Extraits d'un entretien de M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'Etat au tourisme, aux Français de l'étranger, à la francophonie et chargé des petites et moyennes entreprises, avec BFM Business le 16 décembre 2021, sur le tourisme, la grève à la SNCF et l'épidémie de Covid-19.

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  • Jean-Baptiste Lemoyne - Secrétaire d'Etat au Tourisme, aux Français de l'étranger, à la Francophonie et chargé des Petites e

Média : BFM Business

Texte intégral

Q - Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué en charge du tourisme, des Français de l'étranger, et de la francophonie, bonsoir...

R - Bonsoir.

Q - ...et je continue, parce que maintenant, désormais, vous êtes ministre en charge des PME, puisque vous avez repris le portefeuille d'Alain Griset qui a dû démissionner. Ce qui fait que vous êtes un hydre à deux têtes, puisque vous avez une tête à Bercy et une tête au ministère des affaires étrangères, puisque vous dépendez de Jean-Yves Le Drian avec le tourisme.

R - Exactement : 100% à Bercy, 100% aux affaires étrangères, les deux. Mais quelque part, il y a quand même un fil directeur dans ce portefeuille, c'est un peu une sorte de ministère du rayonnement français. Rayonnement par la langue, avec la francophonie, rayonnement par les Français établis hors de France, avec les Français de l'étranger, rayonnement par nos entreprises, nos pépites qui cartonnent aussi à l'export. Il y a quand même ce fil directeur. Je dois dire que servir ces acteurs et les accompagner, c'est passionnant.

Q - Ce serait tout de même plus logique d'avoir le tourisme voire le commerce extérieur, on en parle d'ailleurs du reste, revenir à Bercy... Ce serait plus logique.

R - Ce qui compte, c'est l'efficacité. Il se trouve que je connais Bercy, j'ai été en poste deux ans dans cette maison auprès d'un ministre du budget. Donc je suis très heureux de pouvoir faire le pont entre les affaires étrangères, l'économie et tout cela au service de nos entrepreneurs.

Q - Actualité extrêmement chargée, il y a les assises du commerce, que vous avez reprises de la main d'Alain Griset, mais on dira un mot dans un instant. Car là, il y a quand même les vacances de fin d'année, vacances de Noël, la SNCF avec un préavis de grève qui a été levé. Mais malgré tout, il y a quand même 50.000 Français demain qui ne pourront pas prendre leur train dans le Sud-Est. Est-ce que c'était vraiment la grève de trop ? La menace de grève de trop ?

R - On ne peut pas se satisfaire de prise d'otages de Français comme ça au moment du départ en vacances. C'est par la voie de la négociation que l'on doit aboutir, ce n'est pas par des grèves unilatérales. Heureusement qu'un certain nombre d'organisations ont levé le préavis. La moindre des choses c'est de présenter des excuses aux 50.000 Français qui seront empêchés. C'est un moment de fête, de retrouvailles, qui est important.

Q - Comme le sparadrap du capitaine Haddock, ça reste sur l'image de la France, vous qui êtes en charge du tourisme, ces mouvements de grève qui arrivent et qui font que vous ne pouvez plus atterrir, vous ne pouvez plus partir, prendre le train...

R - Là, on est sur quelque chose de très ponctuel. C'est vrai qu'on a "cotisé" à l'occasion notamment de la réforme des retraites etc. Il est clair que - je l'ai dit à chaque fois - ce sont des signaux qui ne sont pas bons à l'internationale. Mais nous avons néanmoins des fondamentaux qui sont très bons : la France reste la France, Paris reste Paris. Dès que les conditions permettront à nouveau de voyager normalement - parce qu'on est encore entravé à l'international -, j'ai bon espoir que les clientèles reviennent.

Q - Comme cela se présente-t-il pour la France ? Est-ce que les touristes sont là ?

R - Les vacances d'hiver se présentent bien globalement. On est à des taux de réservation - je faisais le point avec les hébergeurs - à 91% par rapport à 2019, qui avait été une très bonne année. On va effectivement avoir de la perte en ligne du côté des Britanniques (c'est 15% environ de la clientèle pour la saison ski). C'est vrai qu'on a pris une décision de restreindre les motifs pour pouvoir voyager. Les motifs de loisir ne sont pas acceptés, sauf pour les Français qui vivent en Grande-Bretagne peuvent naturellement revenir en France. C'est un droit inaliénable. Ils peuvent revenir avec leur conjoint, avec leurs enfants. Mais en revanche, c'est vrai qu'on met pour l'instant beaucoup de prudence par rapport aux flux de voyageurs venant de Grande-Bretagne.

Q - Là, il y a un sommet européen où des restrictions de voyage se multiplient, on le voit bien, à cause de l'Omicron. Les Britanniques, mais pas que... Est-ce que petit à petit les frontières sont en train de se refermer ?

R - Je ne pense pas que l'on referme, mais je pense que l'on va renforcer la vigilance. Ce sont peut-être des durées de test qui vont être raccourcies, des demandes de test plus régulières. Tout ça on va le poser sur la table au conseil de défense demain à 16h00. Donc je ne peux aujourd'hui vous en dire plus parce que le débat va avoir lieu. On est outillé pour faire face. Par la politique de rappel, cette troisième dose, par la vaccination, par les gestes barrières etc. On a les bons outils, on a la bonne stratégie, il ne s'agit pas de refermer d'un coup d'un seul, il s'agit de prendre des mesures de freinage, c'est tout. Restreindre parfois certains flux, parce que les Britanniques s'attendent, je le dis de la bouche de leurs autorités mêmes, à une vague impressionnante. Et donc on prend cette mesure de précaution et de freinage.

Q - Le freinage consisterait en quoi ?

R - Cela peut être en renforçant la politique de test, que ce soit sur la durée de validité, sur la fréquence, ce genre de mesure. Mais aujourd'hui, on le voit, on est capable aussi selon la situation sanitaire de faire évoluer des pays d'une couleur à l'autre. Je vous prends un cas très concret : on a placé l'Afrique australe en rouge écarlate et cela comprenait l'Ile Maurice au début. On a fait un travail avec Maurice et on a vu que les données sanitaires montraient que l'Omicron n'avait pas pénétré sur le territoire. Et donc, on a enlevé Maurice de la rouge écarlate. Donc ces classements sont évolutifs en fonction de la situation sanitaire, dans un sens et dans l'autre.

Q - Il faudra peut-être établir un motif impérieux pour voyager.

R - C'est ce qui a été mis en place pour les échanges avec le Royaume-Uni, puisqu'on souhaite restreindre les déplacements à l'essentiel. Et encore une fois j'insiste : cela ne concerne pas les Français établis hors de France, établis au Royaume-Uni, parce qu'il y a ce droit inaliénable et c'est très important de le dire à votre antenne. Naturellement, il y a aussi beaucoup d'émotion, forcément, on peut le comprendre, puisque les gens se sont organisés aussi pour revenir et ils pourront le faire, eux.

Q - Cela veut dire que cela aura un impact sur le tourisme, non ?

R - On a eu un bel été indien, une belle arrière-saison, la saison d'hiver s'annonce plutôt bonne. Mais on risque d'avoir sur certaines clientèles, britanniques et peut-être nordiques, une moindre affluence, mais je pense que l'on peut compenser avec les clientèles françaises. Vous m'avez souvent entendu appeler à l'été bleu-blanc-rouge, j'appelle aussi à l'hiver bleu-blanc-rouge. J'ai aussi connaissance d'un certain nombre de Français qui souhaitaient réserver, ne trouvaient plus de place... Quelque part, c'est aussi une incitation à réorienter un certain nombre d'annulations, de les remettre sur le marché pour les clientèles françaises qui seraient désireuses de s'y rendre.

Q - Est-ce qu'on peut faire un bilan sur l'année 2021 ?

R - Il est un peu précoce de faire le bilan global, parce qu'on a eu, vous le savez, un premier semestre qui a été quand même soumis à certaines restrictions, un été qui a très bien marché, un été indien très correct, mais il est un peu trop tôt. Il y a quand même une bonne reprise globalement. Mais tout cela reste encore très évolutif. C'est l'inattendu permanent, ce virus ! On le voit avec l'émergence encore de ce variant Omicron (...).


source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 décembre 2021