Interview de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, à France Inter le 26 juin 1996, sur l'aide au développement et la mondialisation de l'économie et sur le Thème "Europe, G7 : les Grands peuvent-ils sauver l'emploi ?".

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Média : Emission Objections - France Inter

Texte intégral

« Europe, G7 : les "Grands" peuvent-ils sauver l’emploi ? »

Avec la participation de Pierre Le Marc (France Inter), Annette Ardisson (France Inter), Fabien Roland-Levy (Le Parisien), Jean-Michel Aphatie (Le Parisien).

Emission animée par Gilbert Denoyan sur France Inter (avec les rédactions de France Inter et du Parisien).

M. Denoyan : Bonsoir.

Le sommet du G7 qui débutera demain soir à Lyon et qui traitera en priorité du problème de l’emploi rectifiera peut-être la fâcheuse image qu’ont donné d’eux les Européens au sommet de Florence, incapables de trouver des réponses à la crise de l’emploi qui frappe l’Europe, et particulièrement la France.

L’Europe apparaît en panne à un moment où le monde change et que des tensions apparaissent à nouveau au Proche-Orient après l’élection de Monsieur Netanyahu à la tête du gouvernement israélien. En Russie aussi, à la veille de l’élection présidentielle du 3 juillet.

Invité d’Objections ce soir, Monsieur Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères.

Bonsoir.

M. de Charrette : Bonsoir.

M. Denoyan : L’actualité internationale est particulièrement riche pour suffire à occuper l’émission, mais nous vous interrogerons également sur la morosité actuelle qui semble régner dans la majorité…

M. de Charette : … Eh bien, moi, je ne suis pas morose.

M. Denoyan : Vous n’êtes pas morose…

M. de Charette : … Non, pas du tout. Vous nous direz pourquoi vous ne l’êtes pas ? Alors que Monsieur Séguin, par exemple, ce matin, l’était.

Nous allons vous interroger avec : Annette Ardisson, Pierre Le Marc de France Inter ; Fabien Roland-Lévy et Jean-Michel Aphatie du Parisien-Aujourd’hui.

D’abord, peut-être, votre réaction, Monsieur le ministre, sur l’attentat qui a eu lieu cette nuit à Dhahran, sur une base où des dizaines de soldats américains ont été tués et d’autres blessés. Ne craignez-vous pas qu’il y ait de nouveau une très forte tension dans cette région ?

M. de Charette : Tout d’abord, je voudrais dire que la France, vous vous en doutez, s’associe profondément à ce drame qui touche des soldats américains. Et, le président de la République a exprimé au président Clinton l’émotion, l’émotion du président, la sienne, du gouvernement, et je crois qu’on peut dire aussi l’émotion du peuple français à l’égard du peuple américain éprouvé.

C’est vrai qu’il y a le risque, chaque fois que le processus de paix connaît un moment de doute ou d’incertitude, que ce soit à nouveau une opportunité qui s’ouvre pour le terrorisme. Il faut bien comprendre qu’au Moyen-Orient, il y a l’armée de ceux qui veulent la paix. C’est l’armée des petites gens, de tous les côtés, qu’ils soient Israéliens ou qu’ils soient Arabes et qui, pour beaucoup, subissent comme un malheur interminable, 45 années de conflit et de déchirement. Il y a beaucoup de chefs d’État et de gouvernement qui veulent la paix. Je crois franchement, parce que je les connais personnellement, la quasi-totalité.

Et puis, il y a le risque qui existe, parce qu’il y a, en effet, des forces, des forces obscures, des forces du mal, souvent cachées, rarement à visage découvert, quelquefois à l’abri de je ne sais quelle conviction nationale ou religieuse, dénaturée évidemment, qui sont tentés de barrer la route au chemin de la paix par tous les moyens. On l’a vu depuis de nombreuses années. On l’a vu au cours de ces derniers mois. Et je crois que c’est une raison de plus pour que tous ceux qui ont une influence, dans la région, ou qui, de l’extérieur, peuvent contribuer à la paix, de coaliser leurs efforts et de redoubler leurs actions pour que le processus de paix se poursuive et, si c’est possible, s’accélère.

Mme Ardisson : Mais vous liez cet attentat davantage au pas marqué par le processus de paix entre Arabes et Israéliens ou à une fragilité propre du Royaume Moabite.

M. de Charrette : Je n’en sais rien. Et, comme il n’y a pas de revendications, je me garderai bien de faire quelques interprétations ici. Je dis seulement que, dans cette région, la grande question, c’est celle de la paix et de la concorde entre les nations et que, tant qu’on n’y sera pas parvenus, il y a en effet des risques que la violence retrouve son chemin, des tentations que ces forces obscures dont je parlais redoublent d’efforts pensant qu’ils ont peut-être une petite chance de réussite.

M. Le Marc : Vous parliez d’influence. La droite est arrivée au pouvoir en Israël. Un nouveau gouvernement a été nommé, il est présidé par Monsieur Netanyahu. Le voyage du secrétaire d’État américain, Monsieur Warren Christopher, s’est passé très mal. Est-ce que vous ne redoutez pas une perte de contrôle des États-Unis sur Israël, de contrôle de tutelle ?

M. de Charette : Je ne peux pas me prononcer sur votre question. Demain, je rencontrerai très longuement Warren Christopher à Lyon, juste avant le G7. Nous avons prévu de passer deux heures et demie ensemble et de déjeuner ensemble. Ce qui nous permettra de faire un travail très sérieux, très amical et chaleureux.

M.  Le Marc : N’êtes-vous pas inquiet sur le développement de la situation en Israël ? du durcissement de la position du gouvernement israélien ?

M. de Charette : Je vais vous dire, Monsieur Le Marc, pour l’instant, je me garderai bien d’être inquiet avant de savoir et de connaître. Il est vrai que j’ai entendu, nous avons entendu pendant la campagne électorale des propos qui ont été tenus par celui qui, depuis, a gagné ces élections et qui est devenu Premier ministre, des propos qui sont contraires au processus de paix. Mais, bon, c’est la campagne électorale et je n’ai pas à juger. Il est un fait que le peuple israélien s’est choisi un Premier ministre. Je ne vais évidemment pas m’ingérer dans les affaires intérieures du peuple israélien, dont les autres pays n’ont pas à se mêler. Mais pour l’instant la communauté internationale attend, elle n’a pas encore la réponse, de savoir quelle sera la ligne, quelles seront les décisions prises par le gouvernement Netanyahu. Et je dirais qu’il n’y a pas de raison de semer l’alarme à l’avance, prématurément.

Les contacts que j’aurai demain avec Warren Christopher, comme d’ailleurs le déplacement que je ferai dans la région, comme la visite que Monsieur Netanyahu effectuera à Paris prochainement, tout cela seront les éléments qui nous permettront d’y voir plus clair. Et aussi de dire qu’il n’y a pas d’autre solution que la poursuite du processus de paix sur les bases qui ont été d’ores et déjà convenues, c’est-à-dire la poursuite des négociations de deuxième phase, c’est-à-dire les négociations définitives, entre les Palestiniens et les Israéliens qui doit porter sur le statut des territoires, qui doit porter sur l’auto­détermination des Palestiniens, qui doit porter sur le statut de Jérusalem. Questions qui ne peuvent pas être tranchées à l’avance par un seul des partenaires.

De même que, s’agissant des discussions avec Israël et la Syrie ou Israël et le Liban, la règle qui a été adoptée, comme base de négociations, c’est le principe de l’échange de la terre contre la paix. Et que, par conséquent, on ne peut pas renoncer aujourd’hui.

C’est cette seule voie. Il n’y a pas d’alternative à la paix. La seule alternative, hélas ! C’est la guerre.

M. Roland-Lévy : Si on a bien lu l’interview du président de la République ce matin au « Progrès de Lyon », il s’apprête, à la table du G7, à reprocher aux grandes nations, aux Américains, je pense, de ne pas suffisamment financer les pays en voie de développement. Et au même moment, on apprend que la France se prépare à opérer une baisse globale de l’enveloppe financière qui sert à aider ces mêmes pays. J’aimerais que vous nous expliquiez s’il y a une contradiction dans ces deux attitudes et quelle est la solution ?

M. de Charette : Il ne faut pas mélanger les informations d’une nature différente. Il y a, d’une part, les discussions propres de pays à pays entre la France et tel ou tel de ses partenaires et, d’autre part, le sujet global de l’aide au développement.

Quels sont les chiffres aujourd’hui, pour que ceux qui nous écoutent y comprennent quelque chose ? Le pays qui donne le plus, c’est le Japon, 14 milliards de dollars d’aide au développement. Celui qui vient immédiatement après, c’est la France, 8 milliards 500 millions de dollars, 50 milliards de francs. Et puis, ensuite, il y a la République fédérale allemande et les États-Unis, avec 7 milliards et demi, ne viennent qu’en quatrième position. C’est tout de même quelque chose d’étonnant 1 250 millions d’habitants, le pays le plus riche du monde et le quatrième seulement par l’aide au développement.

Si vous faites une autre comparaison, si vous prenez tous les pays d’Europe réunis, en additionnant ce que l’Union européenne donne et ce que chacun des États donne, en multi et en bilatéral, vous atteignez le chiffre remarquable de 31 milliards de dollars. L’Union européenne, c’est à peu près la puissance économique des États-Unis. D’un côté, 31 milliards de dollars, de l’autre, 7,5. Et la tendance, c’est cela qui est très inquiétant, est à la baisse pour la quasi-totalité des pays, à l’exception du Japon et de la France qui se tiennent aux alentours de 0,65, 0,70 % du PNB. Ce mouvement est très inquiétant parce qu’il n’est pas imaginable que les pays les plus riches du monde – à Lyon, ce sont tout de même les pays les plus riches du monde qui vont se réunir – puissent avoir comme projet de réduire leur aide aux pays les plus pauvres du monde.

Il y a deux événements qui se produisent, c’est l’enrichissement croissant des pays les plus riches et le fait qu’un petit nombre de pays, notamment les pays africains, ceux qu’on appelle les PMA, les pays les moins avancés, dans le langage technocratique des institutions internationales, sont, eux, de plus en plus pauvres. Peut-on imaginer qu’il y ait un monde de paix dans lequel les riches s’enrichissent et les pauvres s’appauvrissent.

M. Denoyan : Cela, nous l’avons bien compris…

M. de Charrette : Oui, vous l’avez bien compris, mais, Monsieur Denoyan, il faut essayer de lutter contre cela.

M. Denoyan : Mais, pourquoi allons-nous diminuer notre aide ?

M. de Charette : Je vous ai dit qu’il y avait une confusion entre deux informations : l’une qui concerne les discussions qu’il peut y avoir entre un pays et la France et l’ensemble de l’aide française. L’ensemble de l’aide française ne diminue pas. En 1996, il n’y a pas eu de diminution de l’aide française.

M. Denoyan : Le pays dont on parle, c’est l’Algérie. Une partie des sommes qui allait à Algérie vont être redistribuées d’une manière différente. Il y aura une diminution sur l’aide à l’Algérie et une augmentation sur l’aide à la Tunisie et au Maroc.

M. de Charette : Mais non…

M. Denoyan : … Je vous demande ?

M. de Charette : Pourquoi dites-vous cela, Monsieur Denoyan ?

M. Denoyan : Eh bien, vous allez me répondre et me préciser la position de la France.

M. de Charette : Depuis 24 heures, je lis des choses extraordinaires, je lis des choses formidables dont je me demande d’où elles sortent d’ailleurs ? Un article paraît dans ce qu’il est convenu d’appeler un journal du soir qui sort des informations de son chapeau, dont je ne dispose, donc qui sont, permettez-moi de vous le dire, des informations fausses et qui déclarent tout bonnement que la France a l’intention de couper les vivres à l’Algérie. Mais pas du tout ! D’où vient cette idée saugrenue ? La France a des relations normales avec l’Algérie. Elle aide considérablement l’Algérie. Elle développe avec l’Algérie, soit des dons, soit des crédits qu’on appelle concessionnels, c’est-à-dire des crédits à des taux soutenus par l’État, donc très bas, soit des crédits commerciaux qui sont la marque de deux pays qui ont des relations très étroites, avec lequel les échanges commerciaux et l’aide sont à un niveau élevé, et on me dit : « Vous allez couper les vivres à l’Algérie », pour la sanctionner en prime. Mais de quoi, grands dieux ?

M. Aphatie : L’article ne disait pas que vous alliez couper les vivres à l’Algérie…

M. Denoyan : … Que vous alliez les diminuer fortement.

M. Aphatie : L’article disait que l’aide actuelle de la France était de 6 milliards, c’est un chiffre que vous devez confirmer, je pense, et que le Quai d’Orsay s’apprêtait à ne verser plus que 3 milliards à l’Algérie.

M. de Charette : Eh bien, je vous dis que c’est faux.

M. Aphatie : Vous maintenez l’aide à son niveau ancien ?

M. de Charette : On ne peut pas d’ailleurs, aujourd’hui, avancer les chiffres pour une raison : quelle est la situation ? Je vais essayer de mettre un peu de clarté dans cela, quitte, pour répondre à vos interrogations, à aller un peu trop dans la technique.

La réalité est la suivante : nous avons ouvert en 1994, au terme d’une négociation franco-algérienne, un montant d’un milliard de dons. Mais ce n’est pas sur un an, ce n’est pas sur 1994. C’est un milliard et quand la somme est dépensée dans des projets, dans des réalisations on rouvre la négociation. On est à peu près dans la période où il va falloir rouvrir une négociation. Elle n’a pas été ouverte. Où l’auteur de cet article a-t­il trouvé de pareilles informations, qu’on allait les diminuer ? Puisque la discussion n’a pas commencé. Puisque, jusqu’à présent, cela n’a pas paru nécessaire aux deux parties parce qu’il y avait encore de l’argent à dépenser.

Et, par ailleurs, il y a des crédits concessionnels et des crédits commerciaux qui font la différence entre 1 milliard et 5 milliards et pour lesquels il y a tantôt des rubriques qui ont été renouvelées, tantôt d’autres qui sont en cours, tantôt d’autres qui devront être renégociées. Autrement dit, ce n’est pas un paquet annuel, c’est un flux qui, au fur et à mesure de sa consommation, fait l’objet d’ajustement, de complément, d’augmentation. Vous ne pourrez pas trouver la preuve, je vous le dis franchement, parce qu’elle n’existe pas, qu’il y aurait de la part de la France je ne sais quelle mauvaise intention vis-à-vis de l’Algérie, puisque c’était cela que voulait dire le journaliste du monde. Et d’ailleurs, il confirme…

M. Denoyan : … C’est clair…

M. de Charette : … Mais non, Monsieur Denoyan.

M. Denoyan : Mais c’est clair puisque vous venez de répondre.

M. de Charette : Je vais aller un petit peu plus loin parce qu’il y a des moments où tout cela est irritant parce qu’on s’ingénie à rendre les relations franco-algériennes compliquées. Et je lis dans le journal d’aujourd’hui, après le démenti fait par les services du Quai d’Orsay, que nous confirmons que nous allons diminuer. Non, il ne faut tout de même pas exagérer ! La France est attachée à avoir avec l’Algérie des relations claires, des relations de partenaires, amicales, et nous n’allons pas changer notre attitude.

M. Le Marc : Le sommet européen de Florence a été un échec en matière d’emploi, emploi qui est l’obsession du gouvernement français et du président. Jacques Chirac compte, au cours des travaux du G7, poser le problème de la mondialisation et des correctifs à apporter à la mondialisation. Pensez-vous qu’il sera davantage entendu à Lyon qu’il ne l’a été à Florence ?

M. de Charette : Il y a deux sujets. On va en prendre un à la fois, puis on reviendra sur l’autre, si vous voulez. Le sommet européen a-t-il été un succès ou un échec ? Je suis prêt à en parler, je crois que la vérité est plutôt à mi-chemin entre ces deux adjectifs définitifs.

M. Denoyan : C’est à moitié plein, à moitié vide.

M. de Charette : Voilà ! On peut y revenir.

M. Denoyan : On va y revenir.

M. de Charette : Vous avez parlé du G7, c’est l’actualité.

M. Le Marc : Parlons du G7.

M. de Charette : Le président de la République a, en effet, aujourd’hui la charge du G7 parce que la France préside le G7 en 1996. Le G7, comme tous ceux qui nous écoutent le savent, c’est la réunion des pays les plus riches du monde : les États-Unis, le Canada, le Japon, la France, la Grande-Bretagne, la République fédérale d’Allemagne et l’Italie. Et s’y ajoute en deuxième partie, dans la partie politique, la Russie. Les sept pays les plus riches du monde se réunissent comme tous les ans et le président de la République, puisqu’il préside la séance, a choisi l’ordre du jour, il a inscrit « la mondialisation ».

Je voudrais pendant quelques secondes, Monsieur Denoyan, retenir l’attention de ceux qui nous écoutent. La mondialisation, qu’est-ce que c’est ? Et est-ce que c’est bon pour nous ou est-ce que c’est mauvais ? Mondialisation, ça veut dire qu’en réalité, désormais, la quasi-totalité des pays du monde, sauf naturellement les pays moins avancés, sont en train de connaître une profonde transformation et que, après avoir été longtemps des pays quasiment inconnus, qui ne participaient pas à la vie des marchés du monde, qui ne participaient pas à la vie industrielle, à la vie économique, à la vie commerciale, à la vie financière, bref qui étaient, au fond, à l’écart, sont maintenant en train de se développer à des rythmes formidables et ils commencent à connaître une vraie richesse. Je vais vous donner des exemples et des chiffres.

La Chine, tous les ans, deux millions de Chinois accèdent au niveau de vie qui font d’eux des participants à l’activité économique. L’Indonésie, qui sait où est l’Indonésie ? 140 millions d’habitants, c’est énorme, le sixième pays par la population mondiale, dont les observateurs du Fonds monétaire international annoncent que, dans moins de dix ans, ce sera la 7e puissance économique mondiale. Voilà des pays qui arrivent sur le monde. Est-ce bon ? Mais évidemment que c’est bon. Et je voudrais dire à tous ceux qui nous écoutent que je sais que ça pose des problèmes, mais je vais y revenir, mais d’abord, pour l’essentiel, c’est bon. C’est bon pour eux, c’est bon pour nous.

Cela veut dire qu’il y a des gens qui, désormais, vont consommer, vont produire, vont participer à l’activité et qu’ils vont fournir dans le monde un surcroît de possibilités pour réussir et pour gagner.

M. Denoyan : Monsieur de Charette, je voudrais juste une information, c’est que la France vient d’être éliminée de la Coupe d’Europe de football par six penalties à cinq. Ce sont les Tchèques qui iront en finale.

M. de Charrette : Alors, là, vous gâchez mon enthousiasme…

M. Denoyan : … Je vous gâche votre enthousiasme, mais il fallait donner l’information. C’est Pedros qui vient de rater son penalty.

M. Le Marc : Le G7 aura lieu tout de même.

M. Denoyan : Le G7 aura lieu tout de même et il y aura ce débat sur la mondialisation de l’économie.

M. de Charette : Oui, mais beaucoup de Français étaient passionnés par ce match et espéraient que nous finirions en finale.

M. Denoyan : Nous, les premiers.

M. de Charette : Je vais vous dire quelque chose, Monsieur Denoyan, il y a un truc formidable chez les sportifs, formidable, dont les hommes politiques devraient souvent s’inspirer, c’est que les sportifs, quand vous les entendez commenter, je suis sûr que vous allez entendre ce soir les commentaires du capitaine de l’équipe de France, des joueurs, ils vont dire, ce qu’on entend chaque dimanche soir, des choses merveilleuses, c’est-à-dire qu’ils disent : « Oui, c’est vrai, cette fois-ci, l’équipe d’en face était meilleure que la nôtre. Cette fois-ci, je ne m’étais pas assez bien préparé, quand ce sont les sports individuels, mais la prochaine fois, on sera meilleurs ». Ils ont une sincérité, une objectivité, un engagement personnel qui est admirable. Le sport est vraiment la meilleure éducation du citoyen.

M. Denoyan : Jean-Michel Aphatie.

M. Aphatie : On va revenir à la mondialisation. Vous disiez que c’était une bonne chose pour la France…

M. de Charette : … Une chose formidable. Pour un pays qui est le quatrième exportateur mondial, franchement, quelle chance que de voir ce marché se développer.

M. Aphatie : Absolument. La mondialisation fait aussi que Moulinex fait faire sa comptabilité au Mexique et, ensuite, licencie 2 600 personnes. Bref, la mondialisation, c’est quelque chose de complexe qui a des bons côtés et des moins bons côtés. Et le président de la République, à Lille, a dit : « Pour lutter contre la mondialisation, il faut emprunter une troisième voie ». Si vous pouviez nous parler de cette voie qui est susceptible de garder les effets positifs de la mondialisation et d’en gommer les aspects les plus négatifs, ce serait tout à fait bienvenu.

M. Denoyan : Ce serait pas mal, oui.

Hervé de Charette.

M. de Charette : Ce que je voulais dire comprenait deux temps :

La première, c’est que la mondialisation est une chance pour le monde et une chance pour nous. Ce n’est pas rien – on ne peut pas dire – « Il faut condamner la moitié du monde à la pauvreté pour que nous puissions vivre tranquille » – et pour nous c’est bon. C’est donc une chance pour le monde et une chance pour nous. Mais, parce que c’est vrai qu’il y a des « mais », il y a quelques conditions pour y mettre de l’ordre, pour que ce soit un développement ordonné dans lequel chacun gagne, et c’est possible. La première, c’est qu’il n’y ait pas les « laissés pour compte » du développement.

Ceci concerne la nécessité de l’aide au développement dont nous parlions tout à l’heure, qui est un sujet très important. Le monde qui se développe, ne peut pas laisser les autres sur le bord de la route. Il ne faut pas qu’il y ait les pays « laissés pour compte » du développement, et il y en a beaucoup en Afrique. Cela marque assez les devoirs de la France mais aussi les devoirs du monde. Cela concerne tous les pays du monde, pas simplement la France ;

Deuxièmement, il y a la nécessité que l’on prenne en considération, dans ce développement, tout ce qui concerne les concurrences anormales, déloyales, irrégulières. De ce point de vue la France plaide pour que, au niveau mondial, on veuille bien être attentifs à ce que, dans les échanges, il y ait un certain ordre social. Nous sommes attentifs à la défense et à l’illustration du modèle social européen, et c’est vrai qu’il y a un modèle social européen.

Nous sommes différents des Américains, nous sommes différents des pays d’Asie, pourquoi ? Parce que nous avons un dialogue social très intense, parce que nous avons un système de protection sociale, contre les aléas de la vie, développé et parce que nous avons des règles de la vie collective et sociale, développées.

Ces trois éléments sont des éléments très importants, des éléments centraux. Nous n’avons pas l’intention de les mettre à bât par contrainte de la mondialisation.

Qu’il faille y mettre de l’ordre, certainement ! Nous n’allons pas faire payer à personne d’autre les désordres de notre propre régime de Sécurité sociale. Qu’il faille y mettre de l’ordre, à coup sûr ! Et c’est ce que font souvent péniblement, et nous aussi, et difficilement les pays européens. Mais, en même temps, nous sommes fondés à dire : « Il n’est pas normal qu’il y ait des pays dans lesquels il n’y a pas du tout de règles sociales, dans lesquels les enfants travaillent à 10 ans, dans lesquels, etc. ».

Nous voulons joindre au thème de l’organisation mondiale du commerce, la question aussi de l’organisation internationale du travail, et nous voulons que ces deux objectifs progressent conjointement pour que le monde soit plus juste et plus équitable. Voilà ce que l’on peut dire sur la mondialisation à la française.

Objections

M. Denoyan : Objections de Monsieur Henri Nallet, ancien ministre socialiste et responsable au Parti socialiste des problèmes européens. Bonsoir, Monsieur.

M. Nallet : Bonsoir, Monsieur.

M. de Charette : Bonsoir, Monsieur le ministre.

M. Denoyan : Je vous laisse puisque les présentations sont faites. Votre objection, Monsieur Nallet ?

M. Nallet : Ma question est la suivante : Monsieur le ministre, il y a ce soir un petit peu plus de 19 millions de chômeurs dans l’Union européenne et l’on vient d’annoncer en France, à nouveau, des milliers et des milliers de licenciements.

Il est clair que cela devient la préoccupation centrale de notre Europe, et beaucoup se posent la question de savoir ce que peut faire l’Europe pour soutenir une croissance plus forte qui assurerait plus d’emplois dans notre zone.

Il y a quelques semaines le président de la République s’est prononcé pour une troisième voie, comme on vous le rappelait à l’instant, et vous-même, vous avez déposé sur la table de la négociation européenne un Mémorandum pour un modèle social européen, et nous avons salué cette initiative en disant : « Pourquoi pas ? Allez-y ! Et l’on va voir ce que cela donne ! ».

Or, en Florence, Monsieur le ministre, non seulement on n’a pas discuté des propositions concernant le modèle social européen ou la convergence des politiques économiques pour lutter sur l’emploi, mais on n’a même pas discuté des propositions du président de la commission, et surtout, ce qui me paraît le plus choquant, c’est qu’on a refusé de financer les grands travaux qui avaient été proposés par Jacques Delors, y compris le ministre des finances français.

Alors la question qui se pose ce soir pour moi avant la réunion du G7 à Lyon : « Monsieur le ministre, pourquoi dire une chose et ne pas toujours la faire lorsqu’on a la possibilité de le faire ? ».

Autrement dit : « Qu’allez-vous faire de concret dans les semaines qui viennent pour que l’Europe devienne enfin un instrument de la lutte contre le chômage ? ».

M. Denoyan : Merci, Monsieur Nallet. Hervé de Charette vous répond.

M. de Charette : Monsieur Nallet m’interroge sur un ton de confesseur, j’ai envie de lui dire : « Mais vous, qu’est-ce que vous avez fait ? Vous avez été 15 ans au pouvoir, le chômage a doublé pendant ces 15 ans ! ».

Que ce soit compliqué, je veux bien ! Que ce soit difficile, j’en conviens ! Je ne vous porte pas plus de critiques que nécessaire, car je n’ai pas envie de polémiquer. Mais il faut rester, tous, devant les dures réalités de la vie, avec un peu de sérénité et de modestie.

Qu’est-ce qui s’est passé à Florence sur le sujet de l’emploi ? C’est vrai que, dans les conclusions, il ne s’est pas dit des choses bien déterminantes. Mais, moi, je vais vous dire ce que j’ai vu, parce que j’y étais. J’étais autour de la table avec les présidents, parce que vous savez qu’il y a les chefs d’État et de gouvernement et les ministres des affaires étrangères. Donc, j’ai participé et j’ai suivi les travaux.

Il s’est passé deux choses :

La première est que l’ensemble des partenaires a reconnu, je crois que c’était assez nouveau, qu’au fond, la lutte contre le chômage relève, pour l’essentiel, de responsabilités nationales.

Il ne faut pas entretenir l’illusion auprès de nos compatriotes que, par je ne sais quelle mesure européenne, l’on pourrait résoudre d’un coup de baguette magique la question du chômage. Soyons raisonnables, regardons les choses ! Est-ce que vous croyez que l’on va financer les CES au niveau européen ? Soyons sérieux. Et donc, ce n’est pas si simple ! Au niveau européen, on ne peut pas conduire des politiques de ce type utilement. On peut poursuivre le dialogue social. On peut faire certains progrès. Par exemple, une directive communautaire sur le travail à temps partiel. Ça, c’est bien. Par exemple, le renforcement du dialogue des partenaires sociaux entre eux, ce qu’a fait la présidence européenne. Ça, c’est utile. Ce n’est pas très voyant, mais ce sont des progrès utiles.

La deuxième chose que l’on peut faire, c’est de voir si nous sommes d’accord sur la politique économique globale à conduire. J’ai observé que nous étions d’accord.

Tous les gouvernements qui sont autour de la table, ne sont pas d’un même bord, de droite ou de gauche. Il y a des gouvernements de droite. Il y a des gouvernements de gauche. Le gouvernement italien est un gouvernement de gauche. Le gouvernement espagnol est un gouvernement de droite. Eh bien, j’ai observé qu’ils étaient tous d’accord sur le fait qu’il n’y avait pas d’autres solutions pour lutter contre le chômage, que de maîtriser nos déficits et de soutenir par cette voie la reprise de la croissance.

Mme Ardisson : Mais comment expliquez-vous qu’il y ait de plus en plus de voix, y compris de pro-Européens fervents, de gens qui jamais n’ont été taxés de nationalisme, qui refusent les règles du jeu du modèle anglo-saxon dominant ?

M. de Charette : Je ne suis pas partisan du modèle anglo-saxon dominant, je ne crois pas que l’on peut dire cela ! C’est vrai qu’il y a d’un côté des Britanniques qui ont leur façon à eux de conduire leurs affaires, c’est très évident, et qui ont une sorte de particularisme en Europe qui ne manque pas de créer quelques difficultés et quelques soucis…

Mme Ardisson : … mais c’est plutôt leur voie qu’on semble vouloir suivre que celle, par exemple, des Allemands ?

M. de Charette : Je ne crois pas que l’on peut dire cela. Nous sommes d’accord, les uns et les autres, que, pour que la croissance européenne soit soutenue – c’est quand même le principal objectif, parce que c’est comme cela que l’on crée des emplois –, il faut qu’en Europe, il soit mis de l’ordre dans les finances publiques et les finances sociales.

Je crois que vraiment, autour de la table, l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement était d’accord…

M. Denoyan : Cela n’a pas l’air de réussir, en tout cas pour l’instant ?

M. de Charrette : Mais, Monsieur Denoyan, prenez un peu de patience, s’il vous plaît !

M. Denoyan : J’ai la patience qu’il faut, mais à l’intérieur de votre majorité, on commence à s’impatienter, vivement même ?

M. de Charette : Je sais ce qu’est la vie politique au quotidien, mieux que quiconque sans doute, ou, en tout cas, autant que quiconque. Mais je crois qu’il faut voir aussi que nous avons accumulé, au cours de ces longues dernières années, des déficits incroyables ! Est-ce que vous savez que, dans notre budget aujourd’hui, la première des dépenses, la plus importante, consiste à payer les intérêts de nos dettes ! C’est presque 65 % de vos impôts sur le revenu, Monsieur Denoyan ! Quand vous payez 3 francs d’impôt sur le revenu, il y en a 2 qui servent à payer les dettes !

M. Denoyan : Je veux bien en convenir, mais je dirai : la croissance n’est toujours pas au rendez-vous, et cela fait 3 ans que la même majorité est aux affaires !

M. Roland-Lévy : Dans le débat sur les différentes méthodes pour essayer de faire reculer le chômage, il y a des hommes politiques éminents qui interviennent. Hier, c’était Raymond Barre, et Raymond Barre expliquait que la lutte contre le chômage passait par un assouplissement de la législation du travail. Une idée qui fait peur, puisqu’il s’agit de pouvoir, en fait, embaucher, mais surtout aussi licencier plus facilement… surtout aussi, non ! licencier et embaucher plus facilement.

Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette idée de Raymond Barre qui n’est ni un agitateur, ni un idéologue… Est-ce que le gouvernement pourrait reprendre à son compte… ?

M. de Charette : Il y a une sorte de consensus des dirigeants européens, ceux qui exercent des responsabilités – … sur l’opposition, je vais vous en dire un mot tout à l’heure –, ils sont d’accord sur l’idée qu’il faut maîtriser les déficits, qu’il faut alléger les réglementations.

Aujourd’hui même, Jean-Pierre Raffarin, à l’Assemblée nationale montrait, pas pour licencier mais pour embaucher, la liasse de papiers qu’un artisan ou une PME devait remplir jusqu’à présent, et le modèle unique désormais qui remplace une dizaine de feuillets. Cela, ce sont des progrès. Je vous assure que tout cela, ce sont des progrès. Ce ne sont pas des actes contre le travail ou contre les salariés en faveur des employeurs, ce sont des actes pour que la vie économique soit plus simple, plus facile, plus efficace et, finalement, qu’elle permette d’être plus juste socialement. Je crois que c’est cela la bonne démarche.

Évidemment, quand on est dans l’opposition, on nous dit : « On va rétablir l’autorisation de licenciement ». Franchement ! Est-ce qu’on peut arrêter d’exploiter l’inquiétude des gens ? Parce que c’est vrai que les gens sont inquiets. Je suis député dans ma circonscription, je suis maire de ma commune, je suis aussi le témoin de ces inquiétudes. Est-ce que vraiment on peut les exploiter au point de dire que l’on va rétablir l’autorisation de licenciement et qu’ainsi, cela ira mieux. Il faut arrêter. Il faut vraiment arrêter. Ce sont des problèmes sérieux et les Français sont des gens sérieux.

M. Aphatie : Monsieur de Charette, vous êtes un européen fervent, et puis, vous expliquez à ce micro qu’après tout, les Européens peuvent bien s’entendre pour organiser un marché unique, une monnaie unique, discuter de l’économie, mais quand il s’agit des conséquences sociales de tout cela, eh bien, on laisse cela aux nations.

Les gens qui sont au chômage ou les gens qui ont peur de l’être, précisément, s’ils investissent dans l’Europe, c’est pour lever cette inquiétude ? Que leur dites-vous ?

M. de Charette : Ce que je dis et que je répète devant vous avec force, c’est que la meilleure chose que nous puissions faire au niveau européen pour gagner la bataille du développement économique, de la réussite économique et de l’emploi, c’est de pratiquer ensemble des politiques économiques et sociales qui aillent dans la même direction, et que la meilleure chose que nous puissions faire, c’est en effet, de créer cette monnaie unique qui sera un facteur de réussite européenne…

M. Aphatie : … qui contribuera à diminuer le chômage ?

M. de Charette : … qui contribuera, bien entendu, à permettre une plus grande réussite européenne, une moins grande dépendance de l’étranger, et notamment de la monnaie américaine qui, comme vous le savez, Monsieur Aphatie, monte et descend, parce que c’est la seule monnaie de réserve du monde, au gré des intérêts économiques américains, vous le savez bien ! Alors que le jour où nous aurons créé la monnaie européenne, elle sera à égalité de puissance avec les États-Unis et qu’elle empêchera les États-Unis de se servir de ce genre d’arme contre nous, ce que les Américains font régulièrement, font en permanence.

M. Le Marc : Êtes-vous optimiste sur les chances de la majorité aux prochaines législatives, et si oui, pourquoi ? Quelles sont les raisons de cet optimisme ?

M. de Charette : Je crois que la France est un pays qui a les meilleures chances de gagner. Je vais venir sur la politique dans un instant, mais je vais vous raconter une anecdote : j’ai reçu, il y a quelques mois, un personnage tout à fait inconnu du grand public mais tout à fait extraordinaire, c’est un asiatique. Il s’appelle Monsieur Lee Kouan Yu. Il doit avoir 72 ou 73 ans, c’est un vieux monsieur mais très « vert » et très astucieux, c’est celui qui a fait Singapour. Maintenant, il n’est plus Premier ministre, il a une appellation anglo-saxonne, il s’appelle « Senior Minister », cela veut dire je ne sais pas trop quoi ! … ancien ministre… enfin, c’est toujours…

M. Le Marc : … le bar de Singapour ?

M. de Charette : Peut-être ! Enfin, non, il tient les ficelles de Singapour. Il est venu me voir, je ne le connaissais pas et il m’a dit des choses très simples. Il m’a dit : « Votre pays a, entre les mains, les meilleures chances d’être l’un des meilleurs et des plus efficaces pays du monde, mais il ne prend pas pour cela… ».

M. Le M : … mais, Monsieur de Charette, les Asiatiques ne votent pas ! Donc, êtes-vous vraiment optimiste pour 1998 et pourquoi encore une fois ? Parce que votre majorité ne l’est pas !

M. de Charette : Excusez-moi, j’étais en train de vous parler d’un observateur international très connu…

M. Denoyan : … parce qu’il n’est pas sûr qu’à Singapour…

M. de Charrette : … et qui dit des choses très sérieuses…

M. Denoyan : … ce monsieur serait élu si la démocratie y régnait ?

M. de Charrette : Si vous voulez faire de l’humour, Monsieur Denoyan, …

M. Denoyan : … Ça compte quand même !

M. Le Marc : Les élus de la majorité sont aussi de bons observateurs ?

M. Roland-Lévy : … en tout cas, il ne vote pas en France.

M. Denoyan : … en tout cas, il ne vote pas en France, Fabien Roland-Lévy a raison.

M. de Charette : Vous avez tort de ne pas écouter ce que je vous dis…

M. Denoyan : On vous écoute.

M. de Charrette : … parce qu’il est extrêmement sérieux : « La France a les meilleures chances de gagner, la seule condition qu’elle doit remplir, c’est de prendre les bonnes décisions et d’avoir le courage de s’y tenir ». Et si elle ne le fait pas, en effet, elle aura des problèmes. Et si, au lieu de garder ce ton morose, nous voulions bien prendre à bras le corps les difficultés qui sont devant nous, je vous dis, Monsieur Denoyan, Monsieur Le Marc, Madame Ardisson, Monsieur Aphatie, Monsieur Roland-Lévy, que nous gagnerons sans peine.

Maintenant, j’en viens aux élections législatives puisque c’est votre question : eh bien, là non plus, je n’arrive pas à être pessimiste. J’entends dire des choses extravagantes, et je vais vous le dire ici, comme cela vous m’inviterez au lendemain des élections … : … nous allons les gagner ces élections législatives, mais oui, nous allons les gagner ! Bien sûr ! Pour des raisons nombreuses, mais enfin, je voudrais en citer une ou deux :

1. Je crois que les Français sont des gens très sérieux et qui ne changent pas d’avis comme de chemise.

J’ai d’ailleurs observé dans la vie politique, au cours de ces 25 ou 30 dernières années, qu’au fond, les Français pratiquaient l’alternance longue, c’est-à-dire qu’ayant voté pour les uns, ils prenaient un certain temps avant de changer d’avis. Même s’ils n’étaient pas très contents…

M. Denoyan : … en 1988, Monsieur de Charette, cela a duré 2 ans !

M. de Charrette : … ils revenaient. Monsieur Mitterrand a été réélu…

M. Le Marc : … il y a eu une cohabitation en 1986…

M. de Charrette : … parce que les Français ont pensé qu’il fallait continuer à lui faire confiance.

Eh bien, je crois que les Français ont décidé de changer vraiment ou d’organiser la vraie alternance en 1993. C’étaient les élections législatives, donc, ce n’était pas l’élection centrale, mais ils l’ont fait à ce moment-là, ils l’ont confirmé en 1995. Et, je crois qu’ils le confirmeront en 1998, à la demande du président de la République.

M. Denoyan : On va rester sur ce souhait et votre espérance pour aller très vite aux dernières questions, il nous reste 2 minutes.

M. Roland-Lévy : L’une des filles du général Oufkir s’est échappée du Maroc et est arrivée en France via l’Espagne, je voudrais savoir si cette jeune femme, son fils, sa tante ont une chance d’obtenir l’asile de la France ?

M. de Charette : Madame Oufkir, sa tante et son fils recevront une autorisation de séjour dans les prochaines heures ou dans les prochains jours, qui leur permettra de résider et de travailler en France.

M. Denoyan : Mais pas d’asile politique ?

M. de Charette : La question ne se pose pas dans ces termes.

Mme Ardisson : La question ne se pose dans ces termes, je rebondis, expliquez-nous pourquoi ?

M. de Charrette : … mais parce qu’ils recevront un titre de séjour leur permettant de vivre et de travailler en France.

M. Le Marc : François Léotard a pris en main les destinées de l’UDF et fait voter les nouveaux statuts, est-ce une bonne chose ?

M. de Charette : Oui. Je vais vous dire : il y a eu une élection à la présidence de l’UDF, personnellement, j’aurais souhaité, je le souhaitais très vivement, que Valéry Giscard d’Estaing continue à présider l’UDF. Les choses ne se sont pas présentées ainsi. Lui-même a écarté cette idée, et donc, il y a eu deux candidats : François Léotard et Alain Madelin. J’ai soutenu Alain Madelin, chacun le sait, et le PPDF, parti que je dirige, s’est réuni, a délibéré et a décidé de soutenir Alain Madelin.

Maintenant la majorité des électeurs a choisi François Léotard, je ne souhaite pas qu’au sein de l’UDF, il y ait une majorité, une minorité… une majorité, une opposition… il y a un président, c’est très bien ! Je suis dans l’UDF et je soutiens toute l’équipe de l’UDF dont je fais partie.

M. Denoyan : Merci, Monsieur le ministre. Merci, Monsieur Hervé de Charette.

Objections est terminé.

Rendez-vous la semaine prochaine avec Monsieur Borotra.