Texte intégral
SEBASTIEN GUYOT
Le ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse, Jean-Michel BLANQUER, est votre invité Audrey CRESPO-MARA.
AUDREY CRESPO-MARA
Bonjour Jean-Michel BLANQUER.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour Audrey CRESPO-MARA.
AUDREY CRESPO-MARA
A l'occasion de cette matinale délocalisée à Roland Garros, commençons par une question délicate, celle que se posent chaque année les parents de nombreux élèves de Terminale. Peut-on réviser le bac et regarder Roland Garros ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est vrai qu'il y a beaucoup d'éléments de déconcentration. Il y a aussi le Festival de Cannes, il y a toute une série de choses saisonnières qui peuvent distraire. Mais non, je pense qu'on peut réviser le bac même avec Roland Garros.
AUDREY CRESPO-MARA
Plus sérieusement, le sport n'est pas incompatible avec les études. Actuellement les collégiens ont trois heures de sport obligatoires par semaine. Vous trouvez ça fait suffisant ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non. On devrait arriver à faire plus. Vous savez, avec chaque sujet on voudrait toujours faire plus. Chaque discipline…
AUDREY CRESPO-MARA
Mais c'est prévu ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors ce qui est prévu, c'est qu'on puisse faire plus au cas par cas. Notamment nous avons lancé il y a quelques jours l'appel à projets pour les collèges et les lycées qui veulent, et notamment les collèges, qui veulent faire cours le matin, sport l'après-midi. C'est un projet que nous avions annoncé avec Roxana MARACINEANU et donc dès l'année prochaine, vous aurez des établissements qui font feront plus. Et puis bien entendu, on a du volontarisme notamment dans la perspective des JO 2024 avec Tony ESTANGUET. On a crée cet élan, cette dynamique qui fait que des établissements ont un label JO 2024 qui fait qu'ils font plus de sport. Nous développons aussi les sections sportives, donc il y a toute une série de possibilités d'aller assez au-delà de ces trois heures hebdomadaires.
AUDREY CRESPO-MARA
Jean-Michel BLANQUER, revenons au baccalauréat. La vraie menace qui pèse sur le bac cette année, c'est l'appel à la grève de quatre syndicats enseignants qui menacent d'empêcher le bon déroulement des épreuves. Avez-vous le sentiment que les profs prennent leurs élèves en otage ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je ne dirais pas que les professeurs les prennent en otage. Il y a un ou deux syndicats qui peuvent dire ce que vous venez de dire mais les professeurs ne se résument pas à ça. Heureusement. Je connais les professeurs de mon pays, de la France. Je sais qu'ils ont le sens des responsabilités et qu'ils savent bien qu'on ne prend pas les élèves en otages et donc je suis serein sur ce point. Nous organiserons le baccalauréat évidemment de façon normale et c'est dommage qu'il y ait des appels de ce type. Mais il ne faut pas…
AUDREY CRESPO-MARA
Alors vous êtes serein, les parents et les élèves ne le sont pas forcément autant que vous.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Justement, je suis…
AUDREY CRESPO-MARA
Ce qui rassurerait tout le monde, c'est peut-être que vous preniez l'engagement qu'aucune épreuve ne sera annulée le 17 juin prochain.
JEAN-MICHEL BLANQUER
J'en prends très clairement l'engagement. Et non seulement je prends cet engagement mais je dis à chacun de ne pas se laisser troubler par cela. Hier, certains ont voulu faire l'actualité avec ça en profitant d'un jeudi de l'Ascension mais bien entendu, c'est mon devoir de dire à chaque élève et à chaque famille qu'ils ne doivent pas se préoccuper de ce sujet. C'est mon devoir d'assurer le fait que ça se passera bien et ça se passera bien.
AUDREY CRESPO-MARA
Dans certaines académies comme à Toulouse, les grévistes sont très remontés. S'ils parviennent à empêcher le bon déroulement des épreuves, les candidats seront-ils de nouveau convoqués à une date ultérieure ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non mais je ne me mets même pas dans cette situation si vous voulez. Nous allons veiller à ce que chaque session se passe comme elle doit se passer. Elle se passera avec les personnels adéquats. Je ne pense pas qu'il y aura beaucoup de grévistes de toutes les façons.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc vous vous engagez ce matin à ce qu'aucune épreuve ne soit annulée. Clairement.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Mais bien sûr, bien sûr. Non, non, le baccalauréat se passera de façon normale. Je suis un peu surpris par cet appel d'autant plus qu'il correspond à des revendications auxquelles je réponds déjà, notamment sur la rémunération des professeurs pour lequel je dis clairement qu'il y a en effet un sujet. Et je le dis nettement sans aucune ambiguïté. Et pour lequel j'ai dit aux syndicats que nous allions avoir ce dialogue social mais qui est nécessairement dans la durée, parce que c'est un sujet extrêmement approfondi qui nécessite du temps. Ils le savent, ils sont déjà venus au ministère pour parler de cela. Donc je ne travaille pas sous la pression et encore moins avec un quelconque chantage. De toutes les façons ce qu'ils demandent sur ce sujet de la rémunération est en cours, donc il n'y a pas de problèmes.
AUDREY CRESPO-MARA
Vous leur avez promis ces augmentations de salaire depuis un moment. Les enseignants donc seront-ils bientôt augmentés ? De combien ? Qui sera concerné et quand ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y a un sujet immédiat et des sujets de plus long terme si voulez. Le sujet immédiat, c'est d'arriver à faire des progrès en matière de rémunération, ce que nous réussissons à faire. Nous le faisons soit par l'évolution de la rémunération prévue actuellement. Comme je l'avais dit une fois à votre micro, entre 2017 et 2022, un professeur des écoles débutant gagnera mille euros de plus par an donc sur la durée du quinquennat. C'est une augmentation de mille euros par an qui évidemment sera pour la suite. Et c'est plus évidemment pour les plus anciens. Donc il y a de toute façon une augmentation qui est programmée. Est-elle suffisante ? On peut considérer qu'on peut faire mieux parce que c'est vrai qu'il faut faire un effort sur la rémunération des professeurs. Ça, ça réclame maintenant… Alors par ailleurs, nous faisons des primes. Notamment c'est deux mille euros par an pour ceux qui travailleraient plus dès la rentrée prochaine. Donc ça, c'est des choses quand même assez significatives. Ce que je viens de vous dire, ça touche près de cinquante mille personnes quand même donc c'est des choses importantes. Nous augmentons le nombre d'heures supplémentaires, elles sont défiscalisées donc il y a des mesures de pouvoir d'achat. Tout ça est donc important mais je reconnais que ce n'est pas suffisant d'où la nécessité de dialogue pour envisager des choses structurelles mais pas pour un an ou deux ans. Vraiment pour la durée… Enfin pour les temps futurs et ça, ça suppose évidemment un travail très approfondi et il est enclenché.
AUDREY CRESPO-MARA
Ça fait plus de quinze ans que les syndicats d'enseignants n'ont pas menacé de bloquer les épreuves du bac. Ils dénoncent votre autoritarisme…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, ce n'est pas tout à fait exact de dire ça. Il y a toujours eu des gens un peu dans des logiques de ce genre et c'est regrettable. Ça fait partie des…
AUDREY CRESPO-MARA
Ce pays n'est pas réformable où cette réforme n'a pas été concertée ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Si, ce pays est réformable. Si vous voulez, il faut dire avec beaucoup de sérénité que la réforme est possible, que la grande majorité des professeurs d'ailleurs en voient bien l'intérêt. Les élèves de Seconde de cette année voient très bien qu'ils ont beaucoup plus de liberté, beaucoup plus de choix, que la réforme du lycée leur apporte quelque chose de magnifique. Donc vous aurez toujours… Sur un million de personnel, vous aurez toujours des gens pour crier un peu fort, pour trouver que tout n'est pas parfait. Et c'est vrai que tout n'est pas parfait, rien n'est jamais parfait d'ailleurs. Mais en revanche ce qui est certain, c'est que la réforme est possible. La preuve, nous la faisons. A la rentrée prochaine, vous avez une magnifique réforme du lycée.
AUDREY CRESPO-MARA
Alors le bac se profile et cette année encore l'application Parcoursup fait polémique. Plusieurs bugs se sont produits. Des élèves acceptés dans une filière finalement ne le sont plus. Ça concernait pas moins de soixante-sept mille candidats sur les huit cent quatre-vingt-dix-huit mille inscrits selon Les Echos. Comment expliquer que Parcoursup ne soit toujours pas au point alors qu'on en est à la deuxième édition ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Le mot bug n'est pas approprié parce qu'il fait référence à un problème informatique. Or ce n'est pas un problème informatique, ce sont des erreurs humaines qui ont eu lieu. Elles sont regrettables comme il y a eu dans le passé des erreurs humaines.
AUDREY CRESPO-MARA
Ça fait du monde, soixante-sept mille candidats.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ceci arrive, c'est évidemment regrettable. On doit améliorer le système de contrôle mais le problème auquel vous faites référence a été résolu depuis lors.
AUDREY CRESPO-MARA
Certains d'entre eux sont toujours en liste d'attente.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Mais n'oublions pas que Parcoursup, ça se passe sur plusieurs semaines.
AUDREY CRESPO-MARA
Oui. Mais parmi ces candidats, certains sont toujours en liste d'attente alors qu'ils devaient intégrer une filière.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, mais ce qui est le cheminement naturel. Ils auront une place à la fin du processus qui se termine en juillet.
AUDREY CRESPO-MARA
Jean-Michel BLANQUER, l'interdiction du voile lors des sorties scolaires ravive le débat. Un amendement à votre loi sur l'école porté par Les républicains et adopté ces derniers jours par le Sénat divise les parents d'élèves. Des mamans portant le hidjab ont manifesté à Perpignan, à Montpellier pour dénoncer un amendement raciste, discriminatoire. Quelle est la position du ministre de l'Education nationale là-dessus ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
J'ai une position constante qui est d'abord, comme vous le savez, de respect de la laïcité. Nous avons pris beaucoup de mesures qui vont dans le sens de ce respect de la laïcité, notamment maintenant des équipes laïcité qui font respecter les règles qui existent dans chaque établissement chaque fois qu'un problème se pose. Nous sommes donc dans la situation d'une République qui fait respecter les règles. S'agissant de l'interdiction éventuelle du port du voile pour les mamans accompagnatrices, il y a tout un passé juridique si je puis dire. Le Conseil d'Etat s'est exprimé sur ce point il y a quelques années qui fait que c'est un sujet qui aujourd'hui ne relève pas de la loi, et c'est un sujet qui peut tout à fait relever de l'interdiction locale. C'est ce qui peut se passer au travers de décisions d'un directeur d'école. C'est cette approche que nous sommes amenés à prendre aujourd'hui et donc nous ne sommes pas d'accord avec cet amendement des Républicains. Maintenant qu'il y ait parfois des groupes communautaires qui essayent de faire pression sur ce genre de sujet, c'est quelque chose que l'on connaît. Même si en l'occurrence ils manifestent sans qu'il y ait un réel problème par rapport à ce qu'ils veulent défendre, c'est évidemment une chose à laquelle je ne suis pas sensible.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais personnellement, vous n'êtes pas pour l'interdiction des voiles lors des sorties scolaires.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je pense qu'il est souhaitable que dans une sortie scolaire il n'y ait pas de prosélytisme et qu'il y ait le moins possible de signes ostentatoires. Après il y a des libertés constitutionnelles d'un parent qu'on doit respecter mais il est évident qu'on doit localement arriver au maximum à ce qu'il n'y ait pas cette atmosphère de prosélytisme que l'on a dans certains quartiers dont on doit préserver les élèves.
AUDREY CRESPO-MARA
Merci Jean-Michel BLANQUER.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 juin 2019