Texte intégral
Dans cette période de critique constante des partis politiques, pourquoi ne pas observer un jour de trêve et profiter ainsi de l'anniversaire du RPR pour lui reconnaître les justes mérites qui lui sont dus ?
Après le retrait du Général ou après la mort de Georges Pompidou, la tentation du repli aurait pu saisir les gaullistes autour d'une vaine nostalgie. Ils ont choisi l'inverse. Les dirigeants du RPR, Jacques Chirac hier, Alain Juppé aujourd'hui, ont su puiser dans leur héritage les raisons de prendre les bonnes orientations, celles qui convenaient pour notre pays.
Sur l'Europe, une certaine vision du gaullisme aurait pu conduire à l'isolement. C'est une autre tradition, non moins gaulliste, qui fut choisie. Dès 1949 le général de Gaulle pouvait affirmer que « l'unité (de l'Europe) prendrait, d'abord, la forme d'une confédération. Ainsi, chaque État garderait-il sa souveraineté, sauf dans les domaines que les nations attribueraient à la Communauté pour qu'y soit des peuples confédérés l'ajustement des productions nationales et des échanges extérieurs ; la monnaie (...) le développement culturel et scientifique »· Voilà pourquoi nous avons toujours pu marcher ensemble vers cet horizon.
En 1986, nous pensions que la France n'avait rien à redouter d'une gestion plus libérale de l'économie. On aurait pu nous opposer le souvenir des nationalisations de 1945 et l'ambiance de contrôle économique qui régnait alors. Jacques Chirac fit un choix inverse. Il s'appuya sur la critique des nationalisations, proférée par le général de Gaulle lui-même au temps du RPF, pour lancer la France dans le grand mouvement de privatisation qui continue de se poursuivre dix ans après. S'inscrivant dans la lignée de Jacques Rueff – celui qui fut, grâce à l'appui inconditionnel du général de Gaulle, l'artisan du redressement économique de 1958 – Édouard Balladur put démanteler un système trop rigide d'économie administrée.
La décentralisation elle-même fit partie des priorités du général de Gaulle, sous le nom de régionalisation. Enfin, face au défi et au déni que jette à la France l'existence d'un parti comme le Front national, le RPR pouvait puiser dans sa plus haute tradition historique, fondée un certain 18 juin 1940, les motifs d'un refus de tout compromis.
Pour ces raisons et tant d'autres, les gaullistes et les libéraux ont une longue histoire commune. Comme dans toute famille, nous avons pu nous disputer, nous n'avons jamais su nous séparer. Le RPR et l'UDF ont édifié une alliance politique originale où la complémentarité et le respect de la diversité sont fondés sur une estime réciproque. Je sais bien que la culture de parti exacerbe les différences et tend à l'ancrage des formes identitaires. Je sais aussi que nous avons toujours su dépasser de tels obstacles. Il le faut plus que jamais car les échéances qui nous guettent seront âpres.
Voilà pourquoi cet anniversaire, qui est un moment de joie pour nos partenaires, doit être un moment d'espérance peur la France.