Lettre de M. Jean-Pierre Lemaire et Mmes Françoise Galland, Liliane Dayot et Marie-Françoise Pirot, membres démissionnaires de l'exécutif de l'AREV, à la Coordination générale de l'AREV, et réponse de l'exécutif de l'AREV, publiées dans "Rouge et Vert" le 2 octobre 1996, sur les raisons politiques de ces démissions et les débats entre les mouvements alternatifs et écologistes de gauche.

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Circonstance : Réunion de la Coordination générale de l'AREV les 14 et 15 septembre 1996 (nouvelle composition de l'exécutif de l'AREV)

Média : Rouge et Vert

Texte intégral

Rouge et Vert - 2 octobre 1996

Coordination générale de l’AREV

Lettre à la coordination générale

Les décisions prises lors de la dernière coordination générale constituent un tournant assez net dans l’histoire de notre organisation.

Après l’échec des négociations larges entamées depuis plusieurs mois, les Verts proposaient de s’engager dans des discussions plus restreintes visant à poser la question d’une organisation unifiée des écologistes et des alternatifs. Plutôt que d’accepter cette perspective et d’accepter ces discussions sans s’engager sur le résultat, la coordination a préféré des propositions de comité de liaison (refusées d’avance par les Verts), et d’accords électoraux pour 1998.

Cette décision est pour nous une erreur stratégique majeure.

Elle rompt d’abord avec la volonté ancienne de dépassement affirmée tant à l’occasion de notre congrès fondateur, qu’il y a quelques mois à Grenoble. S’il est exact que le texte adopté à Grenoble envisageait un regroupement large, il n’excluait pas néanmoins des rassemblements plus limités dès lors qu’y étaient posées nettement les questions d’identité.

Le refus du débat organisationnel avec les Verts correspond à une logique de repli, à un renoncement pour au moins deux ans à toute perspective de recomposition, en attendant que l’hypothétiques conditions idéales soient réunies. Ce refus nous prive de la possibilité de peser sur nos partenaires en continuant le débat avec eux sur le nécessaire ancrage social, et l’abandon du « paradigme écologiste ». Il se fonde sur une vision erronée en sous-estimant le tournant à gauche opéré par les Verts, et leurs avancées importantes sur une série de terrain (comme la réduction du temps de travail).

L’idée du repli sur un renforcement de l’AREV, qui s’apparente d’ailleurs pour beaucoup à la méthode Coué, néglige un fait essentiel : nous n’avons été en capacité de peser sur les rapports de forces politiques qu’à l’occasion de processus unitaires larges, ouvrant la perspective d’espoir et de recomposition. Ce que nous propose la dernière coordination, c’est en définitive de tirer un trait sur la seule période où nous avons pu marquer des points : la campagne de Dominique Voynet. L’AREV est une force trop faible pour exister durablement seule.

Si on reste attaché à une inscription en positif dans un processus réel de recomposition deux orientations sont possibles : en effet, à l’échelle nationale, deux courants existent en dehors des partis traditionnels : l’extrême-gauche et l’écologie. Il n’est pas absurde de travailler prioritairement avec les libertaires et la LCR à l’émergence d’une nouvelle force à partir du renouveau des luttes sociales. Pour notre part, nous estimons qu’une organisation écologiste et alternative peut représenter un potentiel de renouvellement plus significatif tant dans les mouvements que dans les confrontations électorales.

Faute de choisir, l’AREV court le risque de s’effilocher progressivement voire de s’engager dans des dérives groupusculaires toujours possibles en deçà d’un certain seuil militant.

Nous ne souhaitons pas participer à la gestion d’une orientation aussi grave de conséquences. Nous prions donc la coordination nationale d’enregistrer notre démission de l’exécutif.

Jean-Pierre Lemaire/François Galland/Liliane Dayot/Marie-Françoise Pirot

 

Réponse de l’exécutif

Le retrait de l’exécutif de nos quatre camarades appelle une réponse. Le rassemblement des alternatifs, des écologistes et des progressistes voulu par l’AREV vise deux objectifs principaux :

1. Créer une force politique nouvelle capable de porter sur le plan politique les aspirations des mouvements sociaux.

2. Faire contrepoids au positionnement gestionnaire du PS. Pour concrétiser cette orientation le congrès de l’AREV a proposé un processus de rassemblement aux six organisations représentatives de ces courants.

Les Verts ont fait échouer ce processus et privilégie depuis le regroupement, en leur sein, des seuls écologistes.

Pour la majorité de l’AREV il n’y a pas égalité entre ces deux choix pour deux raisons fondamentales.

Le rassemblement des seuls écologistes est insuffisant pour intéresser la plupart des animateurs des mouvements récents. D’emblée cela ôte une bonne part de la force et de la colonne vertébrale indispensable à une nouvelle formation politique visant une réelle transformation sociale. Un regroupement plus large, comme l’AREV l’a proposé, aurait moins de handicap sur ce point, en assurant dès le départ un pluralisme des itinéraires politiques et une plus grande richesse des ancrages sociaux.

Le projet de regroupement des Verts est couplé à la perspective d’une coalition majoritaire avec le PS. Le rapport des forces est largement déséquilibré en l’état actuel.

Le regroupement les seuls écologistes n’est pas à même de modifier sensiblement cet état de fait.

Dans ce contexte proposer à l’AREV le choix d’un ralliement aux Verts s’avérerait rapidement comme un raccourci contre-productif.

Les conditions pour créer une force politique nouvelle sont encore à réunir. Nous souhaitons pour notre part développer l’AREV, regrouper en son sein ou avec elle les partisans d’une alternative rouge et verte, d’une éthique politique exigeante. Nous voulons tisser des liens plus étroits avec les militants des mouvements sociaux, renforcer nos partenariats avec les Verts comme avec la CAP, nous inscrire dans les débats aussi larges et ambitieux que possible avec les forces de la gauche établie, critique et écologiste.

Pour ce faire nous aurons besoin de tous, des nouveaux qui nous ont rejoint et nous rejoindront, comme des « anciens ». Nous espérons retrouver dans cette démarche les camarades qui ont quitté l’exécutif.

L’exécutif de l’AREV

Composition de l’exécutif de l’AREV après la coordination des 14-15 septembre :
    Raoul Arancibia (campagnes)
    Eugène Begoc (immigration, information interne)
    Jean-Jacques Boislaroussie (élections, relations extérieures)
    Mathieu Cologan (communication, jeunes)
    Michel Fiant (emploi-entreprises, formation)
    Arnaud Gauthey (jeunes)
    Raymond Gené (élus, relations extérieures)
    Agnès Mémin (femmes, emploi-entreprises)
    Henri Mermé (trésorerie, organisation)
    Michel Thomas (élus, organisation)
    Julie Viguié (femmes, communication)

 

Rouge et Vert - 9 octobre 1996

17 octobre, nos revendications pour la justice

Alors que les écarts de revenus se creusent dans notre société, Juppé taxe encore davantage les salariés, les retraités, les chômeurs. Cette politique aggrave le chômage et la précarité en baissant la consommation populaire. S’il y a des déficits, donnons du travail à tous pour qu’ils cotisent à la sécurité sociale, taxons les mouvements de capitaux et prenons l’argent chez ceux qui disposent des plus gros revenus et des grandes fortunes. Assurons la reconnaissance d’une pleine citoyenneté pour les exclus ce qui passe notamment par l’attribution d’un revenu décent pour vivre et la suppression de la dégressivité de l’allocation des chômeurs.

Pour l’emploi : réduction massive du temps de travail

Pour créer des emplois pour les chômeurs et les précaires, pour enrayer l’exclusion, exigeons la réduction massive du temps de travail sans baisse des salaires. Le passage aux 32 heures pour créer 2 millions d’emplois. Pour que ces emplois soient socialement et écologiquement utiles le contrôle des travailleurs et des usagers sur les décisions des entreprises concernant l’emploi doit s’accompagner d’un contrôle sur la fiscalité de la production et sur le caractère non précaire des emplois créés.

Pour une relance économique par les services publics

Le gouvernement Juppé redouble d’attaques et de menaces contre les services publics. Il rogne les moyens consacrés aux écoles, aux hôpitaux, il cherche à privatiser les transports, l’électricité, les télécoms. Défendre les services publics, c’est agir pour les usagers, les malades, les générations futures, assurer l’insertion des jeunes. Contre le pouvoir financier et sa politique d’austérité, remettons en cause les critères libéraux dans la construction européenne et imposons un traité pour une Europe sociale et démocratique.

Développons et modernisons les services publics, mettons en œuvre des plans incitatifs en matière de logement, d’éducation, de transport. Relançons l’économie pour un développement durable répondant aux besoins sociaux et écologiques.