Interview de Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances, à RMC le 29 mai 2019, sur les suppressions d'emploi chez General Electric à Belfort.

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Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour comprendre, il est 7h43 Damien MESLOT est avec nous, maire de Belfort, Agnès PANNIER-RUNACHER aussi, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie et des Finances. Damien MESLOT bonjour.

DAMIEN MESLOT
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Agnès PANNIER-RUNACHER, bonjour.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Damien MESLOT, c'est une catastrophe pour Belfort, que se passe t-il, GENERAL ELECTRIC va supprimer 1.000 emplois en France, principalement à Belfort, mais aussi à Boulogne-Billancourt. Damien MESLOT, ce matin que demandez-vous au gouvernement, Agnès PANNIER-RUNACHER est avec nous, que lui demandez-vous ?

DAMIEN MESLOT
Ecoutez, j'ai eu hier soir au téléphone le ministre de l'Economie, Bruno LE MAIRE et ce qui nous importe maintenant, c'est de trouver des solutions pour l'ensemble des salariés. Donc nous avons étudié un certain nombre de pistes. La première, c'est la piste aéronautique, il y a possibilité de fabriquer à Belfort des pièces pour l'aéronautique, nous travaillons avec Bercy sur ce dossier, il y a aussi des possibilités de reclassement d'un certain nombre de salariés au sein de l'usine ALSTOM Transport de Belfort qui fabrique le TGV du futur, je sais que Bruno LE MAIRE a pris contact avec le PDG d'ALSTOM Transport et on devrait pouvoir reclasser quelques dizaines de salariés là-bas. Nous avons des pistes sur l'hydrogène, des pistes sur le nucléaire, donc nous travaillons pour que chaque salarié puisse trouver une solution.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire que chaque salarié trouvera une solution.

DAMIEN MESLOT
C'est-à-dire que nous sommes en train de travailler pour que chaque salarié trouve une solution et que personne ne reste au bord de la route. C'est un long travail mais nous y arriverons, nous avons déjà fait cette action lors du plan de licenciement 2004 pour ALSTOM, nous y sommes arrivés et nous y arriverons aussi pour GENERAL ELECTRIC.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Agnès PANNIER-RUNACHER, on ne peut rien faire contre cette décision de GENERAL ELECTRIC ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est une décision qui est très dure pour les salariés et moi je veux d'abord dire qu'on est à leurs côtés. Le sujet, c'est que cette unité que possède GENERAL ELECTRIC d'ailleurs depuis plus de 20 ans, je le reprécise parce qu'on mixe exactement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
99.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Cette unité a été achetée par GENERAL ELECTRIC en 99.

AGNES PANNIER-RUNACHER
En 99, et elle fabrique des turbines à gaz pour les centrales à charbon. Donc inutile de vous dire qu'en 99, ils en fabriquaient une petite centaine, aujourd'hui ils en fabriquent une petite trentaine et en 2020-2021, le plan de charge est très, très réduit et c'est ça le sujet. Donc, nous, notre objectif…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Aucune vision de l'avenir, pardonnez-moi, chez GENERAL ELECTRIC au passage.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Si parce que le sujet c'est justement la diversification qu'évoquait le maire de Belfort, c'est-à-dire qu'une fois qu'on a pris la mesure et vous le dites très bien de la réduction de ce marché, alors probablement plus rapide et là on pourrait peut-être commenter de GENERAL ELECTRIC, c'est-à-dire la rapidité de la compression. Mais en tout état de cause aujourd'hui, il faut remettre de la charge dans l'usine, on a des gens qui sont, des opérateurs qui sont, enfin…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Une main d'oeuvre formidable à Belfort.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui très bien formé, on a des besoins dans l'industrie, on sait que l'aéronautique est en croissance.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire quoi, ça veut dire qu'il faut faire venir à Belfort des unités, des activités industrielles.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement c'est de ça qu'il s'agit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, il s'agit de ça.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Il s'agit de ça et comme on a obtenu de GENERAL ELECTRIC dans l'application du plan qu'on avait négocié alors là sur la fusion ALSTOM-GE donc autre sujet.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça c'est après, c'est 2015.

AGNES PANNIER-RUNACHER
50 millions d'euros de bon argent, ces 50 millions d'euros de bon argent on va pouvoir les réinvestir…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils seront réinvestis ces 50 millions.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ils seront réinvestis.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que l'Etat va abonder ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
On peut parce que c'est de l'argent privé, c'est ça qui est très fort.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, il y a 50 millions de GENERAL ELECTRIC.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et on peut abonder nous…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez abonder de combien ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors ça, ça va dépendre des besoins des projets, c'est-à-dire qu'on est en train de les revoir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous êtes prêt à aller jusqu'où ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
La logique dans ce type de projet, c'est qu'il faut respecter un équilibre, en gros, un euro d'argent public, un euro d'argent privé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc au moins 50 millions d'euros.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et à tout le moins avoir des projets qui flottent, on aura peut-être pas besoin de 50 millions d'euros pour tout recaser.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc s'il y a besoin de 50 millions…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais si on a des bons projets, il faut être capable d'aller jusque là …

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca ferait 100 millions.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce qu'on crée de l'activité, on crée de l'emploi, on crée plein de choses et ça c'est vers ça qu'on veut … Et moi je suis complètement d'accord avec le maire d'ALSTOM, le sujet c'est un reclassé de Belfort, reclasser dans les unités GE, trouver de nouvelles activités, reclasser en dehors de GE. Et le quatrième élément qui est avoir un plan social confortable pour ceux qui vont partir peut-être à proximité de la retraite, c'est très bien mais c'est ce n'est que le quatrième objectif, il faut d'abord faire en sorte que les gens retrouvent un emploi.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui parce qu'il y a des emplois…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Il y a 50.000 emplois non pourvus en France dans l'industrie et vous avez des emplois… Vous avez raison, vous avez des emplois induits mais surtout ce qui est paradoxal, c'est que l'industrie recrute aujourd'hui, donc on a des besoins, donc il faut faire venir les besoins vers les personnes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui peut-être. Damien MESLOT, quelle question encore voulez-vous poser à Agnès PANNIER-RUNACHER ?

DAMIEN MESLOT
Je veux dire, moi j'écoute madame PANNIER-RUNACHER et je voudrais lui dire tout d'abord qu'il y a quand même des engagements qui n'ont pas été tenus par GENERAL ELECTRIC et lorsque Emmanuel MACRON, ministre de l'Economie était venu à Belfort lors du rachat de la partie énergie d'ALSTOM par GENERAL ELECTRIC, des engagements avaient été pris. Donc je souhaite que ces engagements soient tenus, Emmanuel MACRON avait dit que le rachat de la partie énergie d'ALSTOM par GENERAL ELECTRIC préparait un bel avenir aux salariés, aux ex-salariés d'ALSTOM, donc je voudrais quand même que le président de la République et le gouvernement, s'engagent fortement. Pour le moment on a des belles paroles, on attend des actes, alors je ne mets pas en cause la volonté du gouvernement de s'engager mais il faudra que ce soit suivi par des actes et il faudra que le gouvernement nous amène rapidement des solutions. Bruno LE MAIRE doit nous recevoir en début de semaine prochaine et j'attends des actes très précis et des solutions parce que nous allons nous mobiliser avec les organisations syndicales et la population pour montrer notre soutien total aux salariés et nous entendons faire pression au maximum pour que le gouvernement ne se contente pas de belles paroles mais nous donne des actes concrets.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors qu'elles étaient ces promesses, non tenues par GENERAL ELECTRIC ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, GENERAL…

DAMIEN MESLOT
GENERAL ELECTRIC avait promis de créer 1000 emplois supplémentaires, mais aussi d'installer des centres de décision mondiaux à Belfort, il n'y a pas eu de centres de décision mondiaux installés à Belfort et il n'y a pas eu 1000 créations d'emplois, il y a même 1000 suppressions d'emplois, donc il faut que GENERAL ELECTRIC, maintenant, prenne ses responsabilités et ramène de la diversification industrielle sur Belfort.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Agnès PANNIER-RUNACHER.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, GENERAL ELECTRIC avait prévu 1000 créations d'emplois, ou, s'ils n'étaient pas capables de le faire, et vous savez qu'ils étaient à + 500 emplois en 2017, d'abonder ce fameux fonds à hauteur de 50 millions d'euros. Ils n'ont pas créé les 1000 emplois, c'est un fait, ils abondent le fonds de 50 millions d'euros, c'est également un fait, et c'est en place, c'est-à-dire on s'est chargé, dès février, puisque le compteur…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez l'argent.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Fin décembre, on a l'argent, on a le système de gestion.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi je suis concret.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça c'est concret. La deuxième chose c'est qu'ils s'étaient engagés à investir plus d'1 milliard d'euros par an en France, ils l'ont fait. La troisième chose c'est que, vous avez aujourd'hui quatre centres de décision sur cinq, sur les énergies renouvelables, qui sont en France, ce qui est une bonne nouvelle parce que, a priori, ça c'est une branche qui a de l'avenir, c'est un peu autre chose que la centrale à charbon. Donc, les engagements qui ont été pris par GENERAL ELECTRIC ont été respectés, à l'exception de ce sujet des 1000 emplois, qui est important, mais sur lequel il y avait, je dirais, une solution pour se rabattre, et ce qui est clair c'est que nous on fera pression au-delà des 50 millions d'euros, c'est-à-dire que le plan social il doit être de qualité, et d'autant plus de qualité que ça ne concerne pas la partie qui a fait l'objet de l'accord, donc il ne faut pas tout mélanger non plus, et 50 millions d'euros…

DAMIEN MESLOT
Un plan social n'est jamais de qualité Madame la ministre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est vrai, un plan social n'est jamais de qualité, c'est un plan social !

AGNES PANNIER-RUNACHER
Il peut être de plus ou moins bonne qualité, je suis désolée, vous avez des plans sociaux où vous ne prévoyez pas des cellules de reclassement privées qui permettent d'alléger, trouver un emploi pour chaque personne, et c'est bien de ça que nous nous parlons.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci Damien MESLOT, merci Agnès PANNIER-RUNACHER.

DAMIEN MESLOT
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 juin 2019