Texte intégral
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le chef d'état-major des armées,
Monsieur le délégué général pour l'armement,
Madame la secrétaire générale pour l'administration,
Mesdames et messieurs les directeurs,
Mesdames et messieurs les officiers généraux,
Officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins, aviateurs, gendarmes, militaires et personnels civils de la défense,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
La mission continue. Malgré les imprévus, malgré les épreuves, envers et contre tout, la mission avant tout, la mission devant tout : si le ministère des Armées devait avoir une devise, je pense que cela pourrait être celle-ci.
C'est un adage qui ne laisse aucune place au répit ou à l'indécision. C'est un adage qui incarne l'engagement sans faille de toute femme et toute homme qui a un jour choisi de servir la France et les Français.
A Gao, au Mali, auprès de nos militaires meurtris par la disparition de 13 de leurs frères d'armes que la France pleurait, j'ai à nouveau pleinement ressenti que ce n'était pas seulement un adage, c'est surtout un principe de vie. A Gao, j'ai saisi, une fois de plus, l'essence de la mission, celle qui ne cesse jamais. J'ai vu l'âme de l'engagement.
Je veux penser ce soir à ceux qui, sous le feu ennemi, en exercice comme à l'entraînement, sont allés au bout de leur engagement. Je veux leur rendre hommage, comme à celles et ceux qui souffrent dans leur chair ou dans leur esprit.
Ils ont tout donné pour la France, ils ont tout donné pour nous. Et nous ne l'oublierons jamais. Nous continuerons de porter avec fierté les valeurs qu'ils avaient à coeur de défendre.
A Gao, la mission continue. Nous le savons, le terrorisme reste aux yeux des Français et des Européens la menace numéro un. Et notre lutte ne connaît aucune respiration. Une semaine après le sommet de Pau, nous étions sur place, avec mes homologues européens, pour travailler à la mise en oeuvre de la Coalition pour le Sahel.
La création de cette coalition est un tournant. Elle dit notre détermination renouvelée, notre attachement au multilatéralisme ; elle dit la nécessité de nous unir pour faire face aux crises de grande ampleur.
Les crises et les foyers potentiels de crises, ce n'est pas ce qui manque au monde aujourd'hui – et je ne vous ferai pas l'affront de détailler les événements que chacun suit avec grande attention au fil des jours. Face au tumulte d'un monde plus imprévisible, plus violent, traversé par des menaces de plus en plus pernicieuses et diffuses, nous avons un glaive et un bouclier : l'esprit de défense.
L'esprit de défense, c'est de ne jamais prendre la paix pour acquise. C'est être conscient que la paix est un combat quotidien et que nous devons toujours nous tenir prêts.
Cet esprit de défense, je sais qu'il vous anime. Sachez qu'il ne me quitte jamais. La mission que le Président de la République et le Premier ministre m'ont confiée est claire : protéger les Français. Et protéger les Français, c'est de ne jamais prendre la paix pour acquise.
Lorsque je suis arrivée à la tête du ministère en 2017, j'ai trouvé une institution entièrement consacrée à sa mission, belle et fière de ses compétences et de ses traditions. Mais cette institution était aussi usée par des décennies d'écarts entre le niveau des engagements et celui des moyens. Elle était en proie aux doutes quant à la volonté réelle de notre nation d'assumer un effort de défense à la hauteur de ses ambitions.
Sur le terrain, en opération extérieure, comme sur le territoire national, j'ai vu le matériel vieillissant, les infrastructures vétustes ; j'ai entendu dire qu'on ne se donnait pas les moyens d'assumer nos missions, j'ai parfois constaté de la lassitude.
Cela, le Président de la République l'a compris et a souhaité engager la remontée en puissance de nos armées. Et cela, j'en ai fait mon combat. C'est ce qui guide mon action depuis deux ans. Je parle de combat, il est évidemment commun, et je suis convaincue que nos victoires sont et seront collectives.
Alors je souhaite vous remercier tous car c'est ensemble que nous menons ce combat, ensemble que nous portons cette mission et que nous relevons les défis. C'est ensemble que nous avons porté la loi de programmation militaire 2019-2025 qui a sonné le glas des coupes budgétaires. Nous avons passé le cap de la première année de la LPM avec succès et en 2019, comme depuis le début du quinquennat, les moyens annoncés sont au rendez-vous. Il en sera de même en 2020. Et je sais pouvoir compter sur la vigilance des parlementaires ici présents. Sur la période 2018-2020, ce sont ainsi 10 milliards d'euros supplémentaires qui auront été mis en place pour les armées.
Vous l'avez entendu à Orléans, le Président de la République n'a pas manqué de réaffirmer son engagement pour porter l'effort de défense à 2% en 2025. Je continuerai à me battre pour que vous ayez les moyens de vos missions. Il me semble primordial de vous le redire, alors que nous entrerons très bientôt dans la phase d'actualisation de la loi de programmation militaire.
Il y a un temps pour les décisions, il y a un temps pour la mise en oeuvre, et il y a un temps pour les résultats. Ce troisième temps est venu. Et je sais que nos militaires sont tous impatients d'en mesurer les bénéfices.
Nous en voyons déjà les premiers effets. Je ne voudrais pas verser dans un inventaire à la Prévert, mais les livraisons de matériels sont engagées et se poursuivent dans toute la France. J'ai vu aujourd'hui à Canjuers une partie des 92 Griffon qui ont été livrés en 2019. Cette année a aussi été marquée par le lancement du Suffren qui, dans quelques jours, va commencer ses essais à la mer et par la livraison d'avions Phénix et A400M.
Le renouvellement des capacités n'est plus un point sur l'horizon. Il est devenu une réalité des forces, une réalité que nous allons accélérer en 2020 avec la livraison – entre autres – de 128 Griffon supplémentaires, celle des 4 premiers blindés Jaguar ainsi que les deux premiers Mirage 2000D rénovés et deux Atlantique 2 rénovés également.
Vous le savez, j'y suis attachée, la loi de programmation militaire a été conçue à hauteur d'homme, et cela se reflète également dans les livraisons de petits équipements : en 2020, un militaire déployé est un militaire mieux protégé, équipé du nouveau treillis ignifugé, du HK-416, et d'un casque composite ultra-résistant.
A hauteur d'homme, c'est s'assurer que les soldes et les pensions militaires sont au rendez-vous.
Il fallait rétablir le fonctionnement normal de la solde. Un premier pas a été franchi avec méthode pour la Marine. Il faut maintenant conclure ce rétablissement indispensable en achevant le programme Source Solde.
Dans les mois qui viennent, je présenterai une nouvelle architecture pour la rémunération des militaires, plus lisible et qui répond aux enjeux actuels.
Vendredi, le projet de loi instituant un système universel de retraite sera présenté en Conseil des ministres. Mon engagement a été total pour faire reconnaître les besoins de nos forces armées. Comme je l'ai annoncé au mois de décembre, les caractéristiques essentielles des pensions militaires seront préservées. Le Président de la République a rappelé lors de ses voeux aux armées la semaine dernière que le système universel prendra en compte les exigences de la condition militaire et du modèle de ressources humaines de nos armées.
A hauteur d'homme, c'est aussi le plan Famille pour améliorer le quotidien de toutes et tous, ainsi que celui de vos familles. Partout en France, les places se multiplient en crèche, le Wi-Fi se déploie en garnison, la mobilité est mieux soutenue et mieux accompagnée. J'ai souhaité organiser une consultation concernant le déploiement du Plan Famille afin que les initiatives puissent s'adapter aux spécificités locales.
C'est aussi un plan ambitieux d'un milliard d'euros pour la construction et la rénovation des hébergements trop longtemps négligée.
Car j'en suis convaincue, tout commence par le terrain. C'est notamment pourquoi nous sommes engagés dans une démarche de déconcentration des décisions. Ainsi, les commandants des bases de défense ont désormais plus de latitude au quotidien et les soutiens ont été réarticulés. Et je souhaite saluer le travail remarquable qui a été accompli.
Transformer le Ministère c'est aussi moderniser et alléger son administration centrale pour gagner en efficacité et remettre des moyens au plus près du terrain. Nous mettons en place en 2020 une nouvelle organisation à l'EMA, au SGA et à la DGA et dans l'ensemble des services et directions associées.
Je connais les réticences face à ces transformations de grande ampleur. Et je salue votre capacité à les dépasser. Tout ce que nous faisons a un sens. Il s'agit de mieux travailler ensemble, de mieux se coordonner pour être plus efficace sur le terrain.
Travailler ensemble, c'est aussi avancer avec ceux qui construisent notre défense. Et nous avons beaucoup travaillé à rééquilibrer nos relations avec les industriels. Je sais que ce n'est ni facile ni immédiat, mais il y a des premiers résultats et sur ce point, comme dans tous les champs de mon action je suis et reste parfaitement déterminée : quand les Français consentent un effort de 172 milliards d'euros pour les équipements entre 2019 et 2025, alors que le financement de nos politiques publiques est soumis à forte tension, il est parfaitement naturel que je m'assure que chaque euro dépensé est un euro utile pour notre défense.
Alors oui, je suis attentive à ce que les prix des armements qui nous sont proposés soient justes et que les délais soient respectés.
En parlant de relations avec les industriels, il est un domaine qui vous le savez, me tient particulièrement à coeur, c'est celui du maintien en condition opérationnelle. Beaucoup a été fait depuis deux ans : nous avons créé la direction de la maintenance aéronautique, un certain nombre de contrats ont été « verticalisés ». Les premiers résultats sont visibles, les industriels sont désormais à nos côtés : je souhaite les saluer et les encourager, Mais je veux aussi dire qu'il faut maintenant accélérer. J'y serai attentive, car c'est un besoin vital pour les forces.
2019 a été une année déterminante pour le futur de nos armées.
Nous avons annoncé notre nouvelle stratégie spatiale de défense. Nous sommes partis d'un constat : l'espace, ce n'est pas encore Star Wars, mais ça pourrait finir par y ressembler. Or, l'espace est vital pour nos opérations. J'ai donc voulu élaborer une stratégie pour notre défense spatiale : une nouvelle doctrine, de nouveaux équipements, une nouvelle organisation, avec un commandement de l'espace, qui réunit aujourd'hui plus de 200 personnes, et qui montera en puissance à Toulouse, auprès du CNES dans les prochaines années.
Nous avons également présenté notre stratégie cyber, avec le principe assumé d'utiliser l'arme cyber à des fins offensives, isolément ou en appui de nos moyens conventionnels. J'ai également souhaité que la France puisse porter sa voix et promouvoir un cyberespace stable, fondé sur la confiance et le respect du droit international. C'est une position que nous avons établie dans un document fondateur en septembre dernier.
Le cyber, c'est aussi dans la pierre qu'il est installé au ministère des Armées. J'ai eu le plaisir d'inaugurer le premier bâtiment du Comcyber au quartier Stéphant ainsi que la cyberdéfense Factory à Rennes. Nous y constituons ainsi un pôle de classe mondiale.
La trilogie des doctrines du futur serait incomplète sans l'intelligence artificielle. Je tiens à saluer le travail remarquable de la Task Force IA qui a conduit à dessiner une feuille de route ambitieuse guidée par nos valeurs et nos engagements internationaux. Nous pourrons compter sur le comité d'éthique de la défense pour appréhender l'ensemble des questions posées par cette nouvelle technologie.
Le chemin que nous avons parcouru ensemble est immense. Mais la mission continue. Ensemble, il nous reste encore beaucoup à accomplir.
Vous pouvez compter sur moi pour monter au front lorsqu'il s'agit de grands programmes d'armement qui dessinent l'avenir de notre défense. Comme vous le savez, nous sommes depuis deux ans engagés dans un projet absolument majeur : la préparation de l'aviation de combat du futur, en coopération avec l'Allemagne. On peut toujours trouver que les choses ne vont pas assez vite, que la coopération implique des négociations trop longues, je voudrais néanmoins qu'on fasse un pas de côté et qu'on regarde attentivement ce qui a été accompli depuis deux ans : nous sommes parvenus à une expression de besoin commune, nous avons initié des études, nous avons trouvé un accord avec les industriels.
Ces avancées, nous les devons au pragmatisme et à l'engagement de nos industriels, à l'esprit de coopération qui anime nos militaires et nos ingénieurs et à une constante impulsion politique des gouvernements de chaque côté du Rhin. Le premier contrat qui nous amènera vers un démonstrateur en vol en 2026 a été préparé, négocié avec les industriels, et j'espère une notification désormais rapide, à l'issue du processus parlementaire allemand.
A l'aube du départ de la mission Foch en Méditerranée, j'aimerais aussi évoquer l'avenir de notre groupe aéronaval, et du projet de porte-avions de nouvelle génération que nous avons initié en 2018, sous l'autorité du Président de la République. Nous aurons à faire un choix d'importance en 2020 sur le mode de propulsion de ce nouveau porte-avions. Avec un objectif très clair : avoir en 2038 un nouveau porte-avions, apte au service, à même de contrer les nouvelles menaces.
Vous pouvez compter sur moi pour continuer de soutenir l'innovation au profit de notre défense. L'Agence de l'innovation de défense, en lien avec Bpifrance, travaille à la création d'un fonds « Definnov », un fonds d'investissement souverain pour soutenir la croissance et le développement de startups et PME, porteuses de projets d'innovation pouvant intéresser le secteur de la défense. Ce projet qui doit associer les grands groupes industriels de défense se concrétisera, je l'espère, dans les prochains mois.
Avec la création de la DGNUM il y a maintenant deux ans, j'ai demandé à ce que soit lancé un chantier de modernisation numérique du Ministère. A l'heure du big data, de l'internet des objets ou encore du Cloud, ces travaux de transformation doivent se poursuivre quitte à revoir en profondeur l'organisation de la conduite de nos projets de systèmes d'information.
Vous pouvez compter sur moi pour continuer de placer les femmes et les hommes au centre de notre ministère. Être à hauteur d'homme, ce n'est pas l'apanage de la LPM. En 2020, nous continuerons d'améliorer les conditions de travail au quotidien. Le quotidien est aujourd'hui numérique, former et accompagner le personnel, cela fait partie de cette amélioration.
C'est pourquoi j'ai le plaisir d'annoncer le lancement cette année d'une Académie du numérique portée par la DGNUM et la DRH-MD : une plateforme de formation ouverte à tous, qui offrira des cours en ligne, des « MOOC », en cyber, sur les métiers informatiques, sur le développement logiciel ou encore en réseaux et télécommunications. Cette académie travaillera en lien avec les écoles du ministère des Armées et nouera des liens avec des partenaires extérieurs comme la Grande école du numérique.
Vous pouvez compter sur moi et vous pouvez aussi compter sur Geneviève Darrieussecq, qui n'est malheureusement pas des nôtres ce soir, mais dont je souhaiterais saluer la détermination et l'engagement. Son ardeur pour préserver les pensions des anciens combattants a été déterminante. Sa passion fait vivre la mémoire au sein de ce ministère et surtout la transmission de cette mémoire vers la jeunesse.
Le Président de la République l'a évoqué le 16 janvier, le Service National Universel montera en puissance cette année. Nous aurons un rôle à jouer. C'est vers cette jeunesse qui a soif d'engagement que nous devons sans cesse nous tourner. C'est à elle que nous devons sans cesse parler, comme nous l'avons fait il y a quelques jours à la Fabrique Défense, une initiative inédite et réussie, dont nous allons maintenant envisager la suite.
Vous pouvez enfin compter sur moi pour continuer à bâtir l'Europe de la défense. Depuis plus de deux ans, avec les Européens, nous avons des idées, mais nous avons surtout des projets. L'Europe de la défense, c'est l'Europe du concret : la mission européenne de surveillance dans le Golfe, l'Initiative européenne d'intervention, la création de la Task Force Takuba, le Fonds européen de défense, de nombreux dossiers nous attendent en 2020, nous sommes décidés à les porter.
La mission continue. Notre mission continue. Alors continuons à nous emparer des opportunités, continuons à porter nos engagements avec passion.
C'est cette passion qui fait taire les cyniques, qui nous emporte plus loin, et qui rend fiers les Français.
Et il n'y a rien de plus beau et de plus noble que la passion de la mission.
Je vous souhaite, à toutes et tous, une belle et heureuse année 2020.
Vive la République ! Vive la France !
Source https://www.defense.gouv.fr, le 27 janvier 2020