Interview de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, dans "l'Evénement du jeudi" du 12 mars 1998, sur le rôle de la communauté internationale pour rétablir une situation d'"autonomie substantielle" au Kosovo.

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Média : L'évènement du jeudi

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Q. Allez-vous plaider « pour une plus grande autonomie de la province serbe du Kosovo » ?

R. Dès le 19 novembre dernier, Klaus Kinkel et moi-même avions adressé une lettre au président Milosevic, qui contenait des propositions concrètes et équilibrées, visant à la foi au règlement de la question du Kosovo et à la réintégration de la République fédérale de Yougoslavie au sein de la communauté internationale. Nous expliquions que ni le statu quo ni l'indépendance ne permettraient un règlement pacifique durable. Dans ces conditions, nous avons demandé un statut spécial pour le Kosovo. L'octroi d'une autonomie substantielle au Kosovo est en effet la seule voie qui permettra de concilier les intérêts légitimes des Serbes et des Albanais.

Q. Les accords de Dayton, qui avait occulté le problème du Kosovo, sont-ils les premiers responsables de ces affrontements ?

R. Bien sûr que non ! Les accords de Dayton portaient sur la Bosnie. En Bosnie, on a eu affaire à une véritable guerre entre différentes armées, au sein d'un État multiethnique qui avait pris son indépendance. Les accords de Dayton visaient à mettre fin à ce conflit-là, et ils y ont d'ailleurs réussi sur le plan militaire. Le Kosovo est dans une situation très différente puisqu'il s'agit de définir et de protéger les droits aujourd'hui bafoués d'une minorité albanaise au sein de la République de Serbie.

Q. Selon vous, la communauté internationale doit-elle se saisir de la question du Kosovo ?

R. C'est déjà fait. Le Groupe de contacts, l'OSCE, l'Union européenne et l'OTAN se sont déjà exprimés sur la question. Il ne s'agit pas exclusivement d'une affaire intérieure serbe, car une dégradation de la situation au Kosovo pourrait entraîner des répercussions incontrôlées sur les États voisins. Il est donc naturel que la communauté internationale s’en saisisse fermement.