Déclaration de M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur la Syrie, à Paris le 30 juin 2020.

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  • Jean-Baptiste Lemoyne - Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Circonstance : Quatrième conférence de Bruxelles sur l'aide à apporter pour l'avenir de la Syrie et des pays de la région (en visioconférence)

Texte intégral

Merci beaucoup, Monsieur l'Envoyé spécial,
Monsieur le Haut représentant, Monsieur le Secrétaire général,
Chers collègues,


Un an après la conférence de Bruxelles III, et près de dix ans après le début de la guerre, force est de constater que la situation continue de se détériorer en Syrie. Le pays s'enfonce dans un cycle d'instabilité durable qui affecte fortement la région. Nous continuons d'atténuer les effets de cette tragédie par l'assistance que nous déployons en faveur du peuple syrien et des réfugiés, par notre action déterminée contre le terrorisme au sein de la Coalition internationale contre Daech, naturellement, et face à la pure logique de reconquête militaire du régime, notre objectif demeure celui de la relance du processus politique, d'un accès humanitaire sans entrave pour les douze millions de syriens dans le besoin, et de la mise en place des conditions d'un retour volontaire, sûr et digne des réfugiés.

Dans ce contexte, la France avec le Président de la République, Emmanuel Macron, avec le Ministre, Jean-Yves Le Drian, porte quatre messages.

Le premier, c'est l'accès humanitaire transfrontalier qui doit être prioritaire.

L'aggravation de la crise sanitaire en Syrie avec le Covid-19 est venue rappeler la nécessité impérieuse du renouvellement de la résolution 2504 du Conseil de sécurité relative à l'aide transfrontalière. Plusieurs millions de personnes dans le Nord-Ouest et dans le Nord-Est syrien sont entièrement dépendantes de cette aide et malgré les efforts des acteurs humanitaires basés à Damas, l'accès depuis les zones régime reste largement insuffisant pour couvrir les besoins. Les deux rapports du Secrétaire général des Nations unies l'ont rappelé : le vide laissé par la fermeture du point de passage de Yaroubiah en janvier n'est toujours pas comblé et nous devons oeuvrer collectivement pour permettre le renouvellement dans la quinzaine de jours à venir de la résolution 2504 qui est une véritable ligne de vie pour des millions de Syriens.

La France réitère son appel à ce que cet accès humanitaire sûr, complet et sans entraves soit garanti.

Deuxième message : la solution à la crise syrienne demeure politique.

La recherche d'une solution politique négociée sous l'égide des Nations unies, bien sûr, Monsieur l'Envoyé spécial, est la seule issue possible à la crise syrienne. Elle seule permettra le retour à la paix et à la stabilité en Syrie, cruciale pour la région comme pour l'Europe, et elle seule pourra garantir le retour des réfugiés.

Ces derniers ont avant tout fui les exactions commises par le régime syrien, les arrestations arbitraires et les persécutions brutales. Ce sont là des obstacles politiques et il n'y aura donc pas de retour des réfugiés, réel et durable, sans qu'un processus politique crédible ne soit engagé, et sans qu'une solution inclusive permette au peuple syrien de décider de son avenir. Dans ce contexte, il est urgent de s'atteler dès à présent à la préparation de futures élections libres, transparentes et sous supervision internationale, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité et l'ensemble des Syriens, y compris les réfugiés et les déplacés, devront pouvoir y participer.

Dans cet esprit, et alors que le régime syrien poursuit son obstruction à tout changement politique, la France et l'Union européenne continueront de conditionner le financement de la reconstruction de la Syrie et la normalisation des relations avec Damas à la mise en oeuvre une solution politique crédible et durable.

Troisième message : la France et l'Union européenne continueront à prendre leurs responsabilités politiques et financières en soutien aux populations syriennes sacrifiées par cette guerre et puis naturellement soutien également aux Etats hôtes.

Nous saluons la mobilisation exceptionnelle du Liban, de la Turquie, de la Jordanie, de l'Irak, de l'Egypte pour l'accueil des réfugiés syriens, cela force notre admiration. Très clairement, l'avenir des réfugiés syriens est en Syrie. C'est ce qu'ils souhaitent et c'est ce que nous souhaitons également. Mais les conditions ne sont pas réunies aujourd'hui, on vient de le dire. Il est important de continuer à soutenir les pays et communautés hôtes de réfugiés. Notre attention se porte particulièrement sur le Liban, confronté à une grave crise économique qui rend encore plus remarquable l'effort consenti et nécessaire notre soutien. Depuis 2011, ce sont près de 20 milliards d'euros qui ont été mobilisés par les Européens en réponse à la crise syrienne.

Aujourd'hui, j'ai l'honneur de confirmer, au nom du gouvernement français, un nouvel engagement de 845 Millions d'euros pour la période 2020-2022, avec 208 Millions d'euros de dons, 637 Millions d'euros de prêt pour soutenir le peuple syrien et les pays qui se mobilisent pour l'accueil des réfugiés, afin que la Syrie et la région retrouvent enfin la paix et la stabilité et permettez-moi de terminer, Monsieur l'Envoyé spécial, avec le quatrième message, celui de la lutte contre l'impunité qui est indispensable, et qui est une garantie pour le retour sûr et volontaire des réfugiés.

Pas de réconciliation nationale sans justice, pas de retour des réfugiés sans justice, pas de paix durable sans justice. La lutte contre l'impunité, c'est l'élément clé de la résolution politique du conflit, la conférence d'aujourd'hui est un moment privilégié pour confirmer notre mobilisation collective contre l'impunité. Une campagne de communication dédiée va commencer, je vous invite tous à la rejoindre et à témoigner de votre solidarité. Merci beaucoup, Monsieur l'Envoyé spécial.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 juillet 2020