Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Muriel PENICAUD bonjour.
MURIEL PENICAUD
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ministre du Travail, moi j'aime bien ajouter ministre de l'Emploi. On va parler d'emploi tout à l'heure.
MURIEL PENICAUD
Et de la formation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et de la formation. Muriel PENICAUD, hier soir vous étiez place de la République, j'ai une question simple à vous poser, où en est la France ? comment se fait-il que nous soyons obligés de montrer au monde entier que nous ne sommes ni racistes, ni antisémites ? On en est là.
MURIEL PENICAUD
On en est là, on en est là et c'est très troublant parce que, il se passe deux choses à la fois, il se passe cette terrible vague d'antisémitisme et on a, je vais dire le pire de notre histoire, le pire de ce qu'il y a dans notre vie, qui ressort, et en même temps, on parlera certainement du grand débat, une participation, une vitalité de la démocratie, du respect, de l'écoute, on a les deux. Donc je crois qu'il faut être très vigoureux, il faut… c'est important de savoir, au fond, pourquoi on est là, pourquoi on est français, et que surtout ça concerne tout le monde. Je crois que l'antisémitisme ce n'est pas le sujet des personnes juives, c'est le sujet de tous les Français, parce que finalement c'est nos valeurs, c'est notre République, c'est notre histoire, et je crois que, eh bien il y a des moments, dans l'histoire, il faut dire, il faut répéter, il faut expliquer, et il faut surtout, tous ensemble, être solidaire, et c'est le moment où on a besoin de le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et pourquoi pas à l'école ? j'ai vu qu'il y avait une proposition de loi déposée par, plusieurs députés d'ailleurs, qui ont consigné cette proposition de loi, pour faire en sorte que l'on enseigne spécifiquement… on l'enseigne déjà la lutte, l'histoire des juifs, l'histoire… mais, la lutte contre l'antisémitisme.
MURIEL PENICAUD
Je crois que, il faut le faire à l'école, c'est déjà fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est l'éducation.
MURIEL PENICAUD
Et Jean-Michel BLANQUER veut renforcer ça, mais je crois qu'il faut aussi qu'on le fasse d'une façon qui touche, qui ne touche pas simplement la tête, mais qui touche le coeur des enfants. C'est-à-dire, imaginez-vous si c'était vos parents dont on profanait la tombe, parce que ça pourrait être n'importe qui d'entre nous, c'est tout le monde, quand on profane une tombe on profane toutes les tombes, et si c'était…. Et je crois qu'il faut le ramener, aussi, à ce que ça veut dire vraiment dans la vie, pour tout le monde, pour que cette solidarité renaisse et que, voilà, on retrouve nos meilleures heures.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Interpellation de l'auteur des propos antisémites lancés contre Alain FINKIELKRAUT, nous allons voir, la justice fait son travail. Et l'antisémitisme s'est finalement, malheureusement, véhiculé par les deux extrêmes, extrême gauche, extrême droite, il n'y a pas un antisémitisme d'extrême gauche, islamo-gauchiste, et un antisémitisme… il y a les deux, il y a les deux…
MURIEL PENICAUD
Absolument, il y a les deux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui finalement se rejoignent, non ?
MURIEL PENICAUD
Oui, souvent les extrêmes se rejoignent dans la violence.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Si nous parlions de cette rencontre entre les syndicats et le patronat qui va reprendre, la dernière chance sur l'assurance chômage, la réforme de l'assurance chômage, tout à l'heure à 14h30. Alors, vous les avez avertis, la lutte contre la précarisation dans l'emploi doit être la priorité de la négociation, vous les avez avertis, mais apparemment c'est sans effet, pour l'instant.
MURIEL PENICAUD
Alors pourquoi c'est la priorité, je pense que tout le monde peut le comprendre, parce que tout le monde, soit est concerné, soit connaît quelqu'un qui est concerné. Aujourd'hui notre système a dérapé, et aujourd'hui 9 recrutements sur 10 c'est un travail précaire, c'est-à-dire un CDD ou de l'intérim.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et c'est parfois même un travail d'une demi-journée, ou même de 2 heures.
MURIEL PENICAUD
Ce qui est pour moi injustifiable, y compris sur le plan économique, et évidemment sur le plan social, c'est que 80 % des CDD c'est 1 mois au moins, mais 1 sur 3 c'est 1 jour au moins, c'est comme si on avait réinventé les journaliers, alors les gens sont à l'assurance chômage, on les appelle, « allô, vous pouvez venir demain », on ne peut pas vivre comme ça, on ne peut pas se projeter, on ne peut pas avoir un logement. Et quand c'est toujours la même personne qui est recrutée dans le même employeur, de façon précaire, on dit qu'on peut faire autrement et on fera autrement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, vous ferez autrement, si vous reprenez la main, et la loi vous forcera peut-être à reprendre la main si les syndicats de salariés et le patronat ne se mettent pas d'accord, ultime chance aujourd'hui. Vous reprendrez la main, puisque la loi vous l'impose ?
MURIEL PENICAUD
Oui, la loi prévoit que si les partenaires sociaux ne définissent pas les règles, c'est l'Etat qui les définit. Personnellement je préfère que ce soit une négociation entre les partenaires sociaux, s'ils n'aboutissent pas, eh bien c'est à l'Etat, c'est à nous de le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le patronat, le MEDEF, mais pas que le MEDEF, la CGPME et d'autres organisations, toutes ces organisations ne veulent pas du bonus-malus sur les contrats courts, pas question d'instaurer ce bonus-malus voulu par le président de la République, et défendu par le président de la République.
MURIEL PENICAUD
Défendu dès la campagne présidentielle. Alors, c'est simple, on a des règles de l'assurance chômage, qui aujourd'hui favorisent le recours au travail précaire tant du côté des employeurs que des demandeurs d'emploi, c'est absurde, c'est absurde parce qu'on ne peut pas faire une société où tout le monde ait un emploi précaire, le CDD c'est bien si c'est un tremplin vers un emploi plus stable. Et donc, de toute façon, c'est ce qu'on avait dit aux partenaires sociaux, il faut une mesure très forte, vigoureuse, pour lutter contre la précarité excessive.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc ce bonus-malus.
MURIEL PENICAUD
Et donc c'est le bonus-malus, ou on leur a laissé le choix, si vous trouvez une formule qui fait au moins aussi bien que le bonus-malus…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tant mieux.
MURIEL PENICAUD
On n'est pas rigide, mais il faut une mesure forte par rapport au travail précaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, si rien n'est décidé aujourd'hui, vous faites quoi ?
MURIEL PENICAUD
On va voir, je laisse la chance…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous instaurez vous-même par décret par le bonus-malus. Vous pouvez.
MURIEL PENICAUD
On laisse la chance d'abord aux partenaires sociaux, sinon on va regarder, on ne va pas faire ça en 5 minutes, on va étudier toutes les possibilit��s, mais oui, on prendra, par décret, les mesures qu'il faut pour l'assurance chômage, pour qu'on ait moins de travail précaire dans notre pays…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le bonus-malus.
MURIEL PENICAUD
Bonus-malus, ou améliorer, s'il y a encore à la dernière minute une très bonne idée, on peut le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, j'ai vu que le patronat proposait de créer un fonds pour soutenir les salariés précaires, les employeurs devant payer un forfait sur les contrats courts, une sorte de taxe en quelque sorte, qui alimenterait un fonds permettant aux salariés précaires d'accéder par exemple à des complémentaires santé.
MURIEL PENICAUD
Alors, j'ai pour principe de ne pas interférer, mais enfin bon, voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça ne vous plaît beaucoup.
MURIEL PENICAUD
Ce n'est peut-être pas tout à fait à la hauteur du sujet, mais après c'est à eux d'en juger, s'ils se mettent d'accord.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous déciderez, par décret ?
MURIEL PENICAUD
On décidera par décret, ça ne veut pas dire, quand on fait un décret, qu'on ne concerte pas, qu'on ne discute pas avant, bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais si aujourd'hui ça échoue, c'est fini ?
MURIEL PENICAUD
Alors aujourd'hui ils peuvent conclure, réussir leur conclusion, ils peuvent décider de poser le crayon en disant « on n'y arrivera pas », ou ils peuvent reprendre des dates de négociation, donc on verra ce soir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon, ils peuvent encore reprendre des dates de négociation…
MURIEL PENICAUD
Oui, quelques jours.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais jusqu'à quand ?
MURIEL PENICAUD
Quelques jours, parce que le document de cadrage est fin septembre, ça devait être pour fin janvier, ils nous ont demandé un délai, on a accordé un délai d'1 mois, donc c'est une affaire de jours ou de semaines, s'ils continuent à négocier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, concernant l'assurance chômage, vous avez demandé aux partenaires sociaux de trouver des solutions pour faire des économies.
MURIEL PENICAUD
Oui, alors c'est le même sujet que la précarité. La taille du sujet, c'est quoi ? Chaque année l'assurance chômage c'est 35 milliards de dépenses, 35 milliards d'euros, mais il y a 8 milliards de déficit qui sont liés aux contrats courts, au fait que les contrats courts soient extrêmement nombreux, donc s'il y a moins de contrats courts, s'il y a plus de gens qui ont un CDI, eh bien automatiquement le système fait des économies. Donc en fait, les économies ça va être la conséquence du fait qu'on a moins de travail précaire dans ce pays.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le patronat va devoir céder.
MURIEL PENICAUD
Alors le patronat et les syndicats, j'espère, trouvent des solutions communes, et sinon, on fera quelque chose. Alors ceci dit les règles aussi, du côté demandeur d'emploi, sont aussi… il y a une partie des règles qui a commence conséquence que le demander d'emploi il n'a pas intérêt à retourner travailler, en tout cas à accepter un CDI, donc il faut faire les deux côtés quand même.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors justement, côté demandeur d'emploi, qu'est-ce que vous pourriez imposer ?
MURIEL PENICAUD
Nous on n'imposera rien du tout, mais ce qu'on a mis dans le document, à ce stade, dans le document de cadrage, on dit juste que les règles doivent encourager à prendre un travail permanent et à ne pas abuser des contrats courts quand on est employeur. Donc, des deux côtés, c'était ça le défi qu'on leur a donné dans le document de cadrage, on leur dit « changer les règles pour qu'il y ait moins de gens en travail précaire dans ce pays. »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le chômeur devra accepter un emploi, si c'est un CDI, même si ce n'est pas dans sa compétence ?
MURIEL PENICAUD
Non, non, pas du tout, ça c'est les règles par ailleurs de contrôle, mais évidemment on a d'ailleurs modifié ça, avant c'était mécanique, maintenant c'est personnalisé, chacun peut dire « là je peux travailler là », « là je n'ai pas de transport, je ne peux pas prendre ce job », ou « ce n'est pas mes compétences », ou « ce n'est pas le niveau de salaire », non, ça c'est vraiment personnalisé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on ne doit pas obliger le chômeur à accepter un emploi au bout d'un certain temps de chômage ?
MURIEL PENICAUD
Je pense que, ce qui est déjà dans les textes, et aujourd'hui ce qu'on voit dans le contrôle c'est que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même si ce n'est pas dans son secteur de compétences ?
MURIEL PENICAUD
Alors, en fait il y a une discussion entre le conseiller Pôle emploi, depuis le 1er janvier, et le demandeur d'emploi, et ils définissent finalement quel type d'emploi. Evidemment, si vous avez un emploi qui n'existe qu'à Paris, et vous déménagez en province, vous devez pouvoir accepter d'autres travaux, par contre si vous êtes dans un secteur où vous avez une qualification et où il y a des emplois, évidemment vous pouvez être exigeant par rapport au secteur.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous dis ça Muriel PENICAUD, parce que parmi les 60 propositions de loi citoyenne, dans notre grande opération, qui sont soumises au vote, il y en a une qui dit « arrêt du versement des allocations chômage si un demandeur d'emploi refuse une offre, quelle qu'elle soit. »
MURIEL PENICAUD
Alors, ce qu'on fait c'est qu'il faut regarder la situation de la personne, ce n'est pas pareil si vous êtes un cadre dans une grande ville alors que le taux de chômage des cadres, c'est une année record sur le recrutement des cadres, il y a très peu de cadres ou personnes qualifiées, par contre si c'est une personne qui n'est pas qualifiée, qui n'a pas de moyen de transport, dans une zone où il n'y a pas d'emploi et qu'il y a une femme seule qui a besoin de faire garder ses enfants, il faut tenir compte de tout ça, c'est en fonction de ce que chacun peut aussi, mais après, effectivement, c'est un système d'assurance, donc droits et devoirs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour faire des économies…
MURIEL PENICAUD
Non, ce n'est pas pour faire des économies, c'est pour avoir un système robuste qui dure.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous pourriez revoir les règles d'indemnisation du chômage, non ?
MURIEL PENICAUD
Alors, le principe même de la négociation en cours c'est que régulièrement les partenaires sociaux revoient les règles, c'est ça le sujet, s'ils ne le font pas c'est à nous de le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le ferez.
MURIEL PENICAUD
Oui, on le fera s'ils ne le font pas, mais on discutera avec eux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça j'imagine, vous ne le ferez pas tout seul, mais vous le ferez, par décret encore une fois.
MURIEL PENICAUD
Oui, la loi prévoit ça, donc on respecte la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement. Je ne sais pas moi, réviser le mode de calcul de l'allocation chômage.
MURIEL PENICAUD
Alors je ne vais pas aujourd'hui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, entrer dans le détail…
MURIEL PENICAUD
Je ne vais pas entrer dans le détail, notre but principal c'est la lutte contre la précarité. Encore une fois, je pense qu'on ne peut pas se projeter dans la vie si on est uniquement en emplois précaires, c'est le problème numéro 1 que nous avons à régler dans ces règles d'assurance chômage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous pourriez baisser le plafond de l'allocation chômage mensuelle ?
MURIEL PENICAUD
Non, mais je ne vais pas prendre des…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ? Ah bon d'accord…
MURIEL PENICAUD
Il y a 200 règles, donc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
200 règles, bon d'accord…
MURIEL PENICAUD
Je ne vais pas commencer à les prendre une par une.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ça ce sont des sujets sur lesquels vous êtes en réflexion bien sûr, et vous pourriez faire évoluer les choses ?
MURIEL PENICAUD
De toute façon il est de notre devoir, par la loi, de faire évoluer les choses si les partenaires sociaux ne le font pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans le cadre de cette réforme.
MURIEL PENICAUD
Voilà, donc il y aura une réforme de l'assurance chômage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, les chefs d'entreprise… quand, d'ailleurs, la réforme de l'assurance chômage devant le Parlement ?
MURIEL PENICAUD
Ah non, le Parlement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah oui, il n'y a pas de Parlement, oui c'est décret.
MURIEL PENICAUD
Le Parlement a défini que c'était par décret.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais quand ?
MURIEL PENICAUD
Mais ça, ça dépend… attendez, je ne sais même pas si la négociation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça va nourrir le grand débat ?
MURIEL PENICAUD
Alors, dans le grand débat c'est des sujets qui sont abordés. Moi, dans les débats où je suis allée, c'est des sujets… d'ailleurs on voit bien que ce n'est pas noir/ blanc, que ce n'est pas un sujet simple, parce qu'il faut à la fois, et on est très fier, avoir un système qui protège les plus… lorsqu'on perd son emploi, c'est ça l'assurance chômage, c'est avoir une assurance que lorsqu'on perd son emploi, entre deux emplois, on a une rémunération, et on est aidé pour trouver un emploi, et puis en même temps droits et devoirs, il faut aussi que le système permette de retrouver un emploi le plus vite possible.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tous les jours nous avons des chefs d'entreprise, des patrons de PME, des artisans, des commerçants, qui nous appellent en nous disant « j'ai des difficultés à embaucher, je n'arrive pas à trouver de personnel. » Parmi les mesures possibles, fixer des contreparties aux aides sociales. J'ai entendu le Premier ministre, ça ne m'a pas échappé, ça existe dans le Haut-Rhin, vous savez que dans le Haut-Rhin ce n'est pas compliqué, les allocataires du RSA sont priés d'effectuer 7 heures, 7 heures de bénévolat, par semaine, pour percevoir leur allocation. On pourrait généraliser cette idée ?
MURIEL PENICAUD
Alors j'ai vu hier le président Frédéric BIERRY, du département, qui justement est venu me rendre un rapport, ainsi qu'à Christelle DUBOS, pour expliquer comment on pourrait avoir plus de personnes du RSA qui puissent aller vers l'emploi. Moi il y a une chose qui me préoccupe, c'est que, aujourd'hui, quand on « tombe » au RSA, comme on dit, personne ne choisit, personne n'a envie de vivre avec 550 euros par mois, 826 si vous avez un enfant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On est d'accord.
MURIEL PENICAUD
Parce que c'est vraiment très dur, eh bien il n'y en a que 1 sur 5 qui retrouve un emploi dans l'année, c'est une trappe à pauvreté. Donc il faut évidemment garder, et heureusement qu'on a ce filet de sécurité, on en est fier, en France, mais il faut avoir une action et notamment que les travailleurs sociaux, du département, et Pôle emploi, travaillent plus ensemble, c'est la recommandation qu'a fait Frédéric BIERRY et son groupe de travail, pour qu'on ait un accompagnement renforcé des personnes qui sont RSA et dont beaucoup peuvent travailler et veulent travailler.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'accompagnement renforcé c'est une chose, mais obliger les allocataires du RSA à effectuer 7 heures de bénévolat par semaine !
MURIEL PENICAUD
Alors, moi ce à quoi je ne crois pas, et je ne suis pas d'accord…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ça marche dans le Haut-Rhin.
MURIEL PENICAUD
Oui, mais ce n'est pas des contreparties punitives, moi je sais comment ils ont faits…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, c'est du bénévolat, pour la collectivité.
MURIEL PENICAUD
C'est quand on n'est pas en travail depuis longtemps, retrouver une situation de travail, se remettre dans un cadre de travail, ce n'est pas évident. Qu'il y ait une première étape qui soit proposée, qu'on puisse faire du travail bénévole pendant quelques heures, pourquoi pas, mais aussi sous d'autres formes. J'étais à Nantes lundi, moi je suis en train de renforcer tous les entreprises d'insertion, les entreprises adaptées pour les personnes handicapées. Il faut de toute façon une activité un peu tremplin lorsqu'on a été au chômage depuis longtemps, pour retrouver, il faut trouver, il faut une activité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, voilà, pour aider les bénéficiaires de droits sociaux…
MURIEL PENICAUD
Pour leur proposer ça, et beaucoup sont preneurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour leur proposer…
MURIEL PENICAUD
Leur proposer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Leur proposer, par leur imposer.
MURIEL PENICAUD
Moi je suis pour leur proposer, et sachant qu'on peut leur proposer d'aider une association, une collectivité, reprendre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pas l'imposer.
MURIEL PENICAUD
Je pense que ce n'est pas... la logique ce n'est pas de l'imposer, c'est qu'ils aient une chance d'avoir une garantie d'activité finalement, ou l'entreprise d'insertion.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Leur proposer systématiquement.
MURIEL PENICAUD
Leur proposer systématiquement, pour tous ceux qui peuvent, certains ont des problèmes de santé, il faut leur proposer plutôt quelque chose qui est un parcours de santé, donc il faut tenir compte de la situation de chacun, mais je crois qu'il faut proposer à chacun, on ne peut pas dire aux gens simplement, eh bien écoutez on vous donne une indemnité pour, voilà, pour vivre, modestement mais pour vivre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour survivre, quoi, pour vivre.
MURIEL PENICAUD
Parfois pour survivre, en vrai. En vrai pour survivre, et puis c'est tout, et puis la société ne s'occupe plus de vous. Je crois que ça, ça veut dire... ça veut dire quoi le message ? Ça voudrait dire qu'on n'aurait pas besoin d'eux. Moi je crois qu'on a besoin de tout le monde, et que nul n'est inemployable, et on le prouve sur le terrain avec eux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais si ça marche dans le Haut-Rhin, pourquoi ne pas le faire dans toute la France ?
MURIEL PENICAUD
Justement ils ont analysé et c'est la proposition du rapport, le président reçoit tous les présidents de département demain, et ce sera à l'ordre du jour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce sera à l'ordre du jour demain. Très intéressant.
MURIEL PENICAUD
D'avoir des propositions sur le sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Très intéressant. Dites-moi les 60 propositions de loi citoyenne, j'y reviens, vous allez me dire ce que vous en pensez. J'ai dégagé celles qui vous concernent. Indexation des salaires sur l'inflation.
MURIEL PENICAUD
Alors, aujourd'hui le SMIC est déjà indexé sur l'inflation et même plus que l'inflation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, le SMIC.
MURIEL PENICAUD
Mais le SMIC, alors le SMIC c'est 1,6 million de personnes, mais ça a un effet pour 11 millions des salariés. Pourquoi, parce que vous savez, il y a des classifications dans chaque secteur d'activité, dans ce qu'on appelle les branches, et donc quand on remonte le SMIC, on remonte en cascade beaucoup de salaires. Donc aujourd'hui on est un des rares pays qui a déjà le SMIC indexé sur l'inflation, plus l'évolution des salaires ouvriers employés, donc voilà, aujourd'hui en fait c'est déjà le cas, mais les gens ne le savent pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une autre proposition : baisse des cotisations patronales, conditionnées à une augmentation des salaires.
MURIEL PENICAUD
Alors aujourd'hui il y a eu une baisse des cotisations patronales, pour avoir plus de compétitivité, ça contribue à l'emploi, ça contribue à la baisse du chômage, ça c'est clair, après c'est jusqu'où, le débat c'est jusqu'où il y a des cotisations. Pour les bas salaires ça a un effet immédiat sur l'emploi, évidemment sur un cadre supérieur ça l'a moins, donc il y a des débats en cours là-dessus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mise en place d'un écart maximal de salaires dans les entreprises privées.
MURIEL PENICAUD
Oui, alors on a mis dans la loi PACTE avec Bruno LE MAIRE, on a mis le fait qu'on ait une transparence sur le sujet, c'est-à-dire que les entreprises, quand la loi PACTE sera votée, devront publier leur écart entre les rémunérations les plus élevées, les dirigeants, et le salaire moyen de tout le monde, pour qu'on puisse mesurer quel est l'écart. Il n'y a pas de normes en la matière, mais je crois que la transparence joue beaucoup, c'est aussi ce qu'on fait avec l'égalité hommes-femmes, où là…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a progrès à faire.
MURIEL PENICAUD
Ah non mais c'est formidable. On vient de prendre la loi, le 5 septembre, la plus avancée du monde sur le sujet. Et je vous donne rendez-vous monsieur BOURDIN le 1er mars, le 1er mars toutes les entreprises de plus de 1 000 salariés devront publier leur index pour savoir si elles respectent l'égalité hommes-femmes. Alors il faudra déjà regarder dans les médias, mais partout.…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr.
MURIEL PENICAUD
Et vous allez voir, ça va faire bouger les choses. Elles ont une obligation de rattrapage salarial, dans les 3 ans, si elles ne sont pas au carré.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et sinon sanctions.
MURIEL PENICAUD
Et sinon sanctions lourdes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sanctions lourdes.
MURIEL PENICAUD
Et d'ici 3 ans il y a 4 à 5 millions de femmes qui vont voir leur salaire augmenter, grâce à ça, ça c'est aussi le pouvoir d'achat, et c'est la justice.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Muriel PENICAUD, l'une des propositions qui revient le plus souvent, vraiment le plus souvent, c'est l'indexation des retraites sur le salaire moyen. Je dis bien sûr le salaire moyen, non pas sur l'inflation. Ça a existé je crois avant 1987, c'est une idée que vous pourriez reprendre ? Sincèrement.
MURIEL PENICAUD
Alors, ça a fait partie du débat des retraites, donc beaucoup trop tôt pour dire ce qu'on retiendra, parce que ce n'est pas décidé, c'est la concertation, mais le débat…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais d'accord, mais c'est une idée que vous pourriez reprendre ?
MURIEL PENICAUD
C'est une idée qui est assez protectrice quand il n'y a pas d'inflation, c'est-à-dire que du coup les salaires augmentent... Aujourd'hui les salaires augmentent à peu plus vite que le coût de la vie, c'est assez proche quand même. Donc, si on indexe sur les salaires, à l'inverse, s'il y avait une inflation... Voilà. Donc ça fait partie des sujets, comme beaucoup de sujets passionnants et utiles dans notre pays, il ne faut pas noir blanc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui non mais d'accord mais vous ne rejetez pas cette idée. Vous ne rejetez pas cette idée.
MURIEL PENICAUD
... on ne peut pas les faire par QCM, et je pense que de toute façon dans le cadre de la réforme des retraites, il n'y a aucune, on est encore très, voilà, c'est une phase d'idées et de propositions, il ne faut rejeter aucune idée a priori, il faut toutes les étudier, et puis il faut débattre avec les partenaires sociaux du sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais parce que ça satisferait, là, si vous prenez cette mesure, je peux vous dire que ça va satisfaire 80 % des retraités.
MURIEL PENICAUD
Ça va faire partie du débat. Par définition…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'êtes pas contre. Vous n'êtes pas contre, mais j'entends ça !
MURIEL PENICAUD
Je suis ni pour ni contre, à ce stade, mais je pense que, de toute façon toutes les idées du Grand débat, il faut en débattre. Toutes les idées qui sortent, moi je suis passionnée par ce Grand débat, il y a plus de un million maintenant de contributions individuelles, 6 000 débats. Moi j'étais à Nantes dans un débat dans un village, j'étais à Schiltigheim avec des artisans, j'étais avec le président avec le débat sur les jeunes, moi je suis frappée comme tout le monde de la... ça donne un espoir formidable, de la vitalité démocratique de notre pays, le nombre d'idées et de propositions, donc évidemment il faut rejeter aucune idée, faut toutes les étudier et après, voilà, il y aura des suites.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Muriel PENICAUD, j'ai une dernière question sur les Gilets jaunes, la crise des Gilets jaunes, 72 675 salariés contraints au chômage partiel. Vont être indemnisés ?
MURIEL PENICAUD
Si les entreprises... j'ai donné l'autorisation, enfin mon ministère a donné l'autorisation pour les demandes d'entreprises, déjà jusqu'à 72 000 salariés, on a provisionné 38 millions d'euros pour ça. Moi ce qui me... 72 000 salariés ça veut dire que c'est tous les emplois de la ville d'Angers, c'est-à-dire que c'est comme si on faisait une ville morte à Angers, si tous ces emplois n'ont pas lieu. Donc il y a certains emplois qui sont perdus définitivement, c'est les emplois du mois de décembre, d'habitude les commerces embauchent beaucoup au mois de décembre pour les soldes, en janvier et en décembre pour les fêtes, ça c'est perdu. Maintenant notre souci c'est que dans le petit commerce, il y en a qui ont tellement perdu, qu'il ne faut pas qu'ils mettent la clé sous la porte, parce que là ça serait pas simplement de l'emploi aidé, parce que qu'est-ce que c'est le chômage partiel ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez faire en sorte que personne à mettre la clef…
MURIEL PENICAUD
Les gens ne sont pas au chômage, ils gardent leur clef et ils gardent leur salaire et l'Etat aide à payer leur salaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez faire en sorte que personne ne mette la clef sous la porte ?
MURIEL PENICAUD
C'est le but, le maximum, c'est pour ça qu'il y a aussi des aides qu'a mis en place le ministère de l'Economie, sur différer les charges etc. Il faut aider ces petits commerces qui ont été très touchés et qui sont encore touchés par les blocages, par les violences, par les menaces, et ça il faut que ça s'arrête.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Muriel PENICAUD.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 février 2019