Texte intégral
Q - Nous sommes en direct avec Jean-Baptiste Lemoyne, bonsoir.
R – Bonsoir.
Q - Vous êtes secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme. Vous, vous donnez aussi une date, le 21 juin, c'est le début de l'été, cela fait rêver. Vous souhaitez que le maximum de lieux soit accessible pour que la saison estivale puisse vraiment démarrer. Vous pensez- quoi précisément ?
R - Je pense tout simplement à ces campings, à ces restaurants, à ces parcs de loisirs, à ces parcs à thèmes, bref, tout ce qui fait la richesse de l'offre française ; ce n'est pas pour rien si nous sommes plébiscités, si nous sommes numéro un, en matière d'attractivité touristique. Vous savez, il y a un dicton allemand qui dit "heureux comme Dieu en France". Voilà, donc ce doit être un peu vrai.
Quand j'évoque cette date du 21 juin, c'est parce que nous allons avoir une autre étape intermédiaire.
Vous savez, le 2 juin, c'est la fin de la première période de déconfinement, et rendez-vous a été donné, fin mai, entre le 25 et le 28 mai à peu près, pour, déjà, donner un certain nombre d'éléments par rapport au calendrier et aux modalités de réouverture à partir du 2 juin pour un certain nombre d'activités parce que nous aurons, alors, le recul sur les quinze, vingt jours depuis l'entrée en vigueur de la première phase de déconfinement. C'est important de prendre ces décisions à la lumière de l'évolution de l'épidémie parce que, ne l'oublions pas, nous sommes en lutte, encore, contre ce virus. Je dirais que ces vacances vont être une conquête sanitaire, pas à pas, c'est avec nos efforts individuels et collectifs que nous allons y arriver et que nous allons les gagner.
Q - On a bien compris que l'on passera des vacances en France, sur les plages dynamiques, avec des plages aménagées, mais lorsque cette plage sera pleine, que va-t-il se passer jusque derrière la plage, peut-être sur la route où toutes ces personnes ne pourront pas accéder à la plage ? IL va y avoir une affluence, une congestion, comment tout cela va s'organiser ?
R - Justement, je crois qu'il faut avoir en tête que cet été sera certainement un peu différent des étés précédents, mais, j'en suis persuadé, il sera tout aussi réussi.
Très clairement, il faudra, je le pense, bannir, effectivement, l'entassement, on le sait ; on a besoin d'éviter les brassages, les contacts de trop de masses de populations entre elles. Donc finalement, cela va peut-être nous inviter à réinventer ces vacances, ce tourisme, tout simplement avec une répartition harmonieuse sur l'ensemble du territoire.
Lorsque j'appelle à un été qui soit bleu-blanc-rouge, c'est pour redécouvrir toute notre France, tous ces terroirs, tous ces territoires. Et elle est riche, entre les littoraux, les montagnes, le rural, l'urbain, il y en a pour tous les goûts, pour toutes les bourses également, et je crois donc qu'il est également important cette année, de faire en sorte de se répartir mieux partout. Vous savez que souvent en effet, on avait tendance à prendre des avions toujours plus gros, pour aller toujours plus loin, et se retrouver plus nombreux, encore, sur certains sites. Je crois qu'il y a une prise de conscience et que, quelque part, c'est aussi le tourisme de demain qui s'imagine, qui est en train de se bâtir. Et la France, aussi, en tant que leader, se doit aussi d'être pionnière dans ce tourisme de demain qui appelle à se réinventer.
Q - Jeudi dernier, c'était un peu l'annonce du top départ pour les réservations de vacances en France ; trois jours après, les Français sont-ils au rendez-vous ? Les réservations démarrent-elles en fanfare, ou pas ?
R - C'est exactement les échos que j'ai d'un certain nombre de professionnels. Je crois que ce plan tourisme qu'a voulu le président de la République, qui a été annoncé lors du CIT autour du Premier ministre, a été un véritable déclic psychologique. Par exemple, Gérard Brémond, de "Pierre & vacances " ou Center Parcs, me signalait qu'il avait désormais un flux de réservations qui était en moyenne au-delà de 20% de ce qu'il pouvait connaître sur les mêmes journées de l'année dernière. Donc, on voit bien qu'il y a eu effectivement une envie qui se matérialise, en tout cas, les Français se renseignent, ils sont en train de regarder et d'ailleurs, je les incite peut-être à aller sur le site d'Atout France, "France.fr", qui met en valeur l'ensemble des destinations.
Très clairement, c'est en train de se mettre en place et c'est tant mieux, parce que vous le savez, les professionnels, ce sont des gens qui ont fait de l'accueil leur métier, qui ont envie, avec le sourire, de donner le sourire aux autres.
Je peux vous dire qu'ils ont des fourmis dans les jambes, ils ne demandent qu'une chose, c'est de pouvoir accueillir à nouveau. Donc, ils s'y préparent très sérieusement, en élaborant des protocoles sanitaires, avec le ministère du travail, avec le ministère de la santé, pour que l'on soit en vacances en toute sécurité sanitaire chez eux.
Je crois qu'ils ont hâte que l'on franchisse le pas de leur camping, de leur parc, je pense notamment au Puy du Fou et à un certain nombre de grands emblèmes nationaux.
(…)
Q - Alors, Jean-Baptiste Lemoyne, on vous retrouve. On a les vacances en France. Certains Français voudraient quand même, aussi, partir, peut-être, en Espagne, en Italie et autour. En tout cas, on le voit, qu'il n'y a aucune harmonisation concernant les pays. Par exemple, l'Italie qui ouvre ses frontières le 3 juin, l'Espagne qui met une quatorzaine en place. Pourquoi n'y a-t-il pas une coordination européenne pour savoir un petit peu où on va ?
R - Ecoutez, je trouve que toutes ces décisions individuelles sont regrettables parce que nous avons convenu, enfin la Commission européenne et le commissaire Thierry Breton, emplis de bon sens, mercredi dernier, ont mis sur la table des recommandations pour la reprise du tourisme. Parmi ces recommandations, il y avait l'idée d'un travail concerté entre les Etats membres. Et, effectivement, on a assisté cette semaine à plusieurs décisions unilatérales.
Il se trouve que mercredi prochain, les ministres de l'Union européenne nous nous retrouvons. Moi, je vais mettre les pieds dans le plat ; on ne peut pas d'un côté justement souscrire à des engagements où l'on dit "on doit travailler ensemble et réfléchir ensemble, se coordonner" et, de l'autre côté, ne pas faire la même chose, faire l'inverse.
Donc, il y a ce besoin parce que, vous savez, l'Europe est le premier continent visité et, au sein de l'Europe, effectivement, la France, l'Italie, l'Espagne sont des grandes destinations touristiques. Mais il est très important de travailler ensemble, de ne pas prendre des décisions unilatérales qui pourraient, tout simplement, nuire au combat sanitaire. Je crois qu'il est, de ce point de vue-là, urgent de pouvoir non seulement parler mais agir ensemble.
Q - Vous allez discuter avec vos homologues. Est-ce que vous pouvez quand même nous donner une date prévisionnelle commune pour l'ouverture des frontières à l'intérieur de l'Europe ? Qu'est-ce que vous souhaiteriez, vous ? Qu'est-ce que vous allez demander ?
Q - Aujourd'hui, il n'est pas possible de donner une date. Pour vous donner un ordre d'idée, la fermeture des frontières, par exemple, entre la France et l'Allemagne, d'un commun accord, est encore en vigueur jusqu'au 15 juin. Donc, cela sera une décision qui viendra dans les prochaines semaines. Mais je le dis à tous les Français, en réalité, on le sait, ces vacances vont être plutôt à domicile. Et c'est aussi une bonne chose pour pouvoir, je dirais, non seulement... il y a plein de chose à faire, je l'ai dit encore, avec la richesse de notre offre, mais surtout les professionnels du tourisme ont beaucoup souffert, que ce soit les restaurateurs, les guides-conférenciers, que ce soit tous ces professionnels des campings, des parcs. Eh bien, il est important que l'on puisse, avec effectivement ce qui était mis de côté entre guillemets depuis deux mois, soixante milliards d'euros qui effectivement n'ont pas été dépensés, réinjecter dans l'économie et dans l'économie touristique, qui surtout a un impact sur l'ensemble de la chaîne dans le pays. Parce que dix restaurateurs qui fermeraient, je peux vous dire que c'est moins de débouchés pour nos agriculteurs, c'est moins de débouchés pour nos pêcheurs.
C'est un impact en amont comme en aval. Chaque euro qui est dépensé par les Français cet été dans leur séjour estival, c'est un euro qui va se multiplier et qui va faire aussi que le pays se portera mieux et repartira.
Q - D'un mot, pour terminer, on voit qu'en Italie les bars et restaurants ouvrent dès demain. En France on n'a pas encore date. Est-ce que vous pouvez rassurer les restaurateurs, les bars, les brasseries ? Où est-ce qu'on va ? Est-ce que le 2 juin on saura si on pourra ouvrir ?
R - La perspective a été tracée. Dans les départements verts, si tout se passe bien, si l'évolution de l'épidémie va en déclinant, alors cette perspective de réouverture, effectivement, des cafés, des restaurants, mais je le souhaite aussi d'un très grand nombre d'autres activités touristiques, pourra se faire. Néanmoins, dans les départements rouges, il y aura peut-être encore un peu de temps à attendre. En tous les cas, il faut espérer que des départements rouges virent au vert, mais, on le sait, là où le virus circule plus activement, il faudra prendre des précautions, il y aura des différenciations avec la zone verte, comme c'est le cas, d'ores et déjà, sur l'ouverture des parcs et jardins. Vos reportages l'illustraient parfaitement.
Donc, vous le voyez, c'est un chemin de crête, entre l'ambition de pouvoir très vite proposer à nouveau des activités aux Français et, dans le même temps, de ne pas jouer avec leur santé, c'est trop important. Et chaque soir, nous sommes encore, à 20 heures pour applaudir les soignants, c'est bien que le combat continue contre cette satanée épidémie.
Q - Merci beaucoup, Jean-Baptiste Lemoyne, d'avoir répondu en direct à nos questions sur BFMTV.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 mai 2020