Texte intégral
RENAUD BLANC
Bonjour Gabriel ATTAL.
GABRIEL ATTAL
Bonjour.
RENAUD BLANC
Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Education nationale et de la jeunesse. On va bien évidemment parler du bac 2019, beaucoup parlent de fiasco.
GABRIEL ATTAL
Ce n'est pas un fiasco, puisqu'on nous annonçait un fiasco, on nous disait : vous savez, il n'y aura pas assez de surveillants pour surveiller les épreuves, qu'ils ne pourront pas se tenir, ça sera un fiasco. Toutes les épreuves se sont tenues. Ensuite, on nous a dit : vous allez voir, vous ne pourrez pas annoncer les résultats du baccalauréat, les jeunes vont être plongés dans un stress absolu avec leur famille pendant plusieurs jours dans l'attente de leurs résultats. On a pris les mesures nécessaires pour pouvoir annoncer les résultats du baccalauréat vendredi, aujourd'hui et demain, se déroulent les oraux de rattrapage, et on reste concentré de manière absolue pour garantir la sérénité et pour que tout se déroule bien jusqu'à mercredi.
RENAUD BLANC
Combien de profs aujourd'hui en grève ?
GABRIEL ATTAL
Il reste 100 professeurs environ, 100 correcteurs qui n'ont toujours pas rendu leurs copies, leurs notes, c'est 100 derniers récalcitrants…
RENAUD BLANC
Mais qu'est-ce qui peut se passer s'ils ne rendent pas les copies ? Qu'est-ce que vous allez faire ?
GABRIEL ATTAL
Ecoutez, il y aura des sanctions, c'est une évidence. Là, on est concentré sur la réussite des oraux et sur la réussite de la fin du baccalauréat, mais il y aura des sanctions, il y en a plusieurs possibles, il y a la retenue sur salaire, puisque quelqu'un qui n'a pas corrigé ses copies, c'est quelqu'un qui n'a pas fait son travail, et puis, il y a ensuite la possibilité de sanctions disciplinaires, pour faute lourde, dans le cas où on ne rend pas du tout sa copie…
RENAUD BLANC
Et vous souhaitez qu'on frappe un peu fort du côté de Grenelle ou pas, de la rue de Grenelle ?
GABRIEL ATTAL
Ecoutez, nous, ce qu'on souhaite, c'est faire appliquer les règles, et qu'une minorité, infime minorité de correcteurs, je rappelle qu'il y a 175.000 correcteurs du baccalauréat, et qu'on parle, au départ de 700, maintenant, de 100 récalcitrants, qui ne rendent pas leurs copies, ce qu'on ne souhaite pas, c'est que cette infime minorité entache l'image des enseignants qui ont fait un travail remarquable, qui ont dans leur écrasante majorité corrigé leurs copies, et donc ça veut dire qu'il faut sanctionner les manquements qui ont eu lieu.
RENAUD BLANC
Alors, vous avez dit, Gabriel ATTAL, que vous avez pris les mesures pour que les élèves puissent avoir leurs notes donc vendredi. Il y a quand même rupture du principe d'égalité dans un certain nombre de cas.
GABRIEL ATTAL
Ecoutez, la rupture du principe…
RENAUD BLANC
Vous avez des élèves qui ont finalement deux possibilités, le contrôle continu ou la note, d'autres qui n'ont qu'une note, d'autres qui n'ont pas encore leur note. Effectivement, il y a quand même un certain nombre de questions qui se posent, cette question du principe d'égalité qui est extrêmement important pour quand on passe un examen.
GABRIEL ATTAL
On est face à une situation exceptionnelle, où vous aviez 50.000 jeunes, 50.000 candidats qui n'avaient pas leur note sur une épreuve vendredi, et donc, il fallait trouver une solution. Et on a pris la moins mauvaise ou plutôt la meilleure des solutions, c'est-à-dire le fait que tout le monde puisse être fixé vendredi, la vraie inégalité, ça aurait été que certains n'aient pas le résultat de leur baccalauréat vendredi, là, on aurait été…
RENAUD BLANC
Mais certains vont aller au rattrapage, certains élèves vont aller au rattrapage sans avoir leur note.
GABRIEL ATTAL
Certains vont au rattrapage en ayant une note provisoire qui les envoie au rattrapage, ils passent le rattrapage, il aurait mieux valu ça que l'ascenseur émotionnel inverse avec des jeunes à qui on aurait dit : vous avez votre baccalauréat, et en fait, vous ne l'avez pas, on a pris justement les moyens pour faire en sorte d'éviter cette situation, et encore une fois, cette situation, c'est encore une infime minorité de correcteurs qui nous y plongent parce qu'ils refusent de faire leur travail d'enseignant, c'est-à-dire corriger les copies d'élèves qu'ils ont préparés tout au long de l'année pour un examen qui est sans doute le plus important de leur scolarité, et ça, c'est absolument inadmissible.
RENAUD BLANC
Les recours administratifs, vous les redoutez ou, quelque part, vous les comprenez ?
GABRIEL ATTAL
Non, parce que vous savez, parler de rupture d'égalité et de recours, ça peut être vrai sur un concours, vous avez des places limitées pour être admis. Là, on est sur un examen…
RENAUD BLANC
Mais là, vous avez quand même des élèves qui ont plus de chances que d'autres avec le système du contrôle continu en plus de l'examen par rapport à d'autres…
GABRIEL ATTAL
Mais je ne sais pas si on peut dire qu'ils ont plus de chances, parce que vous pouvez dire en même temps que vous en avez certains qui vont passer des rattrapages, alors peut-être que s'ils avaient eu la note de leur examen, ils n'auraient pas eu à les passer. Vous voyez ce que je veux dire, on est encore une fois sur une très petite minorité d'élèves, et on a pris des mesures nécessaires pour éviter qu'ils soient pénalisés, il n'y a pas d'élèves particulièrement avantagés dans cette situation.
RENAUD BLANC
Vous avez conscience aujourd'hui du mal-être des enseignants, c'est un dossier prioritaire pour vous ?
GABRIEL ATTAL
Bien sûr. Mais vous savez, la condition de travail des enseignants, c'est un dossier prioritaire, et on y travaille, on y travaille sur la question de l'autorité des enseignants, du professeur face à des situations parfois tendues et d'agression, on a un travail là-dessus, on y travaille sur les conditions de vie et sur les rémunérations, je rappelle qu'un enseignant qui débute sa carrière gagnera à la fin du quinquennat 1.000 euros de plus qu'il gagnait au début du quinquennat, qu'un enseignant qui démarrait au début du quinquennat, et on a encore une réflexion qui a été lancée par le président…
RENAUD BLANC
On est à peu près, pour un Capessien, aujourd'hui, qui débute, il est à 1.300, 1.400 nets, c'est ça ?
GABRIEL ATTAL
Oui. C'est ça. Et on aura 1.000 euros de plus par an, à la fin du quinquennat pour un Capessien qui démarre. Dans la réforme de la formation des enseignants, on fait en sorte que des jeunes qui sont en formation pour devenir enseignants puissent déjà s'engager à l'école en assistants d'éducation ou en remplacement pour augmenter son pouvoir d'achat, et donc pour attirer aussi davantage de vocations dans l'enseignement. Et le président de la République, à l'issue du grand débat national, dans sa conférence de presse, a abordé directement ce chantier de la rémunération des enseignants, il a dit lui-même : je souhaite que nous travaillions à une revalorisation financière de la rémunération des enseignants, et c'est ce sur quoi Jean-Michel BLANQUER travaille.
RENAUD BLANC
Un enseignant devrait être payé combien pour vous ?
GABRIEL ATTAL
Ce n'est pas à moi de le dire…
RENAUD BLANC
Non, mais 1.400 euros, pour quelqu'un qui a passé des concours, qui va donc s'occuper des enfants, qui va finir, grosso modo, à 2.000, 2.200 euros en fin de carrière, c'est à peu près ça, est-ce que vous trouvez que c'est normal en France aujourd'hui ?
GABRIEL ATTAL
Mais évidemment, moi, je souhaite que les enseignants soient payés davantage, comme Jean-Michel BLANQUER, il l'a dit aussi, et on y travaille et on est en train de regarder comment est-ce que cela peut se faire pour que ça soit vraiment ressenti et que ça corresponde à du concret pour les enseignants, parce que vous savez qu'il y a à peu près 900.000 enseignants en France, donc quand on parle d'augmentation, tout de suite, ça fait des masses financières très importantes, et donc c'est ça qu'on est en train de regarder, comment est-ce qu'on trouve le chemin pour qu'il y ait une augmentation réelle, durable et concrète pour les enseignants.
RENAUD BLANC
Autre grand dossier vous concernant Gabriel ATTAL, c'est le service national universel avec les premières expérimentations qui ont débuté et qui ont fini en juin, généralisation, c'est toujours l'idée, c'est en 2021 ?
GABRIEL ATTAL
Alors, ce qui était prévu par le rapport du général MENAOUINE, c'est une généralisation en 2026, et le président de la République a demandé qu'on aille plus vite…
RENAUD BLANC
2021
GABRIEL ATTAL
Il n'a pas fixé de date, c'est à moi de lui faire une proposition…
RENAUD BLANC
Oui, avant la fin du premier quinquennat !
GABRIEL ATTAL
Je suis en train d'y travailler, ça sera plusieurs années avant 2026, mais je ne peux pas vous confirmer aujourd'hui l'année de généralisation.
RENAUD BLANC
C'est toujours la même idée, deux semaines de cohésion républicaine, deux semaines de mission d'intérêt général ?
GABRIEL ATTAL
C'est ça, deux fois deux semaines, donc un mois obligatoire, puis, ensuite, un engagement volontaire qui peut être plus long.
RENAUD BLANC
On en sait plus sur le coût de ce service national universel ?
GABRIEL ATTAL
Eh bien, il va dépendre beaucoup d'arbitrages qu'on en train de faire, qui font suite à la phase pilote qu'on a organisée, on a organisé une phase pilote avec 2.000 jeunes, pourquoi, parce que c'est un projet massif qui va concerner 800.000 jeunes, on ne se lance pas là-dedans à l'aveugle se disant : on a trouvé toutes les solutions, on est pragmatique, on est économe de nos moyens, donc on a testé les organisations. Vous savez, pendant la campagne présidentielle, il y a des chiffres qui avaient été avancés, beaucoup par des oppositions qui voulaient dire que ça coûtait beaucoup trop cher, que c'était infaisable, on parlait de 7 milliards, 10 milliards, ce qu'on voit, là, avec cette phase pilote, c'est qu'on sera bien en dessous, bien nettement en dessous, sans doute entre un milliard, un milliard cinq, mais ce qu'a toujours dit le président de la République, c'est que, évidemment que c'est un coût, mais c'est aussi un investissement…
RENAUD BLANC
Mais justement, c'est ça qui m'intéresse, c'est l'investissement, parce que deux semaines de cohésion républicaine, qu'est-ce qu'on apprend en deux semaines de cohésion républicaine véritablement, Gabriel ATTAL, parce que, même des gens qui sont pour, disent : mais deux semaines, ça ne sert à rien, c'est trop court…
GABRIEL ATTAL
Mais vous savez, c'est moins la durée qui compte que l'intensité de ce que vous faites, des activités qui vous sont proposées. Et vous pourriez d'ailleurs inviter un jeune…
RENAUD BLANC
Ça va être dense en deux semaines, c'est ce que vous nous dites…
GABRIEL ATTAL
Mais bien sûr, mais c'est le témoignage des jeunes qui ont vécu ces deux semaines, vous savez, la plupart de ces jeunes, ils quittaient leur département pour la première fois, déjà, c'était une découverte incroyable, le fait de sortir de leur département, de découvrir qu'ils pouvaient passer un moment en dehors du domicile familial, de chez leurs parents, et je pense que ça va libérer beaucoup de choses ensuite pour l'orientation, pour faire des choix sur sa formation, sur son apprentissage, sur son emploi, ensuite, vous avez des jeunes qui ont été confrontés à de la diversité pour la première fois, qui ont rencontré pour la première fois des jeunes qui viennent d'un autre milieu social, d'une autre origine territoriale, et ça fait tomber un certain nombre de tabous, de représentations, de caricatures, et surtout, ça permet de partager des choses, vous avez des formations très fortes sur les valeurs de la République, sur les règles dans la République, et ça aussi, ça a été plébiscité par les jeunes eux-mêmes, ils disent : on a besoin de cadre, on a besoin de repères. Vous avez des formations qui sont très concrètes…
RENAUD BLANC
Quelque part, vous refaites le boulot finalement de l'Education nationale, parce que quand vous parlez des règles de la République, on doit quand même les connaître avant de faire ce type de service.
GABRIEL ATTAL
C'est aussi le rôle de l'Education nationale, c'est certain, vous avez une éducation civique, un enseignement moral et civique, là, vous avez une mise en pratique pendant deux semaines, ce qu'il y a de fort avec le service national, c'est qu'on n'est pas dans de la pédagogie classique, on va dire ou descendante, on est sur de la pédagogie active…
RENAUD BLANC
Et les premiers jeunes ont…
GABRIEL ATTAL
Par de la simulation, du jeu de rôle, du débat, et donc c'est à travers ça que les jeunes appréhendent ces notions.
RENAUD BLANC
Et ils vont défiler le 14 juillet, ces jeunes, les premiers ?
GABRIEL ATTAL
Oui, une partie d'entre eux défilera le 14 juillet, dans le cadre du tableau final, tableau d'honneur, et ils sont à Paris dès cette semaine pour répéter, parce que c'est un moment évidemment très fort et qui se prépare, c'est aussi une manière de mettre en valeur ces jeunes, qui se sont engagés, parce qu'on était pour cette phase pilote sur la base de volontariat ; et c'est des jeunes qui ont dit à un moment : eh bien, j'y vais, et certains d'ailleurs n'y sont pas allés forcément de gaieté de coeur, c'est aussi un peu en discussion avec leurs parents où leurs parents l'ont dit : vas-y, ça sera bon pour toi. Et tous, en sortant, moi, je les ai rencontrés, ont dit : j'ai grandi à l'occasion de cette expérience, j'ai découvert des choses sur moi-même, j'ai découvert que j'étais capable de choses, j'étais capable de me lever à 6h du matin pour faire une cérémonie, et de lever les couleurs où on chante la Marseillaise, alors même que j'ai du mal à me lever habituellement, donc tout ça, c'est aussi du plus pour la formation des jeunes, il y a un bilan de santé complet qui a été fait pour tous les jeunes, on a découvert des pathologies qui jusqu'à maintenant n'avaient pas été décelées chez certains jeunes. Donc tout ça, c'est extrêmement important pour la construction des jeunes…
RENAUD BLANC
Il me reste une minute pour parler, bien sûr, il y a le 14 juillet, mais avant le 14 juillet, du côté de Paris, il y a aussi le candidat des municipales pour la droite, on va commencer les oraux dès demain, est-ce que vous n'avez pas le sentiment quand même que 45 minutes d'un oral pour dire si on a un bon candidat pour Paris, c'est quand même assez court quand on a une capitale avec deux millions d'habitants, franchement ?
GABRIEL ATTAL
C'est un oral final qui termine un processus de candidature où vous avez des candidats qui ont annoncé leur candidature, qui ont développé leur vision, commencé à développer leur projet pour Paris, et puis, là, vous avez finalement… ça vient sanctionner…
RENAUD BLANC
Ça fait un petit peu à la va vite quand même, non, Gabriel ATTAL, très franchement ?
GABRIEL ATTAL
Non, je ne dirais pas ça, ça fait quand même un moment qu'on en parle des municipales à Paris…
RENAUD BLANC
Je vous dis ça parce que vous avez des candidats de votre propre camp qui disent : il faudrait plus de temps !
GABRIEL ATTAL
Oui, c'est normal qu'il y ait des débats, que certains disent, à un moment, il faut trancher, mais si on attendait, je ne sais pas, septembre, octobre, novembre pour choisir notre candidat, on nous dirait : mais attendez, vous faites ça au dernier moment et vous n'avez pas assez de temps pour faire campagne et pour annoncer ce que vous allez faire.
RENAUD BLANC
Et pourquoi, Gabriel ATTAL, choisissez-vous Benjamin GRIVEAUX, pourquoi GRIVEAUX plutôt que VILLANI ou quelqu'un d'autre, qu'est-ce qui fait que pour vous, il est le bon candidat de La République En Marche ?
GABRIEL ATTAL
Moi, je laisse la Commission nationale d'investiture travailler, et elle choisira, mais c'est vrai que j'ai dit dès le départ…
RENAUD BLANC
Oui, mais vous vous êtes engagé…
GABRIEL ATTAL
Mais j'ai dit dès le départ que pour moi, le meilleur c'était Benjamin GRIVEAUX, pourquoi ? Parce qu'il rassemble…
RENAUD BLANC
Il nous reste 20 secondes…
GABRIEL ATTAL
Je le vois, avec des responsables des Marcheurs de terrain, d'arrondissements à Paris, des parlementaires à Paris qu'il rassemble autour de lui, ensuite, parce que je pense que sa démarche est la bonne, dire : je n'arrive pas en vous disant : voilà le programme, et on va faire campagne là-dessus, dire : je vais travailler avec vous, on va faire une sorte de grande marche, où en fait on va consulter les Parisiens pour connaître leurs priorités, et pour construire le programme avec eux, et ça, ça me semble être la bonne démarche, c'est pour ça que c'est bien d'aller vite sur la désignation, ça me semble être la bonne démarche.
RENAUD BLANC
Et si c'est un autre candidat, vous le soutiendrez ?
GABRIEL ATTAL
Evidemment, moi, je soutiendrai le candidat, ou le candidat, puisque maintenant, il ne reste que des candidats, la dernière candidate s'est retirée, mais je soutiendrai le candidat qui sera choisi par la commission d'investiture.
RENAUD BLANC
Merci Gabriel ATTAL d'avoir répondu à mes questions, le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Education nationale et de la jeunesse, l'invité de Radio Classique.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 juillet 2019