Interview de Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme, dans "Le Figaro" du 22 janvier 1998, sur l'impact de la Coupe du monde de football et des 35 heures sur l'activité touristique, et le projet d'extension du chèque vacances aux salariés des PME.

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Le Figaro Économie : L’an dernier selon les premières estimations, la France, avec 67 millions de touristes étrangers et un solde excédentaires de plus de 65 milliards de francs, a battu tous les records. Est-ce le millésime du siècle ?

Michelle Demessine : Attendons encore les suivants !
L’an dernier, nous avons bénéficié d’une conjonction de bons éléments avec un climat et des parités monétaires très favorables. Les actions de promotion de la France entreprises depuis des années portent leurs fruits. Elles sont le résultat d’un travail patient effectué par les professionnels et l’État. La progression, que nous connaissons depuis dix ans, laisse bien augurer de l’avenir. La France pourrait accueillir 90 millions de touristes en 2020.

Le Figaro Économie :  En attendant, elle organise cette année la coupe du monde de football.

Michelle Demessine : C’est une chance pour notre tourisme et surtout un investissement pour l’avenir. C’est l’événement majeur en terme d’audience télévisée. Les images seront vues, estime-t-on, par 37 milliards de téléspectateurs. La France sera au centre du monde et nous en profiterons pour la promouvoir.

Pour remplir cet objectif, mon administration, les offices de tourisme, les comités régionaux et départementaux du tourisme et les professionnels font un véritable travail d'équipe. Et des efforts sont faits pour rassurer les touristes étrangers qui viennent habituellement en France durant cette période pour leur faire découvrir des régions éloignées de la fièvre des matches.

Le Figaro Économie :  Les prix, notamment de l’hôtellerie, ne risquent-il pas de flamber ?

Michelle Demessine : Les hôteliers sont des professionnels responsables. Ils ont déjà été raisonnable l’an dernier. L’augmentation des prix moyens par chambres dans l’hôtellerie de chaînes intégrées a été très légère. Cette stabilité des prix est indispensable pour fidéliser les touristes.

Le Figaro Économie :  Quelles seront les conséquences de la crise asiatiques sur la fréquentation touristique ?

Michelle Demessine : Pour l’instant, il n’y a pas de raison de s’inquiéter. La clientèle asiatique ne représente que 2 millions de personnes dont 850 000 Japonais.

Le Figaro Économie :  Les premiers résultats de l’année écoulée indiquent un tassement du nombre de déplacements des Français à l’intérieur du pays.

Michelle Demessine : Les Français constituent le socle de notre tourisme. Favoriser l’aide au départ, c’est aussi contribuer au développement de l’économie touristique et d’emplois nouveaux. Nous devons réagir face à cette situation d’autant que 40 % des Français ne partent pas en vacances, c’est l’une de mes préoccupations.

Le Figaro Économie :  Pourtant l’extension des chèques-vacances aux salariés des PME, annoncée depuis des années, tarde toujours.

Michelle Demessine : Dans les PME, 7,5 millions de salariés n’ont pas accès aux chèques-vacances en raison de l’absence de comité d’entreprise. Je propose un système de mutualisation qui sera géré par les partenaires sociaux. C’est un dispositif qui prendra corps par une démarche volontaire de leur part.

Le Figaro Économie : Les effectifs dans le tourisme ont encore augmenté de 2,5 % l’an dernier. Mais le nombre d’emploi créés restent précaires.

Michelle Demessine : La précarité provient souvent d’une saison trop courte. Mais le comportement des touristes change. Ils partent plus souvent et moins longtemps. De plus, la réduction inexorable du temps de travail va accentuer le temps libre et le temps de loisirs. Le ministère du Tourisme n’est pas comme celui de l’Éducation nationale ; ce n’est pas lui qui peut créer des emplois, mais les acteurs économiques sur le terrain.

Les 35 heures vont doper l’activité touristique et entraîner la création d’emploi durables. Les professionnels l’ont déjà compris. Souvenons-nous de 1936 et des congés payés. Les 35 heures vont favoriser les longs week-ends et le développement des cours séjours.