Interview de Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, à BFM TV le 11 janvier 2022, sur le "bouclier tarifaire" de l'énergie, la production d'électricité et la place du nucléaire dans la politique de l'énergie.

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Média : BFM TV

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Barbara POMPILI, bonjour.

BARBARA POMPILI
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d’être avec nous, ministre de la Transition écologique, et je vais vous parler, pour commencer du prix de l’électricité, parce que c’est un souci pour chaque Français, est-ce que l’électricité, le prix va augmenter, on parle de 38 à 40% dès le mois de février ?

BARBARA POMPILI
Non, non, on s’est engagé à protéger les Français en leur proposant un bouclier tarifaire, et on va tenir cet engagement, l’augmentation de l’électricité, elle sera maintenue à 4% comme ça a été annoncé, et on est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur toute l’année 2022 ?

BARBARA POMPILI
Sur toute l’année 2022, je le confirme…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Même après la présidentielle ?

BARBARA POMPILI
Je vous le confirme, après, nous sommes en train de travailler, parce que, effectivement, si ça continue à augmenter, on risque d’avoir des reports, et moi, ce que je ne voudrais pas, c’est que le fait qu’on maintienne les prix en 2022 entraîne des augmentations en 2023, et donc on est en train de travailler à des solutions pour cela qui vont vous être annoncées très bientôt.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais on va en parler, "annoncées" très bientôt ou pas, mais ça avance bien, ces solutions…

BARBARA POMPILI
Oui, ça avance bien…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je veux qu’on en parle, parce que c’est essentiel évidemment, donc vous confirmez 4% sur l’année 2022 et pas un centime de plus, on est bien d’accord ?

BARBARA POMPILI
Tout à fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Réunion importante de la CRE, la Commission de Régulation de l’Electricité aujourd’hui…

BARBARA POMPILI
C’est ça…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et les associations de consommateurs seront présentes, le coût pour l’État déjà, maintenir une augmentation à 4%, ça a déjà coûté 8 milliards d’euros à l’État, vous confirmez ?

BARBARA POMPILI
C’est ça, ça va coûter 8 milliards, oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça a déjà ?

BARBARA POMPILI
Oui, parce qu’on a aussi d’autres mesures qui ont été prises, et d’ailleurs, le total des mesures, on est à 14 milliards aujourd’hui, avec le bouclier tarifaire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
14 milliards déjà ?

BARBARA POMPILI
C’est ça, mais on assume, on assume de payer ça pour aider les Français à passer ce cap.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Quelles solutions ? La baisse des taxes, c’est déjà fait, c’est engagé la baisse des taxes, on est bien d’accord, c’est ce qui coûte cher d’ailleurs à l’État.

BARBARA POMPILI
C’est une baisse temporaire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, une baisse temporaire, bon. EDF va devoir faire des efforts, j’imagine, Barbara. POMPILI ?

BARBARA POMPILI
Oui, on travaille avec EDF là-dessus, on travaille avec EDF sur une solution…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Laquelle ?

BARBARA POMPILI
Après, il y en a d’autres qui sont étudiées…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Laquelle ?

BARBARA POMPILI
Mais une solution qui est d’augmenter la part de vente d’électricité aux autres fournisseurs moins chère, ce qu’on appelle l’ARENH, et aujourd’hui, cette part, on peut essayer de l’augmenter pour justement permettre de maintenir les prix.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, je m’arrête, EDF va vendre son électricité plus chère aux autres fournisseurs ?

BARBARA POMPILI
Moins chère, en fait, on a…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Moins chère ou plus chère ?

BARBARA POMPILI
On a ce qu’on appelle l’ARENH, on a ce qu’on appelle l’ARENH, qui est l’obligation pour EDF de vendre une part de l’électricité à d’autres fournisseurs à des prix qui sont maintenus à un niveau de 42 euros, qui est le prix, on va dire, le prix du nucléaire actuellement, enfin, grosso modo. Donc il est autorisé à le faire, mais dans une certaine proportion et pas plus. Là, ce qu’on regarde, c’est d’augmenter cette proportion, ça demande beaucoup de négociations, parce qu’on ne peut pas faire ça n’importe comment, donc il faut qu’on travaille avec la Commission européenne pour pouvoir arriver à cette solution. C’est une solution parmi d’autres qui sont regardées, qui sont aussi d’autres solutions, pour aider certains types d’entreprises sans être obligé de passer par- là, mais croyons que ça va être difficile de l’éviter.

JEAN-JACQUES BOURDIN
EDF fait des profits avec la hausse des prix évidemment, donc EDF doit contribuer. ?

BARBARA POMPILI
C’est normal…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et EDF veut aussi des investissements dans le nucléaire, on est bien d’accord. Il va aussi falloir réformer le marché européen de l’électricité, dites-moi, Barbara POMPILI ?

BARBARA POMPILI
Oui, tout à fait, on est en train d’y travailler, ce qu’on essaie de faire au niveau de l’Europe, et ce qu’on est en train de faire, c’est de rassembler plusieurs pays qui pèsent suffisamment pour pouvoir influer sur la Commission là-dessus. On a déjà réuni…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Quels changements voulez-vous ?

BARBARA POMPILI
Ce qu’on veut, c’est ne pas changer le marché dans son ensemble qui est un marché protecteur, c’est grâce au marché européen de l’électricité que, d’abord, on a de l’électricité, parce qu’on a des interconnexions qui nous protègent, et on est quand même maintenu sur les prix, par contre, on voit que sur les prix de détail, et non pas sur les prix de gros, sur les prix de détail, là, on voit qu’il y a un souci au regard de ce que nous voyons depuis plusieurs mois ; donc on travaille pour voir si on peut, disons, sur les prix de détail, éviter des soubresauts, donc par exemple faire des contrats à long terme, bref, peu importe, mais on travaille avec la Commission pour avancer…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C’est une mécanique pour faire changer les choses. Barbara POMPILI, est-ce que nous risquons un black-out général avant la fin de l’hiver ?

BARBARA POMPILI
Non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, pourquoi non, alors que des réacteurs nucléaires ont été arrêtés ?

BARBARA POMPILI
Oui, c’est vrai, c’est vrai, nous avons des réacteurs nucléaires qui sont arrêtés en trop grand nombre, et ça nous donne une marge de manœuvre qui se réduit de sécurité, et donc c’est pour ça d’ailleurs que j’ai demandé un audit à EDF, parce que je ne trouve pas normal qu’aujourd’hui, on ait si peu de marges de manœuvre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc des réacteurs vont être remis en marche ?

BARBARA POMPILI
Donc il y en a qui sont remis en marche, vous avez des réacteurs qui sont arrêtés pour maintenance, c’est-à-dire, eh bien, les entretiens de sécurité, et puis, pour remettre du combustible dedans, il y en a 4 qui sont arrêtés, qui n’auraient pas dû être arrêtés, et qui nous privent de 6 gigawatts d’électricité, c’est beaucoup, ces 6 gigawatts d’électricité, parce qu’il y a un défaut qui a été trouvé sur des tuyaux dû au vieillissement, sur 4 réacteurs. Et donc ces défauts font qu’il va falloir faire des réparations et ça va prendre du temps, ça, ce n’était pas prévu, et ça nous met dans une situation où on doit du coup prendre des mesures pour réguler, pour être sûr d’approvisionner nos concitoyens en électricité, ce qui est le plus important. Mais je peux vous garantir que le black-out généralisé, ça n’aura pas lieu, ça, rassurons-nous concitoyens.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. D’autant plus qu’il y a la possibilité de baisser un peu la tension, d’autant plus qu’il y a les 2 centrales au charbon encore en activité en France, celle de Cordemais, de Saint-Avold, ces 2 centrales vont produire au-delà du seuil fixé, pour limiter les émissions polluantes, on est bien d’accord…

BARBARA POMPILI
Oui, c’est très temporaire…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Plus 42%, plus 42%...

BARBARA POMPILI
Non, vous mettez plus 42%, moi, ce que je vais vous dire, c’est moins 38% d’émissions de CO2 dans la production d’énergie depuis 2017, moins 38%...

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, mais d’accord, non, plus 42% pour ces 2 centrales à charbon…

BARBARA POMPILI
Non, attendez, plus…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Par rapport au seuil maximal…

BARBARA POMPILI
Attendez, plus 42% de 0,2% de nos émissions de gaz à effet de serre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Enfin, j’ai vu les titres de la presse allemande : la France relance ses centrales à charbon, vous les avez vus comme moi.

BARBARA POMPILI
Oui, non, mais là, bon, il y a des petits… comment dire... on se titille avec l’Allemagne, puisque l’Allemagne a du mal à sortir du charbon, nous, le charbon représente entre 1 et 2% de notre production d’électricité aujourd’hui, elle a baissé constamment depuis déjà, on va dire, une décennie, et ça ne représente quasiment plus rien, enfin, il faut vraiment dire ça aux Français, on est sur 2% de notre production d’électricité ; on ne relance absolument aucune centrale, quand j’entends Valérie PECRESSE qui dit qu’on relance des... c’est faux, c’est : on a 2 centrales à charbon, dont 1 va bien fermer, Saint-Avold, au printemps. Et on garde Cordemais….

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et Cordemais bientôt…

BARBARA POMPILI
Le temps de…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jusqu’en 2024, c’est ça, Cordemais ?

BARBARA POMPILI
Eh bien, disons, on attend que l’EPR de Flamanville soit mis en route pour fermer Cordemais.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, il sera mis en route quand cet EPR de Flamanville d’ailleurs, c’est vraiment l’arlésienne ?

BARBARA POMPILI
Eh bien, EDF nous dit fin 2022…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C’est l’arlésienne de l’énergie française…

BARBARA POMPILI
EDF nous dit fin 2022, j’ai tendance à penser que ce sera difficile de tenir le fin 2022. On verra.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C’est-à-dire 2023, 2024, mais enfin, tous les deux ans, on nous annonce…

BARBARA POMPILI
Peut-être pas 2024…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pardon, mais, Barbara POMPILI, tous les deux ans, on nous annonce que Flamanville va être mis en route. Et tous les deux ans, on retarde.

BARBARA POMPILI
J’en ai été témoin comme vous, et il va falloir, et on est déjà en train de tirer des retours d’expérience de cet EPR.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc 2023, pas avant 2023, peut-être 2024 ?

BARBARA POMPILI
Je ne dis pas ça, je ne dis pas ça, je dis pour l’instant que c’est prévu fin 2022, que ça me paraît difficile.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, dites-moi, on mesure au passage les limites de l’éolien notamment, énergie intermittente.

BARBARA POMPILI
Alors ça, c’est vraiment…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, allez-y…

BARBARA POMPILI
Une déformation intellectuelle que j’ai du mal à comprendre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, allez-y !

BARBARA POMPILI
Aujourd’hui, on a 70% de nucléaire dans notre mix électrique, mon problème aujourd’hui, c’est que j’ai trop de nucléaire et que je n’ai pas assez de renouvelable pour aider à faire l’appoint quand il y a un problème, aujourd’hui, j’ai un problème, parce que j’ai trop de centrales nucléaires arrêtées, je n’ai pas de marges de manœuvre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous avez un problème aussi parce que vous avez trop de centrales nucléaires, mais, surtout…

BARBARA POMPILI
Arrêtées…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez trop de centrales nucléaires vieillissantes aussi.

BARBARA POMPILI
Vieillissantes, c’est vrai…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien oui, c’est tout le problème…

BARBARA POMPILI
Et d’ailleurs, quand on m’explique que toutes les centrales nucléaires vont pouvoir passer 60 ans alors qu’aujourd’hui, elles sont juste à 40, moi, j’ai du mal à y croire. Et d’ailleurs, l’Autorité de sûreté nucléaire aussi. Donc il faut être raisonnable, aujourd’hui, ce qui me manque, c’est des renouvelables, parce que nous allons avoir besoin de plus d’électricité dans les années qui viennent, et nous le voyons, nous sommes déjà en tension maintenant, on ne va pas pouvoir construire une centrale nucléaire en moins de 15, 20 ans. On a besoin aujourd’hui de renouvelables pour l’appoint, et aussi de faire des économies d’énergie, Jean-Jacques BOURDIN, c’est important.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Si Emmanuel MACRON, oui, on va en parler, si Emmanuel MACRON est candidat, dans son programme, il développera l’éolien, si j’ai bien compris, parce que…

BARBARA POMPILI
Evidemment, enfin, il développera tous les renouvelables.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais dont l’éolien ?

BARBARA POMPILI
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il va falloir lever les contraintes sur les permis de construire sur l’éolien, ce n’est pas évident.

BARBARA POMPILI
On travaille beaucoup, on travaille beaucoup sur l’acceptabilité et sur le fait de mieux concerter, de faire en sorte qu’on le fasse mieux, c’est vrai qu’il y a eu, on le sait, il y a eu des erreurs par le passé, mais on a aujourd’hui RTE qui nous dit qu’on a besoin de multiplier par 2,5 à 4 l’éolien terrestre en France, multiplier par 7 au minimum le photovoltaïque. On doit le faire, il faut le faire bien…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, parlons du nucléaire qui sera l’un, qui est l’un des sujets de la campagne présidentielle, Barbara POMPILI, l’Europe devra investir 500 milliards d’euros dans le nucléaire d’ici à 2050 dit Thierry BRETON, 103 réacteurs nucléaires en Europe, dont 56 en France, ça veut dire quoi, ça veut dire que la France recevra la moitié de cet effort financier ?

BARBARA POMPILI
Non, ce n’est pas comme ça qu’on voit les choses, chaque pays européen fait son choix, fait son choix de mix, par contre, on est tous tenus par le même objectif, qui est la neutralité carbone en 2050, c’est un objectif d’ailleurs qui a été ajouté dans la loi française récemment, en 2019, et qui donc nous oblige à aller plus vite dans la baisse de nos émissions de gaz à effet de serre, ça a des conséquences en cascade, ça, ça veut dire qu’on va devoir faire des économies d’énergie, bien sûr, mais aussi faire passer un certain nombre de consommations d’énergie à l’électrique, qui est moins carbonée, par exemple, les voitures qui vont passer à l’électrique, etc. Donc ça veut dire qu’on a besoin de beaucoup plus d’énergie… d’électricité, et donc…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Doublement de la demande d’électricité en Europe sur les 30 prochaines années ?

BARBARA POMPILI
Eh oui, oui, et donc tous les pays doivent faire face à cela, et donc tous les pays doivent choisir quels investissements ils font. Nous, on a décidé, face à cela, d’augmenter beaucoup es renouvelables…

JEAN-JACQUES BOURDIN
D’investir…

BARBARA POMPILI
De faire des économies d’énergie et de relancer une partie de nucléaire…

JEAN-JACQUES BOURDIN
De renouveler…

BARBARA POMPILI
Justement pour, en termes de sécurité d’approvisionnement, pour palier le fait qu’on a, nous, un parc nucléaire très important mais qui vieillit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, le nucléaire, est-il une énergie verte ?

BARBARA POMPILI
Non, d’ailleurs…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah ben, non, ce n’est pas ce que dit l’Europe, ce n’est pas ce que veut la France…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, ça n’est pas dit comme ça au niveau européen.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, comment, comment, comment ?

BARBARA POMPILI
Comment, comment…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour vous, le nucléaire n’est pas une énergie verte ?

BARBARA POMPILI
Non, c’est une énergie qui produit des déchets, qui sont des déchets dangereux et qui durent, et qui vivent très longtemps, et donc, c’est un héritage qu’on donne à nos enfants qu’on ne peut pas considérer comme vert, par contre, vous parlez…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Thierry BRETON dit que c’est une énergie verte !

BARBARA POMPILI
Vous parlez de la taxonomie, très certainement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C’est vrai ou faux ? Est-ce que c’est vrai ou faux ?

BARBARA POMPILI
Le nucléaire est décarboné, donc émet peu de gaz à effet de serre, quasiment pas de gaz à effet de serre, et c’est en ça qu’il peut être considéré, et c’est pour ça qu’on l’intègre dans la taxonomie, il peut être considéré comme une aide pour baisser les émissions de gaz à effet de serre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l’énergie verte, la taxonomie est énergie verte…

BARBARA POMPILI
C’est une énergie décarbonée, vert voudrait dire que c’est parfait pour l’environnement, ce n’est absolument pas le cas…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Comme le gaz d’ailleurs.

BARBARA POMPILI
Non, en fait, la taxonomie a trois catégories, Jean-Jacques BOURDIN, il y a une catégorie vert, une catégorie pour aider à la transition et une catégorie qu’on appelle ce qui n’est pas vert, mais qui peut aider, par exemple, quand on fabrique des pales d’éoliennes, ce n’est pas vert, mais par contre, ça peut aider aux renouvelables, et donc à la baisse des émissions de gaz à effet de serre, aujourd’hui, le gaz et le nucléaire sont proposés dans la catégorie 2, c’est-à-dire la catégorie du milieu, pas la catégorie verte.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, de nouveaux réacteurs, des petits réacteurs modulaires, c’est pour quand ?

BARBARA POMPILI
On espère un prototype en France en 2030…

JEAN-JACQUES BOURDIN
2030, prototype ?

BARBARA POMPILI
Oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et donc ensuite ?

BARBARA POMPILI
Et donc après, eh bien, le temps de le mettre en place, je vois 2035, 2040…

JEAN-JACQUES BOURDIN
2035, 2040…

BARBARA POMPILI
Mais ça dépend…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et les EPR nouvelle génération ?

BARBARA POMPILI
Les EPR 2, donc s’ils ont lancé, et a priori, c’est bien parti…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils seront lancés ?

BARBARA POMPILI
Eh bien, le président a dit qu’il allait lancer des nouvelles capacités de production nucléaire, il insiste beaucoup sur la recherche sur les petits réacteurs modulaires. Mais aujourd’hui, ce qui est proposé par EDF, ce sont des EPR 2, qui ne pourraient pas voir le jour avant 2036, 2037.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien ? Six ?

BARBARA POMPILI
Pour l’instant, ça n’est pas encore annoncé, et ça, ce n’est pas à moi de le faire, c’est au président.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, d’accord, mais il se murmure qu’il y en aurait six, et où, on sait où déjà ?

BARBARA POMPILI
Ecoutez, ce sur quoi vous pouvez vous fonder, c’est le rapport de RTE qui met des scénarios sur la table avec…

JEAN-JACQUES BOURDIN
J’ai vu, je l’ai lu…

BARBARA POMPILI
Avec un certain nombre de nouveaux réacteurs dans certains scénarios.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon j’ai une question sur les chaudières au fioul dans les logements, interdiction de nouvelles chaudières au fioul dans les logements le 1er juillet, fuel et charbon d’ailleurs.

BARBARA POMPILI
C’est ça.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Si je me chauffe au fioul ou au charbon actuellement, je pourrais continuer à utiliser ma chaudière bien sûr.

BARBARA POMPILI
Evidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon.

BARBARA POMPILI
Evidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais si ma chaudière tombe en panne et est inutilisable, je ne pourrai plus m’équiper d’une nouvelle chaudière.

BARBARA POMPILI
Alors si votre chaudière tombe en panne, vous aurez toujours accès aux pièces pour la changer, vous pourrez toujours la faire réparer. Si votre chaudière meurt et qu’il faut la changer, là vous pourrez acheter des chaudières qui ne sont plus des chaudières à fuel et vous serez aidé pour ça et donc pour le même prix qu’une chaudière à fuel, vous aurez une chaudière qui sera bien meilleure pour l’environnement et donc pour vous aussi.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien StocaMine en Alsace qu’est-ce qu’on fait de StocaMine, de tous ces déchets industriels qui sont enfouis dans des, oui d’anciennes galeries ?

BARBARA POMPILI
StocaMine, on arrête de tergiverser, ça fait 20 ans que ça dure, depuis 20 ans on a repoussé les décisions et maintenant on est dans une situation où moi je ne laisserai pas la situation perdurer. Vous savez le risque, le risque c’est que les gens qui travaillent dans cette mine aient des accidents parce que c’est une mine qui se referme sur elle-même et le risque c’est qu’on n’ait plus le temps de la refermer correctement pour qu’elle soit…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors que faire, qu’allez-vous faire ?

BARBARA POMPILI
Eh bien j’ai déjà annoncé il y a un an que maintenant nous allions arrêter de retirer les déchets parce qu’on ne pourrait plus retirer tous les déchets qui sont dedans.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui 44 000 tonnes.

BARBARA POMPILI
Ce que le demandent certains c’est qu’on retire tous les déchets, tout le monde sait qu’on ne peut plus, donc d’autres disent, bon on peut retirer une partie mais de toute façon il restera des déchets et des déchets dangereux.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors que fait-on ?

BARBARA POMPILI
Donc ce qu’il faut c’est l’isoler pour qu’ils ne puissent plus y avoir de remontée parce qu’il y a une nappe phréatique au-dessus, qui est la nappe d’Alsace donc il ne faut surtout pas qu’elle soit polluée. Donc il faut bien la refermer et puis laisser les déchets-là, on ne peut plus faire autrement. Moi ce que je veux c’est que tout le monde comprenne que c’est la seule solution au regard de toutes les expertises que nous avons, donc arrêtons de mettre en danger les gens qui sont dans cette mine en voulant retirer des déchets, on ne pourra pas tout retirer donc faisons en sorte de maintenant la sécuriser pour qu’ils ne puissent puis avoir de fuite, c’est la seule solution qui soit faisable et qui soit responsable.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Attention on est sur une faille sismique. Attention.

BARBARA POMPILI
Mais tout à fait et ça a été évidemment regardé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Barbara POMPILI, je voudrais vous parler de l’épandage des pesticides, pourquoi, parce que 2019 le gouvernement instaure des zones de non-traitement des cultures par les agriculteurs. On s’en souvient interdiction d’épandre des pesticides à moins de 5 mètres des habitations pour les cultures basses et à moins de 10 mètres pour les cultures hautes. Possibilités de dérogation en signant une charte, l’année dernière le Conseil constitutionnel, Conseil d’État aussi ont demandé au gouvernement de renforcer ces distances d’épandage pour mieux protéger les riverains, 6 mois pour le faire, le délai arrive, 26 janvier, est-il vrai que vous allez demander une nouvelle évaluation à l’ANSES ?

BARBARA POMPILI
Non on ne demande pas une nouvelle évaluation à l’ANSES, ce qu’on demande c’est que l’ANSES regarde pour chaque produit, c’est-à-dire arrêtons de dire que tous les produits se valent, il y a des produits qui sont plus dangereux que d’autres tout le monde le sait et donc l’ANSES va regarder sur chaque produit s’il est dangereux ou pas et auquel cas on réévalue les distances.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous n’êtes pas en train de repousser encore une fois les décisions pour ne pas fâcher les agriculteurs avant la présidentielle, franchement Barbara POMPILI ça fait des années que ça dure, vous-même, vous-même je me souviens lorsque vous étiez à l’Assemblée nationale, je lis depuis le mois d’avril 25 départements ont permis de revoir les distances d’épandage à 3 mètres pour les cultures basses et 5 mètres pour les cultures hautes, vous le déploriez, dans ce contexte épidémie de coronavirus alors que nos concitoyens sont aujourd’hui confinés à domicile permettre de telles pratiques c’est faire le choix d’ignorer leur santé, les fameuses chartes signées par les préfets avec les agriculteurs.

BARBARA POMPILI
Qui ont été annulées depuis.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais enfin vous vous éleviez contre ces épandages. Vous êtes ministre, vous avez changé ?

BARBARA POMPILI
Moi ce que je veux, non évidemment non, ce que je veux c’est que ce soit la science qui résolve ce problème, c’est-à-dire que l’ANSES nous dise, là c’est dangereux et donc là il faut aller plus loin sur les zones d’épandage, là ça passe et donc on laisse comme ça. je crois que c’est le meilleur moyen de sortir par le haut de ça et par contre je ne vous laisserai pas dire qu’il y a rien qui est fait parce que sur la question des phytosanitaires, on a réduit de 50% la part du glyphosate, on n’a pas été aussi vite qu’on aurait voulu et ça je suis totalement d’accord avec vous il faut aller plus loin, mais je vous rappelle que on est sur un système qu’il faut complètement changer, un système productiviste, un système où on a incité les agriculteurs à utiliser des produits chimiques pour nourrir les Français et c’est plus facile et je peux vous le dire en tant que ministre en charge de l’Environnement, c’est plus facile de travailler avec les grandes des industries pour baisser leurs émissions de gaz à effet de serre que de travailler avec 400000 familles d’agriculteurs qui ont des difficultés à avoir des revenus là-dessus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Tout le monde comprend les difficultés des agriculteurs.

BARBARA POMPILI
Donc ce qu’il faut c’est qu’on travaille avec eux et qu’on les aide, mais on a baissé les pesticides. Moi j’ai enfin fait adopter un pacte sur les abeilles qui fait qu’on ne peut plus pulvériser de pesticides au moment où les plantes sont en fleurs et où les abeilles vont dessus dans la journée, maintenant on doit faire ça le soir ou la nuit quand les abeilles ne sont pas là, etc. Donc on a avancé là-dessus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Barbara POMPILI autant mieux informer les populations qui sont concernées.

BARBARA POMPILI
Evidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, j’ai vu, ce sera quoi une petite fiche A4 dans les mairies, c’est insuffisant quand même.

BARBARA POMPILI
Non il va y avoir des sites internet où on va pouvoir avoir les informations. On a déjà les informations…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Que les jours et les heures d’épandage.

BARBARA POMPILI
Je ne sais plus jusqu’à quel niveau de détail on rentre, ça il faut voir avec Julien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C’est dommage.

BARBARA POMPILI
Mais en tout cas il y aura des informations là-dessus, nos concitoyens ont le droit d’avoir toutes les informations possibles et puis je vous rappelle que nous sommes en présidence française de l’Union européenne, le sujet des pesticides a été porté par le président de la République qui a annoncé lui-même qu’il allait se battre pour qu’il y ait une baisse des consommations de pesticides de phytosanitaires dans l’Union européenne, c’est le bon niveau l’Union européenne aussi pour prendre des mesures qui s’appliquent partout et à tous les agriculteurs. Et puis on se bat aussi avec Julien DENORMANDIE pour avoir des clauses miroir, c’est-à-dire que les produits qui rentrent dans l’Union européenne et dans notre pays, doivent avoir les mêmes contraintes environnementales que celles qu’on impose à juste titre à nos agriculteurs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Barbara POMPILI d’être venue nous voir.

Source : Service d’information du Gouvernement, le 12 janvier 2022