Texte intégral
Le président rappelle d'abord que, voici vingt ans, le CNI tenait déjà un conseil national dans le Val-de-Marne : c'était à Joinville-le-Pont et les participants étaient venus déjeuner à Ormesson, « où le plus ancien maire de l'Île-de-France (Olivier d'Ormesson fêtera, en effet, l'an prochain, ses cinquante ans de mandat) nous accueillait déjà ». Il remercie également les sénateurs Débavelaere, Dumont, Prouvoyeur, le député Lucien Brenot, les anciens députés Michel Junot et Bernard-Claude Savy, et puis le docteur Kouchnir, secrétaire de la fédération du Val-de-Marne et également secrétaire général adjoint du Mouvement : « Il voulait que cette réunion dans son département soit une réussite et il n'a pas économisé ses efforts pour y parvenir. »
Enfin, il cite également Pierre-Olivier Mahaux, secrétaire général, « qui est avec nous depuis plus d'un an et demi, à ce poste difficile que je connais pour l'avoir moi-même occupé » : « Je sais que, dans une maison comme la nôtre, qui a connu des difficultés immenses ces dernières années, confie Jean-Antoine Giansily, il faut avoir l'âme chevillée au corps pour travailler, et Pierre-Olivier l'a fait avec beaucoup de coeur et un grand sens des responsabilités. Je tenais à l'en remercier. »
Il annonce qu'il va traiter de trois sujets qui lui paraissent les plus importants de ces dernières années et des années à venir : la première année du septennat de Jacques Chirac, la place de notre pays en Europe et notre opinion sur la CIG, enfin l'attitude du Mouvement vis-à-vis du gouvernement et la préparation des élections législatives de 1998.
1. La première année du septennat de Jacques Chirac
Il rappelle d'abord les difficultés que Jacques Chirac a connues en décembre 1994, lorsqu'il était à moins de 15 % dans les sondages : « Alors que nombre de ses prétendus “proches” le pressaient de se retirer, nous l'avons invité à notre comité directeur, et il a trouvé en nous de vrais amis, des soutiens fidèles et aujourd'hui je crois que nous devons être heureux de l'avoir choisi comme candidat, d'avoir fait en sorte que, le 23 avril 1995, il ait été placé en tête des candidats de la majorité au premier tour et qu'il l'ait emporté au second. »
Depuis la chute du Mur de Berlin, la France n'avait plus de politique étrangère. C'est grâce à Jacques Chirac que notre pays a retrouvé sa place dans le concert des nations. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, il a pris un certain nombre de décisions qui n'ont pas toujours été bien comprises de nos amis européens, mais qui ont permis à la France de reprendre, sur le plan des idées, le leadership dans cette Europe en construction qui était le credo d'Antoine Pinay et qui est toujours le nôtre.
« Je crois ainsi qu'en décidant la reprise des essais nucléaires, au moment où il l'a fait, il a tenu à signifier au monde que la présence à l'Élysée, au cours des années précédentes d'un Président politiquement affaibli, physiquement malade, désorienté face au changement du monde, n'était qu'un accident de l'Histoire et que la France, qui fut une grande puissance militaire, entendait bien le rester et conserver l'outil nucléaire qui a forgé son indépendance. »
Il rappelle en outre l'action décisive du nouveau Président dans le règlement de deux conflits majeurs : la Bosnie et le Liban.
« Si, au lieu d'aller faire la politique des sacs de riz, en Afrique, nous avions mené une politique un peu plus offensive, assure-t-il, le Liban ne serait pas aujourd'hui dans la situation où il se trouve. La nouvelle diplomatie française, si bien illustrée par la pugnacité d'Hervé de Charette, pour que le règlement de la situation au Proche-Orient tienne compte de la réalité du peuple libanais, reçoit tout notre soutien. »
Et il remercie Olivier d'Ormesson pour avoir invité le docteur Camille Tawil, représentant Samir Geagea, le chef des Forces libanaises chrétiennes, actuellement en prison, à venir animer à Ormesson, le dîner-débat consacré à la situation dans son pays.
« Notre fidélité à l'égard de Jacques Chirac, conclut-il, ne pourra que se renforcer, au fur et à mesure que la France retrouvera sur la scène internationale des positions qu'elle avait perdues depuis 1981. »
2. La place de la France en Europe et l'opinion du CNI sur la CIG
Jean-Antoine Giansily dénonce ensuite la stratégie menée par ceux qui veulent une Europe de la redistribution sociale consiste, à terme, à diminuer les dépenses obligatoires et, par conséquent, à diminuer les dépenses concernant le secteur agricole.
C'est pourquoi, comme Christian Jacob et les membres du groupe UPE au Parlement européen, il n'acceptera pas que la PAC soit déclassée du secteur des dépenses obligatoires vers le secteur des dépenses non obligatoires : « Nous en ferons un casus belli, affirme-t-il, car nous considérons que l'Europe telle qu'elle existe aujourd'hui est nourrie en grande partie par ce qui se produit en France et que notre pays, première puissance agricole du continent, comme le rappelait ce matin le professeur Joseph Hudault, doit défendre bec et ongles la PAC, qui est celle de l'Europe en même temps que celle de la France. »
Sur les autres sujets abordés par le conseil national, le président du CNI partage totalement les conclusions des commissions défense et sécurité : « Le débat sur la conscription doit être large et ouvert, il ne doit pas avoir lieu à la sauvette. C'est un débat capital pour l'avenir de la France. » Le rapport de la commission sera remis aux plus hautes autorités de l'État afin qu'elles connaissent la position du CNI sur ce sujet.
En ce qui concerne la monnaie unique, Jean-Antoine Giansily estime qu'elle manque, comme beaucoup de décisions technocratiques, d'explications : « Il y a un déficit de la communication en France : on n'a pas assez expliqué l'intérêt de ne pas accepter indéfiniment le règne absolu du dollar. » Les Américains représentent 14 % de la production mondiale, les échanges mondiaux sont, pour plus de 60 %, libellés en dollars : une telle domination peut-elle continuer plus longtemps à s'imposer à une population de 350 millions d'Européens, dont les qualités intellectuelles, créatives et productives sont au moins égales, sinon supérieures, à celles des Américains ?
« Si nous devons à Antoine Pinay d'avoir relancé la construction européenne en 1955 à la conférence de Messine, poursuit l'orateur, nous devons être très attentifs à la façon dont sera menée, au cours des mois qui viennent, cette Conférence intergouvernementale. Le nouveau traité qui en sortira fixera le cap pour le début du siècle prochain, alors que tout ce qui avait été prévu par le traité de Rome de 1957 aura été finalement réalisé. La libre circulation des hommes, des capitaux et des biens doit aujourd'hui trouver son accomplissement dans la mise en oeuvre de la monnaie unique et dans l'instauration du marché intérieur des Quinze, qui, à l'horizon 2000, doit éliminer la spéculation par le biais du marché des capitaux. »
C'est donc en ce sens que le CNI va continuer à oeuvrer : « Nous ne devons pas cesser de faire en sorte que notre gouvernement se sente appuyé au cours des discussions monétaires et sur les prix agricoles. »
3. L'attitude du CNI vis-à-vis du gouvernement et la préparation des élections législatives de 1998
Jean-Antoine Giansily rappelle le discours prononcé par Alain Madelin à Ormesson-sur-Marne, le 19 avril 1995, à quelques jours du premier tour de l'élection présidentielle : « Ce fut l'un des grands événements de la campagne de Jacques Chirac. » Ce texte a été publié dans « La Revue de politique indépendante », sous le titre : « Nouveau discours aux indépendants ». C'était une réplique au « Discours aux Indépendants », prononcé par Jacques Rueff devant le comité directeur de notre mouvement, en décembre 1950, qui avait inspiré l'action de redressement conduite par le Président Pinay.
Ce discours annonçait les grandes lignes de l'action de redressement qu'Alain Madelin devait conduire quelques semaines plus tard, lorsqu'il prit en charge le ministère de l'Économie et des Finances et qu'il imaginait, ici même, à Ormesson, fondée sur deux piliers :
- le rétablissement de l'ordre financier et de l'orthodoxie budgétaire ;
- la stimulation de la croissance et la création d'emplois.
Comme Jacques Chirac, au même moment, et comme, avant lui, Jacques Rueff et Antoine Pinay, Alain Madelin expliquait alors que le redressement passait inéluctablement par la valorisation du capital humain et le plein emploi du talent et de l'énergie dans Français. « Hélas, ajoute Jean-Antoine Giansily, l'espoir de voir une nouvelle politique libérale s'appliquer à l'économie française a disparu le 25 août 1995, jour funeste où l'authentique représentant de la famille libérale au gouvernement l'a quitté. »
Alain Madelin, avec l'aide d'Alain Griotteray et de beaucoup de nos amis au sein de l'UDF, a voulu reprendre la main pour le courant libéral au sein de la confédération dans laquelle, voici dix-huit ans, nos grand anciens, Bertrand Motte et Camille Laurens, avaient refusé d'entrer.
« Il aura peut-être fallu dix-huit ans pour s'en rendre compte, déclare le président du CNI, mais la ligne de plus grande pente dans une confédération de cette nature est la ligne centriste. Ce qui explique que, probablement par des manoeuvres d'appareils (derrière lesquels se profile l'intérêt bien compris de ceux qui les dirigent), les idées libérales ont été mises au placard de l'UDF, après l'avoir été du gouvernement.
Il faut en tirer les conclusions :
« Si nous appartenons, nous, les libéraux, à la majorité présidentielle, nous n'avons pas le sentiment que le périmètre de la majorité parlementaire recoupe exactement celui de la majorité présidentielle. Je crois en effet que, sur le plan des idées, la majorité parlementaire s'est aujourd'hui rétrécie, probablement parce que l'union efface les différences et que ces différences s'effacent au profit des points moyens, des points centraux, des points centristes, qui ne sont jamais des points offensifs. Nous voulons la pluralité des idées et des opinions. »
Cette pluralité peut conduire les observateurs à penser qu'effectivement, nous pourrions, comme le disait si justement Alain Griotteray, être considérés comme « politiquement incorrects », parce que considérant que tout ce qui est proposé par le gouvernement n'est pas pain bénit.
« Si nous sommes “politiquement incorrects”, il faudra en tirer les conséquences : à un peu moins de deux ans des élections législatives, si nous voulons que notre message soit entendu, il faut qu'il soit retransmis sur le terrain par des candidats qui tiennent un discours qui est le nôtre et sur lequel nous n'avons l'intention ni d'abdiquer, ni de nous renier. »
Les difficultés rencontrées par le Mouvement ces dernières années ont tenu essentiellement à « cette crainte que nous avons eue pendant quatorze années, de se dire que, si nous donnions des coups de canif dans l'union, l'échec éventuel du candidat de l'opposition à l'élection présidentielle pourrait ensuite nous être reproché » :
« À de nombreuses reprises, rappelle Jean-Antoine Giansily, nous avons sacrifié nos intérêts sur l'autel de l'union, faisant nôtre cette phrase du Président Pinay : “Aucun parti n'a le droit de se préférer au pays”. Mais, maintenant que, depuis un an, avec notre aide, il y a, à l'Élysée, un homme qui correspond à ce que nous avions souhaité, nous pouvons envisager de réorienter la majorité législative sur nos idées. »
En conséquence, le CNI aura, « au bas mot », 300 candidats aux législatives de 1998 :
« Vous me direz, s'écrie l'orateur, qu'il y a 90 sortants de gauche, donc, avec 300 candidats, il risque d'y avoir des candidats du CNI dans les circonscriptions où il y a des sortants de droite. Eh bien, oui ! Il faut encourager la compétition. Quels beaux libéraux serions-nous si nous découragions la compétition !
Souhaitant que le Président qui sera élu le 5 octobre se mette en mesure de présenter 300 candidats aux élections législatives et qu'ils soient, en grande partie, issus des jeunes du Mouvement, il ajoute : « Le règne de la technocratie, de la technostructure, des bureaux, ne fonctionne que parce que nous avons accepté que le socialisme soit remplacé par l'étatisme, sans pour autant considérer que les nouveaux patrons de la maison France n'étaient pas sur nos idées. »
C'est donc sur un message d'espoir qu'il souhaite conclure ce conseil national :
« Pendant deux jours, vous avez bien travaillé. Les cadres du Mouvement sont venus de tous les départements de France : beaucoup ont dû affronter la grève d'Air Inter. Cet effort ne sera pas vain et je charge, dès aujourd'hui, Pierre-Olivier Mahaux, notre secrétaire général, de réunir avant le 30 juin une commission électorale destinée à identifier les trois cents circonscriptions avec le nom des candidats et la stratégie qu'ils devront développer pour qu'en 1998, le CNI devienne partie prenante dans la nouvelle majorité gouvernementale.