Texte intégral
Il est peu de dire que la mort de René Andrieu a suscité une grande émotion à « l’Humanité », où on pouvait le croiser régulièrement à l’occasion d’une réunion des « actionnaires » ou de jury du prix Paul-Vaillant-Couturier.
Paradoxalement, pour moi René Andrieu a d’abord été une voix à la radio ou à la télévision. Un homme qui avait la passion du débat, un esprit rationnel habité par la volonté de convaincre. Il était un grand débatteur, redoutable d’ironie, incisif, choisissant les mots avec précision. Grand éditorialiste, René avait une plume acerbe, un style qui reflétait son élégance et sa prestance toujours au service de la pensée et d’une cause. Je n’étais pas à « l’Huma ». J’en était lecteur. Et lire les éditos de René Andrieu, c’était participer, prendre parti, déjà agir, avec passion pour cette cause. On ne faisait pas que le lire ; on en parlait entre amis.
Puis, j’ai connu René de plus près. On était frappé par le champ de sa culture – un homme de lettres que la Résistance a détourné un temps de Stendhal. Il avait à la fois un sens aigu de l’information, du message – de la communication en quelque sorte – et de la grande mission que comporte cette profession. Il ne séparait pas d’ailleurs le communisme de son travail de journaliste et était reconnu par l’ensemble de la profession à la fois une des grandes plumes de la presse française et un communisme résolu. En même temps, plus on le côtoyait, plus on découvrait un homme irrévérencieux, goguenard devant tout de qui apparaît surtout lorsque cela survenait dans son parti.
René Andrieu a marqué « l’Humanité » de son empreinte pendant un quart de siècle : c’était la fin des guerres coloniales – « l’Huma » était parfois saisie ; l’opposition au général de Gaulle à propos de la répartition des richesses et de la démocratie ; puis l’époque où les communistes français ont commencé à s’ouvrir à la critique du stalinisme…
La mort de René Andrieu est un choc pour tous ceux qui l’ont connu, une figure de 50 ans de vie politique et de la presse disparaît.