action, certes, mais aussi ce qu'il touche à la fin du mois ?
– « Il faut réconcilier le capital et le travail. C'est la seule solution, car sinon toutes les entreprises françaises, les unes après les autres, vont passer aux mains des Américains et des Anglais par l'intermédiaire des fonds de pension. »
Q - Est-ce que c'est aussi un moyen d'avancer sur le terrain des retraites ?
– « Bien sûr. Il faut garder le système par répartition, c'est merveilleux : un actif travaille pour un inactif. Mais ce système va exploser. »
Q - Très vite d'ailleurs. À partir de 2004, on est dans la difficulté.
– « Parce qu'il y a beaucoup de retraités et peu d'actifs. Donc, il faut en effet donner des fonds de pension, c'est-à-dire des actions des entreprises françaises, aux Français. Il n'y a aucune raison que les retraités français n'aient pas un petit bout des entreprises françaises, alors que les retraités américains et anglais commencent à acheter toutes les entreprises françaises. »
Q - Une dernière question en ce qui concerne votre avenir personnel. On dit que vous pourriez être candidat à Toulouse. D. Baudis laisse le doute sur sa candidature. On dit aussi que Paris vous intéresse. C'est quoi : Paris, Lourdes, Toulouse ?
– « D . Baudis est un excellent maire. Je l'ai déjà dit : « C'est le meilleur maire de France. » Les impôts baissent, et il n'y a jamais eu de dettes, il n'y a plus de dettes à Toulouse. »
Q - S'il est las, fatigué, s'il n'a pas envie de se représenter ?
– « Vous lui demanderez. Moi je ne connais pas des gens qui, à ce niveau-là, en ont assez, puisqu'il réussit. »
Q - Et Paris ?
– « Je suis très bien dans le Sud-Ouest et en Midi-Pyrénées. Merci. »