Texte intégral
Nice-Matin : Au-delà de la présence de la Polynésie française, que motive la venue du secrétaire d’État à la francophonie à la foire internationale de Nice ?
Margie Sudre : Je suis d’abord venue à Nice pour participer à un débat avec les femmes de la région. Apprenant que Nice inaugurait sa foire internationale le 8 mars, j’en ai profité dans la mesure où un tel événement de portée internationale intéresse au premier chef la francophonie et peut servir de relais au combat que ma mission de défense de la langue et de la présence françaises dans le monde sous-tend.
Nice-Matin : Quel sera votre message demain lors de la journée de la femme que la Foire de Nice a décidé de célébrer ?
Margie Sudre : Ce message, je le délivrerai en tant que femme ministre, et non en tant que ministre. Cette journée a une importance toute particulière à une période où l’on s’apprête à débattre de la présence des femmes en politique. La France, en la matière, a beaucoup de retard sur ses voisins européens. Il est donc temps que les femmes s’impliquent plus dans la vie de la cité. Quoi qu’on en dise, cette décision leur appartient. Et elles ont les atouts en main pour réussir : le pragmatisme, le souci du concret, une rapidité dans la prise de décision... que les hommes, politiques ou pas d’ailleurs, n’ont pas toujours.
Nice-Matin : Les législatives auront lieu dans un an. Or plusieurs circonscriptions risquent, dans les A.-M., de connaître des primaires, voire des triangulaires entre candidats du RPR. Qu’en pensez-vous ?
Margie Sudre : Seuls les candidats qui auront l’investiture du RPR seront légitimes. Cette situation est toutefois regrettable, surtout dans un département où le Front national est aussi présent. Cela dit, j’émets le souhait que, d’ici là, l’union la plus large possible se fasse jour dans les Alpes-Maritimes. La majorité présidentielle a besoin en mars 1998 d’une très grande cohésion.
Nice-Matin : Vous avez participé au dernier sommet de la francophonie, présidé à Cotonou par Jacques Chirac. Qu’en est-il résulté ?
Margie Sudre : Ce sommet a eu le grand mérité de reprendre, là où on l’avait laissée, la réforme des institutions de la francophonie. Aujourd’hui entérinée, cette réforme permettra d’élire en novembre prochain à Hanoï le premier secrétaire général de la francophonie qui sera l’équivalent du secrétaire général de l’ONU. Il s’agit d’un grand pas pour la francophonie qui ne va pas aussi mal qu’on veut bien le dire. Au contraire, la culture et la langue françaises gagnent du terrain partout dans le monde : en Europe centrale, en Afrique australe pourtant anglophone, mais qui est reconnaissante du combat mené aux côtés de Nelson Mandela contre l’apartheid en Afrique du Sud. Mais aussi à Madagascar qui a réintroduit complètement l’apprentissage du français dans ses programmes scolaires.
Nice-Matin : Ne pensez-vous pas que la francophonie est aussi, et peut-être surtout, le meilleur vecteur d’intégration des communautés étrangère en France ?
Margie Sudre : Les valeurs véhiculées par la francophonie reflètent la diversité de la population française. L’intégration passe donc en effet par le partage de la langue.
J’en suis un exemple vivant. Lorsque je suis arrivée en France à l’âge de huit ans, je parlais vietnamien un point c’est tout. Et je suis convaincue que je n’en serais pas là aujourd’hui s’il n’y avait pas eu la francophonie.
Nice-Matin : Enfin, Tahiti est l’invité d’honneur de la foire de Nice. L’exotisme est un bon produit d’appel pour une telle manifestation. Mais ne craignez-vous pas que les départements et territoires d’outre-mer soient par trop relégués au rang de carte postale ?
Margie Sudre : Les choses évoluent très vite. Les DOM comme les TOM sont de moins en moins ces satellites « exotiques et amusants » de la métropole. Ils ont pris, à l’image de La Réunion où je suis installée, leur développement en main et présentent désormais un visage de plus en plus responsable. Aujourd’hui, on ne s’installe plus en outre-mer uniquement pour bénéficier des avantages que l’État octroie notamment aux fonctionnaires. À La Réunion, ils sont pourtant importants : une prime équivalente à 53 % du salaire, plus un an de salaire au titre de l’éloignement et un voyage aller-retour tous les trois ans. Aujourd’hui, on choisit d’y vivre parce que les DOM et les TOM ont atteint un niveau de développement équivalent à celui de la métropole.
Le ministre des DOM-TOM a d’ailleurs récemment décidé de ne plus verser aux nouveaux affectés à La Réunion la prime de 53 % qui n’avait plus lieu d’être et pesait très lourd sur le budget de l’État.