Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour.
MARC FAUVELLE
Vous êtes Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de l'Economie. Avant d'évoquer avec vous, si vous le voulez bien, l'avenir de ces salariés de Belfort, un mot sur le timing de cette annonce qui intervient juste après les élections européennes. Depuis quand le gouvernement était-il au courant ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça fait plusieurs semaines que nous sommes, comme les salariés, dans l'attente d'une nouvelle. Mais je veux dire, toutes les semaines vous avez son lot de sujets industriels. La semaine dernière, on a eu ASCOVAL. Il y a deux semaines, on a eu une réunion avec les élus de Belfort sur GENERAL ELECTRIC. Donc on n'était pas plus au courant que les personnes qui sont concernées et, comme tout le monde, on savait qu'il fallait travailler sur ça et c'est pour ça qu'on a pris les devants.
MARC FAUVELLE
Il se trouve que l'actuel patron de GENERAL ELECTRIC en France est l'ancien conseiller d'Emmanuel MACRON lorsqu'il était ministre de l'Economie. Il n'avait pas averti avant les Européennes de l'ampleur de ce plan social ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors on va remettre les choses très clairement en place.
MARC FAUVELLE
Oui.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça fait plusieurs semaines que publiquement nous travaillons sur le sujet. Moi j'ai été interrogée à l'Assemblée nationale début avril. On a été très transparent, on a réuni les élus, on a eu des réunions avec GE. Et effectivement, comme le disent d'ailleurs les salariés, la question de l'importance du plan social était sur la table. C'est une décision de l'entreprise et on s'attendait tous, dans une entreprise où vous aviez il y a dix ans cent turbines qui étaient fabriquées, l'année dernière trente, on savait que ça allait massivement heurter les résultats de l'entreprise. Et je rappelle que c'est une entreprise qui fabrique pour des centrales à charbon, donc vous voyez bien que le devenir de cette activité est évidemment problématique pour tout le monde. Et encore une fois, nous on s'est préparé. C'est-à-dire qu'on a imposé à GE de mettre en place ce fonds de cinquante millions d'euros de revitalisation industrielle. Le fonds, il est en place. Le patron du fonds, il a été nommé. C'est un industriel qui est en train de travailler sur les possibilités de réindustrialisation et de diversification du site. On a déjà commencé à travailler sur l'aéronautique. On a déjà commencé à travailler sur le nucléaire donc on est vraiment aux côtés des salariés pour qu'on réduise l'impact de ce plan social sur le site industriel de Belfort.
MARC FAUVELLE
Justement, quand on parle d'un millier d'emplois menacés, est-ce que pour vous ce chiffre il est définitif ou vous espérez encore le faire baisser et qu'il y ait moins de suppressions de postes ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est le début de la négociation. C'est pour ça qu'on a…
MARC FAUVELLE
Ce sera moins à la fin ? C'est l'idée ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est le début de la négociation. L'objectif, c'est que ce soit moins à la fin, premier objectif. Deuxième objectif, que le maximum de personnes soient reclassés sur le site de GI, sur les autres sites de GE…
MARC FAUVELLE
En interne ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce que je rappelle qu'il y a trois mille personnes à Belfort qui continueront à travailler à Belfort pour GE. Troisième élément, c'est de développer de nouvelles activités et c'est pour ça qu'on a travaillé sur l'aéronautique, on essaie de regarder les possibilités sur le nucléaire et sur l'hydrogène. Et quatrième volet, c'est de faire en sorte qu'il y ait un maximum de reclassements si on n'arrive pas à reclasser sur GE dans d'autres entreprises. C'est tout le sens de l'action…
MARC FAUVELLE
Vous considérez que cette entreprise américaine qui a menti il y a quatre ans quand elle a repris la branche énergie d'ALSTOM en affirmant qu'elle allait créer un millier d'emplois – ce qu'elle n'a pas fait - vous considérez que cette entreprise est encore un partenaire fiable ? Qu'on peut discuter avec elle ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je considère d'abord que le plan de restructuration dont on parle concerne une branche qu'elle possède depuis vingt ans, donc il ne faut pas mélanger les sujets même si…
MARC FAUVELLE
Qui est sans rapport avec le rachat d'ALSTOM il y a quatre ans, vous avez raison.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et sans rapport avec le rachat d'ALSTOM. Je pense que c'est important.
MARC FAUVELLE
Mais c'est une entreprise qui n'a pas tenu ses promesses.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et par ailleurs, son protocole de négociations disait : soit je crée mille emplois, soit je paye une amende de cinquante mille euros pour chaque emploi. D'où les cinquante millions d'euros. Et pardon, mais ces cinquante millions d'euros pour revitaliser industriellement le site, c'est une vraie chance pour Belfort. C'est-à-dire que c'est crédible, ces possibilités de diversification. On peut investir demain et c'est de l'argent privé. On n'a aucune contrainte de type aide d'Etat etc. Ça change tout.
MARC FAUVELLE
Est-ce que l'Etat ajoutera s'il le faut pour aider les salariés à se reconvertir ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
En tout état de cause, et on le fait toujours, on regarde tous les produits et on essaie… Tous les projets et on essaie de faire le maximum pour aboutir. Tout notre enjeu, c'est deux choses. C'est de préserver les capacités industrielles à Belfort, premier enjeu. Deuxième enjeu, d'accompagner individuellement chaque salarié.
MARC FAUVELLE
Agnès PANNIER-RUNACHER, hier soir en marge du sommet de Bruxelles, Emmanuel MACRON a dit que les engagements pris par GENERAL ELECTRIC devront être tenus. De quels engagements il parle ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors les engagements de GENERAL ELECTRIC, c'est les engagements qu'ils ont pris dans leur contrat il y a quatre ans. Donc c'est ce que je vous dis.
MARC FAUVELLE
Mais qui étaient valables jusqu'à la fin de l'année dernière si je ne me trompe pas.
AGNES PANNIER-RUNACHER
De l'année dernière mais on continue à avoir un comité de suivi et c'est notamment les cinquante millions d'euros sur la revitalisation. Ces cinquante millions d'euros, ils doivent être utilisés pour réindustrialiser et ça ne doit pas être le seul effort que doit faire GE dans ce plan social. On attend d'eux d'aller beaucoup plus loin. On attend d'eux d'être absolument exemplaires dans la façon de faire ce plan social. Ce que je veux dire aussi, c'est que c'est une négociation qui commence…
MARC FAUVELLE
Est-ce que vous avez des moyens de faire pression et lesquels ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, attendez. C'est une négociation qui commence, ça va durer plusieurs mois, ça ne va pas aboutir avant la fin de l'année. Il faut l'avoir en tête parce qu'on a l'impression que tout va s'arrêter. Non, ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas pour les salariés et c'est important qu'ils soient rassurés sur ce point-là. Est-ce qu'on a les moyens de faire pression ?
MARC FAUVELLE
Oui.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, on a les moyens de faire pression parce qu'on a les moyens à la fois d'accompagner mais également on valide le plan social, je le rappelle. Et donc, c'est également un levier.
MARC FAUVELLE
Et s'il le faut, vous pourrez vous opposer à ce plan social.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Si le plan social est jugé insuffisant, on l'a déjà fait, on est capable effectivement de mettre une pression très forte. En règle générale ce qui se passe, c'est que les gens améliorent le plan social. Donc on est aux côtés des salariés, on est aux côtés des organisations syndicales, on travaille avec les élus et l'objectif c'est de minimiser l'impact social de ce plan.
MARC FAUVELLE
Encore un mot, le dernier si vous voulez bien Agnès PANNIER-RUNACHER. On a entendu un ouvrier dans le journal de 7 heures qui disait : « J'ai appris ça à la radio ce matin. » Qu'est-ce que vous leur dites aux ouvriers de Belfort ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce que je leur dis, c'est que le conseil… Enfin en fait, cette procédure qui a été lancée, elle est théoriquement confidentielle et c'est une fuite puisque c'est le processus. C'est-à-dire les organisations syndicales sont les premières à être averties, donc moi je comprends la surprise, le désarroi parce que c'est la différence entre savoir que quelque chose vous attend et avoir la vraie nouvelle.
MARC FAUVELLE
Et ouvrir l'enveloppe.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement, et ouvrir l'enveloppe. Donc aujourd'hui, je le redis, on est à leurs côtés, la négociation commence et maintenant nous on est aligné. On a les cinquante millions d'euros, on a tous les moyens pour faire en sorte de sortir par le haut de ce projet.
MARC FAUVELLE
Merci à vous Agnès PANNIER-RUNACHER, Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie, pour ces éclaircissements ce matin.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 juin 2019