Texte intégral
J.-M. Lefebvre : La dissolution est-elle une bonne idée ?
P.-A. Wiltzer : Je dirais que pour nous – je m’exprime au nom de l’UDF – nous n’avons pas à demander la dissolution. C’est une décision qui relève du président de la République et de lui seul. En revanche, nous sommes prêts à toute éventualité, bien sûr. Est-ce une bonne solution ou pas ? C’est vraiment une appréciation qui relève de Jacques Chirac. À mes yeux, au-delà de la colonne des avantages et de la colonne des inconvénients qu’on peut aligner facilement, je crois que le problème essentiel est de savoir si on veut éviter qu’une longue année préélectorale ne soit une entrave pour prendre des décisions, lancer des actions de long terme, poursuivre les réformes ou si, au contraire, il est préférable de hâter le pas pour passer cette étape, et avoir une plus longue période devant soi.
J.-M. Lefebvre : Mais s’il y a dissolution, comment allez-vous l’expliquer à vos électeurs ?
P.-A. Wiltzer : À mon avis, c’est cet argument-là qui est l’argument important. C’est un argument qui touche à l’intérêt du pays, à la façon dont le Gouvernement peut faire face aux problèmes du pays. Si on veut éviter, en effet, un enlisement – qui se produit toujours pendant les mois qui précèdent une échéance électorale – qui empêche en réalité souvent de prendre les décisions qui s’imposent, on peut estimer qu’il faut hâter le calendrier. L’autre argument se défend aussi, et le Président a le choix. Il peut considérer que le calendrier étant ce qu’il est, l’Assemblée nationale doit aller au bout de son mandat et que, par conséquent, il faut siffler la fin de la partie médiatico-politique qui, depuis quelques semaines, est en train d’agiter les esprits.
J.-M. Lefebvre : Comment considérez-vous cette dissolution : comme un genre nouveau sous la Ve République ? Car, en général, elle survenait après une présidentielle ou une situation grave ?
P.-A. Wiltzer : Oui, si on veut ! Mais la dissolution n’est pas enfermée dans la Constitution, dans des règles précises. C’est à la discrétion du chef de l’État. Jusqu’à présent on a connu des dissolutions dans des cas un peu différents, mais ça n’exclut pas du tout que d’autres raisons amènent, aujourd’hui, à hâter le calendrier. Là, il y a une liberté totale.
J.-M. Lefebvre : Sur quels thèmes va faire campagne l’UDF ?
P.-A. Wiltzer : L’UDF va faire campagne sur les principaux thèmes de son projet politique. Il se trouve que nous sommes prêts de ce point de vue. Nous avons travaillé au cours des semaines précédentes. Le premier thème, c’est la réforme de l’État. Il nous semble que beaucoup de problèmes, à commencer par le problème de l’emploi, tiennent à des difficultés dans l’efficacité de l’appareil d’Etat. Il nous semble qu’il faut donc alléger notre système administratif, le rendre plus efficace et donner plus de pouvoirs aux citoyens – donc une relance de la décentralisation. Il y a aussi, sur le plan financier et fiscal, la nécessité de pousser dans le sens de l’allégement des charges et des impôts. C’est aussi un élément qui va dans le sens de l’emploi. Il y a, bien entendu, la nécessité d’aller vite et loin dans la construction de l’Europe, parce que, pour nous, l’Europe – contrairement à ce que les eurosceptiques ou les eurofrileux essaient de dire – est la seule protection pour la France, comme pour ses voisins immédiats, contre la concurrence sauvage et la mondialisation.
J.-M. Lefebvre : Quelles sont les forces et les faiblesses de l’UDF pour affronter ces législatives anticipées ?
P.-A. Wiltzer : Je vois, dans les thèmes que je viens de résumer brièvement, des forces pas des faiblesses. Je crois que ces thèmes sont capables de trouver dans l’opinion, si nous les expliquons bien – et nous avons cette volonté – un écho. Par conséquent, nous sommes tout à fait prêts à ce débat devant les électeurs.
J.-M. Lefebvre : Quand vous dites que vous êtes prêts, vous aurez donc le temps, à l’UDF, de définir un programme très différent du RPR ?
P.-A. Wiltzer : Nous ferons, comme d’ordinaire avec le RPR, une plate-forme commune pour les cinq ans qui suivent. C’est normal, mais nous avons nos idées à apporter, et je suis convaincu que nous retrouverons dans notre programme commun la trace de ce programme. Nous y veillerons.
J.-M. Lefebvre : La querelle balladuriens-chiraquiens va-t-elle s’effacer définitivement ?
P.-A. Wiltzer : Ça fait longtemps que cette querelle est dépassée.
J.-M. Lefebvre : Ce sont tous les hommes de la majorité qui disent ça ?
P.-A. Wiltzer : Néanmoins, je suis surpris qu’on continue à employer ces catégories, parce que le temps passe, les choses changent et par conséquent les clivages – s’il y en a eu – sont eux aussi dépassés. Donc je crois que cela n’a plus grand-chose à voir avec la réalité d’aujourd’hui.