Texte intégral
Madame le député,
Madame la présidente,
Mesdames, Messieurs,
I. – Les journées annuelles de l'ANIG (Association nationale des infirmiers généraux) constituent toujours un moment privilégié tant pour les participants – très studieux me dit-on – venus des quatre coins de France que pour la communauté hospitalière toujours très attentive aux conclusions de vos réflexions.
Aujourd'hui, dans un cadre de réformes fondamentales de l'ensemble de système de soins, la participation de tous est plus que jamais rendue nécessaire, la concertation et la coopération interprofessionnelle sont devenues indispensables, incontournables.
Vous y trouvez tout naturellement votre place, et votre rôle y sera déterminant.
Aussi je me réjouis – et je vous remercie madame la présidente de m'avoir ainsi permis – de rencontrer les professionnels de santé à part entière (au même rang et au même titre que d'autres catégories) que sont et que doivent demeurer les infirmiers généraux. J'y reviendrai.
Vous détenez cependant au sein de l'hôpital une place particulière et importante. Place particulière, car votre fonction créée en 1971 s'est vue affirmée par la loi du 31 Juillet 1991 portant réforme hospitalière qui l'a doté du service de soins infirmiers. En confiant sa direction à l'infirmier général, le législateur a fait de lui un membre à part entière de l'équipe de direction, qui assure également et tout naturellement la présidence de la commission du service de soins infirmiers. Et l'ordonnance d'avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée n'a nullement remis en cause ni ce principe, ni cette réalité désormais bien ancrée dans la vie de nos établissements.
Place importante car si l'infirmier général anime et coordonne ainsi une grande partie du personnel paramédical de l'hôpital, il est aussi par la définition de ses fonctions, amené à participer – en liaison avec l'ensemble des autres responsables d'encadrement des filières administratives, médicales, paramédicales et techniques – aux divers projets et actions de ces catégories.
C'est à mon sens une garantie indispensable de la cohérence de l'action du service de soins infirmiers dans le cadre du projet d'établissement.
Pour vos XXIIIes journées, vous avez choisi pour thème : « L'ordonnance hospitalière, des textes à l'application. Comment s'y préparer ? ». Ce questionnement témoigne – s'il en était besoin – de l'intérêt stratégique que votre métier porte à l'évolution du système de santé en général et à l'hôpital en particulier. Mme Hermange, rapportant son expérience de terrain il y a quelques instants et empruntant à Françoise Gonnet son expression, qualifiait votre rôle de pivot. J'y souscris totalement. Et ce d'autant plus que je sais par ailleurs que c'est ce rôle, facilité par votre expérience, qui a permis la mise en place des expérimentations des nouvelles fonctions d'expertise pour les paramédicaux et de coordination des plateaux médico-techniques pour lesquelles j'ai marqué mon intérêt au récent salon des professions paramédicales. Je ne doute pas, qu'à l'issue des conclusions des groupes de travail sur ces sujets, leur mise en place définitive trouve là aussi votre appui et votre coopération pour que, comme vous le disiez, la cohérence soit au rendez-vous du décloisonnement.
II. – Pour autant, je sais – vous me l'avez encore récemment exprimé au ministère – que votre fonction éprouve encore quelques difficultés qui ne m'apparaissent pas pour autant de nature à faire douter de votre légitimité. En effet, votre demande aujourd'hui porte essentiellement sur des aménagements statutaires, sur une plus grande souplesse de gestion du corps et sur une actualisation de la formation.
II.1. En ce qui concerne les aménagements statutaires, des progrès ont été faits, de manière récente, grâce au protocole Durafour qui a permis d'améliorer la situation indiciaire de l'ensemble des infirmiers généraux. Par ailleurs, la plupart d'entre vous bénéficie de la nouvelle bonification indiciaire.
Le sujet des améliorations indiciaires est un problème global qui concerne la fonction publique dans son ensemble. Vous savez que nous sommes dans une situation de pause catégorielle sur ces sujets. Toutefois, l'administration réfléchit aux priorités qui devront être retenues à l'avenir.
II.2. En matière de carrière et de formation, je sais que plusieurs idées sont fécondes et susceptibles d'aller dans le sens de vos demandes.
S'agissant tout d'abord de la formation, vous souhaitez que votre formation initiale soit revue et améliorée. Vous avez raison, d'autant que la récente réforme de la formation des cadres de santé a elle-même beaucoup progressé.
J'ai donc demandé à la direction des hôpitaux et à la direction de l'ENSP de reprendre le programme de formation en liaison avec les représentants de votre profession et de me faire des propositions sur ce thème dans les tout prochains mois. Par voie de conséquence, l'offre en matière de formation continue devra aussi être améliorée.
S'agissant de la gestion de carrière, je connais votre inquiétude devant la trop nombreuse liste de postes soit vacants, soit occupés par des surveillants ou surveillants chefs faisant fonction d'infirmier général. Nous nous emploierons à pourvoir ces postes par des infirmiers généraux, formés, et ce, le plus rapidement possible, en cohérence avec les objectifs de bonne [bourdon] des soins et d'amélioration de la qualité des soins et de la gestion auxquels les établissements pourraient s'engager par contrat. Il peut, en outre, paraître opportun aujourd'hui de dissocier le déroulement de carrière des infirmiers généraux du classement des établissements afin de favoriser la mobilité et d'offrir de meilleures perspectives de carrière. Je sais aussi que la recherche d'un poste après la réussite au concours d'infirmier général est un sujet de préoccupation pour vous.
J'ai demandé à la direction des hôpitaux de me faire des propositions sur ce sujet, allant dans le sens d'un véritable choix de poste à l'issue de la formation à l'ENSP. Un groupe de travail, que la direction des hôpitaux a initié à ma demande, composé de représentants des services et de représentants des professionnels, s'est – vous le savez – déjà réuni. Je serai très attentif aux propositions qu'il devra là aussi faire rapidement.
Je pense – loin du conservatisme que vous évoquiez – que l'ensemble de ces propositions sont réalistes, de nature à tracer avec vous des perspectives d'amélioration et devraient déboucher, dès 1997, sur des progrès significatifs et concrets.
Quant à votre position au sein des équipes de direction et au regard de vos missions ; je vous rassure pleinement – quitte à me répéter : votre place existe, elle est largement confirmée par la réforme de l'hospitalisation. Il y a là un défi d'envergure, je ne doute pas, là non plus, que vous sachiez le relever.
III. – Je voudrais d'ailleurs maintenant, d'une manière plus large, revenir sur la place et le rôle de l'infirmier général dans la nouvelle réforme hospitalière. L'ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée que nous avons élaborée avec Jacques Barrot est fondée sur un triple souci :
- améliorer la qualité des soins et de l'accueil à l'hôpital ;
- responsabiliser davantage de chacun des acteurs et partenaires de l'hôpital ;
- mieux insérer l'hôpital dans son environnement.
Ces principes, clairement inscrits dans l'ordonnance, ne font que refléter la ferme volonté du gouvernement de guider et d'accompagner l'évolution de l'hôpital avec l'ensemble des personnels qui y travaillent. Comment accompagner cette évolution, quelle est la place des infirmiers généraux dans ce grand projet ? Cette question constitue le thème de vos journées de travail, aussi je n'aurais pas l'outrecuidance d'y répondre en quelques minutes. Il s'agit simplement pour moi de vous rappeler quelques idées essentielles de la réforme et comment je perçois le rôle de l'infirmier général.
III.1. Tout d'abord l'infirmier général est l'un des principaux garants de la qualité des soins infirmiers et de la qualité de l'accueil des patients et des usagers à l'hôpital. Tous les établissements de santé devront, d'ici cinq ans, s'engager dans une procédure d'accréditation de leurs activités. L'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) élaborera les méthodes et les référentiels de l'accréditation et validera les rapports. Des experts indépendants et agréés par l'ANAES réaliseront les visites d'accréditation. Bien évidemment l'ensemble ou corps infirmier dont les IG, devra faire partie de ces experts, au même titre que les autres paramédicaux, les médecins, les directeurs ou les ingénieurs. La volonté de responsabilisation de tous les professionnels constitue un axe fort de la réforme, vous le savez.
Au sein même de l'ANAES, la section de l'accréditation du conseil scientifique qui élabore les méthodes comprendra des personnes qualifiées notamment dans les domaines des soins, de l'évaluation, de l'organisation ou de l'hygiène hospitalière, aux termes mêmes du projet de décret qui est actuellement examiné par le Conseil d'État. Le collège d'accréditation qui accréditera les établissements devra également comprendre des professionnels qui soient spécialistes de ces domaines. Il n'appartient pas au gouvernement de composer ce collège, mais il me semble que l'infirmier général y aurait toute sa place. Ce sera là la reconnaissance naturelle de votre qualité de professionnel de santé que j'évoquais au début de mon propos et cette participation multiforme permettra de faire bénéficier les travaux de cette instance de votre expérience.
Nous avons voulu aussi que l'usager soit au cœur de la réforme : qu'il bénéficie de toutes les informations nécessaires à son séjour ou à sa visite dans un livret d'accueil généralisé ; qu'il puisse s'exprimer sur la qualité de sa prise en charge grâce à des critères d'évaluation efficaces et mesurables. Ceci donne une dimension toute particulière à votre fonction et engage les équipes de soins infirmiers dans leur comportement ainsi que dans leurs pratiques quotidiennes.
III.2. En deuxième lieu, l'infirmier général devra davantage s'impliquer dans la gestion de l'hôpital puisque l'ordonnance prévoit que les équipes médicales et paramédicales pourront constituer, à leur initiative, des centres de responsabilités.
Ces centres pourront bénéficier d'un budget et de délégations de gestion. Ils seront chargés de la mise en œuvre d'actions au bénéfice des patients, leurs objectifs et moyens étant fixés par un contrat interne avec le directeur de l'établissement. Vous aurez là, me semble-t-il, en liaison avec le corps médical et l'encadrement, un vaste champ d'exercice, aussi bien de vos compétences et de vos expériences que de votre imagination.
III.3. Enfin l'infirmier général aura un rôle à jouer dans l'ouverture des établissements hospitaliers vers l'extérieur. Il est impératif que, dans les trois ans à venir, les établissements publics inscrivent leur développement dans une communauté d'établissements dans le secteur sanitaire où ils sont implantés. Les hôpitaux se rapprocheront également des cliniques privées afin de réaliser des activités de soins dans les mêmes locaux et avec des moyens communs.
En ce qui concerne les réseaux de soins, l'infirmier général pourra favoriser et organiser le développement des relations du corps infirmier hospitalier avec les infirmiers libéraux, bien sûr en étroite collaboration avec les autres cadres soignants, afin de venir en appui du réseau médecin hospitalier-médecin de ville et permettre ainsi le suivi et le maintien des malades à domicile.
De même, je vous confirme mon très vif intérêt sur votre suggestion concernant le rôle que pourraient jouer les infirmiers généraux dans le développement d'une politique de soins dans les hôpitaux locaux. Je vais demander à la direction des hôpitaux de me faire des propositions sur la manière dont pourrait se concrétiser cette suggestion. Elle pourrait s'inscrire dans le cadre des communautés d'établissements facilités par les dispositions de l'ordonnance.
Enfin, je souhaite rappeler que les agences régionales de l'hospitalisation ont un rôle important mais une structure légère. Elles travailleront avec les caisses régionales d'assurance maladie et avec les directions régionales des affaires sanitaires et sociales où, en qualité de CTRSI (conseillers techniques régionaux en soins infirmiers), les infirmiers généraux sont déjà représentés.
Madame la présidente, Mesdames, Messieurs, simplement au travers de quelques exemples, vous aurez pu mesurer l'importance de la place qui est faite aux infirmiers généraux dans la nouvelle réforme. Sachez que moi-même et mes services sommes à votre écoute.
Je souhaitais par ma présence ici aujourd'hui vous le témoigner et vous redire toute l'estime et toute l'attente que suscite pour moi votre engagement de chaque jour dans la mise en œuvre et le suivi des actions de prévention, de soins et de réhabilitation de la santé de nos compatriotes.
En vous remerciant de votre accueil, je vous souhaite un fructueux travail et vous assure de mon attention personnelle aux conclusions que vous voudrez bien me transmettre.