Texte intégral
NICOLAS DEMORAND
Ali BADDOU, votre invitée ce matin est ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation.
ALI BADDOU
Bonjour Frédérique VIDAL.
FREDERIQUE VIDAL
Bonjour.
ALI BADDOU
Et merci d'être avec nous. Votre parole est très attendue, les résultats du bac seront connus ce matin, dans quelques minutes, dans l'académie d'Aix-Marseille qui ouvre le bal à 08h00, ce sera suivi par les résultats d'Orléans- Tours, 09h00 à Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, 10h00 dans la plupart des académies. Autant dire que des milliers de copies n'ont pas été restituées par des enseignants grévistes, et malgré tout vous pensez que tous les candidats au bac auront leurs résultats aujourd'hui ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, j'ai suivi avec évidemment, je pense comme tout le monde, beaucoup d'attention les déclarations de Jean-Michel BLANQUER sur ce sujet, et il l'a confirmé. Ce qui est important, c'est que, effectivement, aujourd'hui tous les bacheliers en France puissent avoir les résultats de leur baccalauréat, parce que c'est une forme de rite, et que tous les ans nous voyons à quel point ce moment particulier, où l'on sait si on a son baccalauréat, on va au rattrapage ou bien on n'a pas son bac, est important pour nos jeunes.
ALI BADDOU
Mais ce sera le cas aujourd'hui, vous le garantissez à tous les candidats au bac.
FREDERIQUE VIDAL
Ce sera le cas aujourd'hui, oui, c'est ce que Jean-Michel BLANQUER a réaffirmé, donc c'est ce qui va se passer.
ALI BADDOU
Même si ce sont de faux résultats, pour le dire vite.
FREDERIQUE VIDAL
Oh, je pense qu'il ne faut pas qu'on parle de faux résultats. La solution qui a été proposée par le ministre de l'Education nationale c'est de faire en sorte que tout le monde ait ses résultats aujourd'hui et que personne ne soit perdant.
ALI BADDOU
Pour comprenne, pardon, j'essaie de reprendre mon souffle, mais ça doit être le stress comme pour les candidats au bac, quand on n'a pas la note d'une discipline, c'est la note du contrôle continu qui devrait s'appliquer, mais ça crée une forme d'injustice, disent un certain nombre d'élèves qui disent : mais si on n'a pas eu de bonnes notes pendant toute l'année, et qu'on a à réviser pour le bac, on sera pénalisé. Que leur répondez-vous ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors, une fois de plus, je crois que ce qu'il faut comprendre c'est que les copies ont été corrigées, c'est les notes qui sont retenues, donc ces notes vont à un moment réentrer dans le système, et évidemment les corrections seront apportées. C'est ce qu'a indiqué le ministre de l'Education nationale. Ce que je voudrais dire, moi, et ce qui est important parce que les bacheliers, après les résultats du bac, s'inscrivent dans l'enseignement supérieur, c'est que cela n'a aucun impact sur le fonctionnement de la plateforme d'orientation et d'inscription Parcoursup.
ALI BADDOU
Parcoursup. C'est-à-dire que si un élève n'a pas reçu sa copie ou n'a pas reçu sa note à temps, et que le jury déclare qu'il est recalé ou qu'il est admis, il faudra combien de temps pour que Parcoursup s'adapte à sa situation ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors en fait ça ne change rien à la plateforme, puisque les résultats ont commencé à arriver aux différents bacheliers à partir du 15 mai, donc bien avant le baccalauréat. On a des jeunes qui passent leur bac dans des lycées français à l'étranger, où les résultats sont décalés et arrivent d'autres jours. Donc en fait le jour où le résultat définitif est connu, n'a aucun impact sur le fonctionnement de la plateforme.
ALI BADDOU
On va en parler de Parcoursup dans un instant, parce que c'est un autre stress, une autre forme d'angoisse que vivent de très nombreux élèves ou étudiants en France. Est-ce que vous pensez que la crise qui concerne le bac aujourd'hui c'est une crise que vous n'avez pas prise assez au sérieux, quand on entend le ministre de l'Education nationale, quand on écoute également la porte-parole du gouvernement, il y a des enseignants qui se sont sentis humiliés par les mots qui ont été employés par l'un et par l'autre.
FREDERIQUE VIDAL
Alors, une fois de plus la réforme du baccalauréat elle a été préparée par Jean-Michel BLANQUER avec plusieurs outils de dialogue, de la consultation des lycéens jusque des discussions évidemment avec les syndicats. Je crois que sur ces sujets, en tout cas c'est ce que nous avons pratiqué jusqu'à maintenant, il y a toujours eu beaucoup de concertation. Après effectivement là on une forme de radicalité qui prouve que probablement l'écoute n'a pas été, n'a pas permis d'éviter cette radicalité.
ALI BADDOU
Vous n'avez pas suffisamment écouté le malaise des enseignants.
FREDERIQUE VIDAL
Oh, je ne sais pas si on n'a pas suffisamment écouté le malaise des enseignants…
ALI BADDOU
Parce qu'on vous sent prudente en tout cas, les mots que vous employez ne sont pas ceux qu'employait le ministre de l'Education nationale quand il parlait de sabotage, quand Sibeth NDIAYE par exemple disait que les profs n'ont pas été élus au suffrage universel, et quand on présente les enseignants, pour le dire vite, les enseignants grévistes comme des ennemis des élèves, vous êtes plus mesurée, plus réservée.
FREDERIQUE VIDAL
Mais c'est-à-dire que moi évidemment, ce n'est pas mon domaine de compétences, puisque je suis dans l'Enseignement supérieur, mais ce que je vois c'est que l'immense majorité des professeurs ont accompagné les élèves pour les préparer au bac, les ont accompagnés jusqu'aux épreuves, l'immense majorité a surveillé, a corrigé les copies, et moi ce que je voudrais surtout, rendre hommage à tous ceux qui ont fait leur travail. Voilà.
ALI BADDOU
Le bac 2019 ne sera pas dévalorisé.
FREDERIQUE VIDAL
Non, le bac 2019 ne sera pas dévalorisé, et là encore Jean-Michel BLANQUER l'a indiqué, là encore Jean-Michel BLANQUER l'a indiqué, ce qui est important c'est qu'aujourd'hui tous les bacheliers puissent avoir leurs résultats.
ALI BADDOU
La phase complémentaire, comme on dit, a commencé sur Parcoursup, donc cette plateforme d'inscription dans l'enseignement supérieur, elle permet pour le dire vite, de rebattre les cartes pour tous les candidats qui ont vu leurs voeux refusés, ceux qui attendent toujours, ceux qui ne sont pas satisfaits des propositions qui leur ont été faites. Le casse-tête continue pour eux. Combien de candidats aujourd'hui sont concernés, combien de candidats n'ont pas encore reçu d'affectation définitive ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors à 5 minutes des premiers résultats du baccalauréat, on a déjà 86,2 % des bacheliers qui ont des propositions définitives, et lorsqu'elles ne leur conviennent pas, effectivement, il y a la procédure complémentaire qui s'ouvre en parallèle. La procédure principale s'arrête le 19 juillet cette année, puisque nous avons voulu faire en sorte que les jeunes puissent profiter de leur été…
ALI BADDOU
Oui, le mieux qu'ils peuvent, la phase complémentaire, elle, dure juste qu'à la mi-septembre.
FREDERIQUE VIDAL
Mais la phase complémentaire est une phase où en fait les jeunes vont chercher des choses auxquelles ils n'avaient pas pensé. Vous savez, un projet d'orientation ça se mûrit, quand on a 17 ans, 18 ans, on peut changer d'avis, et je crois que c'est toute la souplesse qu'offre la plateforme Parcoursup qui permet…
ALI BADDOU
Mais on sait qu'aujourd'hui les places se libèrent au fur et à mesure, donc beaucoup de candidats qui n'ont pas vu leurs voeux exaucés, passent leur temps à attendre devant leur ordinateur, entre le stress et l'angoisse. Ça crée une hiérarchie entre les candidats disent certains, ça sécurise ceux qui sont en confiants, ceux qui n'ont pas de souci, ceux qui savent déjà où ils feront leur rentrée, et ça insécurise les plus vulnérables. Ça c'est un vice qui est au coeur de Parcoursup ou c'est quelque chose qu'on peut améliorer ?
FREDERIQUE VIDAL
Alors ça, c'est effectivement un des défauts qu'on a constatés l'an dernier et que nous avons améliorés cette année, en mettant en place ce que nous avons appelé le répondeur automatique, c'est-à-dire qu'en fait les jeunes peuvent lister les réponses qu'ils apporteront aux propositions qui leur seront faites, et puis éviter d'avoir à se connecter effectivement tous les jours.
ALI BADDOU
Mais vous leurs conseillez de prendre leur mal en patience, c'est quelque chose qui ressemble parfois à de la panique.
FREDERIQUE VIDAL
Non, vraiment, je crois que le processus et le fait que justement nous ayons en permanence ce souhait d'écouter, ce souhait d'entendre ce que les utilisateurs de cette plateforme ont à nous dire, fait que l'année dernière c'est effectivement quelque chose qui a été signalé et que comme je l'ai toujours dit, Parcoursup a vocation à évoluer et à s'améliorer, année après année, donc cette année je pense qu'on a corrigé ce phénomène, en mettant justement en place ce répondeur automatique, en fermant la procédure principale plus tôt, et en ouvrant la procédure complémentaire plus tôt aussi. Donc là vraiment, tous ceux qui cherchent encore, je pense que c'est très important qu'ils s'inscrivent dans cette procédure complémentaire.
ALI BADDOU
Et qu'ils ne perdent pas espoir. Vous avez engagé, Frédérique VIDAL, une réflexion pour améliorer la capacité des grandes écoles et des instituts les plus prestigieux de l'enseignement supérieur, pour qu'ils puissent accueillir des élèves issus de milieux très très différents. D'où vient qu'on en soit encore là, en France, aujourd'hui ? C'est une question qui est aussi ancienne, on a l'impression que l'enseignement supérieur en France, et on est toujours en train de se demander comment faire en sorte que l'égalité des chances permette un égal accès, quelle que soit notre origine sociale, aux grandes écoles.
FREDERIQUE VIDAL
En fait, je crois que c'est un processus qui s'est mis en place petit-à-petit et qui correspond aussi à la perte de confiance dans l'avenir, qu'on nos jeunes. Moi, quand je rencontre des jeunes bacheliers, des jeunes étudiants, je vois ce niveau de stress qui est très important chez eux, et donc évidemment quand on n'a pas confiance dans l'avenir, quand on n'a pas confiance en soi, c'est difficile de se projeter. Moi ce que j'ai envie de leur dire, c'est que notre rôle c'est de mettre en valeur leurs talents, quels qu'ils soient, et les talents sont différents, et donc c'est normal que les voies d'accès soient différentes pour ces grandes écoles.
ALI BADDOU
Les voies d'accès doivent être différentes, c'est par exemple une initiative qui a été menée, on le sait depuis 2001 à Sciences Po Paris, pourquoi est-ce que ça a du mal à être, sinon suivi, au moins, comment dire, imité par d'autres grandes écoles ?
FREDERIQUE VIDAL
Eh bien en fait elles sont en train d'y réfléchir, mais la différence fondamentale c'est que Sciences Po Paris recrute après le baccalauréat, alors que les grandes écoles recrutent après une première phase et un concours. Donc la façon, enfin ce à quoi je leur ai demandé de réfléchir, c'est : penser cette nouvelle façon de vivre cette première phase, une nouvelle façon de préparer ces concours, non pas pour faire des quotas, comme j'ai pu l'entendre, mais pour faire en sorte que les talents de chacun soient reconnus.
ALI BADDOU
C'est quand les vacances pour les ministres ?
FREDERIQUE VIDAL
Oh, c'est fin juillet je pense ou début août. Je ne me suis pas trop préoccupée de ça.
ALI BADDOU
Merci en tout cas Frédérique VIDAL d'avoir été notre invitée ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 juillet 2019