Articles de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, dans "L'Hebdo des socialistes" le 24 avril et le 8 mai 1998, intitulés respectivement : "L'euro au service de la croissance et de l'emploi" et "Au-delà de l'euro".

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Média : L'Hebdo des socialistes

Texte intégral

L’Hebdo des socialistes le 24 avril 1998
L’euro au service de la croissance et de l’emploi

Avec le vote à l’Assemblée nationale, ce mercredi, sur le passage à la monnaie unique, nous entrons dans la troisième phase de l’union économique et monétaire qui verra l’euro devenir notre monnaie commune le 1er janvier 1999.

Nous avions fixé quatre conditions au passage à la monnaie unique, lors de la campagne législative, après en avoir longuement débattu entre nous à l’occasion de deux conventions nationales du parti. Cet engagement vis-à-vis des Français est en passe d’être réalisé par l’action résolue, depuis dix mois, du gouvernement de Lionel Jospin. Relance de l’Europe sociale au sommet de Luxembourg, mise en place du Conseil de l’euro face à la Banque centrale européenne, refus d’une surévaluation par rapport au dollar et enfin une zone euro large.

Pour ces raisons, les socialistes ont approuvé le passage à l’euro. La droite, quant à elle, a étalé ses divisions et son incohérence. Alors que le chef de l’État s’était engagé solennellement pour affirmer la position de la France en faveur de l’euro, le RPR a décidé de voter « non », puis de ne pas prendre part au vote, pour finir par déposer une motion de censure. Comprenne qui pourra.

Mais cette étape franchie, nous devons poursuivre dans la voie tracée pour affirmer l’Europe sociale, l’Europe politique par la réforme des institutions, l’Europe de la croissance et de l’emploi, l’Europe des services publics.

Cette Europe que nous voulons doit être respectueuse de la Nation française, mais sera une entité nouvelle, fondée sur la coopération et l’intégration entre États. Ce sera l’objet de notre réflexion lors des prochaines semaines. Elle sera l’aspect principal du débat lors d’un séminaire avec le Gouvernement et durant l’année, pour se terminer par une convention Europe-Nation que nous tiendrons au début de 1999. Voilà le chantier qui doit mobiliser nos militants et nos élus pour préparer ensemble un nouvel avenir pour l’Europe.

L’Hebdo des socialistes le 8 mai 1998

Au-delà de l’euro

L’Europe vient de franchir une étape historique puisque onze des quinze pays de l’Union européenne ont décidé de faire, dès à présent, de l’euro leur monnaie.

Nous avons voulu la monnaie unique, choix du cœur par notre attachement à la construction européenne, et de la raison, car l’euro est un outil de stabilité au service de la croissance dans un monde jusque-là dominé par le dollar. Nous voulons l’Europe. Mais nous savons qu’à l’avenir les Français ne se mobiliseront que si les objectifs assignés à l’Union sont ceux qui touchent leur vie quotidienne, à savoir l’emploi, le pouvoir d’achat, la lutte contre les inégalités, et que si la construction européenne s’infléchit dans le sens de plus de démocratie, de transparence et d’efficacité. Car en définitive, il est de notre responsabilité, à nous socialistes et sociaux-démocrates, de construire cette Europe politique, tandis que la droite et les libéraux se contenteront toujours d’une simple Europe « zone de libre-échange ».

À un moment où les adversaires de la construction européenne jouent sur les peurs de nos concitoyens, il est nécessaire de bâtir un projet commun, précisant l’avenir que nous souhaitons pour l’Europe dans le respect de l’identité et de la souveraineté des nations qui la composent, fruit de notre histoire commune.

L’Europe doit être aujourd’hui synonyme de volonté politique, car elle offre les dimensions nécessaires pour élargir les marges de manœuvre des politiques nationales. Ainsi, l’Union monétaire donne l’occasion de retrouver collectivement une souveraineté qui nous échappait.

Cependant, pour rencontrer l’adhésion des citoyens, il faut mettre en œuvre les procédures qui leur permettront de peser au niveau national et européen sur les décisions qui les concernent directement.

C’est le sens du travail que nous avons engagé lors du séminaire parti-Gouvernement, et que nous poursuivrons tout au long de l’année 98 pour préparer la convention du parti au début 1999. Cet « Hebdo-Idées » est une première contribution à cette réflexion sur les rapports entre la Nation et l’Europe.