Texte intégral
Il fallait épargner à la France de perdre près d’un an dans l’attentisme que suscitent les périodes préélectorales.
En choisissant, par la dissolution de l’Assemblée nationale, de donner la parole au peuple, le président de la République a fait le choix du courage et de la responsabilité.
Il l’a fait en gaulliste et, n’en déplaise à ceux qui voulaient, au nom d’on ne sait quelle légitimité, s’ériger en censeure constitutionnels, dans le strict respect des prérogatives inhérentes à sa fonction.
L’article 12 de la Constitution ne limite en effet aucunement – sinon par l’obligation de consulter le Premier ministre et les présidents des Assemblées – le droit du président de la République à prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale.
Certes, les quatre précédents survenus depuis 1958 ont tous été liés à une crise sociale et politique (en 1968) ou à un conflit de légitimité entre l’exécutif et le législatif (en 1962 après le renversement du gouvernement Pompidou), en 1981 et en 1988, après l’élection de François Mitterrand.
Pour autant, rien ne lie le recours à la dissolution exclusivement à ces deux seuls cas de figure, ni dans la forme, ni au fond.
Prétendre le contraire n’est pas seulement faire valoir un point de vue réducteur. C’est également défendre une analyse erronée. Car la seule véritable contrainte, dans l’esprit, c’est le souci de l’intérêt de la nation.
C’est cette préoccupation seule qui a guidé le choix de Jacques Chirac.
Une légitimité réaffirmée
L’intérêt national, c’est d’abord de permettre au gouvernement de s’appuyer, dans les cinq ans à venir, sur une légitimité réaffirmée, pour poursuivre et approfondir les réformes engagées sur la base de l’effort d’assainissement mené depuis 1993 et pour aller plus loin, avec Jacques Chirac, dans la construction d’une France pour tous, où nos concitoyens soient de nouveau heureux et fiers d’être français.
L’intérêt national, c’est également que le président de la République et le Gouvernement disposent, lorsque vont s’engager, dans les prochains moi (1), des négociations extrêmement délicates et difficiles sur l’avenir de la construction européenne, d’une majorité nouvelle et durable.
Cette légitimité renouvelée, particulièrement forte, sera un atout maître pour assurer au mieux la défense des intérêts du pays.
Pas de temps à perdre
L’intérêt national, c’est encore d’épargner à la France de perdre près d’un an dans l’attentisme que suscitent toujours les périodes préélectorales.
Il est en effet clair que la campagne électorale avait commencé.
Et chacun sait qu’une campagne aussi longue signifierait, par les incertitudes qu’elle provoquerait, un ralentissement inévitable de l’activité économique, au moment même où il faut la stimuler encore plus pour faire reculer le chômage.
Notre pays n’a pas besoin de cela, d’autant plus que ce délai n’est pas nécessaire à l’expression démocratique.
Nos concitoyens connaissent le bilan désastreux de la gestion socialiste et la volonté du PS de renouer avec les méthodes qui ont échoué entre 1981 et 1993. Ils mesurent également l’ampleur du travail réalisé depuis quatre ans pour assainir la situation du pays et engager les grandes réformes dont il a besoin.
Ils ont donc toutes les cartes en main et bien assez d’un mois pour juger en toute sérénité de l’avenir qu’ils souhaitent pour la France.
L’appel au peuple
L’intérêt national enfin, a l’heure où certains s’emploient à faire vaciller les valeurs républicaines, c’est de les faire confirmer par le peuple.
Ce sont là autant de raisons fortes et complémentaires qui justifient pleinement la décision présidentielle.
Elle n’est pas cette dissolution « de confort » que stigmatisent certains et que Jacques Chirac, s’il avait dû la faire, aurait faite il y a deux ans.
Le choix du président de la République, c’est au contraire celui du courage, qui fait passer l’intérêt national avant l’intérêt partisan.
C’est le choix de préférer à tous les calculs et à toutes les manœuvres, qui font trop souvent le quotidien de la vie politique, la parole souveraine du peuple.
C’est le choix de la République et de la France. Ses partisans, en effet, loin de craindre les urnes, y puisent toute leur force et leur ardeur…
(1) Le choix des pays intégrant directement la monnaie unique dès 1999 doit avoir lieu en avril 1998.