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Q - Monsieur le Ministre, quel est le bilan de cette année 2019 sur le point de s'achever ?
R - Après une année 2018 record pour l'industrie touristique française qui s'est élevée à 57 milliards d'euros, 2019 se présente bien avec, de janvier à septembre, une hausse de 1,2 milliard d'euros de recettes générée par les touristes internationaux. C'est un motif de satisfaction, car nous avions commencé l'année avec quelques inquiétudes dues aux manifestations des gilets jaunes. Mais, Atout France et le réseau diplomatique se sont mobilisés pour envoyer les bons messages aux tour-opérateurs. Et c'est d'ailleurs à Marseille, au mois de mars dernier, qu'ils ont été accueillis et qu'ils ont maintenu leur confiance dans la destination France. Ça s'est traduit par une hausse de 2,2% de nuitées estivales. Un été qui a été plus porté par les Français que les étrangers.
Q - Justement lors de ce "Rendez-vous en France", vous vous étiez engagé à sécuriser le budget alloué à Atout France et définir un plan d'action sur 3 ans. Qu'en est-il aujourd'hui ?
R - Nous avons conforté le budget dédié à la promotion. Les actions menées avec différents partenaires ont augmenté de 10% et sont passées de 37 à 41 millions d'euros. Cela montre l'intérêt des pouvoirs publics. En revanche, Atout France participe comme d'autres opérateurs de l'Etat aux économies de fonctionnement. Donc effort sur les dépenses de fonctionnement et augmentation sur les dépenses de promotion.
D'ailleurs, je me réjouis des partenariats entre Atout France et les CRT, comme le contrat-cadre que Jean-Yves Le Drian a signé dernièrement avec la région Sud pour renforcer la visibilité des trois marques, Provence, Alpes et Côte d'Azur à l'international.
Q - La cible de 100 millions de touristes en 2020 est-elle toujours d'actualité ?
R - On entre dans une ère où ce qui compte est de quantifier et d'évaluer les retombées économiques sur notre territoire. On se rend compte que ce n'est pas forcément la course au nombre de touristes qui nous permet de l'atteindre, mais tout un travail sur les dépenses, le panier moyen des visiteurs étrangers. Je parlerai plutôt d'un objectif de 60 milliards d'euros de recettes que de 100 millions de touristes. On voit bien que sur des sites réputés, s'ils ne connaissent pas encore la saturation, ils sont quelquefois sous pression. Aussi, on est tous engagés, Etat, collectivités, prestataires, pour faire campagne afin que les visiteurs soient respectueux des territoires et des habitants. J'ai d'ailleurs demandé à l'Ademe qui est le bras armé de l'Etat en matière de développement durable de plancher sur le sujet. J'attends prochainement ses recommandations pour donner un coup d'accélérateur au tourisme durable et répondre, dans le même temps, aux attentes des consommateurs.
Q - Pour réussir cette mission, comptez-vous aussi vous inspirer des Pays-Bas, à savoir "trier les touristes sur le volet ?"
R - Ce qui compte, c'est favoriser un certain nombre de pays qui connaissent une croissance de leur classe moyenne. Je pense à l'Inde ou encore à la Chine. Sur cette clientèle-là, à mon sens il faut que nous mettions l'accent sur les voyageurs individuels plutôt que sur les groupes, car eux sont vraiment à la recherche de véritables expériences. C'est un axe de travail intéressant.
Par ailleurs, avec le ministère de l'Economie, nous avons pris un certain nombre de mesures concernant la détaxe qui sera en vigueur d'ici 2022 et qui va favoriser les achats.
Q - Désireux de maintenir une Cop d'avance, la région Sud a signé des partenariats avec Waze et Airbnb. Un exemple à suivre ?
R - Ces expérimentations sont intéressantes car ils ont l'un et l'autre comme ambition de favoriser une répartition plus harmonieuse des flux touristiques. C'est notre défi si l'on veut que le tourisme reste vivable. Je me réjouis d'ailleurs que le partenariat avec Airbnb se concentre sur les zones rurales ou en montagne pour réchauffer des lits froids, qui aujourd'hui sont pénalisants en termes de fréquentation pour les stations de ski. Sur un plan plus général, on souhaite porter le niveau d'investissement dans le domaine du tourisme à 15 milliards en 2022 afin d'offrir des structures de qualité pour rester attractif. Ce partenariat entre le CRT et la plateforme, qui a vocation aussi à inciter les propriétaires à relooker leur appartement pour les mettre sur le marché locatif, va totalement dans ce sens.
Q - La montagne justement. Avec la neige déjà au rendez-vous la saison hivernale semble prometteuse ?
R - Tout à fait. L'association des stations de montagne faisait état de prévisions positives pour Noël. Maintenant, encore une fois, à partir de demain (NDLR : ce jeudi), on se doit de rester vigilant, en espérant que cela n'aura pas d'impact trop fort sur le début de la saison. C'est important de rester sur le pont.
Comme l'an dernier, à la même époque, avec les gilets jaunes. Et sur un plan général, la France a su tirer son épingle du jeu.
Notre pays reste attractif. Et les territoires savent se montrer dynamiques. En Provence par exemple, MPG 2019 a permis de faire rayonner la France à travers le monde. Maintenant il faut veiller à ce que les images qui vont être envoyées dans les prochains jours ne soient pas un frein notamment pour le tourisme d'affaires et de congrès. Il y a des destinations qui se structurent et certaines émergent avec de réelles ambitions. Il est important de rester en alerte.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 décembre 2019