Interview de Mme Olivia Grégoire, secrétaire d'Etat à l'économie sociale, solidaire et responsable, à Public Sénat le 22 février 2022, sur l'élection présidentielle, la crise ukrainienne, le pouvoir d'achat et la politique économique.

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Intervenant(s) : 
  • Olivia Grégoire - Secrétaire d'Etat à l'économie sociale, solidaire et responsable

Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Bonjour. Merci beaucoup Olivia GREGOIRE d'être notre invitée politique ce matin. On est ravi de vous retrouver sur ces plateaux après votre congé maternité, qui n'est pas un secret, on va d'ailleurs en parler dans quelques instants. Vous êtes secrétaire d'Etat chargée de l'Economie sociale, solidaire et responsable, et on est ensemble pendant 20 minutes, pour une interview en partenariat avec la Presse quotidienne régionale. Bonjour Stéphane VERNAY.

STEPHANE VERNAY
Bonjour bonjour.

ORIANE MANCINI
De Ouest France. On commence bien évidemment Olivia GREGOIRE, par l'Ukraine, puisque Vladimir POUTINE a donc pris la parole hier à la télévision, il reconnaît l'indépendance des séparatistes pro-russes. Il ordonne à l'armée russe de rentrer dans ces territoires. Est-ce que quelque part cette décision de Vladimir POUTINE, c'est l'échec d'Emmanuel MACRON ?

OLIVIA GREGOIRE
Je crois qu'il faut, et je sais que vous le faites souvent, de bon matin ici, raisonner à la hauteur du sujet. Emmanuel MACRON a fait tout ce qu'il pouvait, et continuera à le faire d'ailleurs, dans les prochains jours, et depuis des semaines, des mois, pour maintenir la paix, encore plus depuis que la France préside l'Union européenne. Il n'a pas ménagé ses efforts, il ne les ménagera pas. On a aujourd'hui besoin de saisir le Conseil de l'ONU, il a réagi tardivement hier soir par le truchement d'un communiqué de Presse. L'enjeu est bien plus important, et je sais Oriane que vous comprendrez ma réponse, que de savoir si c'est une victoire ou un échec d'Emmanuel MACRON. Je ne doute pas que toute la journée sur les plateaux télé vont défiler les oppositions, sur cet angle d'un échec du président de la République, de grâce laissons le sujet à la hauteur, et dans l'ampleur…

ORIANE MANCINI
Mais est-ce qu'il ne s'est pas quand même un peu illusionné, sur la volonté de Vladimir POUTINE de négocier ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne crois pas du tout. Je ne crois pas du tout. Le président de la République est un homme lucide (coupure son) je ne m'aventurerai pas sur le type de sanctions, par prudence et par respect aussi des négociations diplomatiques. On en saura plus dans les prochaines heures, dans les prochains jours.

ORIANE MANCINI
Mais quand même, est-ce qu'il n'y a pas un risque, si la Russie coupe le robinet de gaz, est-ce que finalement les Européens ne vont pas se retrouver perdants ?

OLIVIA GREGOIRE
Les risques sont nombreux, et ce n'est pas pour rien que le président de la République a réagi depuis des mois, et a agi, au-delà de réagir, pour éviter la situation belliqueuse et la guerre. Les risques sont nombreux, notamment sur l'énergie.

ORIANE MANCINI
Mais vous pensez qu'au-delà des mots, il pourrait vraiment y avoir des actes ? Est-ce que l'Union européenne n'est pas finalement impuissante ?

OLIVIA GREGOIRE
Non, l'Union européenne, vous savez, et merci d'en parler, l'Union européenne elle est puissante, elle est capable, si tant est qu'elle soit unie, et aujourd'hui elle est unie un derrière celui qui porte, non pas la voix de la France, mais la voie de l'Union européenne, c'est Emmanuel MACRON. Ce qui me frappe accessoirement, c'est qu'on parle souvent de la faiblesse de l'Europe, et vous savez, je le dis sur le ton de la blague, mais en vrai ça ne me fait pas rire du tout. Depuis que je suis revenue, j'essaie de dire ce que je fais par exemple en matière, et je sais que ce matin on le pourra, d'économie sociale en Europe, ou de responsabilisation du capitalisme en Europe. A chaque fois que mes collaborateurs de cabinet parlent présidence française de l'Union européenne, les programmateurs les plateaux nous disent « ah non Madame GREGOIRE, pas la PFUE, parce que… par contre on va parler de la campagne, par contre on va parler de telles polémiques, par contre on va parler… On ne peut pas être Européen les années bissextiles, voyez-vous ? Moi je suis Européenne tous les jours, ça fait plusieurs mois et ça va continuer, qu'on dirige la présidence française de l'Union européenne, ce n'est pas tous les ans que ça se passe, merci de me permettre de pouvoir parler de comment on promeut des politiques économiques en Europe, en ce moment même, mais c'est vrai qu'on ne peut pas d'un côté s'émouvoir de la faiblesse de l'Europe, et d'un autre côté ne jamais en parler aux Français, et à ceux qui la font vivre. Donc…

ORIANE MANCINI
Est-ce qu'il faut qu'il y ait, puisqu'on est sur une chaîne parlementaire, est-ce qu'il faut qu'il y ait un débat au Parlement sur ce sujet ?

OLIVIA GREGOIRE
Moi je viens du Parlement, donc je suis, en règle générale, a priori, toujours favorable au débat. Point 1. Point 2, je rappelle que dans le domaine diplomatique, et notamment le chef des armées, c'est le président de la République, c'est le domaine de l'exécutif, et donc je comprendrais aussi qu'en fonction de la gravité et de l'ampleur de la situation, des mesures doivent être prises, concomitamment peut-être à un débat, mais le temps du débat peut aussi ralentir le temps de la diplomatie. Donc ça doit être le fruit d'un équilibre, et je pense que…

ORIANE MANCINI
Donc pas forcément là. Parce que par exemple aujourd'hui et demain il y a un débat sur la politique française au Sahel, qui là aussi est la prérogative d'Emmanuel MACRON, est-ce que de la même manière il doit y avoir un débat sur ce qu'on doit faire dans cette guerre entre la Russie et l'Ukraine ?

OLIVIA GREGOIRE
Je vous le redis, je suis a priori favorable au débat parlementaire, il ne faut pas non plus que le temps du débat, et là la situation est chaude, pour ne pas dire brûlante, entrave le temps de la diplomatie.

STEPHANE VERNAY
Alors, « la situation est chaude pour ne pas dire brûlante », je reprends vos mots. Ça fait des jours et des semaines qu'Emmanuel MACRON laisse planer le doute sur sa candidature en raison de la crise, là on est au plus fort de cette crise, est-ce que du coup, comment est-ce qu'il peut entrer en campagne dans de bonnes conditions, maintenant ou dans les jours qui viennent ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne sais pas ce que veut dire « entrer en campagne dans de bonnes conditions ».

ORIANE MANCINI
Officialiser sa candidature, tout simplement.

OLIVIA GREGOIRE
Je pense que c'est un homme, le président de la République, et c'est aussi pour ça que je suis derrière lui, qui a le sens des priorités. Je me questionnais avant de venir ce matin, en me disant : imaginez 2 secondes que depuis 3, 4 jours, 5 jours, Emmanuel MACRON soit candidat, et soit dans des meetings, sur les territoires, soit…

STEPHANE VERNAY
Les circonstances lui donnent raison.

OLIVIA GREGOIRE
Mais non, mais je serais là, en fait, ce matin, et ce n'est pas à votre encontre que je dis ça, je serais là à défendre le fait que le président de la République soit candidat dans un moment de tension, tel que, et c'est Jean-Louis BOURLANGES qui le disait hier sur une radio, nous n'en avons pas connu, et Jean-Louis BOURLANGES sait de quoi il parle, depuis à peu près la Seconde Guerre mondiale.

ORIANE MANCINI
C'est le président de la Commission des Affaires Etrangères.

OLIVIA GREGOIRE
Merci, pardon, président de la Commission des affaires étrangères, et un homme d'expérience. Donc…

STEPHANE VERNAY
Il se trouve qu'à un moment il faudra bien qu'il se déclare, de toute façon il y a une date butoir.

OLIVIA GREGOIRE
Il y a une date butoir, donc ça, ça ne lui a pas échappé. Il se déclarera…

ORIANE MANCINI
Oui, mais là, la situation internationale, vous vous en doutez, Olivia GREGOIRE, elle ne sera pas réglée d'ici le 4 mars.

OLIVIA GREGOIRE
Non, mais…

ORIANE MANCINI
Est-ce qu'à un moment vous n'allez pas vous retrouver à défendre un président de la République candidat, en train de régler une situation internationale ?

OLIVIA GREGOIRE
C'est fort possible, parce qu'il n'est pas prévu que la crise s'arrête le 4 mars au matin, bien évidemment. Pour autant, il y a un sujet très important, qui a un impact direct, on ne peut pas trop détailler, mais sur le pouvoir d'achat des Français aussi. Et puis il y a le réel. Vous savez, vous avez rappelé que j'avais eu une petite fille il y a quelques semaines, moi j'ai accouché à l'hôpital public, j'ai parlé avec celles qui m'ont accompagnée, à celles et ceux qui m'ont accompagnée, des médecins, des infirmières, je suis dans ma circonscription très souvent, dans le 15e, personne ne m'arrête sur le marché par exemple, pour me dire : " Madame GREGOIRE, madame GREGOIRE, je suis tellement impatient, quand est-ce que le président de la République rentre en campagne ? ". Non, on m'arrête sur : " Madame GREGOIRE, madame GREGOIRE, on n'en peut plus du prix de l'essence, qu'est-ce qu'il se passe…

ORIANE MANCINI
Et on va y venir justement.

OLIVIA GREGOIRE
… machin ». On m'arrête sur : " Madame GREGOIRE, mon mari il a une boite, il ne trouve pas de salariés à embaucher. Il a un restaurant, il a une boucherie, il ne trouve pas de main-d'oeuvre, qu'est-ce que vous proposez ? ". Personne, et ce n'est pas un jeu de jambes que je vous fais là, mais personne ne m'a arrêtée, dans la vraie vie des Français de tous les jours, pour dire :"« Quand est-ce que le président de la République sera candidat ? ".

ORIANE MANCINI
Mais on va y venir, puisque vous en parlez, on va y venir

OLIVIA GREGOIRE
C'est une question légitime de journalistes, plus que de Français.

ORIANE MANCINI
Non mais juste…

STEPHANE VERNAY
Mais ça pose tout de même un problème, c'est qu'à un moment, vous-même, je parle de la République En Marche, des macronistes…

OLIVIA GREGOIRE
De la majorité, oui.

STEPHANE VERNAY
… de la majorité présidentielle, il faut aussi que vous soyez au clair sur les thèmes sur lesquels vous allez faire campagne. Et tant que le président n'a pas donné l'impulsion en déclarant sa candidature, c'est un peu compliqué.
OLIVIA GREGOIRE
Mais d'abord, ce n'est pas parce que le président n'est pas officiellement candidat au moment où on se parle, que la maison Ensemble citoyens, majorité présidentielle, ne travaille pas.

STEPHANE VERNAY
Les choses se préparent, donc.

OLIVIA GREGOIRE
Hier soir j'étais encore au siège de En Marche, avec Stanislas GUERINI, Edouard PHILIPPE, François BAYROU, Laurent HENART, Franck RIESTER, l'ensemble des dirigeants de la majorité présidentielle, nous travaillons, il y a des idées qui sont posées, il y a des … qui se préparent…

ORIANE MANCINI
Vous êtes vraiment prêts à rentrer en campagne, ou il manque quelque chose encore ?

OLIVIA GREGOIRE
Eh bien, il manque un candidat mais on est prêt à rentrer en campagne.

ORIANE MANCINI
C'est tout, il ne manque que le candidat ?

OLIVIA GREGOIRE
On a, et l'énergie, et l'envie, et les idées, et on va réunir toutes les idées.

ORIANE MANCINI
Et les idées, c'est lesquelles justement ? Parce qu'on se souvient que pendant la présidentielle…

OLIVIA GREGOIRE
Mais les idées, il ne vous aura pas échappé que je ne vais pas les déflorer ce matin, voyez-vous ?

ORIANE MANCINI
Non, mais pendant la présidentielle il y a eu campagne de la part de la majorité présidentielle, sur ce clivage mondialistes contre patriotes…

OLIVIA GREGOIRE
Oui, qui demeure assez vrai d'ailleurs.

ORIANE MANCINI
Donc là, la présidentielle, ça va être quoi le thème de campagne ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne saurais m'exprimer sur ce que je ne maîtrise pas, le cas échéant je me mets en risque, donc il y aura plusieurs thématiques. Moi je travaille, ça ne vous a pas échappé, à Bercy, donc je fais des propositions en matière économique. Il y aura des propositions évidemment en matière d'éducation, en matière d'environnement, en matière de santé. Sur les grandes thématiques, qui accessoirement intéressent les Français, et qui contrairement à ce que certains sur l'échiquier de l'extrême droite veulent nous faire croire, ne sont pas de façon obsessionnelle, sécurité, délinquance, immigration ; vous le savez, aujourd'hui la préoccupation première des Français c'est le pouvoir d'achat, et je dirais que ça tombe à point nommé parce que c'est la préoccupation première de ce gouvernement depuis 2017. Ensuite c'est la santé, ensuite ce sont les questions environnementales sur l'ensemble de ces sujets, nous aurons des propositions et notamment sur le domaine du pouvoir d'achat.

ORIANE MANCINI
Alors justement, le pouvoir d'achat ça reste effectivement la préoccupation numéro un des Français, sauf que, vous le savez très bien, les prix du carburant continuent d'augmenter, ils battent encore de nouveaux records. Est-ce que vous pouvez continuer à dire que les mesures prises sont suffisantes et qu'il ne faut pas en prendre d'autres dans les jours prochains ?

OLIVIA GREGOIRE
Ah oui, je peux continuer à dire, en tout cas, je ne dirais pas suffisantes, elles étaient absolument nécessaires. Il y a eu un travail de fond déjà depuis 2017, je ne vais pas égrainer l'ensemble des mesures, mais quand on supprime la taxe d'habitation, quand on supprime les cotisations sociales, maladies, vieillesse, sur les salaires, quand on supprime 5 milliards d'euros d'impôt sur le revenu, tout ça c'est 25 milliards d'euros qui ont été rendus aux Français, et qui leur permettent, pour une personne au smic par exemple, d'avoir effectivement promesse tenue, un 13e mois à la fin du quinquennat d'Emmanuel MACRON. Promesse tenue, c'est un engagement de 2017.

ORIANE MANCINI
Non, mais ça, ce sont des grands chiffres, effectivement c'est un apport, mais qu'est-ce que vous dites ce matin aux Français qui vont faire leur essence et qui voient les prix augmenter de jour en jour ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça c'est important, si je puis me permettre, c'est important, parce que cette crise elle est là aujourd'hui, mais quand la crise se retirera, ces gains de pouvoir d'achat demeureront. Il y a ensuite la conjoncture, 15 milliards d'euros qui ont été mis sur la table par ce gouvernement, pour pouvoir mettre en place le bouclier tarifaire, pour pouvoir mettre en place le Chèque inflation. Je sais que l'on est assez sensible dans notre pays aux comparaisons, mais quand on regarde ce qui se passe aujourd'hui en Espagne ou en Italie, en matière de hausse des prix de l'énergie, et quand on regarde ce qu'a fait le gouvernement et ce qui se passe en France, on a quand même sacrément protégé le pouvoir d'achat des Français en matière d'énergie, avec le bouclier tarifaire. Est-ce suffisant ? J'ai envie de vous dire, pour y travailler depuis 5 ans, que c'est aussi pour ça que je l'aime cet enjeu, c'est que ça n'est jamais suffisant le pouvoir d'achat, c'est toujours nécessaire, mais c'est jamais suffisant. Donc il va falloir qu'on continue. Est-ce qu'on sera capable d'augmenter le pouvoir d'achat en continuant à baisser les impôts ? C'est notre objectif. Le rapporteur du budget l'a encore dit il n'y a pas longtemps, peut-être moins que nous l'avons fait pendant cette première mandature, 50 milliards d'euros rendus aux entreprises et aux ménages, mais on continuera à le faire, et sur les gains de pouvoir d'achat, il y a aussi le sujet de la rémunération, sur lequel nous sommes nombreux à travailler. Il y a le fixe, c'est tout le travail que nous menons sur les branches. On est quand même dans un pays où vous avez de nombreuses branches secteur, pour parler simplement, qui aujourd'hui rémunèrent en deçà du prix du SMIC le travail dans notre pays. Donc il y a un énorme travail un peu technique, mais sacrément important, mené par Elisabeth BORNE, pour faire en sorte…

STEPHANE VERNAY
De négociations salariales, de branches.

OLIVIA GREGOIRE
… que branche par branche, domaine par domaine…

STEPHANE VERNAY

Il va aboutir ce travail ?
OLIVIA GREGOIRE
Eh bien il a déjà abouti. On a des filières comme le bois, l'habillement, les volailles, qui n'avaient pas un salaire minimum au SMIC, qui aujourd'hui s'alignent sur le SMIC. On a un peu moins de 40% des branches qui respectent le salaire minimum. C'est dire qu'il y a encore 60% des branches qu'il faut emmener dans la négociation, et ça, il faut le faire dès les premiers mois, après l'élection de 2022. C'est important.

ORIANE MANCINI
Mais juste, ce que vous nous dites, parce que ça c'est important, Olivia GREGOIRE, vous nous dites : si Emmanuel MACRON est réélu, il n'y aura pas d'augmentation d'impôts, mais les baisses d'impôts seront moindres que dans ce quinquennat qui vient de passer.

OLIVIA GREGOIRE
C'est normal. 20 milliards d'euros sur la taxe d'habitation, pour tous les Français, on ne peut pas d'un côté nous reprocher la dette, et je ne doute pas que l'on en parle dans quelques instants, et d'un autre, ne pas considérer qu'on soit sérieux et qu'on agisse avec raison et pragmatisme. Ce qui a été fait en matière de baisse d'impôts dans ce quinquennat est historique. Ce n'est pas pour rien qu'on retrouve un niveau d'imposition qui relève des années à peu près de 2010, c'est-à-dire qu'on a rattrapé 10 ans d'augmentation d'impôts, avec l'arrivée d'Emmanuel MACRON et avec les baisses d'impôts qui ont eu lieu. Sur l'impôt sur les sociétés, sur la taxe d'habitation, sur l'impôt sur le revenu. Il y en aura d'autres, mais on sera obligé de faire un peu moins. En revanche nous financerons la résorption du déficit, n'en déplaise aux esprits grincheux, ni comme Nicolas SARKOZY l'a fait, ni comme François HOLLANDE l'a fait. C'est-à-dire que nous estimons avec la République En Marche, qu'entre la méthode du Père Fouettard austérité, on arrête les investissements et on met en place une politique d'austérité budgétaire. Ça ne crée pas de la croissance, ça ne crée pas de l'emploi. On estime aussi qu'augmenter les impôts comme François HOLLANDE l'a fait, ne permet pas de soutenir la croissance. Donc nous on a un parti pris, entre le Père Fouettard et entre les fous, type MELENCHON, et je pèse mes mots, qui disent : " on n'a pas besoin de rembourser la dette, c'est de la pacotille ", nous on est dans la raison, dans le pragmatisme. On crée de la richesse pour créer des rentrées fiscales, pour permettre de réduire le déficit public. Le meilleur remède contre la dette, c'est l'activité, c'est de créer des richesses. Jamais ce pays depuis 15 ans n'en a autant créé. Je sais qu'on a beaucoup de sujets graves, on a commencé avec l'Ukraine, mais tous les jours c'est des ouvertures de JT pendant des années, où on nous a dit : le chômage augmente. Tous les jours on a entendu ça. Moi j'ai entendu ça pendant 10 ans. Ce pays a un taux de chômage que nous n'avons pas connu depuis à peu près 15 ans. 7%, 7,4%. Nous n'avons pas résorbé le chômage des jeunes aussi fort que nous l'avons fait depuis ces 4, 5 ans, pour atteindre des niveaux historiques. Tout le monde parlait apprentissage, en nous disant : vous savez, les Allemands ils sont bien meilleurs que nous, sur l'apprentissage. J'ai entendu ça 15 ans. Enfin 700 000 apprentis, enfin les financements qu'on a mis sur la table paient. Donc oui il y a plein de raisons d'être inquiets, oui le pouvoir d'achat il est directement lié au prix de l'énergie, mais ces chiffres sont quand même…

ORIANE MANCINI
Mais est-ce que ces chiffres du chômage et de la croissance, qui sont bons là aussi, ce n'est pas un peu des chiffres en trompe-l'oeil, du rattrapage des derniers mois de crise ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne sais pas ce que c'est le trompe-l'oeil sur les chiffres. J'ai entendu Eric ZEMMOUR dire : mais les chiffres c'est aléatoire, il y a quelques jours sur les plateaux. Mais alors, si même les chiffres deviennent aléatoires, je veux dire, bon, moi je vous parle ici de chiffres, ils sont partagés à quelques pourcentages près par l'ensemble des institutions publiques de l'Etat, ce ne sont pas des chiffres de propagande gouvernementale, ce sont des chiffres…ce n'est pas ce que vous avez dit, mais ce sont des chiffres partagés. Est-ce que ce sont des chiffres…

ORIANE MANCINI
… chiffres réels, mais est-ce que ce n'est pas un rattrapage, parce que les chiffres étaient mauvais les mois précédents avant la crise ?

OLIVIA GREGOIRE
Non, les chiffres n'étaient pas mauvais les mois précédents. Je rappelle que depuis 2018, je siégeais à la Commission des Finances avant, ce pays est la première zone d'investissements de tous les investisseurs en Europe. Et ce depuis avant la crise. Je rappelle accessoirement à la droite notamment qui nous fait des leçons sur la dette, qu'en 2018 nous avons pour la première fois eu un déficit public que nous avons su réduire en deçà des 3 %, permettant, parce qu'on l'oublie aussi, de sortir la France du processus de déficit excessif, et qu'avant la crise nous avons entre 2017 et 2019, connu un déficit public en diminution extrêmement fort. Ça veut donc dire qu'on est capable, et de créer de l'emploi, et de faire venir des investisseurs, tout en réduisant la fiscalité. Il y a eu un petit truc après, qui s'est appelé les Gilets jaunes, mais aussi la crise du Covid, on a pris nos responsabilités, on a investi 72 milliards au moment où je vous parle, sur les 100 milliards du Plan de relance. Est-ce que ça crée de l'activité ? Oui et heureusement. Est-ce que les carnets de commandes sont pleins ? Oui et heureusement. Est-ce qu'on connaît aujourd'hui le problème inverse du chômage dommage, c'est-à-dire un problème de recrutement de compétences pour répondre à cette tension économique extrêmement positive ? Oui. Donc oui évidemment que le Plan de relance a créé de l'activité, c'était aussi l'objectif.

ORIANE MANCINI
Avec un problème sur la dette.

STEPHANE VERNAY
Mais, est-ce que cette création d'activité sera suffisante pour éponger les dettes ou la dégradation des finances publiques, qui a été générée au cours des deux dernières années, ce que vous venez de dire…

OLIVIA GREGOIRE
C'est l'objectif de trajectoire que nous nous sommes fixés.

STEPHANE VERNAY
Sauf que la Cour des comptes a tiré la sonnette d'alarme, en disant : il faut 9 milliards d'euros d'économies par an pour rétablir les comptes. Enfin, les chiffres sont quand même assez impressionnants.

OLIVIA GREGOIRE
Je n'ai pas lu l'intégralité des 700 pages. Alors, deux, trois choses. La Cour des comptes, moi j'ai lu, j'ai survolé, puisque ça fait 792 pages je crois, mais j'ai lu les principales conclusions, et j'ai écouté avec attention son président. Chacun est dans son rôle déjà. Quand on est, quand on vient de la Commission des finances, on est habitué à recevoir le président de la Cour des comptes, qui nous fait état de son analyse et de l'analyse de la Cour des comptes. Ce sont toujours des analyses a posteriori, ça n'a échappé à personne. Quand vous êtes en mars 2020, que vous avez une tension incommensurable dans les hôpitaux, que la France est comme les autres pays d'Europe en shut down, qu'il faut fermer les boutiques, qu'il faut fermer les commerces, que l'on met en place le chômage partiel pour que les gens aient leur salaire à la fin du mois, etc. Etant à Bercy j'ai pu observer ça de très près aux côtés de Bruno LE MAIRE. On est là dans l'action. Donc nous avons pris nos mesures, a posteriori la Cour des comptes juge ce qui a été fait. C'est son rôle, mais quand vous avez les mains dans l'urgence…

STEPHANE VERNAY
Mais au-delà de ce qui a été fait, c'est-à-dire, qu'est-ce qu'on peut faire ensuite pour rétablir les choses ?

OLIVIA GREGOIRE
Non mais imaginez deux secondes que je sois venue ici en mars 2020, en disant : « là on ne va pas trop bouger parce que vous comprenez… ». Ils disent par exemple, sur les stations de ski, parce que je l'ai lu le rapport, les stations de ski, on a déclenché trop vite et trop d'argent pour les stations de ski. Mais, allez dire ça…

ORIANE MANCINI
Et mal ciblé, oui.

OLIVIA GREGOIRE
Eh bien, bien sûr. Allez dire ça aujourd'hui à celles et ceux qui se débattent pour faire en sorte que les stations de ski survivent…

ORIANE MANCINI
Non mais ceci dit, la Cour des comptes, elle ne juge pas si négativement que ça le « quoi qu'il en coûte », en revanche elle dit…

STEPHANE VERNAY
La suite.

ORIANE MANCINI
… le problème de la dette ce n'est pas uniquement le quoi qu'il en coûte, ce n'est pas uniquement la crise, il y a aussi un problème de réformes structurelles. Est-ce que là-dessus, vous pourriez répondre ?

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais ça, rien de neuf sous le soleil, enfin, moi aussi je veux bien aller à la Cour des comptes, et je peux vous écrire le rapport dans 5 en disant qu'il y aura des problèmes de réforme structurelle.

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire qu'on ne change rien ?

OLIVIA GREGOIRE
Mais si, d'ailleurs on a même essayé. Vous vous rappelez, on a essayé la réforme des retraites. On avait un climat social qui était complexe et peut-être une réforme, comme l'a dit le président, à amender ou à changer, pour qu'elle soit plus acceptable, mieux comprise, et donc comme des gens assez pragmatiques, eh bien devant le rejet de l'opinion et le refus de cette réforme, on a repris nos travaux. Est-ce que ça veut dire qu'on n'est pas capable de les remettre sur la table en 2022 ? Si, et nous le ferons.

ORIANE MANCINI
Mais sur les 9 milliards, vous dites quoi ? Chacun est dans son rôle, on n'a pas à faire 9 milliards d'économies ? Ou oui on va tout faire pour faire ces9 milliards d'économies par an ?

OLIVIA GREGOIRE
Non, mais on a beaucoup plus que 9 milliards d'économies en réalité à faire si on veut remonter le déficit public. Donc oui il faut des réformes structurelles. Bon…

ORIANE MANCINI
Et lesquelles ? C'est quoi la priorité ?

OLIVIA GREGOIRE
Une des priorités c'est évidemment la réforme des retraites. Mais quand vous lisez…

ORIANE MANCINI
Quelle réforme des retraites ? Pas la même que celle de 2017.

OLIVIA GREGOIRE
Non, pas exactement la même. Nous la reprendrons et je laisse au président de la République et au prochain Premier ministre la possibilité de la détailler. Mais vous savez, je pense qu'on n'a jamais réformé ce pays autant que nous l'avons réformé en 5 ans. Une des choses qui me frappe beaucoup, et ce n'est pas pour avoir un mot comme ça désagréable, c'est à quel point je n'entends aucune perspective nouvelle ou innovante de la part des oppositions. J'ai lu et je lis avec attention le programme des oppositions. Que dit par exemple Valérie PECRESSE ? Il faut accentuer la réforme des assurances chômage. Merci. Accentuer des réformes que nous avons eu le courage de mener et sur lesquelles d'ailleurs sur tous les plateaux télé, les LR nous cassaient du sucre sur le dos. Il faut faire la réforme des retraites. Merci, on a essayé de la faire. Il faut baisser le coût du travail…

ORIANE MANCINI
Essayer, c'est peut-être ça qu'elle vous reproche.

OLIVIA GREGOIRE
Ah oui, mais enfin il ne m'a pas échappé qu'en 2011 elle était à la manoeuvre, et qu'elle n'a pas forcément réussi spécifiquement. Donc il y a plusieurs gouvernements qui ont essayé de façon très paramétrique de changer. Nous on a un courage qui est de changer le structurel, le fond de notre système, et pas uniquement de jouer sur la durée de cotisations ou le niveau des pensions. C'est un peu plus compliqué. Moi, ce que je vois…

ORIANE MANCINI
Non, mais est-ce que vous irez jusqu'à repousser clairement l'âge de départ à la retraite ? Est-ce que vous dites : on n'y coupera pas dans le prochain quinquennat, il faudra repousser cet âge ?

OLIVIA GREGOIRE
Mais, ça fera partie des propositions qui seront certainement sur la table, et l'ensemble des acteurs politiques le savent, et les Français l'entendent aussi.

ORIANE MANCINI
Ce n'est pas l'ensemble, il y a des candidats qui disent par exemple qu'il faut revenir à une retraite à 60 ans.

OLIVIA GREGOIRE
Oui. Ces candidats-là, pour moi ont des programmes économiques qui sont infaisables, injouables, intenables. Voilà, ça le mérite d'être clair.

ORIANE MANCINI
Dernière question Stéphane.

STEPHANE VERNAY
Dernière question. Après la présidentielle, quel qu'en soit le résultat, est-ce que vous serez vous-même à nouveau candidate aux législatives ?

OLIVIA GREGOIRE
Oui. Cette question est plus facile. Oui. Eh bien ça a le mérite de la clarté, toujours dans la même circonscription que j'aime, la 12e de Paris, 15e Nord, 7e Sud, et j'aurai à coeur de promouvoir bien sûr le bilan du président de la République mais aussi mon propre bilan. La loi PACTE, des propositions en matière de généralisation de la participation, mon travail engagé et acharné au service d'une économie plus responsable, comme je vais le porter jeudi à Bruxelles à l'Europe, puisque nous avançons, et c'est avec force et honneur que j'irai demander la confiance des électeurs en juin prochain, pour un second mandat.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup.

OLIVIA GREGOIRE
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Merci Olivia GREGOIRE d'être revenue nous voir sur ce plateau. C'était un plaisir de vous revoir. Merci beaucoup.

OLIVIA GREGOIRE
Merci à vous, pareillement.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 23 février 2022