Texte intégral
Le Parisien : La gauche, selon vous, peut-elle diriger l’an prochain l’Ile-de-France ?
Dominique Strauss-Kahn : Oui. J’en ai la conviction. Nous présenterons, le moment venu, un projet global en ce sens. Déjà, nous sentons bien les préoccupations des Franciliens sont assez proches des valeurs des socialistes. Il faudra, pour ne citer que quelques exemples, réduire les déséquilibres à l’intérieur de la région par une meilleure répartition de la taxe professionnelle, mettre en œuvre une autre politique des transports, veiller à une véritable démocratie locale…
Le Parisien : Quel sera votre principal adversaire : Michel Giraud, l’actuel président de la région, ou Allain Juppé ?
Dominique Strauss-Kahn : Le combat ne se mène pas contre un homme, mais contre une majorité. Elle est largement dominée par le RPR qui dirige, depuis longtemps, la région dans des conditions d’opacité comparables à ce qui se passe à la mairie de Paris.
Le Parisien : La loi Robien est, aujourd’hui, critiquée par une partie de la majorité RPR-UDF qui lui reproche de coûter très cher à l’Etat…
Dominique Strauss-Kahn : La loi Robien est un symbole extraordinaire des contradictions de la majorité. Cette dernière s’est opposée pendant des années à la réduction du temps de travail. Elle a tout de même fini par mettre en place une loi – certes imparfaites – qui va dans le sens de la réduction du temps de travail. Mais, sur ce sujet-là aussi, le gouvernement n’a pas de vraie doctrine. Il est vrai que la loi Robien coûte atrocement cher. De plus, elle n’est appliquée qu’à titre défensif par des entreprises en difficulté. Cela dit, la réduction du temps de travail est un formidable dossier et doit s’appliquer à un champ beaucoup plus large. Il ne s’agit pas seulement d’éviter des licenciements mais, par ce biais, de créer des emplois.
Le Parisien : Jusqu’où le PS doit-il aller pour trouver un accord avec les Verts ?
Dominique Strauss-Kahn : Il est difficile de parler d’un accord tant qu’il n’a pas été définitivement signé, donc approuvé. Il est sans doute souhaitable que notre pays réfléchisse à l’avenir du nucléaire, à ses infrastructures, à une vraie politique de l’environnement, prenant ainsi en compte les préoccupations des Verts.
Le Parisien : Le PS approuve-t-il l’occupation du siège du Crédit foncier par ses salariés ?
Dominique Strauss-Kahn : On peut comprendre l’exaspération des salariés du Crédit foncier. On est aujourd’hui, après le retrait du plan du ministre de l’Economie, Jean Arthuis, dans une situation de blocage qui ne devrait pas surprendre : ce gouvernement fait chaque fois les mêmes impairs lorsque surgit un problème social.
Le Parisien : Pourquoi, cinquante ans après les faits, la spoliation des biens appartenant aux juifs pendant la guerre n’avait-elle, jusqu’ici, pas encore fait l’objet d’un examen sérieux ?
Dominique Strauss-Kahn : Notre pays n’a jamais accepté de regarder en face son histoire. Le renvoi de Maurice Papon devant les assises constitue la première reconnaissance officielle par le France de son passé. L’annonce par Alain Juppé de l’ouverture d’une enquête sur les biens juifs doit être portée à l’actif du Premier ministre. C’est un dossier difficile : il demandera du temps, mais il méritait d’être ouvert.