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SUD-OUEST : Pierre-Rémy Houssin, ancien député RPR de la Charente battu aux législatives de mai dernier, a annoncé sa volonté de se présenter aux régionales. Est-ce un rival pour le fauteuil de président ?
Jean-Pierre Raffarin : Tout d’abord, Pierre-Rémy Houssin est un ami. Une des caractéristiques de Poitou-Charentes, c’est qu’il n’y a pas d’ambiguïtés sur les chefs de file des deux camps principaux. Le match sera entre le candidat de l’actuelle majorité régionale et celui du Parti socialiste, Philippe Marchand. L’ensemble des instances nationales semble avoir confirmé ces choix.
SUD-OUEST : À part votre cas qui est donc réglé dans la Vienne, les têtes de liste RPR-UDF sont-elles désignées dans les autres départements ?
Jean-Pierre Raffarin : Non. Elles le seront d’ici à la fin de l’année. Nous avons encore besoin de discussions au niveau national au cours du mois de novembre. Les têtes de liste seront probablement connues à la fin de l’année et les listes à la mi-janvier.
SUD-OUEST : Menez-vous des négociations avec chasse, pêche, nature et traditions qui annonce présenter des candidats dans tous les départements de la région ?
Jean-Pierre Raffarin : Pour le moment, il n’y a aucune négociation. Nous verrons s’ils souhaitent le faire. Le débat est ouvert. À CPNT, il y a des responsables de grande qualité et j’ouvrirai très volontiers le dialogue avec eux.
SUD-OUEST : Et avec les écologistes, dont certains se sont rapprochés de votre majorité au cours de ce dernier mandat ?
Jean-Pierre Raffarin : Je souhaite que nos listes soient des listes rénovation et d’ouverture à la société. Des listes de rajeunissement, des listes féminisées.
Tout dépendra aussi de la stratégie qu’adoptera l’opposition régionale. Elle peut choisir de faire des listes unies ou des listes séparées, PS, PC, Verts. Nous aurons aussi à choisir entre des stratégies d’ouverture des listes ou d’alliances.
SUD-OUEST : Allez-vous faire votre campagne sur le bilan de votre action ?
Jean-Pierre Raffarin : Nous allons expliquer ce que nous avons fait. Parmi les points forts de notre bilan, il y a l’accomplissement d’une véritable révolution éducative. Claude Allègre m’a dit récemment : « Avec l’université, vous avez sauvé La Rochelle. » Je sais que je partage ce mérite avec Claude Belot et Michel Crépeau.
D’autres éléments du bilan sont très importants. Il y a une dizaine d’années, cette région était contestée. Aujourd’hui, elle est écoutée. Quand je regarde la politique contractuelle de l’État ou l’Europe, cette région sait se faire entendre à Paris ou à Bruxelles.
Dans beaucoup de domaines nous avons rattrapé notre retard. Nous sommes passés des cinq derniers au milieu du tableau. Il faut maintenant que nous soyons dans les cinq premiers.
SUD-OUEST : Dans le bilan, il y a aussi les infrastructures. Pourquoi bloquez-vous les études préliminaires du TGV Aquitaine ?
Jean-Pierre Raffarin : Je ne bloque rien, mais que M. Gayssot mette l’argent sur la table ! Aujourd’hui, ce projet est-il financé ? Est-il finançable ? Que le gouvernement réponde ! Je ne veux pas diviser Poitou-Charentes sans qu’il y ait des règles de financement établies.
Je vois le déficit de la SNCF, je vois les difficultés du budget du ministère des transports, j’entends les promesses du gouvernement pour le TGV Est, et l’on voudrait que j’aille dessiner un tracé qui passe dans les cours et les jardins, qui effraie toutes les populations sans savoir si ce TGV a des chances d’exister avant 2010 ? Je suis un homme réaliste. Nous avons dit oui au TGV, mais avec quel financement, quel calendrier ; quel respect de l’environnement et quels services pour Poitou-Charentes ?
Une chose est claire, notre objectif n’est pas d’être transpercés par une ligne TGV, nous voulons des services. Si le gouvernement répond, nous sommes très ouverts. Mais le réalisme me ferait dire qu’il vaudrait mieux qu’on mette le paquet sur la RN 10, parce que c’est le court terme.
SUD-OUEST : Justement, parlons-en ! Il reste entre Poitiers et Bordeaux des tronçons importants à rendre plus sûrs en 2x2 voies. Est-ce une priorité pour vous ?
Jean-Pierre Raffarin : C’est une priorité. Si l’État nous dit qu’il est prêt à achever la RN 10 dans les cinq ans, je dis chiche ! La clé de financement sur cet axe est de 70 % pour l’État, 30 % pour la région, le département de la Charente ayant été exonéré pour compenser son éloignement de l’autoroute. Si l’État met plus d’un milliard, nous pouvons ajouter 500 millions demain, quitte à emprunter. La santé de nos finances nous le permet.
Poitou-Charentes est motivé, déterminé, et la réponse est exclusivement dans les mains du ministre des Transports.
Il n’est pas plaisant d’entendre des déclarations au sud de Bordeaux selon lesquelles le ministre aurait une affection pour cette zone qu’il n’aurait pas pour le nord. S’il doit y avoir des crédits supplémentaires de l’État, ils ne doivent pas être réservés au sud mais répartis équitablement entre le nord et le sud de Bordeaux.
SUD-OUEST : Et pour le dernier maillon de l’autoroute des estuaires entre Rochefort et Fontenay-le-Comte ?
Jean-Pierre Raffarin : J’appuie toutes les démarches que Michel Crépeau entreprend pour convaincre Dominique Voynet. Pour moi, le premier parti, c’est le PC, le parti de Poitou-Charentes. Nous considérerions que le contrat de plan serait trahi si cet axe n’était pas inscrit au schéma autoroutier. Nous avons signé un grand nombre d’accords en fonction de cette décision confirmée par deux ministres successifs.
SUD-OUEST : Après la grande fête des régions périphériques maritimes européennes, à La Rochelle il y a un mois, que va-t-il en rester ?
Jean-Pierre Raffarin : Le rendez-vous de la Rochelle illustre le nouvel état d’esprit de Poitou-Charentes. Souvenez-vous qu’il y a quelques années, on doutait même de son existence. La Rochelle a illustré ce message ; en Poitou-Charentes, c’est la fin des complexes. J’étais très heureux qu’on puisse donner cette image de force à l’ensemble de nos partenaires européens et français.
C'était très important de faire exister le consensus sur une idée simple : ne pas mettre tout l'argent des fonds structurels européens sur le seul critère de pauvreté qui était dominant jusqu'ici. Nous avons obtenu des régions d'Espagne, du Portugal, du Royaume-Uni, qu'on fasse exister à côté de ce critère celui de périphéricité. Une région fragile n'est pas seulement une région pauvre, mais une région éloignée du centre de l'Europe. La motion finale adoptée par 110 régions d'Europe comporte le critère de périphéricité. Pour moi, c'est un combat politique majeur.
SUD-OUEST : En obtenant l'accord de vos partenaires, vous pensez aussi emporter celui de Bruxelles et par ricochet celui de Paris ?
Jean-Pierre Raffarin : Le but, c'était d'abord de faire comprendre aux régions pauvres que c'est leur intérêt. Ça permet de dire à Bruxelles qu'il faut tenir compte de la périphéricité. Et maintenant, je me retourne vers Mme Voynet et je lui demande : quel est le projet français pour la réforme des fonds structurels qui représentent 2 milliards sur cinq ans en Poitou-Charentes. Moi, j'ai un projet, celui de la CRPM. Quel est le vôtre ?
SUD-OUEST : Pas de réponse de sa part ?
Jean-Pierre Raffarin : J'en aurai prochainement, puisque le mardi 18 novembre, j’ai une question au Sénat sur ce sujet.