Texte intégral
ALBA VENTURA
Bonjour Barbara POMPILI.
BARBARA POMPILI
Bonjour.
ALBA VENTURA
Le plan France 2030 annoncé hier par le président MACRON c'est notamment 8 milliards d'euros consacrés à l'énergie et dans ces 8 milliards, un milliard pour le nucléaire avec la construction de réacteurs nucléaires de petite taille. Vous n'avez pas l'impression de manger votre chapeau ?
BARBARA POMPILI
Non. J'ai surtout l'impression qu'enfin on se prépare à l'avenir.
ALBA VENTURA
Avec le nucléaire.
BARBARA POMPILI
Le plan France 2030, c'est la souveraineté écologique de notre pays qu'on met en place pour être prêts à affronter la suite. À affronter le changement climatique, à affronter tous les défis que nous avons. Le plan France 2030, le but c'est que nous puissions être indépendants dans la fabrication de notre énergie, dans notre électricité. Qu'on puisse faire de l'hydrogène qu'on fabrique chez nous. Faire des énergies renouvelables qu'on fabrique chez nous. Etre enfin souverain sur les matériaux, les terres rares ; vous entendez parler de ces problèmes que nous avons d'alimentation parce que nous sommes dépendants vis-à- vis de l'étranger.
ALBA VENTURA
Mais de nouveaux réacteurs nucléaires même de petite taille, ça c'est acceptable pour vous, l'écologiste du gouvernement ?
BARBARA POMPILI
C'est acceptable pour toute personne qui est pragmatique. Je vous rappelle que nous avons besoin de baisser nos émissions de gaz à effet de serre. Nos émissions de gaz à effet de serre, n'oublions jamais que notre énergie, deux tiers de notre énergie utilisée en France c'est du pétrole, contrairement à ce que certains peuvent croire. Et donc pour utiliser moins de pétrole, il faut d'abord qu'on fasse des économies d'énergie. C'est tout le travail qu'on fait sur l'isolation des bâtiments par exemple. Et puis, il faut switcher, passer du pétrole à l'électrique qui est décarboné. Donc les véhicules électriques ou bien la décarbonation de notre industrie. Ça, ça veut dire que nous allons avoir besoin de plus d'électricité et ça ce sont une nouveauté. Nous avons RTE qui fait des projections régulièrement et qui, là, nous dit d'ici quinze ans, nous allons avoir besoin de 20% de plus d'électricité. Comment on la fabrique cette électricité ? Alors justement pas avec du nucléaire dans les quinze ans qui viennent parce qu'on ne peut pas construire.
ALBA VENTURA
Eh bien si !
BARBARA POMPILI
On ne peut pas construire une centrale nucléaire qui sera prête avant dix, quinze ans. Et donc d'ici là, on aura besoin d'électricité donc il faut faire des renouvelables. Des renouvelables et beaucoup d'énergie renouvelable.
ALBA VENTURA
Donc ce matin, j'entends que vous nous dites qu'on ne peut pas se passer du nucléaire.
BARBARA POMPILI
Et pour après, après 2035, si on a besoin de nucléaire il faudra qu'on ait plus de possibilités dans notre besace. C'est pour ça qu'on lance des recherches sur de nouveaux réacteurs.
ALBA VENTURA
Il y en aura combien de ces petits réacteurs ?
BARBARA POMPILI
Mais je vous dis, là on en est au stade de la R&D.
ALBA VENTURA
De la Recherche et Développement.
BARBARA POMPILI
De la Recherche et Développement. Ce qu'on veut, c'est ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier. Et donc si on a besoin de nucléaire, il va y avoir là RTE qui va faire un rapport avec des scénarios à 2050 pour voir quelles sont les diverses possibilités qui s'offrent à nous. Si jamais on doit choisir de refaire du nucléaire, donc à partir de 2035-2040 ans – ce n'est pas avant qu'on pourrait - il faut qu'on puisse choisir entre plusieurs options pour ne pas être coincé avec un scénario qui ne serait pas faisable.
BARBARA POMPILI
Quid des EPR, Barbara POMPILI ? La construction d'EPR, c'est dans les tuyaux ça ? Parce que quand on entend Agnès PANNIER-RUNACHER, qui est votre collègue de l'industrie, elle dit : ? lorsque l'EPR de Flamanville sera livré, nous devons prendre des décisions de construire de nouveaux EPR ; peut-être nous la prendrons un peu en avance, lorsque nous serons sûrs que l'EPR de Flamanville sera sur la bonne voie. ? Donc c'est dans les tuyaux.
BARBARA POMPILI
En fait, ça rejoint ce que je vous ai dit juste avant. D'ici 2035, il faut qu'on développe massivement les renouvelables parce qu'on a besoin d'électricité. Je ne plaisante pas là-dessus. Si on ne fait pas ça, dans les dix ans qui viennent on risque soit le black-out, soit d'avoir besoin de rouvrir des centrales à charbon ou d'importer du charbon du gaz, ce qui serait très mauvais pour nos émissions de gaz à effet de serre. Donc dans les dix ans, j'insiste, énergies renouvelables. Après, il y a un choix à faire et ce choix nous allons le faire sur la base de scénarios qui sont proposés par RTE où on va nous dire combien ça coûte, le plus cher, le moins cher.
ALBA VENTURA
Mais si le choix ce sont les EPR…
BARBARA POMPILI
Ce choix-là devra être fait entre plusieurs technologies.
ALBA VENTURA
Ce sera un choix que vous accepterez ?
BARBARA POMPILI
Encore une fois, le président de la République ne veut pas se retrouver contraint à devoir choisir une technologie parce qu'il n'y aurait pas d'autre solution.
ALBA VENTURA
Mais vous, Barbara POMPILI ?
BARBARA POMPILI
Et voilà pourquoi on fait de la Recherche et Développement sur d'autres types de réacteurs. Donc attendons un petit peu de voir ce que tout ça va donner pour pouvoir ensuite dire ce qu'on va faire. Mais si on a besoin de nucléaire, il faudra utiliser tout ce qu'on a en magasin.
ALBA VENTURA
Emmanuel MACRON avait repoussé l'objectif de 50% du nucléaire dans la production d'électricité de 2025 à 2035. Donc avec les nouvelles ambitions nucléaires du président, est-ce que cet objectif de 2035 il va être repoussé ou est-ce qu'il reste à 2035 ?
BARBARA POMPILI
Non, nous avons une feuille de route qui s'appelle la programmation pluriannuelle de l'énergie. Elle dit bien que nous devons passer à 50% de nucléaire dans le mix électrique en 2035, et donc on va mettre en œuvre cette feuille de route parce que ça nous permet aussi de gérer nos centrales qui sont en train de vieillir. Donc on fait mais en parallèle, on développe beaucoup les énergies renouvelables, toutes les énergies renouvelables parce que nous en avons besoin pour faire face à la demande qui va augmenter.
ALBA VENTURA
Et j'ai une autre question. Emmanuel MACRON en 2018 annonçait la fermeture de 14 réacteurs. Est-ce qu'on est toujours sur cette trajectoire ?
BARBARA POMPILI
C'est la trajectoire qui est dans la PPE et c'est celle que l'on doit tenir si on veut réussir à tenir tous les fils, si vous voulez.
ALBA VENTURA
GREENPEACE affirme dans un communiqué publié hier que le gouvernement français a repris en toute discrétion son trafic de déchets radioactifs vers la Sibérie. Est-ce que c'est vrai ?
BARBARA POMPILI
Alors sur ces questions de déchets, c'est très sérieusement encadré par des législations nationales et internationales.
ALBA VENTURA
Ce n'est pas pour s'en débarrasser ?
BARBARA POMPILI
Non, mais nous avons un certain nombre de déchets qui sont des déchets issus du retraitement. Ces déchets issus du retraitement, ils font l'objet d'une réflexion sur ? est-ce qu'ils terminent leur vie de déchets ? ?, et dans ces cas-là ils iraient certainement dans les projets comme CIGEO ; soit on essaie de réutiliser ces déchets pour en faire un nouveau combustible. Pour l'instant, on est encore en train de travailler sur ces questions-là mais, encore une fois, tout ça est très sérieusement encadré et moi je ne laisserai pas faire quelque chose qui ferait prendre des risques à l'environnement, notamment en Russie.
ALBA VENTURA
Barbara POMPILI, face à la flambée des prix du carburant, hier à l'Assemblée vous avez appelé les distributeurs à faire un geste. Vous leur dites ? réduisez vos marges pour faire baisser les prix à la pompe. ? Et pourquoi vous ne baissez pas les taxes, vous ?
BARBARA POMPILI
Alors sur ce sujet, non, nous ne laisserons pas tomber les Français. Nous l'avons montré sur la hausse des prix du gaz et la hausse des prix de l'électricité. On met en place un bouclier pour que les Français soient protégés donc ne laissons pas dire qu'on ne prend pas nos responsabilités dans l'urgence.
ALBA VENTURA
Donc, pas baisser les taxes.
BARBARA POMPILI
On n'est pas tout à fait sur la même chose sur a hausse des carburants. On est sur une hausse qui est moins forte. Des projections que nous avons - je reste prudente - on ne sera pas du tout dans des hausses, des envolées comme on a eu sur les prix du gaz et sur les prix de l'électricité donc on regarde de près. Là pour l'instant c'est le un centime de plus qui a fait que tout a explosé hier.
ALBA VENTURA
Mais à quel niveau vous dites ? là on va baisser les taxes ? ?
BARBARA POMPILI
Moi je ne vous dis pas ? on va baisser les taxes ?, on ne va pas baisser les taxes. Je vous dis qu'on est en train de regarder quelle est la solution immédiate – immédiate, la plus efficace - pour aider les Français. Mais je vous rappelle qu'on peut prendre des mesures là tout de suite pour aider dans l'urgence, mais que ça montre encore une fois qu'on est très dépendant du pétrole et du gaz, et qu'il faut que les mesures à plus long terme : changement de voiture, travail sur la mobilité, soient faits pour qu'on ne soit plus dépendant à chaque fois que les prix du pétrole montent.
ALBA VENTURA
Rapidement, ce n'est pas facile de faire appliquer la féminisation des titres. Vous avez eu une passe d'armes avec Julien AUBERT, le député LR à l'Assemblée. Il vous a appelée ? Madame le ministre ?, vous lui avez répondu ? Monsieur la rapporteure ?. Ce n'est pas du meilleur effet, non, pour défendre son titre.
BARBARA POMPILI
Je voulais montrer à quel point on était dans l'absurde.
ALBA VENTURA
Mais justement, pourquoi vous n'avez pas laissé filer cette provocation ? C'est lui qui est ridicule.
BARBARA POMPILI
Parce qu'en fait, il s'avère que ça faisait plusieurs… Je l'avais déjà appelé comme ça à plusieurs reprises. Là, ça a choqué une présidente de séance. Il n'y a pas de petits combats pour le féminisme. Ça peut paraître anecdotique comme ça mais ça montre, encore une fois, que quand on est une femme, quand on veut se faire respecter - parce que c'est une question aussi de respect : j'avais demandé à plusieurs reprises qu'on m'appelle par mon titre ; normal – je n'ai pas été respectée…
ALBA VENTURA
Il n'y est pas obligé.
BARBARA POMPILI
Si. Figurez-vous qu'il y a une instruction du bureau à l'Assemblée nationale qui dit qu'il faut respecter la parole des femmes. Ce qui est quand même assez grave, c'est qu'on doive le marquer quelque part.
ALBA VENTURA
Merci Madame la Ministre, Barbara POMPILI
source : Service d'information du Gouvernement, le 14 octobre 2021