Extraits de l'interview de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, à "France Soir" le 12 mars 1998, sur le dispositif de sécurité de la coupe du monde de football, la régularisation des immigrés sans papiers et la politique des visas pour les ressortissants algériens.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France soir

Texte intégral

Question :
On attend des centaines de milliers de visiteurs pour la Coupe du monde. Préparez-vous un super-dispositif pour éviter les incidents, notamment les menaces terroristes ? Comment faire en sorte que cette fête sportive ne se déroule pas sous haute surveillance policière, ce qui nuirait à son image ?

Réponse :
Mon premier souci, c’est la sécurité de cette grande manifestation, à l’occasion de laquelle la France accueillera des centaines de milliers de visiteurs. L’ensemble du dispositif de sécurité ne sera pas visible de tous les spectateurs, mais il sera considérable. À l’intérieur du stade, il incombera d’abord aux organisateurs, sauf en cas de nécessité où la police présente aux abords pourra intervenir. Il est préparé depuis des mois afin de faire face à des éventualités très diverses. L’expérience acquise par la préfecture de police et les différents services de polices, de gendarmerie et de secours, en coopération avec les polices étrangères, nous sera très précieuses.

(…)

Question :
Combien y a-t-il eu d’étrangers en situation irrégulière reconduits à la frontière depuis que vous êtes place Beauvau. Par quels moyens de transports sont-ils repartis ?

Réponse :
Un peu plus de 5 000 étrangers en situation irrégulière ont fait l’objet d’une mesure d’éloignement de juin à décembre 1997. Et cela, bien que l’opération de régularisation décidée par circulaire du 24 juin 1997 nous amène à vérifier auparavant les droits de chaque intéressé de manière très attentive, au cas où, notamment, ils ont déposé une demande. Les charters, qui ne concernaient jadis que 6 % à 7 % des éloignements, étaient des manifestations spectaculaires mais sans efficacité. Cette gesticulation portait atteinte à l’image de la France dans beaucoup de pays, parce qu’elle représentait une marque de mépris et d’humiliation. L’administration utilise tout simplement les lignes régulières de transports publics (aériennes, maritimes, ferroviaires…).

Question :
Y aura-t-il un moratoire pour les Algériens ?

Réponse :
Un moratoire général n’est nullement souhaitable : il aboutirait à vider l’Algérie de ses cadres, de ses responsables, de ses élites, au moment où le combat pour la démocratie et contre l’intégrisme est plus que jamais nécessaire. Il faut dans cette affaire considérer l’intérêt de nos deux pays à long terme et ne pas se cantonner à des mesures caritatives à courte vue. Mieux vaut assouplir la politique des visas, devenue excessivement restrictive : c’est ce qu’a entrepris le gouvernement. Les problèmes de l’Algérie seront d’abord résolus en Algérie, et non par l’installation durable de ses cadres en France. En revanche, chaque cas particulier, dès lors qu’il y a menace directe en cas de retour en Algérie, doit être examiné avec soin. La loi que la Parlement examine prévoit un asile territorial pour ceux dont il est avéré qu’ils sont personnellement menacés dans leur vie, mais il ne faut pas donner un signal général qui serait inévitablement interprété comme un signal défaitiste.