Déclaration de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, sur la question des effectifs et sur les missions du ministère pour 1998, Paris le 8 janvier 1998.

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Circonstance : Voeux du ministre aux entreprises publiques et aux directeurs de l'administration centrale du ministère, Paris le 8 janvier 1998

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs

Permettez-moi, en mon nom et au nom de Louis BESSON et de Michèle DEMESSINE (qui vous prie de l’excuser) de vous remercier pour vos vœux sympathiques, colorés et profonds à la fois.

Vous le faisiez remarquer à juste titre Monsieur MAILLET, l'année 1997 a vu son lot de réformes, de problèmes, de progrès ou de difficultés interpeller directement ou indirectement l'État, les administrations, le ministère.

Je crois franchement qu'il serait déraisonnable de penser que 98 pourrait être plus calme et nous permette de nous atteler plus spécifiquement aux questions de fonds.

Est-ce à dire que la fréquence, la diversité et l'acuité des questions qui surgissent dans la vie constituent un obstacle insurmontable à la réflexion et aux propositions, aux réformes indispensables, je ne le pense pas. J'ai même envie de vous dire au contraire.

Vous êtes toutes et tous bien placés pour savoir combien la complexité, les contradictions qui naissent et se développent dans une société d'appels à la réflexion et à des constructions modernes.

Cela demande évidemment beaucoup de travail, je le sais et aussi un peu de recul parfois, mais c'est dans ce croisement entre la compétence d'en haut si j'ose dire et celle du terrain, de la vie, des hommes et des femmes qui la font : fonctionnaires, salariés, citoyens, mais aussi élus, militants que nous avancerons.

Lorsque les françaises et les français ont souhaité le changement en juin dernier, lorsque nous avons été appelés à participer au gouvernement de Monsieur Lionel JOSPIN qui a défini dès juin, dans son discours d'investiture à l'Assemblée nationale les choix nouveaux, nous nous sommes mis à la tâche et nous avons mis au niveau du gouvernement bien sûr, mais je parlerais surtout au niveau de notre ministère, fait en sorte de répondre, de commencer à répondre à l'attente non seulement au plan du contenu : c'est le choix de la lutte pour la cohésion et la justice sociales, pour la modernisation et la promotion du service public, pour la croissance et pour une construction européenne ayant au cœur l'emploi, la justice sociale, la démocratie dans un monde tourmenté et en mouvement.

On pourrait me dire : nous sommes loin du compte ! C'est vrai tant les questions sont lourdes et difficiles. Mais c'est vers là, sur la durée - en ce sens - que nous avons décidé d'aller.

Il y a le contenu et il y a la méthode. J'ai d'ailleurs toujours un peu de mal à séparer les choses tant il est sûr que les intentions fussent-elles sont soi-disant destinées ne sont pas associés à leur définition, à leur construction et à leur mise en œuvre.

De ce point de vue le caractère même des activités de notre ministère nous donne, si je puis dire, un petit avantage. En effet le nombre de gens, d'élus, de responsables, de militants qui souhaitent nouer des contacts est considérable. Et c'est tant mieux.

Tous doivent savoir par-delà les différences d'opinions, de situations, d'expériences qu'ils peuvent trouver en nous une écoute attentive, la transparence de la chose publique, le souci du bien commun et de l'intérêt général.

L'État et la nation ne sont pas des objets séparés, et encore moins antinomiques dès lors que c'est la conception de la République et de sa modernité qui nous guide.

Permettez-moi à ce propos de vous dire des mots gentils que je pense profondément : la première caractéristique qui m'a particulièrement touché depuis juin dernier, c'est l'extrême compétence et l'extrême dévouement de toutes celles et tous ceux qui dans l'administration assument les différentes responsabilités qui sont les vôtres.

Vous en voyez passer des ministres ! Leurs choix sont parfois différents mais vous êtes toujours là au service de l'État et de la volonté exprimé par le suffrage universel.

À celles et ceux qui voient systématiquement chez les fonctionnaires la cause de tous les maux de la société, la réalité est là pour, dans des domaines les plus divers, apporter son lot de démentis.

Oh soyez tranquilles, en disant cela j'ai vu ni un repli frileux sur la nation, ni le culte du je ne sais quel « ératisme » que l'on n'a pas besoin de qualifier pour savoir qui est par nature pervers et dangereux.

J'ai simplement en vue les nécessaires progrès de civilisation.

Vous disiez Monsieur le Président que suite au conflit des routiers, certains m'attribuent « les deux oreilles et la queue » ! Cela m'amène deux commentaires.

Le premier je n'ai pas risqué ma vie, même en allant sur les « barrages ».

Le deuxième surtout, c'est que sans vous, sans votre rôle, le conflit des routiers lui-même, malgré les efforts du cabinet, du ministre, n'aurait pas été réglé de cette manière.

Notre ministère est en fait un grand ministère des services publics couvrant par les entreprises publiques et leurs filiales, par ses établissements publics et par son administration, un champ très large. Pour réussir il est indispensable de travailler sur nos fonctions essentielles et identitaire.

C'est bien sûr déterminant pour nos entreprises publiques de transport (AIR-FRANCE, la SNCF, la RATP, la SNCM...) qui doivent conquérir (ou reconquérir) des parts de marché, des clients, et toujours mieux satisfaire les usager). C'est également déterminant pour tous les organismes du logement social et pour les constellations des entreprises, grandes ou petites, du secteur du tourisme. C'est peut-être plus déterminant encore plus pour les services de l'administration qui ont, au niveau central comme aux nouveaux déconcentrés, une fonction essentielle comme régulateurs et, dans tous nos domaines de responsabilité de faire en sorte que les services publics soient créateurs de progrès et d'efficacité. Il y a un énorme besoin de transparence, de reconnaissance et d'efficience.

Dans un secteur comme le nôtre, où chacun d'entre vous aspire légitimement à disposer de plus de moyens (que ce soit au niveau des crédits d'intervention, du fonctionnement ou des personnels) pour mieux satisfaire à une demande toujours plus exigeante, il importe de pouvoir justifier économiquement et socialement, de pouvoir légitimer notre intervention. Pour cela la qualité du service rendu est déterminante.

Toutes mes visites sur le terrain m'ont permis d'apprécier tout à la fois la valeur des agents et l'importance que chacun attache à la qualité et à l'efficacité de nos services - dans tous les domaines : aviation civile, métro, tourisme, affaires maritimes, transports, logement, environnement…

La question des effectifs est aujourd'hui d'une extrême sensibilité pour l'exercice de nos missions essentielles - y compris pour ce qui est des missions relatives à la sécurité.

Depuis vingt ans, près de 15 000 emplois ont été supprimés. Les gains de productivité ont certes permis aux services de maintenir, voire même dans certains cas, d'améliorer la qualité du service. Il n'en demeure pas moins que nous constatons tous aujourd'hui des déficits préjudiciables car la demande des usagers est toujours plus exigeante.

J'ai trouvé, à mon arrivée, des engagements contractualisés programmant la réduction des effectifs à hauteur de mille emplois en 1998 et autant en 1999 ; en contrepartie figuraient des mesures catégorielles et la maîtrise des crédits de fonctionnement.

Je n'ai pas voulu mettre en péril les engagements pris vis à vis des personnels de catégorie C et je n'ai donc procédé qu'à certaines inflexions assumant les réductions et permettant la création de 160 emplois et donc d'assurer un flux d'embauche qui pourrait quand même atteindre nettement plus de 2 000 embauches, c'est-à-dire un chiffre supérieur à celui des années précédentes. Il s'agit là du début d'une inflexion qui ne constitue pas pour moi une réponse satisfaisante.

Il est possible qu'ici ou là on n'appréhende que très mal de ce que font les personnels de ce ministère. C'est pour cette raison que je considère nécessaire, voire indispensable de relégitimer l'action des services. C'est l'objectif de la Conférence nationale sur l'entretien et l'exploitation des infrastructures. C'est également l'objectif de nos travaux de Chambéry ; il est en effet indispensable de repositionner les missions des services sur les territoires dans leur diversité sans déserter le champ urbain, même s'il est plus difficile. Nous devons être le ministère de tous les territoires. Et savoir le montrer par notre façon de travailler.

Je compte donc, d'une part, utiliser toutes les possibilités de la loi de finances initiale pour 1998, d'autre part, engager la préparation du PLF 1999 sur des bases différentes de celles de l'an dernier. Mon souhait est de retracer des perspectives d'emploi pour le ministère, dans ses différentes composantes, avec une forte exigence interne en matière de qualité de service rendu. Pour cela il reste nécessaire que chacune des directions dispose, en permanence, d'une vision stratégique à 3 ou 5 ans ; cette vision stratégique doit bien sûr être concertée et partagée avec les personnels.

Pour 1998, j'attends donc beaucoup de chacun d'entre vous, peut-être autant que ce que vous attendez de moi.

L'année 1998 sera, si j'en juge par les derniers mois, une année stratégiquement décisive :

• pour nos principales entreprises publiques ;
• pour la clarification de nos perspectives d'investissement dans les domaines ferroviaires et routiers ;
• pour le renouveau des transports urbains, en région Île-de-France comme en province ;
• pour inverser les tendances ségrégationnistes lourdes en matière de logement ;
• pour le positionnement de nos services et la qualité de notre partenariat avec les départements, les autorités organisatrices de transports, les villes et les régions ;
• pour l'environnement que nous saurons créer en faveur de l'emploi dans l'ensemble de nos champ d'intervention ;
• pour les progrès que nous réaliserons en matière de prévention des risques améliorant ainsi la sécurité dans nos domaine d'intervention ;
• pour intégrer la dimension européenne que vous rencontrez sur toutes les questions. Nous devons être « euroconstructifs » si nous voulons contribuer, à la place qui est la nôtre, à réorienter la politique européenne en faveur de l'emploi, du progrès social, de l'harmonisation par le haut, de la démocratie.

Nos projets sont nombreux. Je suis bien conscient que nous devons aller au-delà des inflexions apportées ces derniers mois pour répondre aux aspirations et aux attentes qui s'expriment et qui doivent être pour nous autant d'encouragements à améliorer notre efficacité et notre travail commun.

C'est donc ces vœux de progrès que je vous présente ce soir mais aussi des vœux personnels pour vous même, vos familles et ceux qui vous sont chers de bonheurs et de réussite.

Bonne année !

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