Interview de M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, à France Bleu Champagne le 21 janvier 2021, sur les efforts en faveur des agriculteurs et la stratégie nationale de développement des protéines végétales.

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Média : France Bleu

Texte intégral

GREGORY DUCHATEL
Le ministre de l'Agriculture est en visite dans la Marne aujourd'hui.

VIANNEY SMIAROWSKI
Julien DENORMANDIE est notre invité ce matin. Il a rendez-vous à Saint-Rémy-sur-Bussy, Tilloy-et-Bellay ou encore aux Essarts-le-Vicomte, une visite pour soutenir les initiatives des agriculteurs du département de la Marne dans le cadre de la stratégie nationale de développement des protéines végétales et du plan France relance. Bonjour Julien DENORMANDIE.

JULIEN DENORMANDIE
Bonjour.

VIANNEY SMIAROWSKI
Merci d'être avec nous ce matin. Avant d'évoquer votre déplacement aujourd'hui dans la Marne, hier des agriculteurs ont manifesté dans les Ardennes. Ils étaient dans un magasin LECLERC. La FNSEA dénonce une fois de plus une baisse des prix pour les producteurs quand la grande distribution fait de bons résultats pendant la crise. C'est un problème récurrent. La loi EGalim devait assurer une meilleure rémunération des agriculteurs. Qu'est-ce qui ne marche pas ?

JULIEN DENORMANDIE
Eh bien aujourd'hui la loi n'est pas assez respectée et je vais être très clair avec vous. Je ne cesse d'avoir des rendez-vous avec que ce soit la grande distribution, vous savez, ce qu'on appelle les transformateurs des matières agricoles. Et je leur dis très clairement que je mettrai en place toutes les mesures de contrôle, c'est-à-dire y compris avec des sanctions derrière, des contrôles des services de l'Etat pour s'assurer que cette loi, elle soit enfin respectée. Parce qu'on est dans une situation qui est ubuesque. On ne peut pas accepter que nos agriculteurs ne soient pas rémunérés à la juste valeur de leur travail. Ou sinon, on est en train de détruire notre agriculture française. Et qu'est-ce qu'on va faire dans 10 ans, qu'est-ce qu'on va faire dans 20 ans ? Donc cette loi EGalim, c'est un véritable changement. Aujourd'hui elle n'est pas encore assez respectée et pour la faire respecter, je vous le dis très clairement, on va démultiplier les contrôles par la Direction générale de la répression des fraudes qui a été mandatée par le gouvernement pour démultiplier ces contrôles.

VIANNEY SMIAROWSKI
C'est-à-dire dans la grande distribution, chez ces transformateurs justement aussi ?

JULIEN DENORMANDIE
Exactement. Chez les deux. Parce que la chaîne agricole, la chaîne agroalimentaire elle est extrêmement complexe. Il y a beaucoup d'intervenants. Et donc ce qu'on appelle la création de valeurs, il faut qu'elle soit mieux répartie pour qu'à la fin dans nos cours de ferme, nos agriculteurs soient rémunérés à leur juste valeur. Et c'est très important de le faire notamment via ces contrôles. Et c'est d'autant plus important que vous savez, avec la crise qu'on traverse on a une chance formidable dans notre pays : c'est que toute notre chaîne agroalimentaire, elle a tenu grâce aux agriculteurs, grâce aux transformateurs, grâce à la distribution. Et elle a tenu parce qu'il y a aussi une solidarité mais cette solidarité, elle ne peut pas s'exprimer que dans les moments difficiles. Elle doit s'exprimer tous les jours et l'un des moyens de la faire s'exprimer, c'est une juste répartition des prix.

VIANNEY SMIAROWSKI
Et comme si ça ne suffisait pas, il y a eu cette crise sanitaire. L'agriculture a souffert de la crise du Covid. Quelles sont les aides pour les agriculteurs ?

JULIEN DENORMANDIE
Alors on met beaucoup d'aides en place pour pouvoir, en fonction des secteurs, venir apporter un soutien. Je pense notamment dans le beau territoire de la Marne à énormément de productions. Je pense aux productions agricoles, je pense aux productions viticoles aussi. On sait à quel point elles ont été impactées. Et donc nous, Etat, on met en place un certain nombre d'aides qu'on amplifie au fur et à mesure que la crise dure. Et j'ai aussi, moi, un message à toutes celles et ceux qui nous écoutent. Vous savez, le meilleur moyen d'aider nos agriculteurs, c'est d'abord d'acheter des produits frais et des produits locaux. Les produits de nos territoires, des produits d'à-côté de chez nous. On a lancé par exemple il y a une semaine une très belle plateforme qui s'appelle fraisetlocal.fr qui permet à chacun en se connectant d'aller identifier les producteurs d'à-côté qui font des points de vente à la ferme, des points de vente au producteur. Qui permet en plus d'avoir des échanges avec ces producteurs, de comprendre leur métier, de voir comment cela fonctionne, de tuer un certain nombre d'idées préconçues souvent. Et bien vous voyez, de telles initiatives montrent à quel point le consommateur a un rôle. Quand je consomme, je fais un acte citoyen. Si je consomme frais et local, j'aide l'agriculteur et j'aide au final mon territoire.

VIANNEY SMIAROWSKI
Julien DENORMANDIE, vous l'avez dit, vous serez dans la Marne tout à l'heure, en visite pour parler des protéines végétales, notamment de la luzerne, vous irez à la coopérative LUZEAL, la première coopérative de France de déshydratation de luzerne. Quel est l'enjeu en fait, pourquoi vous venez soutenir cette filière en particulier ?

JULIEN DENORMANDIE
Parce que moi, à la tête du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, j'ai un objectif, c'est la souveraineté agroalimentaire de notre pays, et la crise du moment nous rappelle à quel point cette souveraineté elle est importante, parce que, encore une fois, la chaîne alimentaire elle a tenu dans notre pays, mais la crise elle a montré aussi un certain nombre de faiblesses. Eh bien figurez-vous que, dans notre pays, on est dépendant, en termes de protéines, des importations de soja brésilien, c'est quelque chose qui est aberrant, c'est un système organisé depuis 50 ans à l'international. Et en plus, quand on importe du soja brésilien, on importe de la déforestation. Il y a, dans notre pays, des acteurs, des agriculteurs, ces coopératives que vous venez de mentionner, qui sont des acteurs pour regagner en souveraineté, pour produire des protéines dans notre territoire, de la luzerne, du soja, des pois, de la féverole, et la coopérative où je serai tout à l'heure, LUZEAL, c'est, vous l'avez dit, la première coopérative qui fait de la déshydratation de luzerne, c'est quelque chose d'essentiel, parce que plus on fera de la luzerne et d'autres protéines, plus on regagnera en souveraineté. Et pour accompagner toute la filière, dans le cadre de France Relance, ce fameux plan de relance, j'ai décidé d'octroyer une enveloppe de 100 millions d'euros au développement de ces protéines, pour moi c'est un enjeu fondamental, c'est un enjeu de souveraineté de notre pays.

VIANNEY SMIAROWSKI
Cent millions d'euros donc, pour le développement des protéines. Merci beaucoup Julien DENORMANDIE d'avoir accepté notre invitation.

JULIEN DENORMANDIE
Merci à vous.

VIANNEY SMIAROWSKI
Ministre de l'Agriculture, en déplacement, donc, dans la Marne aujourd'hui pour valoriser les initiatives des agriculteurs du département. Bonne journée à vous.

JULIEN DENORMANDIE
Bonne journée.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 janvier 2021