Interview de M. Gabriel Attal, secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement à RTL le 21 juillet 2020, sur la sécurité routière, le rythme des tests Covid et le plan de relance économique.

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Intervenant(s) : 
  • Gabriel Attal - Secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement

Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

STEPHANE CARPENTIER
Sept heures quarante-trois, l'invité de "RTL Matin", Benjamin SPORTOUCH, est face à vous bien sûr en studio et en direct, c'est le porte-parole du Gouvernement, Gabriel ATTAL.

BENJAMIN SPORTOUCH
Bonjour Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

BENJAMIN SPORTOUCH
Merci d'être avec nous en direct ce matin sur RTL. Cinq enfants ont donc péri hier soir dans un terrible accident de la route sur l'A7 dans la Drôme et quatre autres personnes, trois adultes et un enfant, sont hospitalisés, est-ce que vous avez des informations ce matin ?

GABRIEL ATTAL
D'abord je veux dire mon émotion, c'est un drame absolument bouleversant celui qui s'est déroulé dans la Drôme. Il y effectivement cinq enfants entre trois et 14 ans qui sont décédés et quatre autres passagers, trois adultes et un enfant de sept ans, qui ont été transférés à l'hôpital avec un pronostic vital qui est engagé pour l'enfant et pour deux adultes et évidemment je veux dire mes pensées pour les victimes, leurs familles et leurs proches.

BENJAMIN SPORTOUCH
Puisqu'on parle de sécurité routière, deux ans après l'abaissement de la vitesse à 80 km/h, Gabriel ATTAL, 349 vies ont été sauvées en un an et demi, est-ce que vous ne regrettez pas d'avoir cédé à la pression des élus, à la pression populaire aussi, il faut bien le dire, en permettant aux départements de remonter à 90 km/h ?

GABRIEL ATTAL
Vous savez, moi je pense qu'il y a un temps de recueillement quand il y a un pareil drame et je ne veux pas rentrer immédiatement et basculer de ce drame à un débat politique sur la question des 80 km/h.

BENJAMIN SPORTOUCH
Je ne parle pas des autoroutes là, je fais la distinction…

GABRIEL ATTAL
Il y a une volonté très forte qui est la nôtre de réduire le nombre de morts sur les routes en France, il y a un chemin qui a été trouvé sur les 80 km/h avec cette souplesse donnée aux départements et je suis sûr qu'ils y ont recours avec la plus grande responsabilité pour garantir que les vies puissent être protégées.

BENJAMIN SPORTOUCH
Passons au Covid bien sûr et à cette pandémie qui persiste, des files d'attente, Gabriel ATTAL, devant les laboratoires pharmaceutiques pour faire un test Covid, ces files s'allongent partout, pourquoi ne pas avoir anticipé cet afflux ?

GABRIEL ATTAL
On a anticipé en augmentant très fortement nos capacités de tests, elles sont aujourd'hui supérieures à 700 000 par semaine, nous avons réalisé la dernière semaine 380 000 tests en France. La difficulté c'est qu'il y a des territoires où beaucoup de Français ont recours aux tests, ce qui explique les files d'attente, et il y en a d'autres où les Français ont moins recours aux tests aussi parce que le virus circule moins fortement, aussi parce que le nombre de tests est très important dans les territoires où massivement des Français s'apprêtent à partir pour aller en vacances et veulent se faire tester avant. Tout le travail qu'on est en train de faire avec les laboratoires d'analyses médicales c'est d'augmenter les capacités de tests, d'augmenter la capacité de flux dans les laboratoires dans les territoires où il y a la pression la plus forte pour permettre qu'il y ait le plus de Français…

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais ils vous disent qu'ils manquent de bras, Jean-François DELFRAISSY hier matin ici même nous disait qu'il avait voulu faire un test, qu'il avait dû attendre cinq jours, il avait fait un test et lui-même cinq jours d'attente, vous vous rendez compte ! Pour beaucoup de Français qui nous écoutent c'est incompréhensible alors qu'on nous disait que le Gouvernement avait anticipé tout cela !

GABRIEL ATTAL
Evidemment j'entends parfaitement que les Français se posent des questions et doutent, ce que je veux dire c'est qu'on fait au mieux, le ministère de la Santé fait au mieux via les agences régionales de santé pour augmenter les capacités de tests et baisser les délais puisque c'est de ça qu'on parle. Il y a des capacités très importantes mais il y a. une forme de entre guillemets d'"embouteillages" à l'entrée de certains laboratoires et c'est vraiment sur ça qu'on travaille et ce sur quoi on va continuer à travailler.

BENJAMIN SPORTOUCH
Recourir au Service de santé des armées pour qu'il y ait des soignants des armées qui viennent aider les laboratoires c'est possible ou pas ?

GABRIEL ATTAL
Toutes les pistes sont en train d'être regardées mais, je le dis, on a beaucoup augmenté les capacités de tests en très peu de temps, il faut aussi voir d'où on vient. Alors évidemment c'est une réponse qui n'est qu'à moitié satisfaisante pour celles et ceux qui nous écoutent, j'en suis parfaitement conscient, mais en tout cas on fait au mieux pour pouvoir élargir.

BENJAMIN SPORTOUCH
Autre dysfonctionnement visible c'est dans les aéroports, très peu de tests, même des touristes qui sont en provenance de pays à risques s'en étonnent, "c'est le Club Med, dit même le professeur Philippe JUVIN, on ne garde même pas les coordonnées de ces touristes français qui reviennent de ces pays à risques". Comment ça se fait, est-ce qu'il ne faudrait pas soit à défaut de fermer les frontières multiplier les tests dans les aéroports ?!

GABRIEL ATTAL
Sur ce point il y a aujourd'hui un système qui a été mis en place, quand vous avez des personnes qui viennent de pays à risques, qu'on appelle les pays zones rouges maintenant, on leur demande de réaliser un test dans le pays d'où elles viennent 72 heures avant de prendre l'avion, ce n'est pas possible partout, il y a des pays qui n'ont quasiment aucune capacité de tests. A ce moment-là quand ces personnes arrivent en France on leur demande d'observer une quatorzaine chez eux sauf s'ils réalisent un test à l'aéroport à leur arrivée. On a donc mis en place depuis maintenant une dizaine de jours des capacités de tests dans les aéroports, un système de tests dans les aéroports, on est capable de tester 2 000 personnes par jour dans nos aéroports. Evidemment il faut aller plus loin, moi j'entends aussi les doutes là-dessus qu'il peut y avoir de certains Français qui se disent "finalement nous on fait beaucoup d'efforts, on respecte les gestes barrières, on fait tout pour que le virus ne circule pas et on veut être sûr que pour les personnes qui viennent de pays à risques et qui arrivent…".

BENJAMIN SPORTOUCH
Beaucoup de ceux qui nous écoutent, Gabriel ATTAL, ne savent pas qu'ils doivent respecter une quatorzaine, je pense à ceux qui reviennent de certains pays, ils l'apprennent peut-être ce matin avec vous et du coup est-ce qu'il y a d'autres mesures qui vont être prises dans les jours à venir ?

GABRIEL ATTAL
Ce que je peux vous dire c'est que d'abord on a avancé ces 10 derniers jours avec les capacités de tests dans les aéroports et qu'en fin de semaine nous aurons un nouveau Conseil de défense autour du président de la République sur la question du Covid pour examiner de nouvelles mesures pour aller plus loin sur cette question des aéroports et des frontières.

BENJAMIN SPORTOUCH
Est-ce qu'on peut éventuellement fermer des frontières avec des pays à risques ?

GABRIEL ATTAL
Tout va être regardé à l'occasion de ce Conseil de défense, je ne peux pas vous faire les annonces maintenant, par définition c'est à ce moment-là que ça se décide mais il y aura ce moment important en fion de semaine.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc Conseil de défense vendredi. Puisqu'on parle de frontières, Catherine, une auditrice de RTL, nous a contactés ces dernières heures pour raconter son histoire, ses deux parents étaient bloqués à Tanger, au Maroc, depuis janvier, ils étaient en vacances, impossible de rentrer en France à cause du coronavirus et malheureusement sa maman est décédée il y a quelques jours. Ils seraient encore des dizaines de Français bloqués en camping-car au Maroc sans solution…

GABRIEL ATTAL
Depuis le début de la crise on a organisé avec le Quai d'Orsay une politique massive pour permettre à nos ressortissants de revenir en France, la France n'abandonne pas ses ressortissants et dans un moment de crise comme celui qu'on vit elle leur permet de revenir en France. Je crois que c'est près de 250 000 ressortissants français qui depuis le début de la crise ont pu revenir en France et s'agissant du Maroc je crois que c'est autour de 35 000 personnes qui ont pu être rapatriées, c'est massif. Evidemment là on concentre nos efforts pour que les dizaines, peut-être les centaines de ressortissants qui n'ont pas encore pu rejoindre la France puissent le faire dans les prochains jours.

BENJAMIN SPORTOUCH
Ce sera pour quand, Gabriel ATTAL, vous pouvez leur dire ceux qui nous écoutent ce matin ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, on fait au plus vite, pays par pays nos consulats sont mobilisés, nos ambassades sont mobilisées, la cellule de crise du Quai d'Orsay est opérationnelle 24 heures sur 24 pour avancer dans cette direction mais je comprends l'émotion, je comprends l'urgence pour beaucoup de Français…

BENJAMIN SPORTOUCH
L'impatience.

GABRIEL ATTAL
…l'impatience de se dire « on veut pouvoir retourner en France, retrouver nos familles, pouvoir être pris en charge si on est malade », 250 000 ont déjà pu le faire parce qu'on s'est mobilisés depuis le début de la crise.

BENJAMIN SPORTOUCH
Catherine vous aura peut-être entendu ce matin sur RTL. On va passer à l'accord qui a été décroché cette nuit par les 27 dirigeants européens, quatre jours, quatre nuits, c'est le plus long sommet européen, la France et l'Allemagne ont dû faire des concessions notamment en révisant à la baisse les 500 milliards de subventions prévues, c'est tombé à 390. C'est tout de même un accord de solidarité au forceps, on s'inquiète un peu de cette solidarité européenne, on la trouve fragile ce matin tant il a fallu batailler, Gabriel ATTAL…

GABRIEL ATTAL
Moi je pense d'abord qu'il faut se réjouir, c'est un pas de géant dans la construction européenne, cette date figurera dans les grandes dates de la construction européenne ! Pourquoi ? Parce que dans un moment de crise on voit bien que les frontières nationales évidemment sont importantes mais finalement ne permettent pas d'empêcher la circulation du virus, on a besoin de plus de solidarité et de coordination européenne. Qu'est-ce qui a été décidé dans cet accord ? C'est que les 27 pays membres de l'Union européenne allaient ensemble emprunter de l'argent pour permettre de faire face à cette crise et de relancer l'économie, c'est historique ! Pour la France ça représente autour de 40 milliards d'euros qui vont arriver de l'Europe pour financer les grandes priorités du plan de relance, c'est-à-dire les petites lignes de chemin de fer, le fret ferroviaire, l'isolation thermique des bâtiments, la relance économique pour nos entreprises.

BENJAMIN SPORTOUCH
40 milliards pour la France…

GABRIEL ATTAL
C'est 40 milliards, alors ceux qui nous écoutent peuvent se dire finalement ça arrive de l'Europe, ça arrive un peu de nous puisque c'est les pays européens qui contribuent à l'Europe.

BENJAMIN SPORTOUCH
Ça vient de notre poche, ça revient dans nos poches.

GABRIEL ATTAL
Non parce que l'autre nouveauté est totalement historique dans cet accord c'est qu'on a ancré le fait que l'Union européenne allait développer des ressources propres, c'est-à-dire que c'est l'Union européenne qui s'endette et pour rembourser c'est des ressources propres, c'est-à-dire une taxe carbone aux frontières, c'est-à-dire une taxe sur les géants du numérique. Là aussi c'est un progrès majeur et c'est un progrès y compris sur la question de l'environnement puisque l'idée c'est de valoriser les bons comportements et de pénaliser entre guillemets ceux qui polluent le plus la planète.

BENJAMIN SPORTOUCH
Le comportement notamment sur l'État de droit et ce n'est pas acquis pour la Pologne notamment, ça n'a pas été évoqué complètement cette nuit mais tout de même des rabais ont été accordés pour les Pays-Bas, pour l'Autriche, leur participation au budget européen va considérablement baisser, 138% pour l'Autriche ! C'est quand même un marché compliqué à faire, on leur demande d'un côté, on leur donne beaucoup de l'autre, c'est ça l'Europe ?

GABRIEL ATTAL
C'est évidemment très compliqué, c'est pour ça que ça a pris plusieurs jours et qu'on a réussi en six jours je crois à faire aboutir des sujets qui étaient en gestation, qui étaient en discussion depuis des décennies, c'est pour ça que c'est un pas de géant. Evidemment la question des rabais reste, pourquoi est-ce qu'il y a des rabais ? Il y a des rabais parce qu'il y a en Europe des contributeurs nets, c'est-à-dire des pays qui donnent plus qu'ils ne reçoivent sur le papier et puis des bénéficiaires nets qui reçoivent plus qu'ils ne donnent sur le papier. Les rabais servent à faire en sorte que l'écart ne soit pas trop important sinon vous développez un sentiment anti-européen et la volonté de quitter l'Union européenne. Mais là-dessus évidemment que des discussions vont se poursuivre dans les années à venir mais ce sur quoi je veux insister c'est que d'abord la France bénéficie beaucoup de l'Europe, la politique agricole commune, on est le pays dont l'agriculture bénéficie le plus de fonds européens.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc c'est une victoire pour vous pour la France clairement ce matin…

GABRIEL ATTAL
C'est une victoire pour l'Europe !

BENJAMIN SPORTOUCH
Pas de déception.

GABRIEL ATTAL
C'est une victoire pour l'Europe et donc pour la France !

BENJAMIN SPORTOUCH
Et on verra dans les actes bien sûr parce qu'on attend après les décisions et concrètement ce que ces sommes donneront sur le terrain. Autre sujet, Gabriel ATTAL, 200 élus pour la plupart proches de Gérald DARMANIN dont Xavier BERTRAND ont signé une tribune de soutien hier au ministre de l'Intérieur qui est visé par une accusation de viol, est-ce que cette pétition est la bienvenue ?

GABRIEL ATTAL
Chacun prend des positions comme ils le souhaitent, évidemment Gérald DARMANIN est un élu important des Hauts-de-France, il y a des élus qui souhaitent lui apporter leur soutien…

BENJAMIN SPORTOUCH
Elle est bienvenue cette pétition ?

GABRIEL ATTAL
…parce qu'ils le connaissent, parce qu'ils souhaitent lui apporter un soutien. Moi je redis ce qu'a dit le président de la République, ce qu'a redit le Premier ministre, il y a une présomption d'innocence dans notre pays qui a valeur constitutionnelle, on préserve cette présomption d'innocence. Qu'on est aussi dans un Etat de droit et que quand il y a des investigations y compris si elles concernent un ministre elles se déroulent normalement, c'est comme ça.

BENJAMIN SPORTOUCH
Mais vous l'auriez signée cette pétition, vous l'auriez signée cette tribune ?

GABRIEL ATTAL
Moi je ne suis pas élu des Hauts-de-France.

BENJAMIN SPORTOUCH
Si vous l'étiez est-ce que vous auriez signé ?

GABRIEL ATTAL
Je ne me projette pas comme ça, ce que je dis c'est que le président de la République, le Premier ministre et le Gouvernement ont apporté leur confiance à Gérald DARMANIN et qu'évidemment les investigations se poursuivent.

BENJAMIN SPORTOUCH
Laurent JOFFRIN, ancien directeur de Libération, se lance en politique pour une refondation, je cite, « une gauche réaliste et réformiste », certains y ont vu l'ombre de François HOLLANDE et vous, Gabriel ATTAL ?

GABRIEL ATTAL
Ecoutez, moi je n'ai pas vu d'ombre, j'entends et je lis qu'effectivement ce serait en lien avec François HOLLANDE !

BENJAMIN SPORTOUCH
Vous ancien socialiste qui avez bien connu François HOLLANDE.

GABRIEL ATTAL
Oui, oui, j'ai été au Parti socialiste, moi je trouve toujours positif que des personnes souhaitent participer au débat d'idées.

BENJAMIN SPORTOUCH
Donc vous pouvez travailler avec lui, vous lui tendez la main ce matin ?

GABRIEL ATTAL
Je pense qu'il faut écouter et regarder tout ce qui est proposé ! Vous savez, moi je défends avec Emmanuel MACRON le dépassement des clivages politiques traditionnels, je comprends que c'est une volonté de Laurent JOFFRIN, tant mieux, il faut alimenter le débat politique et démocratique en France et s'il y a de nouvelles forces qui émergent pour le faire c'est tant mieux.

BENJAMIN SPORTOUCH
Y compris avec François HOLLANDE s'il est de retour éventuellement ?

GABRIEL ATTAL
C'est un ancien président de la République, il a tout à fait la légitimité de faire des propositions !

BENJAMIN SPORTOUCH
On connaîtra la liste des secrétaires d'État quand, aujourd'hui, les futurs, très rapidement ?

GABRIEL ATTAL
Je pense que c'est une question d'heures.

BENJAMIN SPORTOUCH
Une question d'heures, on le saura dans la journée, c'est une autre annonce ! Merci Gabriel ATTAL, très bonne journée à vous.

STEPHANE CARPENTIER
Un face à face bien sûr que vous retrouvez quand vous le souhaitez, vous allez cliquer sur notre site rtl.fr.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 juillet 2020