Texte intégral
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bienvenu Gabriel ATTAL. Bonjour.
GABRIEL ATTAL
Bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors c'est la panique ?
GABRIEL ATTAL
La panique ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. A quatre jours d'un scrutin, c'est alerte générale.
GABRIEL ATTAL
C'est une mobilisation générale comme depuis plusieurs semaines pour la majorité et puis le président de la République qui s'est exprimé dans la presse ce matin…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Une nouvelle fois.
GABRIEL ATTAL
Une nouvelle fois, oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il intervient une nouvelle fois.
GABRIEL ATTAL
Personne n'aurait compris que le président de la République ne jette pas toutes ses forces dans la bataille européenne alors qu'il se bat pour donner un cadre politique à l'Europe depuis maintenant deux ans, depuis son élection, parce qu'on a besoin d'Europe. On a besoin d'Europe pour agir en matière climatique, on a besoin d'Europe pour nos agriculteurs, pour nos artisans, pour qu'ils puissent exporter. On a besoin d'Europe pour les Français et donc le président se mobilise.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors il s'exprime dans une quarantaine de journaux et de quotidiens régionaux. Il voit des menaces partout. Je le cite : « L'Union européenne est face à un risque existentiel.. » Il veut être un acteur de l'élection européenne, ça c'est une évidence.
GABRIEL ATTAL
Oui, c'est une évidence. Pour moi aussi c'est une évidence que le président puisse intervenir.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pourquoi le dire ?
GABRIEL ATTAL
Le dire parce que certains ont décidé de faire de l'élection européenne un référendum pour ou contre le président de la République. Et lui, il considère qu'il a à s'exprimer parce que la question, les enjeux, ils dépassent la question nationale. C'est une question européenne. Et si on veut que la France soit forte, il faut que l'Europe soit puissante. Et donc le président de la République se mobilise et j'ai même envie de dire : il prend des risques en se mobilisant comme ça. Parce qu'il fait passer le destin de l'Europe avant des considérations politiques nationales.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il prend des risques, c'est-à-dire que s'il arrive après la liste de madame LE PEN, il n'y a plus de réformes en France. Le quinquennat est fichu.
GABRIEL ATTAL
Non, non. Les commentateurs politiques chercheront à y voir des considérations nationales. Le président de la République, il considère qu'il faut s'impliquer. Il faut s'impliquer parce qu'encore une fois, c'est des enjeux historiques. On n'a sans doute jamais été aussi proche d'un point de bascule dont on se dira peut-être s'il bascule…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est quoi le point de bascule ?
GABRIEL ATTAL
Le point de bascule, ce serait une Europe totalement grippée, totalement bloquée, parce que les nationalistes arrivent à constituer une force de blocage au Parlement européen, parce qu'ils ont des représentants et des relais maintenant au Conseil.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne pensez pas que ça, ça ne marche plus, l'argument de la peur de l'épouvantail ? Parce que, regardez, les Finlandais sont socialistes ou socio-démocrates ; les Suédois, bientôt les Danois ; les progressistes sont portugais, sont espagnols. D'ailleurs Emmanuel MACRON dit dans son interview qu'il proposera une grande coalition avec les Portugais et les socialistes. Donc il y a le moyen de faire le contrepoids à ceux qui, d'après vous, nous menacent.
GABRIEL ATTAL
Le Premier ministre portugais effectivement, comme plus d'une dizaine de pays européens, a annoncé son soutien à la liste Renaissance et a annoncé le fait qu'il constituerait un groupe central, ce qui est notre objectif, pour peser au Parlement européen. On ne peut pas dire que le nationalisme ne progresse pas dans un certain nombre de pays. Il suffit de voir la Pologne, la Hongrie, l'Italie. Moi je n'ai pas envie que la France se réveille le 27 mai avec le Rassemblement national premier parti de France.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Nous non plus. Nous non plus mais…
GABRIEL ATTAL
C'est déjà ce qui s'est passé en 2014, on a vu le résultat avec des députés européens Rassemblement national…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais c'est bien de dénoncer le national populisme mais est-ce qu'il ne faut pas mieux s'attaquer aux causes, à ce qui fait que le nationalisme monte dans tel ou tel pays européen.
GABRIEL ATTAL
Mais c'est ce qu'on veut faire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Les causes économiques, sociales, culturelles.
GABRIEL ATTAL
Mais bien sûr. Pourquoi est-ce que le nationalisme est monté en Italie aux dernières élections avec monsieur SALVINI ? Pas parce qu'il y avait trop d'Europe mais parce qu'il n'y avait pas assez d'Europe. Parce que les Italiens se sont sentis dans leur majorité abandonnés par l'Europe. Ils ont considéré qu'on les avait laissés seuls pour gérer la crise migratoire. Seuls pour gérer la crise économique et sociale. Et nous précisément ce qu'on dit, c'est qu'on veut une politique européenne de l'asile pour que les pays qui sont en première ligne ne soient pas laissés tout seuls. Qu'on veut une intégration plus forte industrielle pour qu'il y ait des emplois. Pour qu'il y ait des industries fortes au niveau européen.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais pas de quotas d'accueil répartis à travers l'Europe.
GABRIEL ATTAL
Le président a…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous avez entendu, vous avez entendu les opposants, ils sont dans leur rôle, mais vous les avez entendus. Il est le président de tous les Français mais il s'engage comme le chef d'un parti et du parti majoritaire.
GABRIEL ATTAL
Ecoutez, ça c'est toujours le débat un peu hypocrite qu'il y a en permanence. Je veux dire, on se souvient très bien que Nicolas SARKOZY s'était engagé à l'époque, beaucoup de présidents se sont engagés. Il ne s'engage pas comme chef de parti, il s'engage comme chef de l'Etat qui défend…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous voulez dire qu'il alerte les Français sur les dangers, les menaces d'un scrutin qui peut faire basculer un pays.
GABRIEL ATTAL
Il s'engage comme un chef de l'Etat qui défend les intérêts de la France. Et l'intérêt de la France, ça n'est pas d'avoir une Europe qui se déconstruit. L'intérêt de la France, c'est d'avoir une Europe qui poursuit un projet et surtout qui se dote d'un cap politique. On veut pouvoir protéger nos emplois et nos industries. On ne le fera pas tout seuls avec nos petits bras, on le fera si on arrive à s'accorder et à aller plus loin avec un certain nombre de pays.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour Vincent LAMBRT, dans la PQR est dans un tweet hier, le président de la République a précisé avec une émotion logique et légitime qu'il ne lui appartenait pas de suspendre l'arrêt des traitements. Il dit : il y a des médecins.et il y a la justice pour cela. Qu'est-ce que vous avez pensé de ce retournement de circonstance dramatique et spectaculaire ? La cour d'appel ordonnant la reprise des traitements pour Vincent LAMBERT pendant six mois, et l'équipe médicale de Reims devrait aujourd'hui reprendre les traitements.
GABRIEL ATTAL
Moi je pense que c'est une affaire dramatique qui dure depuis maintenant près de dix ans, et moi je me garderai bien de faire des commentaires. On ne peut pas faire de la politique spectacle avec une situation individuelle aussi dramatique. Moi je ne porte pas de jugement sur la famille, qui que ce soit. Je considère juste qu'on ne peut pas avoir d'instrumentalisation politique.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui l'a fait ?
GABRIEL ATTAL
J'ai entendu notamment hier monsieur BELLAMY en appeler au président de la République. Je considère que ce n'est pas très au niveau. Ce n''est pas un enjeu politique, on le voit bien.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On voit bien qu'il y a un clivage entre la gauche et la droite ou l'extrême droite.
GABRIEL ATTAL
Mais il n'y a pas à avoir de clivage droite-gauche sur des situations particulières qui ont trait à la vie humaine. Encore une fois, on voit bien que c'est une situation individuelle qui est très dure. Que d'ailleurs la loi, telle qu'elle existe aujourd'hui, aurait pu permettre de répondre à la situation de Vincent LAMBERT. Il n'a pas rédigé de directive anticipée. Dès lors dans sa famille, il y a deux positions qui s'opposent et c'est à la justice finalement qu'il revient de trancher. Elle l'a fait une première fois, la Cour d'appel a rendu un arrêt hier. Je ne sais pas s'il y aura un pourvoi en cassation et si les choses vont se poursuivre.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous le souhaitez ?
GABRIEL ATTAL
Ah non, moi je n'ai pas à donner d'injonction. Ce que je veux dire, c'est que c'est la justice…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ce qui a frappé hier, c'est qu'il y a le droit supranational venu des Nations Unies, l'ONU, et d'autre part le droit français et européen. Et c'est le droit supranational qui oblige la cour d'appel, pense-t-on, à prendre la décision qui a été prise.
GABRIEL ATTAL
La cour d'appel a pris une décision et moi je ne vais pas la commenter. A chaque fois qu'on m'interroge sur des décisions de justice, je me refuse et je me garde toujours de les commenter.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ce que vous commentez, c'est l'instrumentalisation ou l'exploitation.
GABRIEL ATTAL
De tous les côtés.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et vous avez vu ce retournement. La mère, la maman, considère que c'est une joie, que c'est une grande victoire. Et l'avocat a dit : « C'est une première grande victoire et il y en aura d'autres. » On l'a entendu tout à l'heure avec Clélie et Romain, mais ça vaut la peine de le réentendre.
ME JEAN PAILLOT, AVOCAT DES PARENTS DE VINCENT LAMBERT
C'est donc une extraordinaire victoire qui confirme ce que nous disions : que la France est obligée d'appliquer les dispositions de la convention. C'est donc une grande victoire. Ce n'est que la première des victoires. C'est la remontada !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Là, ce cri et la remontada, ce n'est pas indécent, impudique ? Et même scandaleux ?
GABRIEL ATTAL
C'est ce que je vous dis depuis tout à l'heure…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est du foot, ça ?
GABRIEL ATTAL
Moi, je pense qu'il y a une forme d'indécence à faire de l'instrumentalisation politique mais de tous les côtés. On voit bien que certains cherchent à faire de la politique des deux côtés. Il y a aussi des personnes qui sont pro-euthanasie, qui cherchent à s'emparer de cette affaire pour faire avancer leurs positions politiques. Et puis il y a ceux qui sont contre qui s'en emparent aussi pour faire avancer des positions politiques .On ne fait pas de politique avec des situations familiales dramatiques. Moi je me garderai bien de prendre position.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais beaucoup avaient déjà été choqués par les images vidéo tournées dans la chambre de Vincent LAMBERT hier et diffusées par Valeurs actuelles sur son site. Ça avait une forme d'exhibitionnisme et de voyeurisme qui là encore était indécente. Donc si on pouvait respecter à la fois Vincent LAMBERT, les différents groupes de la famille et laisser les choses se dérouler dans la dignité et sans qu'il n'y ait de menaces. Parce que le médecin et l'équipe médicale de Reims sont menacés de mort par des toqués dangereux et il faudrait, au contraire, les protéger. Voilà pour ce sujet. Je pense qu'Edouard PHILIPPE va lire avec plaisir l'entretien. Romain précisait tout à l'heure qu'Emmanuel MACRON révèle qu'il n'envisage pas et absolument pas le départ de son Premier ministre en qui il a toute confiance. C'est-à-dire qu'on voit la suite : éventuellement un remaniement mais pas un changement de gouvernement.
GABRIEL ATTAL
Moi je ne me lance pas dans ces spéculations. C'est une élection qui est une élection européenne. Les enjeux, ils sont européens. Nous ce qu'on veut, encore une fois, c'est avoir un groupe central au Parlement européen pour faire bouger les lignes. Et si on se mettait à se placer dans des considérations de politique nationale, on ne serait pas au niveau du débat. On est les seuls, aujourd'hui on est la seule liste à parler d'Europe. Dimanche, on a passé douze heures avec tout le gouvernement et nos candidats à se succéder sur Facebook pour répondre à des questions très concrètes sur l'Europe.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Nous avons tous peur de l'abstentionnisme.
GABRIEL ATTAL
Oui. On veut que les Français se mobilisent et on est les seuls à parler d'Europe. Vous avez les extrêmes, la France insoumise, le Rassemblement national qui disent : c'est un référendum pour ou contre le président de la République. Ensuite vous avez des partis, le Parti socialiste et Les Républicains, qui disent : c'est le premier acte de notre reconstruction en France. Ce n'est pas au niveau. Nous, on considère que le niveau, les enjeux de cette élection ils se passent au niveau européen et c'est pour ça qu'on parle d'Europe.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et si le Rassemblement de Marine LE PEN aujourd'hui n'était plus un épouvantail ? Si les gens n'avaient plus peur du Rassemblement ?
GABRIEL ATTAL
Mais on voit bien que ça fait maintenant plusieurs années que ce n'est plus un épouvantail. Ils étaient promis aux élections européennes, ils ont gagné des villes aux dernières municipales.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ça reste pour vous un danger.
GABRIEL ATTAL
Mais bien sûr que c'est un danger. C'est aussi un danger pour l'Europe en matière d'ingérence. On a vu que Steve BANNON était à Paris pour conseiller Marine LE PEN. C'est quand même… Il arrive à Paris, descend au Bristol dans une suite à huit mille euros et il dit : « Je viens pour renverser l'élection, pour faire élire Marine LE PEN. » Mais pourquoi il fait ça ? Il ne fait pas ça pour se faire plaisir ou par idéologie.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il doit être payé.
GABRIEL ATTAL
Mais il fait ça parce qu'il y a des forces qui ont intérêt à ce qu'on déconstruise l'Europe.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il est mandaté par qui ? Ou il vient au nom de qui ?
GABRIEL ATTAL
En tout cas, il a des réseaux d'influence. C'est un lobbyiste, Steve BANNON. Et moi, je pense qu'il faut non seulement qu'il s'explique mais que Marine LE PEN s'explique. Il faut qu'elle s'explique pourquoi elle a menti. Hier matin, elle a dit chez certains de vos confrères qu'elle n'était pas au courant qu'il était à Paris. Qu'est-ce qu'on a appris hier après-midi ? Qu'il y avait deux de ses plus proches émissaires qui étaient avec lui dans sa suite au Bristol ce week-end. Pourquoi est-ce qu'elle ment ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais peut-être qu'ils ont oublié de la prévenir.
GABRIEL ATTAL
Pourquoi elle ment ? Elle ment. Et encore une fois…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous accusez Marine LE PEN de mentir là-dessus alors qu'elle vous a dit qu'elle ne savait pas.
GABRIEL ATTAL
Oui. Elle a dit qu'elle ne savait pas et puis elle s'est fait dédire par certains de vos confrères qui ont révélé que ses proches émissaires étaient avec lui. Moi je veux savoir pourquoi elle ment. Il y a des forces derrière Steve BANNON qui veulent déconstruire l'Europe parce qu'ils veulent acheter les pays européens à la découpe, en pièces détachées. Parce qu'ils savent très bien qu'on est plus fort…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Attendez. Steve BANNON pour vous, c'est le symbole du risque d'une domination de l'Europe et de l'éclatement de l'Europe par des puissances étrangères et l'hyper puissance américaine.
GABRIEL ATTAL
Mais vous savez, des Etats comme les Etats-Unis, la Russie, la Chine, ils ont intérêt à négocier pour leur commerce avec vingt-sept pays séparés plutôt qu'avec un bloc de cinq cents millions d'Européens.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Qui le finance à votre avis ? Qui le finance ?
GABRIEL ATTAL
Je n'en sais rien, moi. Je ne fais pas de spéculations.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne vous posez pas la question ?
GABRIEL ATTAL
Evidemment qu'on se pose des questions. Evidemment qu'on se demande quels sont ses réseaux suprémacistes, conservateurs, financiers sans doute qui le financent.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dernière remarque, il y en a assez de faire la promotion de Steve BANNON. J'ai envie de dire : arrêtons d'en parler. Parce qu'on en parle depuis plusieurs jours comme si, à lui seul, l'Europe était si faible qu'un BANNON pourrait démolir l'Europe. C'est quand même inouï, ça !
GABRIEL ATTAL
Vous savez, derrière il y a des réseaux d'influence, il y a de l'argent, il y a des financements. Voilà. Moi je pense qu'il faut il faut de la transparence dans ces affaires-là. Et encore une fois, il y a un projet derrière.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Comment s'en débarrasser ? Ce matin, on pourrait dire comme une pièce de théâtre : comment s'en débarrasser de BANNON. Il ne s'agit pas donc d'une nouvelle présidentielle mais le duel a bloqué et neutralisé tous les autres partis. Vous avez lu François-Xavier BELLAMY, il s'en plaint. Il dit : « Le débat n'est pas à la hauteur. »
GABRIEL ATTAL
Bien qu'il se place à la hauteur du débat. Ce n'est pas faute d'essayer de parler d'Europe dans cette campagne. On passe notre temps à essayer d'en parler et on a des oppositions qui passent leur temps à parler de considérations nationales. S'ils pouvaient se placer au niveau du débat européen, ça serait bon pour l'élection. Le problème c'est que ces partis, notamment Les Républicains mais comme le Parti socialiste, ils n'ont pas de ligne cohérente sur l'Europe. Ils sont divisés en leur sein. Nous, c'est notre force, on a une cohérence. Mais vous avez chez Les Républicains des personnes qui ne comprennent pas qu'ils continuent à s'allier avec Viktor ORBAN en Hongrie, qui a quand même une conception assez étrange de la liberté de la presse, de la liberté de la justice. Qu'ils continuent à s'allier avec la CDU allemande qui défend quand même des positions sur le siège de la France aux Nations Unies, sur le siège au Parlement de Strasbourg…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a des accords avec madame MERKEL qui est CDU-CSU.
GABRIEL ATTAL
On ne peut pas dire qu'on est alliés dans cette élection en tous cas. AKK, la responsable de la CDU, n'a pas appelé à voter pour la liste Renaissance. On verra ce qui se passera après les élections mais en tout cas, ils n'ont pas donné une cohérence.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Elle le dit en allemand pour la liste Renaissance allemande. Mais vous vous demandez à tous les responsables politiques de s'engager. Bon, on a vu que Ségolène ROYAL, sans le crier publiquement, a choisi la liste Macron-Loiseau. C'est une bonne prise pour vous ?
GABRIEL ATTAL
Moi je pense qu'il y a un certain nombre de responsables politiques très importants qui ont récemment soutenu la liste Renaissance. Vous avez cité Ségolène ROYAL, on peut citer Jean-Pierre RAFFARIN, on peut citer peut-être des personnes qui sont moins connues mais qui sont très crédibles au niveau européen. Françoise GROSSETETE, députée Les Républicains-UMP depuis des années, qui est vice-présidente du PPE, qui considère que précisément parce que l'enjeu est extrêmement fort, il faut soutenir la liste Renaissance parce qu'on a besoin de l'Europe. Et puis, voilà, vous avez des personnalités de gauche, de droite qui soutiennent cette dynamique parce, que encore une fois, l'heure est grave.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc les bons Européens et les politiques qui sont biens sont ceux qui se prononcent, je ne dis pas en faveur de madame LOISEAU et d'Emmanuel MACRON.
GABRIEL ATTAL
Je ne suis pas le juge du bien et du mal.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous voulez dire qu'il faut qu'ils s'engagent.
GABRIEL ATTAL
Moi je pense que c'est important de s'engager, oui. Je pense que c'est important parce qu'encore une fois, on est sur un moment sans doute de bascule et que si on croit au projet européen, il faut s'engager.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Aujourd'hui le Sénat doit se prononcer sur la loi Blanquer pour une école de la confiance. Le Sénat a voté un amendement qui interdit le port du voile des parents lors des sorties scolaires au nom de la laïcité. Pourquoi vous n'êtes pas d'accord ?
GABRIEL ATTAL
Parce que c'est un débat, un serpent de mer qui revient depuis des années. Quand on n'est pas dans l'école, on n'est pas dans l'école et ça ne sert à rien d'essayer de faire de la politique, de la stigmatisation symbolique à travers cet amendement-là.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais quand le texte reviendra à l'Assemblée, les députés Macronistes voteront-ils pour ou contre cette interdiction ?
GABRIEL ATTAL
En tout cas, moi je ne peux pas me prononcer pour les députés mais le gouvernement leur proposera de retirer cette disposition.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
En tout cas, on a l'impression que les colistiers de Nathalie LOISEAU parlent de tous les sujets sauf de quelques-uns qui semblent embarrasser. La laïcité, l'islamisation progressive de la société, la place des religions aujourd'hui dans une société laïque.
GABRIEL ATTAL
Nous, on a absolument aucun problème avec ces enjeux-là. D'ailleurs sur l'islamisation, on s'est mobilisé. On a pris des lois extrêmement fortes. Sur la question de la fermeture des mosquées salafistes, on en a fermé quatre depuis que la loi a été votée. Sur les écoles hors contrat, vous avez des écoles…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Quatre sur beaucoup.
GABRIEL ATTAL
Oui, mais enfin quand même, il n'y en avait pas eu avant de fermées. Donc c'est un bon début. Sur les écoles hors contrat, on en a fermé plusieurs.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne fermez pas le lycée Averroès de Lille qui est peut-être dirigé par quelqu'un qui est inspirée par les Frères musulmans.
GABRIEL ATTAL
Nous, on regarde toutes les situations et on prend des décisions ensuite en fonction…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Alors les jeunes, les jeunes, parce que vous vous occupez des jeunes. J'ai envie de dire les jeunes, vous mettez en place le service national universel le SNU, à partir de juin là, un mois de SNU, donc quinze jours en uniforme. Il paraît que vous allez le porter, que vous l'avez porté.
GABRIEL ATTAL
Oui.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour les photos.
GABRIEL ATTAL
Je le porterai aussi en juin puisque je vais faire mon service national.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Où ?
GABRIEL ATTAL
Je le ferai en itinérant sur les treize départements pilotes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. Qui va les encadrer ?
GABRIEL ATTAL
Ils seront encadrés par des militaires, des animateurs et des personnels de l'Education nationale. Les trois.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. Et où ils vont se préparer ? Et où ils vont être formés ?
GABRIEL ATTAL
Alors la formation démarre aujourd'hui pour les cadres de compagnies. Les jeunes seront répartis dans des maisonnées. Une maisonnée, c'est dix jeunes. Puis dans des compagnies de cinquante jeunes. Et la formation a commencé ce matin à Saint-Cyr Coëtquidan.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est l'image qui monte en ce moment et que vous nous avez apportée.
GABRIEL ATTAL
Absolument.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Voilà, c'est en ce moment.
GABRIEL ATTAL
Elle date d'il y a quelques minutes effectivement. Il y a une formation pour les cadres de compagnies, pour leur apprendre comment on fait la levée des couleurs, le salut au drapeau, le chant de La Marseillaise puisqu'il aura lieu tous les matins pour les jeunes. Donc effectivement…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous entendez les reproches : c'est encore une idée qui est incomplète, pourquoi un mois, coûteuse et inutile.
GABRIEL ATTAL
Moi je crois, au contraire que les derniers mois ils montrent qu'on a besoin de ce service national. On a vu qu'il y a des fractures dans le pays, il y a des fractures chez les jeunes. Et le fait d'avoir des jeunes qui se rencontrent par-delà leurs différences géographiques, sociales et qui bâtissent un projet commun, je pense que c'est ce dont on a besoin.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce que vous n'êtes pas frappé, Gabriel ATTAL, par le fait que les jeunes aiment l'Europe ? Ils vivent l'Europe depuis longtemps. Ils pratiquent en quelque sorte l'auberge espagnole du réalisateur KLAPISCH. Mais pourquoi est-il si difficile de les mobiliser pour cette élection. Et qu'est-ce que vous pouvez trouver comme argument pour que les jeunes, quelle que soit leur tendance politique, aillent mettre leur bulletin dimanche dans l'urne ?
GABRIEL ATTAL
C'est un vrai enjeu de préoccupation pour moi. Il y a un sondage récent qui montrait que 23 % des jeunes seulement avaient l'intention d'aller voter. C'est ma génération. Et je pense qu'on et je pense qu'on vit depuis toujours, nous, avec ces acquis européens. Avec la monnaie commune, avec la paix, avec tous ces grands acquis avec Erasmus.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais eux aussi.
GABRIEL ATTAL
Oui, eux aussi. Et donc sans doute on ne mesure pas totalement à quel point ces acquis ont été difficiles à obtenir. Et je pense qu'il y a un enjeu aussi, une responsabilité européenne y compris en matière de repères culturels. Vous citiez l'auberge espagnole : à chaque fois qu'on me parle des jeunes et d'Europe, on me renvoie au film « L'Auberge espagnole ». C'est un très beau film, moi ça m'a donné envie d'aimer l'Europe. Le film, il a dix-sept ans maintenant. Comment est-ce qu'on n'a pas été capable de produire des nouveaux repères ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui. Vous avez cité, et on va en terminer, dimanche Le Parisien a publié l'enquête dont vous parliez tout à l'heure sur les jeunes. Beaucoup d'entre eux, et c'est frappant, réclament un pouvoir autoritaire pour la France. Et certains ne voient pas d'inconvénient à imaginer un militaire à l'Elysée. Qu'ils ne voient pas la différence entre une dictature, un pouvoir militaire et la démocratie, c'est un peu choquant parce que, bon, on dirait Charles de GAULLE mais Charles de GAULLE, il est assez rare, les de GAULLE. Est-ce que ce n'est pas choquant ?
GABRIEL ATTAL
Oui, moi ça m'interpelle. Je pense que c'est une forme…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il n'y a pas une question d'éducation civique ?
GABRIEL ATTAL
Je pense que c'est une forme de constat d'échec sur l'éducation à la citoyenneté qui doit passer par…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et alors ? Et alors qu'est-ce qu'on fait ?
GABRIEL ATTAL
Avec Jean-Michel BLANQUER, on pense qu'il faut totalement refonder l'éducation à la citoyenneté, l'éducation civique à l'école. Et ça va être un des enjeux de travail pour nous dans les mois qui viennent : il faut qu'on propose une nouvelle manière d'enseigner la citoyenneté, les valeurs de la République à l'école pour que les jeunes les appréhendent davantage et les vivent davantage.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Je retiens que la première génération de SNU sera donc prête en juin 2019 dans un mois. Merci d'être venu.
GABRIEL ATTAL
Deux mille jeunes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Deux mille jeunes.
GABRIEL ATTAL
Une vraie diversité de jeunes, des décrocheurs, des apprentis, cinquante jeunes en situation de handicap. C'est important qu'ils puissent participer aussi à ce dispositif. Donc une vraie diversité de jeunes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci d'être venu. Les grands événements ne manqueront pas d'ici à la fin du mois de juin. Demain je recevrai Nicolas DUPONT-AIGNAN. Il ne peut pas remercier, je pense, François-Xavier BELLAMY : il est en train de lui piquer un à un ses électeurs. Bonne journée, merci.
GABRIEL ATTAL
Ça en dit long.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Hein ?
GABRIEL ATTAL
Ça en dit long.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 juin 2019